PORTUGAL
Intervention du Haut Commissaire pour l'Immigration et les Minorités
Ethniques du Portugal,
M. José Leitâo
CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION
RACIALE,
LA XÉNOPHOBIE ET L'INTOLÉRANCE
Durban, 31 août - 7 septembre
2001
Mme. la Présidente, Excellences Distingués Delegués Mesdames
et Messieurs
Permettez-moi d'abord de remercier le peuple et les autorités sudafricaines
de l'organisation de cette Conférence et de la chaleureuse réception
de cette ville qui, j'en suis sûr, contribueront de façon déterminante
pour le succès de nos travaux.
Je voudrais également exprimer mon soutien total aux positions présentées
dans le discours de mon collègue belge au nom de I `Union Européenne.
La Conférence de Durban pourra marquer un point de référence
pour les générations à venir. En effet, le succès
auquel nous esperons tous pouvoir aboutir ici représentera un pas décisif
vers l'éradication du fléau du racisme.
Une fois que la décision a été prise de réaliser
cette Conférence, le Portugal s'est engagé dans le processus préparatoire
aux niveaux régional et mondial. Nous avons participé activement
à la Conférence Régionale Européenne de Strasbourg
et aux sessions du Comité Préparatoire qui ont eu lieu à
Genève et nous ont permis d'être ici aujourd'hui.
Mme. la Présidente,
L'Afrique du Sud s'est engagée dans des combats décisifs pour
la lutte contre le racisme et la discrimination raciale, qui étaient
dans le temps des pratiques institutionnalisées et systématiques.
Ce fut lutte longue et héro~ique du peuple sud-africain, qui s'est terminée
par la victoire sur un régime raciste et par l'instauration d'une véritable
démocratie. Aucun autre pays ne serait ainsi mieux à même
pour la réalisation de cette réunion que nous espérons
signifiera un progrès majeur dans le combat contre le racisme, la discrimination
raciale, la xénophobie et autres formes d'intolérance.
Je souhaite, a ce propos, exprimer nos regrets qu'un des grands tuteurs pour
cette cause, Govan Mbeki, ne soit plus parmi nous et transmettre nos sincères
condolèances a Son Excellence le Président Thabo Mbeki.
Le racisme n'est pas un phénomène nouveau, ni spécifique
d'aucune région. Le racisme, sous des formes et manifestations diverses,
a malheureusement traversé l'histoire de l'humanité. Des actes
d'intolérance, basés sur des doctrines ou attitudes racistes,
ont été et continuent d'être commis à l'encontre
d'individus qui sont presque toujours sans défense.
II est ainsi de notre responsabilité, à nous tous qui nous sommes
engagés dans le combat contre le racisme - Gouvernements, acteurs de
la société civile, chaque citoyen - de créer les conditions
pour que de tels actes ne se répètent plus jamais.
Dans chacun de nos pays, nous avons le devoir de renforcer les cadres juridiques
afin de garantir l'égalité et combattre la discrimination. Nous
devons donner une voix aux victimes ou potentielles victimes ; suivre avec une
attention particulière les groupes les plus vulnérables ; donner
la priorité à l'éducation et à la formation en matière
de droits de l'homme et de combat contre le racisme.
Dans ce contexte, j'aimerais aussi faire ici une référence à
l'engagement de nombreuses ONG dans la construction d'un avenir sans racisme.
Mme. la Présidente,
Le racisme, comme je viens de l'évoquer, est un phénomène
qui a persisté tout au long de l'histoire de l'humanité. Dans
cette histoire commune, il y a eu des réalités qui doivent être
particulièrement rappelées et condamnées.
Dans ce contexte, la Conférence devra ainsi représenter un moment
marquant de reconnaissance de ceux qui ont souffert les conséquences
de pratiques comme l'esclavage et la traite d'esclaves. Les victimes sont privées
de leur liberté et de leur dignité humaine. Ce moment devra permettre
à la communauté internationale tout entière de rappeler
l'immense souffrance de ces victimes, en déplorant et en condamnant de
façon claire toutes les pratiques d'esclavage, qui n'ont malheureusement
pas encore été définitivement abolies dans toutes les régions
du monde.
En prêtant l'hommage du à ceux qui ont étés victimes
de ces tragédies, Durban permettra ainsi de construire un avenir dans
lequel nous pourrons nous reconnaître comme des êtres humains pouvant
exercer leur droit à la dignité.
Mme. la Présidente,
Permettez-moi maintenant de faire référence à l'expérience
particulière de mon pays en matière de combat contre le racisme
et contre toute forme d'exclusion sociale, une des manifestations contemporaines
des plus insidieuses de discrimination.
La Constitution de la République Portugaise consacre un vaste ensemble
de droits, libertés et garanties, qui sont conformes aux instruments
internationaux ratifiés par le Portugal et qui s'appliquent d'après
le principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi.
Le Portugal s'est activement engagé dans la construction d'une société
qui assure le respect de la dignité de tous les êtres humains,
indépendemment de leurs caractéristiques individuelles et qui
vise à promouvoir une société inclusive, participative
et non raciste qui considère la diversité comme un facteur d'enrichissement
culturel.
Le Plan Portugais d'Action pour l'Inclusion 2001-2003 établit «un
concept de citoyenneté sociale, s'appliquant à toutes les personnes
habitant légalement au Portugal, et qui préconise le droit au
travail et à un revenu minimum, ainsi que l'exercice de leurs droits
civiques et de leurs droits à la culture, à l'éducation,
à un logement digne et à la participation à la vie sociale
et culturelle, bref, à una pleine insertion dans la vie en société».
Ce faisant, ce Plan concrétise le principe constitutionnel de l'équiparation
de droits entre nationaux et étrangers.
Ce principe est à la base des politiques qui cherchent à assurer
la qualité d'intégration des immigrants, qui contribuent au développement
de notre pays et que nous tenons ici à saluer.
Nous voulons aussi associer ces immigrants à la résolution des
problèmes, tout en leur reconnaissant des droits de participation aux
associations qui leur sont consacrées.
Mme. la Présidente,
Le racisme et la discrimination raciale doivent être combattus de façon
efficace quand ils se manifestent. Au-delà de l'éducation des
générations les plus jeunes en matière de droits de l'homme,
nous disposons d'une législation qui permet de punir les crimes racistes,
et aussi d'appliquer des sanctions administratives et d'assurer aux victimes
de discrimination une réparation juste et adéquate.
D'autre part, le Portugal a reconnu la compétence du Comité établi
par l'article 14 de la Convention pour l'Elimination de toutes formes de Discrimination
Raciale, qui prévoit la réception et l'acheminement de communications
de personnes ou de groupes de personnes sous jurisdiction de l'Etat Portugais
et qui peuvent être amenés à présenter des plaintes
contre nos autorités pour des violations des droits consacrés
par la Constitution.
Afin de renforcer l'étude, la dénonciation et la prévention
de la discrimination raciale, nous avons récemment crée la Commission
pour l'égalité et contre la Discrimination Raciale, qui est un
organe indépendent dont la majorité de ses membres est désignée
par des associations d'immigrants, d'anti-racistes, de défense des droits
de l'homme, de sindicats et d'employeurs.
Nous dirigeons également notre action en vue d'appliquer des mesures
assurant l'égalité des tsiganes portugais.
Mme. la Présidente,
La société portugaise devient de plus en plus une société
dévelopée où l'on cherche à conjuguer la diversité
et la citoyenneté.
Plusieurs initiatives ont contribué à ce que l'on apprenne collectivement
à vivre ensemble sans discrimination, à lutter contre le racisme,
la xenophobie, la discrimination raciale et l'intolérance. Ce faisant,
nous sommes conscients du fait que, comme l'a affirmé l'écrivain
mozambicain Mia Couto, «Chaque personne est une humanité individuelle».
Dans ce monde de plus en plus petit qui est maintenant le nôtre, l'existence
dans chaque espace national de réalités culturelles diversifiées
servira certainement de pont vers d'autres cultures et d'autres pays, en nous
permettant à nous tous de bénéficier du village global
où nous habitons aujourd'hui.
Je suis sûr que dans nos travaux nous saurons privilégier les opportunités
de construire un avenir meilleur et plus heureux pour nous-mêmes et pour
nos enfants.
Je vous remercie, Mme. la Présidente.