Soixante-douzième session,
39e & 40e séances – matin & après-midi
AG/SHC/4216

En présence du Haut-Commissaire pour les réfugiés, la Troisième Commission discute des moyens de résoudre la crise des réfugiés et déplacés

Avec plus de 66 millions de personnes forcées de se déplacer dans le monde, dont plus de deux millions rien que depuis le début de l’année, le déplacement forcé de population est devenu un phénomène mondial qui n’épargne aucun continent, a expliqué aujourd’hui, dans un tableau sombre mais réaliste, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, M. Filippo Grandi, venu présenter le rapport d’activité de son agence à la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles.

Des crises récurrentes ou nouvelles ont plongé ces millions de personnes sur les routes de leurs propres pays ou vers les pays voisins, a expliqué M. Grandi, qui a rappelé que les conflits en Syrie et en Iraq comptaient, à eux seuls, pour le quart des déplacements forcés dans le monde.  Pour le Haut-Commissaire, la situation exige non seulement que les États réaffirment les engagements pris dans la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants mais mettent également en œuvre le Cadre d’action global pour les réfugiés, annexé à cette Déclaration et qui souligne l’importance de l’action humanitaire pour les aider.  Tout cela restera toutefois sans effet si les moyens financiers manquent et la résolution des conflits actuels et la prévention d’autres ne sont pas privilégiées comme approches, a-t-il averti.

Lors de la discussion générale qui a suivi cette présentation, l’Union européenne a relevé que la nature prolongée des conflits était à la source de ces chiffres, les plus haut jamais atteints.  En tant qu’un de ses principaux contributeurs, l’Union européenne reconnaît les compétences du Haut-Commissariat pour les réfugiés et partage son diagnostic de même que ses solutions pour répondre aux défis posés par cette réalité.

Sans rejeter ces propositions, la Fédération de Russie, qui accueille notamment un million d’Ukrainiens fuyant leur pays, estime aussi que les crises doivent se régler par la voie politique et non par « l’ingérence irresponsable » des États européens dans les affaires intérieures de pays africains et du Moyen-Orient pour en changer les gouvernements par la force.  Le Bélarus a, pour sa part, estimé que les causes profondes de la crise actuelle sont le résultat de l’incapacité de la communauté internationale à tourner la page de guerre froide et à instaurer un nouvel ordre mondial.

Un autre chiffre du rapport a été relevé, notamment par l’Union européenne, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) ou encore le Brésil: 84% des réfugiés recensés par le HCR se trouvent dans des pays du Sud à revenu faible ou moyen, alors que les budgets alloués à l’Afrique, terrain de plusieurs conflits et de la moitié des déplacés, tendent à diminuer.

Or, beaucoup de ces pays d’accueil ont déjà de grandes difficultés à répondre aux besoins de leur propre population.  La situation devient même insoutenable, a déclaré la République islamique d’Iran, qui elle aussi accueille un grand nombre de réfugiés et en ressent grandement la charge sur son économie, d’autant plus qu’elle est soumise à des « sanctions inhumaines » qui affectent aussi la qualité des services fournis aux réfugiés.

S’il faut soutenir ces pays sur le plan financier, l’aide apportée ne doit en aucun cas constituer une contrepartie pour les pays qui adoptent des politiques restrictives en ce qui concerne l’entrée et le séjour sur leurs territoires, a toutefois averti le représentant du Brésil.

Face à cet afflux ininterrompu et grandissant de réfugiés, qui dure depuis des années et face au déséquilibre entre les besoins et les ressources, déploré par de nombreuses délégations, de nouvelles approches sont nécessaires.  Le représentant de la Suisse, pays qui abrite le siège du HCR à Genève, a ainsi exprimé le vœu que le futur pacte mondial pour les réfugiés vienne renforcer le soutien aux États et aux communautés hôtes qui accueillent ces personnes déplacées.  Pour leur part, les États-Unis se sont dit favorables à des réponses concrètes appuyées sur l’élan créé par le HCR pour aider les réfugiés, les demandeurs d’asile, les apatrides et les personnes déplacées, ainsi que les pays qui les accueillent.

Par ailleurs, la Troisième Commission a achevé ce matin sa discussion générale sur l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, entamée hier, une dizaine de délégations ayant pris la parole.  

Demain, la Troisième Commission achèvera à partir de 10 heures sa discussion générale sur le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, avant de recevoir le Président du Conseil des droits de l’homme.

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE

a) Élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de.l’intolérance qui y est associée (A/72/18 et A/72/291)

b) Application intégrale et suivi de la Déclaration et du Programme d’action de Durban (A/72/285, A/72/287, A/72/319, A/72/323 et A/72/324)

DROIT DES PEUPLES À L’AUTODÉTERMINATION (A/72/317 ET A/72/286)

Suite et fin de la discussion générale

M. ALEXANDER TEMITOPE ADEYEMI AJAYI (Nigéria) a assuré que l’élimination du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée demeure des priorités pour son pays, comme en attestent les dispositions de sa Constitution interdisant toute forme de discrimination basée sur la race, la nationalité, l’origine ethnique ou la tribu.  De même, le Nigéria condamne dans les termes les plus forts tous les actes de haine religieuse et d’incitation à la discrimination, à l’hostilité et à la violence et invite tous les États à faire de même.  En effet, a constaté le représentant, la communauté internationale reste confrontée à des défis considérables dans ce domaine.  Aussi le Nigéria se prononce-t-il pour un consensus en faveur d’un monde exempt de racisme.

Pour le délégué, la ratification et la mise en œuvre complète de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ainsi que de la Déclaration et du Programme d’action de Durban constituent une base normative sur laquelle les efforts nationaux peuvent se former pour éliminer la discrimination raciale.

Le Nigéria réaffirme par ailleurs son soutien à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, laquelle fournit une plateforme effective pour combattre le plus largement possible le racisme, la discrimination et l’intolérance associée.  Le représentant s’est également félicité de la campagne mondiale proposée par le Secrétaire général pour lutter contre la xénophobie.  Enfin, se disant profondément préoccupé par les violations des droits de l’homme dont sont victimes les migrants, il a appelé les pays de transit et de destination à traiter ces personnes avec dignité et respect, indépendamment de leur nationalité et de leur statut migratoire.

Mme DARYNA HORBACHOVA (Ukraine) a rappelé que son pays était partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et s’assurait, au plan intérieur, de l’absence de toute discrimination pour l’ensemble de ses ressortissants, indépendamment de leur statut personnel ou juridique.  Soucieuse de respecter ses obligations en lien avec la Convention, l’Ukraine a adressé deux rapports périodiques sur ce thème au Comité sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale.  Malheureusement, a noté la représentante, ce fléau persiste dans toutes les régions du monde, ce qui oblige la communauté internationale à renforcer ses capacités et à se concentrer, avec tous acteurs impliqués, sur des actions susceptibles de donner des résultats concrets.

Évoquant à ce sujet l’occupation de la république autonome de Crimée par la Russie, Mme Horbachova s’est élevée contre la campagne de discrimination de « grande ampleur » lancée par la Puissance occupante à l’encontre d’une partie de la population de ce territoire.  Elle a rappelé que l’Ukraine avait saisi la Cour internationale de Justice (CIJ) pour dénoncer le sort réservé par la Russie aux habitants de Crimée.  À la suite de cette saisine, la CIJ a notamment demandé à la Russie de s’assurer du droit des citoyens à parler et utiliser leur langue, a souligné la représentante, déplorant que l’occupant néglige toujours ses obligations au regard du droit international et ne tienne pas compte des droits des citoyens ukrainiens. 

M. ROBERT ALEXANDER POVEDA BRITO (Venezuela), qui a d’abord présenté ses condoléances aux familles des victimes de l’attentat terroriste survenu hier à New York, a ensuite jugé « honteux » les discours de haine, de racisme et de xénophobie contre des populations spécifiques que l’on entend dans les pays développés et en développement et qui exacerbent la violence.  Le Venezuela est également préoccupé que les technologies de l’information servent à diffuser ces idéologies d’intolérance et à nourrir les tensions ambiantes qui minent tout effort de paix. 

Alors que la Déclaration et le Programme d’action de Durban célèbrent leurs 16 ans, il faut se saisir de cette occasion pour renouveler la volonté collective de réaliser de façon palpable l’esprit qui a inspiré ce document, a affirmé le représentant.  Pour sa part, le Venezuela a travaillé inlassablement à promouvoir une culture de coexistence pacifique et de tolérance dans sa société multiethnique et pluriculturelle, dans l’esprit de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  En 2011, le pays a ainsi adopté une loi contre la discrimination raciale qui vise à en sanctionner les manifestations, à l’éradiquer et à en prévenir la résurgence, a expliqué le représentant.

M. KOMLAN AGBELÉNKON NARTEH-MESSAN (Togo) a déclaré que son pays restait déterminé à respecter les engagements pris au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, qui constituent à ses yeux le meilleur cadre d’action contre le racisme, la discrimination raciale et l’intolérance qui y est associée.  Le Togo, qui a présenté avec succès ses dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques au Comité en novembre 2016, se réjouit que ce dernier n’ait ménagé aucun effort pour améliorer ses méthodes de travail.

Le Togo déplore cependant qu’en dépit des progrès réalisés grâce à l’action du Comité depuis 50 ans, des défis multiples persistent, liés notamment à une certaine réticence à dénoncer et reconnaître les actes de discrimination raciale ou à la montée des incidents à caractère raciste et xénophobe partout dans le monde, visant notamment les groupes vulnérables comme les migrants et les demandeurs d’asile.  Le Togo condamne ses actes, de même que toute manifestation d’intolérance religieuse, d’incitation, de harcèlement ou de violence à l’égard des personnes ou des communautés, en raison de leur race, origine, ethnique, a dit le représentant.

Sur le plan normatif, le Togo a consolidé son cadre juridique, notamment en devenant partie à la Convention de l’UNESCO sur la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement, à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et au Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant l’abolition de la peine de mort.  Il a aussi revu son Code pénal, notamment pour prendre en compte les éléments de la définition de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a assuré le représentant. 

Mme THIRANAT SUCHARIKUL (Thaïlande) a déclaré qu’il était impératif de continuer à travailler pour l’élimination de toutes les formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et autres formes d’intolérance liées.  Au plan national, la Constitution de 2017 de la Thaïlande garantit l’égalité de toutes les personnes devant la loi et interdit les discriminations sur la base de différences, notamment de religion, de race, de langue, de sexe et d’âge.  Sur le plan international, le pays est partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale depuis 2003 et a retiré ses réserves concernant l’article 4 en octobre 2016.  En outre, la Thaïlande a ratifié en juin dernier la Convention no 11 concernant la discrimination (emploi et profession) de l’Organisation internationale du Travail.

Mme LILIT GRIGORYAN (Arménie) a déclaré que son pays s’était engagé à éradiquer le racisme, la xénophobie et le racisme qui y est associé, comme en témoigne la présentation de ses rapports périodiques devant le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.  L’Arménie organisera en outre la prochaine conférence sur la lutte contre les minorités religieuses à Erevan, sa capitale.

L’Arménie constate en revanche que tous les États ne respectent pas et n’honorent pas leurs obligations internationales, comme on le voit dans le conflit du Nagorno-Karabakh, a ajouté la représentante.  On a vu dans les années 80 des pogroms et des actes de barbarie contre le peuple de ce territoire, qui ne cherche qu’à exercer son droit à l’autodétermination, a ajouté Mme Grigoryan, qui a dénoncé la « barbarie » du régime azerbaidjanais, lequel continue de traiter en héros des assassins comme Ramil Safarov, un officier azerbaidjanais qui a tué, en 2004, à coups de hache, un militaire arménien pendant un cours de formation militaire organisé par l’OTAN à Budapest.  

Mme NORA IMANE BELLOUT (Algérie) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, estimant en outre que la violation des droits des peuples à l’autodétermination était une forme de discrimination raciale.  Ce refus du droit à l’autodétermination constitue également une violation des droits fondamentaux et d’une « règle obligatoire » du droit international consacrée par la Charte des Nations Unies et les deux Pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques, et aux droits économiques, sociaux et culturels, a encore affirmé Mme Grigoryan.

Conformément à ces textes reconnus au niveau mondial, le droit à l’autodétermination est un droit permanent, qui se fonde sur le droit d’éliminer les restrictions qui pourraient avoir un effet négatif sur les droits des personnes à manifester de leur volonté d’autodétermination, a fait valoir la représentante, qui a souhaité que l’ONU mène une consultation libre et intégrée pour mesurer cette volonté chez les différents peuples se trouvant dans une telle situation.  Depuis la Révolution française, qui avait entraîné des élections, nous voyons le vote comme le seul moyen de manifester sa volonté à l’autodétermination, a poursuivi la représentante.  Elle a assuré à ce sujet que l’Algérie continuait de soutenir les droits de tous les peuples qui ne sont pas autonomes et se trouvent en situation d’occupation.  Nous voulons qu’ils puissent se prononcer par le biais d’un référendum, a-t-elle précisé, en disant penser en particulier « aux personnes vivant au Sahara occidental occupé depuis quatre décennies ».  

M. OMAR KADIRI (Maroc) a déploré le double discours de certains pays qui cherchent à figer le droit à l’autodétermination dans une vision passéiste.  Or, ce droit n’est pas statique et a même évolué tant dans les aspects juridiques que dans sa pratique, comme le montre les évolutions observées dans les résolutions 1514 ou 1541, adoptées en décembre 1960 et la résolution 2625 de l’Assemblée générale.  Dans la pratique, ce droit a évolué vers des cadres d’autonomie comme celui mis en place dans de nombreux pays, a dit le représentant, appelant à dépasser la vision passéiste et à reconnaître les nouvelles formes de ce droit.  Le Maroc déplore aussi que tandis que l’Algérie « s’acharne sur le Maroc », elle continue de nier les droits du peuple kabyle.

M. HABIB MIKAYILLI (Azerbaïdjan) s’est déclaré préoccupé par la montée de l’intolérance religieuse et des crimes haineux ciblant des groupes spécifiques, et notamment les discours antimusulmans.  Il a rejeté toute tentative pour assimiler l’Islam avec la violence et le terrorisme.  Dénonçant le rôle des médias dans l’aggravation des stéréotypes discriminants, il a appelé à l’adoption d’un code de conduite pour les journalistes.

Après avoir mentionné certaines mesures prises au plan national par son pays, le représentant a déploré « l’agression militaire continue et l’occupation d’une portion significative du territoire azerbaïdjanais par l’Arménie », ainsi que le nettoyage ethnique et la constitution d’un État monoethnique sur ces territoires.  Il a également regretté la politique du Gouvernement arménien de glorification de Garegin Nzhdeh et d’autres figures qui ont collaboré avec les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. 

M. Mikayilli a également déploré une « mauvaise interprétation » du droit à l’autodétermination par certaines instances, qui l’utilisent pour justifier le droit à l’utilisation illégitime de la force, l’occupation militaire et le soutien extérieur à des sessions unilatérales de territoire appartenant à des États indépendants.  Il a notamment insisté sur le fait que l’Arménie continuait d’agresser l’Azerbaïdjan et tentait d’imposer une sécession unilatérale des territoires azerbaïdjanais où vivent des minorités arméniennes.

Mme ALHAMMADI (Émirats arabes unis) a estimé que la communauté internationale disposait d’outils pour lutter contre la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Aux Émirats, où, a affirmé la représentante, vivent en harmonie plus de 200 nationalités, le Gouvernement souhaite se débarrasser de l’intolérance et a mis dans ce cadre un institut de la tolérance.  Mais il reste préoccupé par les idéologies d’intolérance véhiculées par certains groupes et estime qu’il faut réduire ceux-ci au silence.

Droits de réponse

Exerçant son droit de réponse, la représentante de l’Arménie a accusé la délégation de l’Azerbaïdjan de « suivre de très près la propagande nazie » et de proférer des mensonges si gros que certains commencent à y croire.  Le commentaire de la délégation de l’Azerbaïdjan montre, selon elle, que ce pays veut nier le droit du peuple du Nagorno-Karabakh à l’autodétermination et continue d’y violer le droit international.  Les atrocités commises contre des civils ont montré que rien n’a changé pour les Arméniens de ce territoire, a-t-elle dénoncé.  Pour l’Arménie, les faits montrent que Bakou a préféré ces hostilités au lieu de préparer la paix, alimentant au contraire une propagande anti-arménienne et diffusant un discours de haine.  Nous voulons un règlement pacifique et l’Azerbaïdjan devrait participer à la mise en œuvre d’un mécanisme d’enquête sur les violations du cessez-le-feu, a-t-elle conclu. 

Le représentant de la Fédération de Russie a demandé à la délégation de la Géorgie de reconnaître la réalité des faits, à savoir que les territoires de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud sont indépendants et disposent de leurs droits souverains.  Il a aussi demandé à l’Ukraine de faire de même, à savoir reconnaître que la Crimée et la ville de Sébastopol ont librement exercé leur droit à l’autodétermination, tel que reconnu par le droit international.  S’il y a des personnes pour croire que des violations des droits de l’homme sont commises dans ces territoires ou qui en sont victimes, elles peuvent librement saisir les moyens de recours qui existent et sont accessibles à tous, a assuré le représentant. 

En réponse à l’Arménie, le représentant de l’Azerbaïdjan a dénoncé des observations qui ne font que « déformer les faits » et qu’il rejette totalement.  L’Arménie continue d’induire la communauté internationale en erreur, a-t-il accusé, appelant ce pays à renoncer à son « idéologie raciste » et à apprendre à vivre en paix avec ses voisins.  Évoquant des « nettoyages ethniques massifs » perpétrés dans le Haut-Karabakh, il a rappelé que le Conseil de sécurité avait demandé à l’Arménie de se retirer et de respecter l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan, y compris ses frontières.  Il a enfin dénoncé les « relations spéciales » qu’entretient l’Arménie avec des « terroristes », dont certains sont considérés comme des « héros nationaux ».

La représentante de la Géorgie a affirmé que l’attitude de la Fédération de Russie ne servait qu’à détourner l’attention de la communauté internationale, en plus de violer l’accord du 12 août 2008, le droit international et les résolutions des Nations Unies.  La Fédération de Russie a agressé la Géorgie et occupe 20% de son territoire, cela est établi par la mission d’établissement des faits de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et les résolutions des Nations Unies, a affirmé la représentante.

La représentante de l’Ukraine a déclaré que la Fédération de Russie « continuait de s’enterrer la tête dans le sable », bien que la communauté internationale la reconnaisse comme agresseur de l’Ukraine et comme occupant une partie de son territoire, y compris la Crimée.  L’Ukraine rappelle en outre à la Fédération de Russie que le « peuple criméen » n’existe pas et que le droit à l’autodétermination ne se manifeste pas par une occupation de territoires étrangers.  

La représentante de l’Algérie a souhaité répondre à la déclaration du Maroc en indiquant que, pour l’instant, la situation dans les 17 territoires non autonomes reconnus par la communauté internationale n’était pas liée aux « rumeurs de quelques parties qui redoublent d’hallucinations ».  De fait, l’Algérie appelle toutes les parties à régler leurs problèmes à l’intérieur de leur propre pays et les organes des Nations Unies à se pencher sur la situation calamiteuse de ces pays.  En outre, l’Algérie soutient l’autodétermination de tous les peuples, surtout au Sahara occidental, où un peuple vit depuis 40 ans sous occupation et ne peut exercer ce droit librement.

Le représentant du Maroc s’est étonné que l’Algérie ne cherche à appliquer le principe de l’autodétermination qu’au seul « Sahara marocain » et refuse de le considérer pour le plus vieux peuple d’Afrique, les Kabyles, dont elle viole les droits en Kabylie.  L’Algérie reste par ailleurs ancrée dans une lecture passéiste de ce droit et ne tient pas compte de l’évolution historique de ce droit.  Le Maroc observe en outre qu’un rapport de l’organisation Amnesty International montre que l’Algérie se rend coupable d’arrestations massives et arbitraires de ressortissants de « pays africains frères », sur la seule base du profilage ethnique et les expulse dans le désert.  Pour le représentant du Maroc, tous ces agissements de l’Algérie sont contraires au droit international et aux droits de l’homme. 

Dans un second droit de réponse, le représentant de la Fédération de Russie a dit juger très intéressante la thèse ukrainienne selon laquelle il n’y a pas de peuple criméen.  Pour lui, cela montre la conception de ce pays quant au droit à l’autodétermination.  La Crimée a rejoint la Fédération de Russie par le même biais qu’elle avait rejoint l’Ukraine dans le passé, à savoir en exerçant son droit à l’autodétermination, a déclaré le représentant.

Le représentant de l’Azerbaïdjan a rejeté l’affirmation arménienne selon laquelle son pays glorifie des héros nazis ou s’est rendu coupable d’agression.  L’Azerbaïdjan souligne que l’occupation de son territoire n’est pas une solution à la crise entre les deux pays.  L’Arménie devrait au contraire retirer ses troupes du territoire azerbaïdjanais. 

Citant un proverbe, la représentante de l’Algérie a déploré que « le chameau ne voit pas ses bosses ».  Elle a rappelé que les Nations Unies parlent du « Sahara occidental », et non d’un autre Sahara, quel que soit le nom que lui donne le Maroc.

Reprenant la parole pour répondre aux observations du représentant de l’Azerbaïdjan, la représentante de l’Arménie s’est dite « surprise » et a constaté que l’Azerbaïdjan continuait de « mener la communauté internationale par le bout du nez ».  Rejetant en bloc des « affirmations non fondées », elle a rappelé que l’Azerbaïdjan avait reconnu que l’autodétermination devait faire partie du règlement du conflit au Nagorno-Karabakh.  De plus, en ce qui concerne les résolutions du Conseil de sécurité, l’Azerbaïdjan ne parle que de « quelques dispositions » sans tenir compte du fait que ces résolutions confirment que ce territoire est placé sous le contrôle des forces du Nagorno-Karabakh.

Le représentant du Maroc a repris à son tour la parole pour s’étonner que l’Algérie persiste à vouloir évoquer la question du « Sahara marocain », ce qui prouve, selon lui, son manque de « courage politique ».  L’Algérie n’est mue, ici, que par les seuls motifs de son hostilité à l’égard du Maroc et de ses desseins hégémoniques en Afrique du Nord, a-t-il déploré.  Rappelant d’autre part que le Maroc s’était inscrit dans le processus onusien pour parvenir à un règlement du différend sur le Sahara, il a assuré que le référendum dont parle l’Algérie « est mort et a été enterré par le Secrétaire général de l’ONU depuis plus de 18 ans ».  Il a conclu en regrettant la situation désastreuse des populations vivant dans les camps de Tindouf.

RAPPORT DU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS, QUESTIONS RELATIVES AUX RÉFUGIÉS, AUX RAPATRIÉS ET AUX DÉPLACÉS ET QUESTIONS HUMANITAIRES (A/72/12, A/72/12/ADD.1 ET A/72/354)

Déclaration liminaire, suivie d’une séance de questions

M. FILIPPO GRANDI, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a déclaré que le déplacement forcé de population était devenu un phénomène mondial qui n’épargne aucun continent et que certains pays accueillaient à eux seuls plus d’un million de réfugiés.  Des crises durant depuis des décennies jettent une nouvelle génération d’enfants et de jeunes dans des parcours dangereux, et la magnitude de ce phénomène est si complexe qu’elle retient l’attention et est devenu un thème central des débats au sein de la communauté internationale.  Fin 2016, quelque 65,6 millions de personnes à travers le monde étaient déplacées de leur foyer par les persécutions, les conflits et d’autres situations de violence, a rappelé M. Grandi, citant les chiffres du rapport annuel de son agence. 

Rien que depuis le début de cette année, plus deux millions de personnes ont quitté leurs pays à cause d’un conflit récurrent ou émergent, a précisé M. Grandi.  Ce chiffre inclut les 600 000 personnes ayant fui le Myanmar pour le Bangladesh.  La complexité de la situation au Soudan du Sud a fait partir 4,5 millions de personnes qui vivent désormais hors de ce pays pour les pays voisins.  Les violences en République démocratique du Congo, notamment dans les Kasaï, ont provoqué 100 000 réfugiés, alors que le nombre de déplacés internes dans ce pays a doublé depuis 2015, atteignant désormais presque quatre millions, a encore déclaré le Haut-Commissaire.

De même, en République centrafricaine, le nombre des personnes déplacées –réfugiées ou déplacées internes- a bondi de 50%, portant le chiffre à un million, dont 12 000 pour le seul mois de septembre.  En Afghanistan, ce ne sont pas moins de 2,3 millions de ses ressortissants qui sont réfugiés au Pakistan et en Iran, tandis que les conflits en Syrie et en Iraq comptent, à eux seuls, pour le quart des déplacements forcés dans le monde.  En Amérique centrale, des dizaines de milliers d’hommes et de femmes migrent pour trouver un meilleur asile contre la violence, pendant que les routes migratoires vers l’Europe, allant du Sahara et passant par la Libye et l’Italie, sont empruntées par des réfugiés venant d’Érythrée, de Somalie ou d’ailleurs, a poursuivi M. Grandi, qui a déploré que la protection de ces personnes se soit érodée dans de nombreux pays, en dépit de l’obligation faite aux États de protéger ces populations.

Cette érosion est souvent le fruit de mesures fragmentées et unilatérales prises pour répondre à l’afflux de réfugiés, mais inspirées par des considérations politiques à court terme, a également déploré le Haut-Commissaire, qui a dénoncé l’abandon de politiques reposant sur des principes au profit de démagogues irresponsables qui ont fermé les frontières et mis en place des politiques de dissuasion et d’exclusion dans plusieurs pays ou régions.  En même temps, M. Grandi a constaté de grands élans de solidarité envers les réfugiés, souvent renforcés par le rôle de responsables locaux, de dirigeants d’entreprise ou d’autres personnalités publiques.  Plus encore, des pays qui accueillent des réfugiés en grand nombre ont continué de faire preuve d’un niveau extraordinaire de générosité et d’engagement en faveur de leur protection, a-t-il reconnu.

Le Haut-Commissaire a également estimé que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants avait été l’occasion pour les États de réaffirmer leur solidarité, tandis que le Cadre d’action global pour les réfugiés annexé à cette Déclaration soulignait l’urgence de l’action humanitaire pour les aider.  Ces deux approches sont importantes, a-t-il affirmé, se félicitant que le cadre soit désormais mis en œuvre dans 12 pays, dont le Belize, le Costa Rica, le Guatemala, le Kenya, la Somalie, l’Éthiopie ou l’Ouganda.  Mais sans appui international et un partage équitable des responsabilités, les piliers communs seront fragilisés, a-t-il prévenu, appelant à un soutien financier urgent de la part de tous les acteurs et donateurs nationaux et internationaux.

Le Haut-Commissaire a aussi estimé que chercher des solutions aux crises actuelles est un autre modèle d’approche qui doit être approfondi, d’autant que seulement un demi-million de réfugiés ont pu regagner leurs foyers en 2016, souvent dans des circonstances loin d’être idéales.  Pour M. Grandi, le vingtième  anniversaire des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays, en 2018, devrait être l’occasion de galvaniser à nouveau le soutien aux États et d’enraciner ces principes dans les lois et pratiques.  Le HCR est disposé à mettre à contribution son expertise, y compris dans les politiques de réinstallation des réfugiés, a-t-il assuré.

M. Grandi a également expliqué que, pour renforcer les capacités d’adaptation du HRC, il avait entrepris une série de réformes, notamment une restructuration de ses processus internes pour atteindre une meilleure efficacité sur le terrain ou pour améliorer la collecte de données et mieux gérer les risques.  Par ailleurs, en 2016, le HCR a reçu presque 4 milliards de dollars en contributions volontaires, soit la plus forte somme jamais atteinte.  Et pourtant, même avec cette manne financière, l’année s’est terminée avec 41% des besoins identifiés non financés.  Cette année, avec 4,2 milliards de dollars disponibles, presque 50% des besoins ne sont pas couverts, a-t-il fait observer, ajoutant que l’agence devait faire des choix difficiles, compte tenu aussi des prévisions peu optimistes pour 2018.  Le financement des crises majeures n’est pas assuré, a-t-il averti, citant en exemple la crise en République centrafricaine, qui n’est financée actuellement qu’à hauteur de 11%, avant de lancer un appel aux donateurs. 

Lors de l’échange entre M. Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, et les délégations, l’Éthiopie a félicité le Haut-Commissaire pour sa visite récente dans le pays et lui a rappelé qu’elle était l’un des États accueillant le plus de réfugiés en Afrique.  L’Éthiopie a, à cet égard, déploré l’absence de solidarité internationale, tout en avouant se heurter à de graves difficultés pour financer le Cadre d’action global pour les réfugiés.  Ceci est grave et a un impact négatif sur la situation sur le terrain, a ajouté l’Éthiopie, qui a souhaité connaître les estimations du HCR sur un élargissement des perspectives de réinstallation dans le cadre du nouveau pacte mondial. 

Autre pays accueillant de nombreux réfugiés, le Kenya s’est déclaré préoccupé par les violences persistantes en Afrique, et notamment dans la Corne de l’Afrique et au Soudan du Sud.  S’agissant de celui-ci, il a souhaité savoir, du point de vue du HCR, quels progrès avaient été effectués pour répondre à la crise dans ce pays.  La Turquie a souligné l’importance d’une participation active de toutes les parties prenantes dans le monde entier au processus menant à l’élaboration d’un pacte mondial sur les réfugiés.  Notant que le HCR joue un rôle de chef de file dans la mise en œuvre du Cadre d’action global sur les réfugiés, elle a demandé aux États de le déployer pleinement et a souhaité savoir comment le HCR évaluait les tendances actuelles de réinstallations et leur évolution. 

La République islamique d’Iran a estimé qu’en matière d’accueil et de protection des réfugiés, le partage des charges n’était pas suffisant au niveau international.  Elle a demandé au HCR de lui fournir des informations sur sa capacité à mesurer l’impact lié à l’accueil de grands nombres de réfugiés.  S’agissant de la réinstallation dans des pays tiers, il aimerait savoir si des progrès ont été réalisés par rapport à l’an dernier et pourquoi les pays tiers hésitent tant à accueillir et à assurer la réinstallation de réfugiés.

Le Cameroun a dit tenir compte dans ses actions des personnes en situation de vulnérabilité.  Il a estimé que l’aide humanitaire et l’aide au développement devaient être appuyées politiquement par les États.  Au plan intérieur, l’afflux de réfugiés s’ajoute à des situations de grande précarité et de pauvreté.  Pour y répondre, le Cameroun a lancé un plan de réponse humanitaire en mettant l’accent sur l’éducation pour tous les enfants réfugiés et les communautés hôtes.

L’Azerbaïdjan a exprimé son inquiétude quant au nombre élevé de personnes déplacées à l’intérieur de pays dans le monde.  Il a souhaité savoir comment cela sera reflété dans le futur pacte mondial sur les réfugiés.  L’Iraq a rappelé que la citoyenneté est le droit de tous les Iraquiens.  Tous ceux qui sont nés d’un père et d’une mère iraquienne sont iraquiens automatiquement et ceux qui ont perdu leur citoyenneté peuvent la récupérer, a-t-il expliqué, se disant préoccupé par ce qui est écrit dans le rapport du HCR sur l’apatridie en Iraq.  Il a cependant remercié le HCR pour ses efforts déployés en faveur des réfugiés dans le pays, ajoutant qu’il avait besoin de davantage d’aide en raison des circonstances et parce que l’hiver approche. 

Le Qatar a souhaité que des solutions politiques d’urgence soient apportées pour répondre aux crises et atténuer la pression sur les pays qui accueillent des réfugiés, tout en appelant au respect des droits de l’homme de ces personnes.  Assurant respecter tous ses engagements à cet égard, il a souhaité savoir quelle réponse le HCR conçoit face à ces crises qui entraînent la fuite d’un nombre ne croissant de personnes dans le monde. 

Le Brésil a souligné que, depuis la Déclaration de Carthagène, la région de l’Amérique latine et des Caraïbes était en pointe en matière d’accueil de réfugiés.  À cet égard, il a demandé au HCR ce qu’il pense de la contribution des groupes régionaux aux discussions devant conduire à l’élaboration du pacte mondial sur les réfugiés.  Le Maroc a lui aussi demandé au Haut-Commissaire comment il voyait l’apport du futur pacte sur les réfugiés et comment celui-ci pourrait avoir un impact positif sur le terrain.  Il a aussi demandé plus d’informations sur les orientations du HCR en matière de déplacements de toutes sortes dans le monde.  La Papouasie-Nouvelle-Guinée a, elle, souhaité savoir quelles étaient les attentes des États Membres pour la mise en place du futur pacte mondial sur les réfugiés.  Elle aimerait par ailleurs en savoir plus sur les dispositifs de réinstallation, étant elle-même concernée par cette question.   

Le Japon a jugé que la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants était un texte essentiel au vu du nombre toujours croissant de personnes réfugiées dans le monde.  Il a indiqué qu’il allait continuer à intervenir au niveau humanitaire et s’est engagé à coopérer avec le Cadre d’action global pour les réfugiés.  À ce sujet, il a souhaité avoir l’avis du HCR sur les obstacles qui existent dans la coordination des travaux humanitaires et de développement. 

Pour la Norvège, il est important que les États mettent en œuvre la Déclaration de New York si l’on veut que le Cadre d’action global pour les réfugiés soit efficace.  Évoquant le grand écart entre les besoins et les ressources disponibles du HCR, la Norvège a dit percevoir des signes prometteurs, comme la participation de la Banque mondiale aux efforts internationaux.  À cet égard, la Norvège a demandé au HCR s’il lui serait possible de donner des précisions sur les autres mobilisations futures.  Elle a aussi demandé au HCR comment il pourrait intervenir de façon plus concrète avec d’autres agences de l’ONU pour répondre au phénomène des personnes déplacées.

L’Islande a indiqué avoir signé l’accord-cadre avec le HCR sur le financement et offert des possibilités de réinstallation à de nombreux réfugiés syriens.  Cet accueil est rendu possible par l’action de la Croix-Rouge islandaise et de citoyens volontaires, a-t-elle fait remarquer, avant de demander ce qu’elle pourrait faire pour aider davantage à l’intégration positive des Syriens qui se réinstallent dans de nouveaux foyers.

Le Myanmar a dit essayer de trouver une réponse pour arrêter le flux de réfugiés vers le Bangladesh.  Il a assuré qu’il s’efforçait d’assurer la sécurité de ces personnes et était déterminé à mettre en œuvre les recommandations du HCR dans l’État Rakhine.  Affirmant aussi adhérer aux principes du HCR en matière de retour des réfugiés, le Myanmar a indiqué que ceux qui ont la citoyenneté du pays, qui peuvent présenter un document émis par les autorités du Myanmar, un titre de propriété ou qui ont une adresse au Myanmar ne devraient pas rencontrer de difficultés à cette fin.  Il a conclu en réaffirmant sa volonté d’améliorer le processus de rapatriement. 

Dans ses réponses, M. Filippo Grandi, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, s’est déclaré encouragé par la reconnaissance et le soutien des délégations, unanimes à appuyer le concept et l’esprit du pacte.  Il a rappelé que le pacte était basé sur l’annexe 1 de la Déclaration de New York qui a été approuvée l’année dernière.

Le Haut-Commissaire a expliqué que les orientations stratégiques publiées début 2017 pour une période de cinq ans constituaient les volets d’actions du Haut-Commissariat.  Si le pacte mondial est bien approuvé l’an prochain, on y retrouvera tous les éléments indispensables pour renforcer ces orientations stratégiques, et plus particulièrement pour l’inclusion et l’intégration des réfugiés dans les différents services, notamment l’économie, a expliqué M. Grandi. 

Il a rappelé que le pacte mondial n’aurait pas de portée normative et ne remplacerait ni ne complèterait la Convention de 1951 ou tout autre instrument juridique, mais qu’il permettrait juste de mieux organiser les différentes réponses à donner aux crises.  Le pacte devrait nous permettre de nous concentrer sur la recherche de solution face au déplacement, a-t-il expliqué, en souhaitant que cette plateforme politique complète le cadre existant et garantisse la protection des réfugiés.  Il a félicité les pays ayant déjà mis en œuvre des initiatives complémentaires en faveur du pacte, tels que le Kenya avec l’initiative de Nairobi ou encore le Brésil. 

Face aux défis liés au financement, le Haut-Commissaire a déclaré que la réponse devrait intégrer les acteurs du développement tels que la Banque mondiale et les bureaux chargés de l’aide bilatérale.  Il faut savoir quelles sont les réponses inadéquates d’un point de vue humanitaire et délimiter les éléments qui permettront de changer les choses en ce qui concerne l’utilisation des ressources disponibles, a-t-il ajouté. 

C’est pourquoi M. Grandi s’est dit ravi que le Bangladesh ait déjà demandé à la Banque mondiale d’étudier les possibilités d’appuyer son travail d’accueil des réfugiés du Myanmar, et ce, au début d’une situation d’urgence, ce qu’il a qualifié de « jalon sur la voix du pacte mondial ».  Cela doit être la norme, a-t-il insisté, nous devons appuyer dans les situations de crise humanitaire mais également penser à long terme l’implication du développement.

M. Grandi a enfin insisté sur l’importance des données et a fait état du travail du Haut-Commissariat avec la Banque mondiale pour mettre en place des bases de données plus fiables.  Il s’est déclaré très préoccupé par les déclarations de certains États Membres annonçant une réduction du nombre de réfugiés qu’ils acceptent d’accueillir, estimant qu’ils envoient « un très mauvais message ».  En réponse au Myanmar, il a demandé à ce que le pays laisse s’installer les agences humanitaires dans l’État Rakhine et a insisté auprès du pays, ainsi qu’auprès du Bangladesh, pour qu’ils incluent le plus possible le Haut-Commissariat dans leurs discussions. 

Discussion générale

M. JESÚS DIAZ CARAZO, de l’Union européenne, a rappelé que les 65,5 millions de déplacés recensés à la fin 2016 représentaient le « nombre le plus élevé jamais enregistré », qui inclut 22,5 millions de réfugiés fuyant la guerre, la violence, la persécution et les violations des droits de l’homme.  Pour l’Union européenne, un des problèmes centraux de la question des déplacés est la nature prolongée des conflits, puisqu’en moyenne une personne est déplacée pendant 10 ans et que nombre de ces personnes doivent mettre leur vie entre parenthèses bien plus longtemps.  M. Diaz Carazo a également relevé que 84% des réfugiés sous mandat du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) étaient hébergés dans des États à revenu faible ou moyen.

La communauté humanitaire ne peut agir seule pour prendre en charge le problème, a déclaré le représentant.  Une approche globale à long terme est nécessaire, dans laquelle les acteurs politiques et du développement ont un rôle crucial à jouer.  Prévenir les conflits, les résoudre et éviter leur retour sont les objectifs principaux de la politique extérieure européenne, a expliqué M. Carazo.  C’est pourquoi l’Union européenne a proposé un nouveau cadre pour les politiques concernant les déplacements forcés, qui inclut de l’aide humanitaire, qui a pour but de renforcer la résilience des déplacés et de leurs communautés hôtes à travers des moyens d’existence durable et un accès aux services de base.  L’Union européenne a commencé à mettre en œuvre cette nouvelle approche dans des projets concrets et des programmes et a pour objectif de l’utiliser systématiquement dans les crises impliquant des déplacements.

Reconnaissant le rôle majeur du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés dans un contexte ou l’aide humanitaire est de plus en plus complexe, le représentant a rappelé que l’Union européenne lui avait apporté un financement de 3,9 milliards de dollars en 2016, signe d’une « claire reconnaissance » des compétences de l’agence.  Il a aussi fait observer que les dépenses du Haut-Commissariat avaient quadruplé ces 10 dernières années pour atteindre près de 4 milliards de dollars.  Il a déploré que le financement total ne permette pas de mener toutes les activités identifiées par l’agence qui, en 2017, aurait besoin de 7,8 milliards de dollars de budget, et a appelé les donneurs à accroître leur support. 

M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud), qui s’exprimait au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a réaffirmé l’attachement de son groupe aux principes consacrés dans la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et son Protocole de 1967, ainsi que dans la Convention de l’organisation de l’Unité africaine régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique de 1969, qui traite des différents aspects de cette question en Afrique.  À ce titre, la SADC s’engage à respecter, aux niveaux régional et national, le principe de non-refoulement et à se conformer aux normes internationales en matière de protection des réfugiés.  Elle invite les autres régions du monde à faire de même.

Se disant préoccupé par le fait que, fin 2016, le nombre de personnes déplacées de force dans le monde s’élevait à 65,6 millions, du fait de persécution, de conflits ou de situations de violence, le représentant a regretté le peu d’attention accordée aux conséquences de l’afflux de réfugiés dans les pays en développement.  Or, a-t-il souligné, ces pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire accueillent 84% des réfugiés recensés par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).  Il a aussi exprimé l’inquiétude de la SADC quant à la baisse continue du budget alloué à l’Afrique, en dépit de ses politiques d’accueil pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, lesquelles lui coûtent beaucoup.

M. Mminele a par ailleurs réaffirmé l’engagement de la SADC en faveur de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants et de son Cadre d’action global pour les réfugiés, saluant les pays pilotes qui ont commencé à mettre en œuvre ce dispositif pour répondre aux situations de réfugiés à grande échelle.  Il a également félicité le HCR pour avoir élargi ses sources de financement en faisant appel au secteur privé et aux banques internationales.  La SADC se réjouit en particulier que l’Association internationale de développement de la Banque mondiale ait prévu de fournir une aide de 2 milliards de dollars aux réfugiés et aux pays en développement qui les accueillent.

M. ALMERI (Arabie saoudite) a rappelé que son pays était un des plus importants fournisseurs d’aide aux réfugiés, comme en atteste son action en faveur des personnes arrivées sur son territoire en provenance de Syrie.  Il a ainsi affirmé que le pays avait accueilli 2,5 millions de réfugiés syriens.  Il a ajouté que le nombre d’étudiants syriens en Arabie saoudite s’élevait à 141 000 et qu’aucun d’entre eux n’avait dû payer pour sa scolarité. 

Le représentant a également souligné que l’Arabie saoudite avait soutenu des millions de réfugiés dans les pays voisins et s’était efforcée de fournir une aide humanitaire en coopération avec les pays hôtes.  Il a également fait état d’une aide financière d’un montant total de 800 millions de dollars.  S’agissant des « frères yéménites » de l’Arabie saoudite, ceux qui résident dans le Royaume sont traités comme des ressortissants, a précisé le délégué, notant que 500 000 d’entre eux avaient eu des possibilités d’emploi et que plus de 800 000 étudiants yéménites étaient présents sur le territoire saoudien.  De surcroît, a-t-il dit, nous répondons aux besoins humanitaires du peuple yéménite.

Avant de conclure, le représentant a déclaré que son pays avait aussi apporté, en février 2016, une assistance à hauteur de 59 millions de dollars à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) et avait engagé des millions de dollars en faveur du Pakistan et des Rohingya du Myanmar.

M. FURUMOTO (Japon) a salué le travail du Haut-Commissariat pour les réfugiés et a dit être conscient des responsabilités et attentes grandissantes envers l’agence dans le contexte des crises humanitaires actuelles en Syrie, au Soudan du Sud, au Bangladesh et au Myanmar.  Le représentant a rappelé qu’en septembre, la contribution du Japon au budget du HCR s’élevait à 150 millions de dollars au titre de 2017.  Aux yeux du Japon, le Cadre d’action global pour les réfugiés complète la convergence entre aide humanitaire et développement que le Japon promeut.  M. Furumoto a en outre mentionné les actions d’aide humanitaire du Japon en Ouganda et au Soudan du Sud avant de conclure sur l’importance du concept de sécurité humaine, « pilier de la diplomatie du pays ».

M. GILLES CERUTTI (Suisse) a rappelé que les chiffres liés au déplacement forcé n’avaient pas cessé d’augmenter ces dernières années et a déploré que les solutions pour contenir cette croissance et offrir des solutions durables aux réfugiés et aux déplacés demeurent insuffisantes.  Il a insisté sur l’importance du futur pacte mondial pour les réfugiés, qui permettra de renforcer le soutien aux États et aux communautés hôtes qui accueillent ces personnes déplacées.  Enfin, dans l’optique de « ne laisser personne de côté », le représentant a déclaré qu’il était crucial de garantir protection et assistance aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays du fait de conflits ou de catastrophes naturelles. 

M. CARLOS ARTURO MORALES LÓPEZ (Colombie) a rappelé que le pays comptait de très nombreuses personnes déplacées internes, « conséquence la plus grave » du conflit armé qu’a connu le pays.  Le représentant a fait état des mesures prises sur le plan national pour faire face au problème, et notamment du système de réparation.  Il a également mentionné les mesures en faveur du retour et de la réinstallation offertes aux déplacés, ainsi que de l’inclusion dans celles-ci d’une approche ethnique « qui est un réel progrès ».  Faisant aussi état du processus de restitution des terres aux anciens déplacés, le représentant a affirmé que des progrès avaient été faits dans l’adoption d’indicateurs de restitution et que 4 856 familles s’étaient vues restituer leurs terres.

M. ILARIO SCHETTINO (Italie) a relevé qu’alors que plus de 65 millions de personnes sont déplacées de force dans le monde, nombre d’entre elles subissent des abus et des violences pendant leur périlleux voyage.  Celles-ci courent ainsi le risque de devenir les victimes de réseaux de traite des personnes, a-t-il souligné, observant que la crise humanitaire actuelle était clairement la pire que le monde ait jamais connue et que c’était les plus vulnérables qui en payaient le prix.

Relevant par ailleurs que 84% des réfugiés sont accueillis dans des pays en développement, le représentant a jugé essentiel que la communauté internationale reconnaisse que les interventions d’urgence doivent être complétées par des réponses en faveur d’un développement à long terme.  À cet égard, l’Italie appuie les efforts du HCR visant à promouvoir un changement de paradigme dans la réponse apportée aux déplacements forcés, par le biais du développement du Cadre d’action global pour les réfugiés.  L’Italie continuera aussi de soutenir le HCR dans ses opérations d’urgence destinées à sauver des vies, réduire les souffrances humaines et protéger la dignité des demandeurs d’asile, des réfugiés, des déplacés internes et des apatrides dans le monde, a assuré le représentant.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a insisté sur le fait que les pays qui recevaient le plus grand nombre de réfugiés étaient des pays du Sud, qui souvent font face à des difficultés pour répondre aux besoins de leur propre population.  Il a demandé à ce que ces pays soient soutenus, de façon à ce qu’ils puissent garantir les droits de base et l’inclusion sociale.

Reconnaissant la nécessité de soutenir ces pays sur le plan financier, le représentant a toutefois insisté sur le fait qu’une telle aide ne devait en aucun cas constituer une contrepartie pour les pays adoptant des politiques restrictives en ce qui concerne l’entrée et le séjour sur leurs territoires.  Il s’est dit préoccupé que certains pays aient mis en œuvre des mesures qui limitent l’accès de leur territoire aux réfugiés, estimant qu’ils violaient ainsi le droit international des réfugiés.  M. de Souza Monteiro a rappelé que son pays s’était engagé à recevoir 3 000 réfugiés syriens.  Le Brésil a en outre adopté une nouvelle législation sur les migrations afin de garantir les droits des migrants et de mieux intégrer les étrangers, ainsi que pour faciliter l’adoption de la citoyenneté brésilienne aux apatrides.

Mme NATALIE COHEN (Australie) a estimé que le total sans précédent des personnes déplacées dans le monde rendait le travail du HCR plus important que jamais.  À cet égard, la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants se révèle un jalon essentiel, a-t-elle souligné, précisant que son pays avait déjà commencé à traduire ses engagements en actions.  En plus de sa propre part au budget du HCR, l’Australie a ainsi contribué à hauteur de 6,9 millions de dollars au soutien apporté par le Haut-Commissariat à la mise en œuvre du Cadre d’action global pour les réfugiés en Ouganda et en Éthiopie.

L’Australie souhaite par ailleurs que le futur pacte mondial pour les réfugiés, attendu en 2018, réaffirme l’engagement des États envers le régime de protection des réfugiés et développe un partage des responsabilités plus équitable au niveau planétaire.

M. NEBIL SAID IDRISS (Érythrée) a déclaré que la distinction entre réfugiés et migrants économiques était critique pour mieux répondre aux besoins des refugiés et qu’une meilleure coopération internationale était nécessaire pour faire face à ce phénomène.  Il a déploré que des camps dans la région, financés et coadministrés par le HCR, soient utilisés comme des « centres d’agitation politique et de recrutement armé ».

Le représentant a également mentionné le fait que l’Érythrée menait une politique de retour volontaire de ses ressortissants nationaux, en les encourageant et les soutenant.  Il a accusé le Haut-Commissariat de présenter une image fausse du pays en accusant son pays de persécuter les retournés volontaires.  Il a enfin demandé à ce que le HCR engage un dialogue avec les pays avant de produire des recommandations les concernant et a appelé l’agence à modifier ses recommandations concernant l’Érythrée. 

M. AL HUSSAINI (Iraq) a rappelé que son pays était frappé par le terrorisme depuis 2013, ce qui a entraîné le déplacement de 3,6 millions de personnes sur son territoire.  Le Gouvernement iraquien fait face à cet enjeu majeur afin de pouvoir atténuer les souffrances des personnes et des familles déplacées, a souligné le représentant, précisant qu’une commission d’accueil des réfugiés avait été créée à cette fin.  Des camps ont aussi été mis en place et une assistance humanitaire distribuée à la population.

Le Gouvernement s’emploie par ailleurs à régler les questions des cartes d’identité et des salaires des personnes déplacées, a poursuivi M.  Al Hussaini, qui a également fait état d’une aide accordée aux étudiants dans les communautés d’accueil.  L’Iraq y parvient grâce à l’aide de l’ONU et de ses agences, a expliqué le représentant, qui a rendu ensuite hommage au « sacrifice » consenti par l’armée fédérale, la police et les forces civiles populaires, lesquelles ont œuvré à libérer les villes détenues par Daech.  Notant à cet égard que l’armée, engagée dans la libération de Mossoul, s’est concentrée sur la protection des civils, il a assuré que les forces de sécurité iraquiennes avaient intégré un volet humanitaire dans leur stratégie. 

M. ROMAN KASHAEV (Fédération de Russie) a rappelé que M. Grandi s’était rendu à Moscou et a expliqué que le pays accueillait des ressortissants de plus de 57 États, dont plus d’un million d’Ukrainiens ayant fui le conflit dans leur pays.  Faisant état des nouvelles lois fédérales en cours concernant l’octroi du statut de réfugiés, le représentant a mentionné un raccourcissement des procédures et une réduction des frais.

Pour la Fédération de Russie, il faut régler les conflits de façon politique et fournir une assistance aux pays d’origine pour favoriser le retour volontaire.  Le représentant a enfin estimé que la situation des réfugiés en Europe est le résultat de « l’ingérence irresponsable » des pays européens dans les situations internes de pays africains et au Moyen-Orient pour en changer les gouvernements par la force.

Mme BROOKS (États-Unis) a constaté qu’avec la crise migratoire actuelle, des millions de personnes étaient confrontées à des violations graves des droits de l’homme dans de nombreux points du monde.  Face à cette situation, il faut trouver des réponses concrètes et s’appuyer sur l’élan créé par le HCR pour aider les réfugiés, les demandeurs d’asile, les apatrides et les personnes déplacées, ainsi que les pays qui les accueillent, a plaidé la représentante.

Mme Brooks a d’autre part rappelé que les États-Unis s’étaient engagés fortement en faveur des travaux du HCR, faisant état de 8 milliards de dollars en assistance pour l’année budgétaire en cours.  En 2017, a-t-elle poursuivi, plusieurs événements ont mobilisé la communauté internationale et il nous faut y répondre en trouvant des solutions durables.  La nature des enjeux doit nous pousser à en faire davantage, a encore affirmé la représentante, qui a enjoint au HCR d’être « le plus transparent possible » pour préserver la confiance de son organisation.  Elle a enfin demandé au Haut-Commissariat d’accroître sa présence dans les environnements les plus dangereux et de continuer à placer les peuples au cœur de ses décisions, tout en renforçant sa culture de responsabilisation.

M. AMJAD QASSEM AGHA (République arabe syrienne) a déclaré que la crise des réfugiés dans son pays n’était qu’un élément de la crise en Syrie et a déploré que des pays arabes « fassent chanter la communauté internationale » à cause de la situation humanitaire en Syrie.  Citant Julian Assange, le représentant a indiqué que les vagues de réfugiés en provenance de Syrie était « une stratégie contre le Gouvernement syrien pour vider le pays de ses citoyens et le faire sombrer dans le chaos ».  Il a regretté que la Turquie utilise les réfugiés syriens pour faire pression sur l’Union européenne afin d’accélérer son adhésion et « alors même qu’elle viole les droits de l’homme des réfugiés dans les camps et notamment ceux des enfants syriens ».

Le représentant a également accusé l’Arabie saoudite de « manipuler » les chiffres en déclarant accueillir 2,3 millions de réfugiés syriens alors que dans son rapport le HCR ne liste que 133 personnes.  S’interrogeant sur les conditions à assurer au peuple syrien pour qu’il puisse retourner dans ses foyers, il a lui-même répondu qu’il fallait mettre fin « au terrorisme qui cible le peuple syrien », notamment en appliquant les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, et mettre aussi fin aux mesures coercitives unilatérales adoptées par certains États à l’encontre du peuple syrien.

M. GHULAM SEDDIQ RASULI (Afghanistan) a déclaré qu’au moment où plus de 65 millions de personnes dans le monde sont déplacées de force, dont 22,5 millions hors de leur propre pays, la recherche de solutions à cette crise devait être au centre des efforts de la communauté internationale.  Cet impératif figure dans la Déclaration de New York ainsi que dans le Cadre d’action global pour les réfugiés, a souligné le représentant, assurant que son pays y accordait une attention particulière dans la perspective du futur pacte mondial sur les réfugiés.  La question des réfugiés est d’une importance centrale pour l’Afghanistan, dont plus de deux millions de ressortissants sont enregistrés comme tels dans les pays voisins après avoir fui les conflits des dernières décennies, a précisé le représentant.  À cet égard, il a indiqué que son gouvernement s’engageait à garantir le retour et la réinstallation durable des réfugiés afghans et qu’il travaillait pour cela en étroite collaboration avec le HCR et d’autres acteurs internationaux. 

Mme PHAM THI KIM ANH (Viet Nam) a rappelé que la moitié des réfugiés dépendant du mandat du HCR se trouvaient en Afrique, et qu’en 2016 la moitié de la population réfugiée était composée d’enfants.  Le problème des réfugiés est étroitement lié à la paix, aux questions de sécurité et aux droits de l’homme, a-t-elle observé.  Citant la Déclaration de New York, la représentante a insisté sur la nécessité de trouver des solutions durables pour les réfugiés, en particulier pour leur permettre d’obtenir un statut juridique durable qui protège leurs droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux.  La représentante a également rappelé la vulnérabilité accrue des femmes et des enfants, plus exposés à la traite des personnes. 

Mme SUSAN WANGECI MWANGI (Kenya) a déclaré partager les préoccupations exprimées par le Haut-Commissaire tout en faisant remarquer que son pays avait gardé ses portes ouvertes aux réfugiés.  Conformément à nos obligations internationales, nous continuerons à assurer la protection des réfugiés en appliquant les dispositions de la Convention de 1951 et son Protocole de 1967, ainsi que la Convention de 1969 de l’Organisation de l’Unité africaine traitant des différents aspects de cette question, a précisé la représentante.

À cet égard, la représentante a souligné que, depuis octobre dernier, le Kenya enregistrait une augmentation du nombre des arrivées en provenance du Soudan du Sud.  Sur les 183 542 réfugiés du camp de Kakuma, quelque 109 000 proviennent de ce pays, a-t-elle indiqué, assurant que son gouvernement travaille en étroite collaboration avec le HCR pour fournir une protection à ces personnes.  Elle a, en revanche, regretté le manque de soutien de la communauté internationale, qui lui a fait assumer seul le poids d’un des plus vastes camps de réfugiés au monde à Dadaab.  Or, avec le temps, ce camp est devenu une base de recrutement pour des attaques terroristes dans le pays, a poursuivi la déléguée, selon laquelle une solution à cette crise consisterait à favoriser la stabilité en Somalie.

M. MOHAMMAD HASSANI NEJAD PIRKOUHI (République islamique d’Iran) a expliqué que les pays à ressources limitées étaient les premiers à accueillir des réfugiés, une situation qu’il a qualifié « d’insoutenable ».  Il a rappelé que, depuis quatre décennies, son pays avait toujours accueilli un grand nombre de réfugiés et en ressentait grandement la charge sur son économie.  Il a insisté sur la nécessité d’une réponse internationale en la matière et a demandé à ce que soient partagées les charges qui en résultaient, réclamant un « mécanisme clair » sur le sujet.

Le représentant a en outre fait observer que son pays subissait des « sanctions inhumaines » qui affectent la qualité des services fournis aux réfugiés.  Il a enfin expliqué que la République islamique d’Iran avait offert des garanties d’emploi aux réfugiés présents sur son territoire, précisant que 700 000 réfugiés travaillaient dans le pays.

M. BENARBIA (Algérie) a dénoncé le caractère asymétrique des réponses apportées à la crise des réfugiés.  Les pays en développement continuent d’accueillir la majeure partie de cette population dans le monde, a-t-il constaté, observant qu’ailleurs, seul un nombre limité d’États ont fait preuve d’hospitalité.  Or cette asymétrie ne peut se justifier par la seule proximité géographique, a-t-il encore fait valoir.  

Au vu de la situation actuelle, beaucoup reste à faire pour assurer un partage équitable du fardeau et mettre en œuvre pleinement les dispositions de la Convention de 1951 qui s’appuie sur les principes de solidarité et de coopération, a estimé le représentant.  Pour l’Algérie, le HCR devrait prendre en compte la durée de séjour des réfugiés dans le calcul de son assistance, ce qui permettrait aux pays hôtes de mieux évaluer leur effort.  Assurant d’autre part que l’Algérie soutient la solution du rapatriement volontaire des réfugiés dans la sécurité et la dignité, M. Benarbia a conclu en appelant la communauté internationale à redoubler d’efforts en matière d’assistance, de protection et de solutions durables, dans la droite ligne de la Déclaration de New York.  

Mme IRINA VELICHKO (Bélarus) a cité les mesures mises en œuvre par son pays, faisant état de consultations avec toutes les parties intéressées pour élaborer une position nationale sur les réfugiés et les migrants.  Pour le Bélarus, le pacte mondial sur les réfugiés est un instrument utile pour résoudre les problèmes des personnes déplacées.  La représentante a estimé que les causes profondes de la crise actuelle sont le résultat de l’incapacité de la communauté internationale à tourner la page de guerre froide et à instaurer un nouvel ordre mondial.  Elle a d’ailleurs proposé que son pays soit au centre d’un dialogue entre les gros acteurs mondiaux pour que soit enfin trouvé ce nouvel ordre mondial.

M. YIĞIT CANAY (Turquie) a dit apprécier le rôle directeur joué par le HCR pour passer avec succès de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants à la création d’un pacte mondial sur les réfugiés, tout en mettant en œuvre le Cadre d’action global pour les réfugiés.  La Turquie, conformément aux engagements pris lors du Sommet humanitaire mondial d’Istanbul, applique un modèle de coopération entre les acteurs humanitaires et du développement, a indiqué le représentant, précisant que, dans ce cadre, l’aide de son pays allait en particulier aux personnes déplacées en Afrique subsaharienne. 

M. Canay a par ailleurs rappelé que son pays accueille près de 3,3 millions de personnes déplacées en raison de conflits dans sa région, dont plus de 3 millions de Syriens.  Cela fait de la Turquie le premier pays d’accueil de réfugiés, a-t-il souligné, assurant qu’il était accordé à ces personnes un accès libre à l’éducation, à la santé et à l’emploi.  Il a précisé qu’à la suite de l’accord conclu le 18 mars 2016 avec l’Union européenne, le nombre de traversées de la mer Egée avait chuté.  Nous sauvons des vies en mer et, dans le même temps, nous luttons contre le trafic d’êtres humains, a-t-il expliqué, avant de conclure en se disant préoccupé par la situation des réfugiés palestiniens et par la tragédie humanitaire que vivent les musulmans rohingya.   

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