Soixante et unième session,
6e & 7e séances – matin & après-midi
FEM/2110

La Commission de la condition de la femme considère l’autonomisation des femmes autochtones comme un thème prioritaire

La Commission de la condition de la femme a poursuivi, aujourd’hui, les travaux de sa soixante et unième session en organisant, en marge de son débat général, un dialogue interactif de haut niveau sur le thème de l’autonomisation des femmes autochtones, puis la présentation d’exposés nationaux volontaires par cinq pays sur la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement(OMD)en faveur des femmes et des filles.

C’est la première fois que la Commission de la condition de la femme considère l’autonomisation des femmes autochtones comme un thème prioritaire, ce qui coïncide avec le dixième anniversaire de l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, s’est félicité le modérateur du dialogue du matin, M. Antonio de Aguiar Patriota, du Brésil, qui préside la Commission cette année.

Les préoccupations des femmes autochtones, reflétées dans les recommandations de l’Instance permanente sur les questions autochtones des Nations Unies, ont été abordées sous différents angles par les représentants d’États Membres, de la société civile et d’instances du système de l’ONU.  Ils ont notamment débattu de leur participation au processus de prise de décisions dans la vie politique et parlementaire.

« Nous, les femmes autochtones, nous ne voulons pas seulement que nous soit réservé un paragraphe dans le document final de cette session, nous voulons plus de visibilité », a résumé une militante du Guatemala.  Dans un même élan, les représentants de l’Argentine, du Mexique et du Pérou ont souligné la nécessité de considérer les femmes autochtones comme des sujets de droit. 

Sur la question de la violence contre les femmes et les filles autochtones, la Directrice d’une organisation attachée aux droits des communautés pastorales au Kenya a remarqué combien la violence à l’égard des femmes était « pernicieuse », parce qu’elle fait partie intégrante des cultures, citant notamment les mariages précoces et les mutilations génitales féminines.  L’élimination de la violence faite aux femmes exige davantage de données ventilées, ont plaidé le représentant du bureau régional du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour l’Amérique latine et les Caraïbes, de même que celui du Réseau mondial des personnes autochtones handicapées.

 « Les femmes autochtones n’ont pas assez de droits économiques et ne contrôlent pas assez les terres et les ressources », a constaté par ailleurs la représentante de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  Ces femmes travaillent souvent dans l’économie informelle avec peu ou pas d’accès à un emploi décent.  En outre, d’après la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, elles souffrent, de par leur dépendance à la terre, des effets des changements climatiques de façon disproportionnée.

Il est ressorti de ce dialogue que les femmes autochtones ne veulent pas être perçues comme des victimes, mais comme de véritables actrices du changement.  À ce sujet, plusieurs intervenants, dont le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et la Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda, ont souligné que les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ne pourront pas être réalisés sans respecter leurs droits, afin de « ne laisser personne de côté ».

Cet après-midi, les représentants de cinq pays ont chacun présenté un exposé national sur les difficultés rencontrées et les résultats obtenus dans la réalisation des OMD pour les femmes et les filles.

La Sous-Secrétaire générale et Directrice exécutive adjointe d’ONU-Femmes, Mme Lakshimi Puri, a d’abord introduit le rapport du Secrétaire général qui fait le point sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des conclusions concertées adoptées à la cinquante-huitième session de la Commission de la condition de la femme. 

Malgré des avancées appréciées dans de nombreux domaines, le rapport conclut que les États Membres n’ont pas tous accordé la même attention aux politiques intersectorielles.  Les lacunes se font sentir dans la prise en compte de la dimension environnementale du développement durable, ainsi que dans l’accès des femmes aux ressources, le travail domestique non rémunéré et la santé sexuelle et reproductive. 

Au Mexique, a expliqué la Présidente de l’Institut national des femmes de ce pays, la mise en œuvre des OMD en faveur des femmes et des filles n’a pas donné de résultats probants, mais les leçons de ces échecs servent aujourd’hui dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs du développement durable.

Au Libéria, le Gouvernement a mis en place un certain nombre de projets pour favoriser l’autonomisation des femmes, a indiqué la Ministre du genre, de l’enfance et de la protection sociale, citant par exemple des campagnes menées contre le mariage précoce.

La Sous-Directrice générale à la Sous-Direction des relations internationales au Ministère de la santé de l’Espagne a, pour sa part, mentionné les mécanismes institutionnels mis en place pour garantir l’autonomisation des femmes et des filles.  Son intervention a été suivie de l’exposé de la représentante de la Slovaquie qui a signalé des initiatives pour concilier les vies professionnelle et familiale des femmes slovaques. 

Enfin, la Vice-Ministre de la santé tanzanienne a profité de son exposé pour demander à la communauté internationale d’offrir un soutien aux pays en développement pour que ces derniers puissent améliorer la collecte de données sexospécifiques.

La Commission de la condition de la femme reprendra ses travaux demain, vendredi 17 mars, à partir de 10 heures, avec la présentation d’autres exposés d’États Membres, en parallèle avec son débat général. 

SUITE DONNÉE À LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET À LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE » (A/71/38, E/CN.6/2017/2, E/CN.6/2017/3, E/CN.6/2017/4, E/CN.6/2017/6, A/HRC/35/3E/CN.6/2017/7, E/CN.6/2017/10 ET E/CN.6/2017/NGO/3 À E/CN.6/2017/NGO/131, E/CN.6/2017/NGO/220 ET E/CN.6/2017/NGO/221)

Dialogue interactif sur le thème « Autonomisation des femmes autochtones »

Alors que la soixante et unième session de la Commission de la condition de la femme coïncide avec le dixième anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le modérateur du dialogue, M. Antonio de Aguiar Patriota, du Brésil, y a vu l’occasion de susciter un élan supplémentaire pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui s’est donné pour mission de « ne laisser personne de côté ».  Les quatre thèmes à traiter en rapport avec l’autonomisation des femmes autochtones étaient les suivants: leur participation aux processus de prise de décisions, la violence dont elles sont victimes, les opportunités économiques qui s’offrent à elles et les effets des changements climatiques sur leur autonomisation.

« La participation des femmes autochtones aux processus de prise de décisions fait partie des priorités », a assuré d’emblée une représentante de la Fédération de Russie, membre de l’Instance permanente sur les questions autochtones.  L’Instance a en effet formulé plus de 150 recommandations concernant les femmes autochtones, a-t-elle illustré en notant tout de même que ces femmes restent sous-représentées dans les organes politiques nationaux ou locaux.

« Nous, les femmes autochtones, nous ne voulons pas seulement que nous soit réservé un paragraphe dans le document final de cette session, nous voulons plus de visibilité », a enchaîné une militante du progrès social du Guatemala qui est une ancienne vice-présidente de l’Instance.  « Si nous sommes à cette tribune, c’est parce que nous voulons vraiment une participation plus équitable et plus juste », a-t-elle insisté.

Au Pérou, les femmes sont des acteurs clefs de la vie économique et sociale, a fait valoir la Vice-Ministre des femmes en réaffirmant sa détermination à remédier à leur situation de pauvreté, en particulier pour les femmes autochtones, et à leur faible représentation dans le processus de prise de décisions.

Du côté de la Norvège, un membre du conseil exécutif du Parlement Sami, a indiqué que 49% de cet organe est constitué de femmes, se vantant d’avoir dans son pays « de fières traditions en ce qui concerne la participation des femmes ».  Le revers de la médaille est qu’il n’y a pas de ministre Sami au sein du Gouvernement, a-t-elle cependant regretté.  Les femmes Sami participent en outre activement aux travaux du Parlement finnois, a renchéri la Ministre des affaires sociales et de la santé de la Finlande, un pays qui soutient depuis longtemps le Fonds d’affectation spéciale dédié à l’Instance permanente.

La Ministre du genre, du travail et du développement social de l’Ouganda a fait part de l’expérience de son pays où, alors même que les 56 ethnies autochtones sont citées dans la Constitution, les femmes autochtones souffrent toujours de discriminations, notamment pour ce qui concerne l’accès à la terre et aux ressources naturelles.  Comme début de solution au problème, elle a conseillé de renforcer les mouvements issus de la base de la société, pour donner davantage voix au chapitre à ces femmes en matière de service publics  Elle a également vu l’intérêt pour les femmes autochtones d’un système de protection sociale universel, qui doit être mis en place dans le cadre du Programme 2030.

De façon plus générale, le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande a mis en place des approches uniques pour appuyer le développement des Maoris, a indiqué la Directrice exécutive au Ministère des peuples pacifiques.  Son voisin, l’Australie, sait que « l’autonomisation des femmes aborigènes et insulaires du détroit de Torres permet d’obtenir de meilleurs résultats en matière de santé, d’éducation, d’emploi et d’espérance de vie », comme l’a concédé la Ministre des femmes et de l’emploi qui a en même temps reconnu que le chemin à parcourir restait long.

Sur le constat d’une participation encore faible des femmes autochtones aux processus de prise de décisions, les intervenants en ont dénoncé une des causes principales, à savoir les inégalités entre les sexes qui entravent le développement en général, comme l’a résumé la Ministre du travail et de la sécurité sociale du Guatemala. Cette inégalité se traduit par de fréquentes discriminations à l’encontre des femmes autochtones qui, par conséquent, souffrent du chômage et de ne pas jouir de leurs droits.

Les inégalités que subissent les femmes autochtones se retrouvent aussi dans la violence dont elles sont victimes, ont rappelé les intervenants en abordant le deuxième thème de la discussion.  Plusieurs ont lancé des appels pour que l’on dispose de davantage de données à ce sujet.  Un représentant du Bureau régional du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour l’Amérique latine et les Caraïbes a ainsi jugé impératif d’obtenir plus de données ventilées.  Celles-ci sont d’autant plus importantes en ce qui concerne les femmes autochtones handicapées qui souffrent d’une triple discrimination.  C’est ce qu’a souligné une représentante népalaise du Réseau mondial des personnes autochtones handicapées en demandant des données ventilées sur la nature structurelle de la violence à l’égard de ces personnes.  En outre, un membre du Forum des personnes handicapées du Pacifique a encouragé leur pleine participation aux débats « en tenant compte de leurs us et coutumes ». 

La Directrice exécutive de Laramatak Community Concerns, un groupe qui promeut les droits des communautés pastorales dans le nord et le sud du Kenya, a indiqué avoir été l’une des première femmes autochtones à participer aux travaux de la Commission de la condition de la femme.  Elle a dénoncé le caractère « pernicieux » de la violence à l’égard des femmes autochtones, en ce qu’elle fait partie intégrante des cultures, comme les mariages précoces et les mutilations génitales féminines.

En Argentine, des efforts menés sous l’égide de l’Institut national des affaires autochtones ont permis de faire des personnes autochtones « des sujets de droit » et de réduire les écarts entre les femmes autochtones et non autochtones, notamment en matière de santé, et de lutter contre la violence à leur égard.  Cet institut a vu le jour en 1972, a rappelé son président avant de céder la parole à une femme autochtone qui a parlé de certaines actions menées dans la province de Buenos Aires.

De même, au Mexique, les femmes sont des sujets et non des objets des politiques publiques, a fait valoir la Directrice générale de la Commission nationale pour le développement des peuples autochtones. Une militante Quechua du Pérou a souhaité, dans le même esprit, que la société considère les femmes autochtones comme des sujets de droit et non des objets d’assistance.

Or pour être pleinement « sujets de droits », les femmes doivent avoir accès à l’éducation, ce qui n’est pas encore complètement acquis pour les filles et les femmes autochtones.  « Il est urgent de lever les barrières à l’éducation pour les femmes autochtones », a reconnu une responsable des politiques de l’action extérieure de l’Union européenne en demandant de prendre en compte le rôle de ces femmes dans la transmission intergénérationnelle des langues et de la culture.

Après avoir entendu la Ministre adjointe de la gouvernance coopérative et des affaires traditionnelles de l’Afrique du Sud, les participants ont écouté la représentante de la République du Congo expliquer que la Constitution de 2015 affirme l’égalité de tous citoyens congolais.  Les populations autochtones, qui représentent 1,2% de la population, devraient donc y jouir des mêmes droits.  Mais, a reconnu la représentante, elles rencontrent encore un accès difficile aux services de base.

Passant à la question des opportunités économiques des femmes autochtones, la Directrice de la Division du Proche-Orient, de l’Afrique du Nord et de l’Europe du Fonds international de développement agricole (FIDA) a mis en exergue le rôle du FIDA qui a approuvé en 2015 et 2016 près de 260 millions de dollars d’aide aux peuples autochtones.  Elle a cité des exemples de gestion des terres ancestrales, au Népal, aux Philippines ou en Inde. 

Pourtant, la représentante de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a remarqué que « les femmes autochtones n’ont pas assez de droits économiques et ne contrôlent pas assez les terres et les ressources ».  Elle a ajouté que ces femmes travaillent souvent dans l’économie informelle avec peu d’accès à un travail décent.  Elle a souhaité que ces femmes soient vues comme des agents du changement qui contribuent largement à atteindre les objectifs de développement durable.

« Les femmes autochtones doivent être considérées comme de véritables partenaires du développement pour atteindre les objectifs du Programme 2030 », a confirmé le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Il a souligné le rôle décisif que jouent les femmes autochtones des zones rurales, et ce, depuis des millénaires, car elles sont « garantes des savoirs traditionnels » et apportent une contribution sociale essentielle au bien-être de leur peuple.

Un processus de changement en ce sens a été lancé en Bolivie pour renforcer le rôle de ces femmes aux niveaux politique, universitaire et économique.  « Le Président Morales a rendu aux femmes autochtones leur dignité », s’est félicitée la Ministre des cultures et du tourisme de la Bolivie où les femmes autochtones sont en majorité propriétaires foncières.

De même, au Brésil, où 462 terres autochtones recouvrent plus de 12% de la superficie du pays, la Ministre des politiques pour les femmes a fait part des efforts de son gouvernement pour autonomiser les femmes autochtones.  Elle a indiqué par exemple avoir organisé en décembre dernier, à Belém di Parà, une « Réunion des femmes de l’Amazone » pour élargir le débat et renforcer leur leadership dans le domaine des ressources en eau et forestières. 

Des actions sont également menées au niveau de la société civile, comme en ont témoigné des représentants d’organisations telles qu’« Echo por nosotros » qui a pour but d’intégrer les femmes autochtones dans l’économie en protégeant leur culture ancestrale et le travail artisanal. 

Enfin, le dernier thème, consacré aux effets des changements climatiques sur les femmes autochtones, a été examiné par la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones.  C’est une question épineuse, a-t-elle indiqué, car ces femmes dans leur majorité dépendent des moyens de subsistance traditionnels.  Elles vivent dans les écosystèmes les plus fragiles du monde : l’Arctique, les petits États insulaires en développement, les hauts plateaux montagneux et les zones arides et semi-arides.  Elles souffrent donc de ces effets de façon disproportionnée.  Selon l’experte, il faut que le Fonds vert pour le climat garantisse un accès direct des peuples autochtones aux financements.

Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives: thème de l’évaluation: difficultés rencontrées et résultats obtenus dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement en faveur des femmes et des filles (E/CN.6/2017/4)

Mme LAKSHMI PURI, Sous-Secrétaire générale et Directrice exécutive adjointe d’ONU-Femmes, a présenté le rapport du Secrétaire général qui fait le point des progrès accomplis dans la mise en œuvre des conclusions concertées adoptées à la cinquante-huitième session de la Commission de la condition de la femme (E/CN.6/2017/4).  Elle a rappelé que ces conclusions concertées avaient défini cinq domaines prioritaires.  Le premier effort qui était demandé aux États était d’adopter des lois et de prendre des mesures pour lutter contre la violence faite aux femmes, le harcèlement sexuel et les pratiques nuisibles, ainsi que pour améliorer la condition de la femme au regard du mariage, du divorce, de la citoyenneté et de l’héritage.  Si de nombreux États ont mené des réformes judiciaires pour s’attaquer aux discriminations parfois multiples que subissent les femmes, l’autorité et les ressources nécessaires pour appliquer les lois font souvent défaut, a constaté le rapport.

Dans le deuxième domaine d’action, il était recommandé aux États de faire des questions liées au genre un thème transversal, de façon à instaurer un environnement propice à l’égalité entre les sexes dans tous les domaines.  Certains pays ont, par exemple, nommé des points focaux sur le genre, tandis que d’autres ont donné la priorité aux questions sociales.  Cependant, il a été remarqué que l’impact d’une budgétisation sensible au genre restait limité lorsque les budgets globaux pour les politiques d’égalité et la fourniture de services sociaux étaient insuffisants.

En troisième lieu, les États ont progressé dans la collecte de données relatives à l’égalité entre les sexes.  Ils établissent de plus en plus souvent des rapports basés sur des indicateurs de genre et organisent de nouveaux sondages et études.  En outre, sont développés des systèmes électroniques de données et des logiciels, parallèlement au renforcement des capacités des systèmes nationaux de statistique.  Il n’en reste pas moins des écarts importants selon les pays dans le domaine des statistiques sur le genre, ce qui affectera le suivi de la réalisation des objectifs de développement durable.

Enfin, pour assurer la participation des femmes à tous les niveaux, beaucoup d’États ont pris des mesures favorables à la représentation des femmes dans les parlements et les gouvernements locaux, par le biais de quotas.  De nombreux pays ont également incité les secteurs public et privé à augmenter la présence des femmes à des postes de dirigeants et de cadres.  Certains ont créé des conseils d’égalité des sexes, et d’autres ont développé des stratégies pour élargir les réseaux de femmes.

En conclusion, malgré des avancées appréciées dans de nombreux domaines d’action des conclusions concertées, on se rend compte que les États Membres n’ont pas tous accordé la même attention aux politiques intersectorielles.  Les lacunes se font sentir en particulier dans la prise en compte de la dimension environnementale du développement durable, ainsi que dans l’accès des femmes aux ressources, le travail domestique non rémunéré et la santé sexuelle et reproductive.  Il est donc urgent que les États Membres prennent des mesures, et ce, dans tous les domaines.

Exposés nationaux volontaires, suivis de dialogues interactifs

En début de séance, la Vice-Présidente de la Commission de la condition de la femme, Mme SEJLA DURBUZOVIC (Bosnie-Herzégovine), a précisé que 11 pays au total s’étaient portés volontaires pour faire part de leurs expériences nationales.  Six de ces pays vont présenter leur exposé demain matin, les cinq autres étant programmés pour la présente séance.  Elle a précisé qu’après chaque présentation, deux représentants d’États Membres seraient invités à demander des précisions.

Le premier pays à présenter son expérience a été le Mexique.

Mme LORENA CRUZ, Présidente de l’Institut national des femmes du Mexique, a expliqué que la mise en œuvre des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en faveur des femmes et des filles n’avait pas donné des résultats probants au Mexique, mais que les leçons de ces échecs servaient aujourd’hui dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Désormais, les programmes d’autonomisation des femmes sont mis en œuvre de manière transversale dans les activités de toutes les administrations mexicaines, avec l’appui de partenaires internationaux, a-t-elle indiqué.  Elle a également relevé que la mise en œuvre des OMD avait permis de renforcer les institutions nationales, notamment dans le domaine des statistiques, ainsi qu’en matière de suivi-évaluation et de reddition des comptes.

Un membre de l’organisation non gouvernementale (ONG) mexicaine Simone de Beauvoir,  Mme CHRISTIANE MENDOZA, a ensuite salué la baisse de la mortalité maternelle au Mexique, notamment grâce à un partenariat entre le Gouvernement et la société civile.  Elle a indiqué que la mise en œuvre des OMD avait renforcé la spécialisation des organisations de la société civile au Mexique, avant de plaider pour l’implication des toutes les ONG du pays dans la quête de la parité et de l’autonomisation de la femme et de la fille.

Après ces deux témoignages, la représentante de l’Allemagne a demandé comment la parité était respectée dans la mise en œuvre des objectifs du développement durable au Mexique.  La Présidente de l’Institut national des femmes du Mexique l’a assurée que la coordination des mesures et actions en matière de parité se faisait au plus haut niveau, dans le bureau même du Président de la République.  Ensuite, les directives et les budgets y relatifs sont répercutés dans les 32 États du pays.  

Répondant ensuite à une question de la représentante de l’Argentine sur ce qui est fait en termes d’autonomisation économique des femmes, l’experte mexicaine a expliqué que son gouvernement avait pris des mesures afin de favoriser l’accès des Mexicaines à des postes de responsabilité.  En outre, il y a davantage de crèches en milieu professionnel et les femmes entrepreneuses ont accès à des prêts à des taux réduits.

La Commission a ensuite invité la délégation du Libéria à présenter son exposé volontaire.

Mme JULIA DUNCAN-CASSELL, Ministre du genre, de l’enfance et de la protection sociale du Libéria, a relevé que la Constitution du pays proscrit toute discrimination contre les femmes, même si certaines législations en vigueur dans le pays rament à contre-courant.  Le Gouvernement a mis en place un certain nombre de projets pour favoriser l’autonomisation des Libériennes, a-t-elle dit.  Des campagnes contre le mariage précoce ont été engagées, des incitations financières pour renforcer l’entrepreneuriat féminin ont été lancées, tandis que le Gouvernement lutte également contre le fléau des violences ciblant les femmes.  La Ministre a ainsi présenté à l’auditoire une jeune dame qui a été défigurée par de l’acide lancé à son visage par son ex-époux.  Un documentaire a même été produit sur l’histoire de cette personne qui a malheureusement perdu l’usage d’un œil.

Mme Duncan-Cassell a également parlé de programmes de renforcement de capacités des Libériennes dans le cadre des programmes de consolidation de la paix. En matière de collecte de données sexospécifiques, elle a déclaré que des agents de l’État étaient déployés sur le terrain à cette fin, grâce au soutien financier de la Banque mondiale et de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).  Le système statistique du pays mérite encore d’être renforcé, a-t-elle reconnu.  Par ailleurs, un projet de loi sur la discrimination positive en faveur des femmes est toujours en attente au Parlement.  Elle a terminé son exposé en rappelant les affres que le pays a connus du fait de l’épidémie à virus Ebola.

Réagissant à cet exposé, le délégué de la Norvège a voulu connaître les mesures précises ayant été prises en faveur de la scolarisation des jeunes filles au Libéria.  La Ministre a indiqué que, grâce au concours de la coopération internationale, des jeunes filles sont extraites de leur milieu défavorisé et placées en pension.  Des programmes de transferts de liquidités permettent aussi de payer les frais de scolarité des filles issues de familles défavorisées.

Comment les autorités libériennes font-elles pour impliquer les autorités traditionnelles dans les efforts visant à l’autonomisation de la femme libérienne, a ensuite demandé la représentante du Canada.  Les dirigeants traditionnels sont inclus dans nos programmes, mais les réformes du droit coutumier vont faire l’objet d’un référendum afin de voir ce qu’il faut retenir des traditions, a répondu Mme Duncan-Cassell.

Pour ce qui concerne l’Espagne, Mme MERCEDES ALICIA FERNANDEZ, Sous-Directrice générale à la Sous-Direction des relations internationales au Ministère de la santé, a mentionné les mécanismes institutionnels mis en place pour garantir l’autonomisation des femmes et filles.  Une autre représentant de l’Espagne, Mme GONZALEZ, a continué l’exposé en relevant que les programmes de la coopération internationale de son pays avaient toujours accordé une place importante à la parité des sexes et à l’autonomisation des femmes et des filles, que ce soit dans le cadre des OMD que, à présent, avec les objectifs de développement durable. 

Mme Fernandez a rappelé que son pays était le premier bailleur de fonds qui avait créé un cadre de partenariat avec ONU-Femmes.  L’Espagne a adopté une loi sur la violence à l’encontre des femmes et une autre sur l’égalité des sexes qui servent de base à la mise en œuvre de nombreux programmes gouvernementaux, a-t-elle indiqué.  La violence à l’égard des femmes n’est donc plus une affaire privée et le fléau est désormais débattu sur la place publique par le biais de campagnes médiatiques.  En outre, les statistiques publiques sont ventilées par sexe en vue de promouvoir la parité.

À la suite de ces exposés, la déléguée du Portugal a demandé comment les autorités se coordonnaient pour intégrer la question de la parité.  Mme Fernandez, du Ministère de la santé de l’Espagne, a expliqué qu’au niveau central, un cinquième du budget du pays est consacré à la parité des sexes.  Elle a aussi assuré que les minorités et les femmes vulnérables, telles que les autochtones, étaient impliquées dans la vie publique.

Répondant ensuite à la déléguée de l’Uruguay qui a voulu connaître les mesures prises pour modifier la culture de violence à l’égard des femmes, Mme Fernandez a expliqué que le Gouvernement espagnol luttait contre « la culture du silence » en « envoyant des messages clairs aux auteurs ».  Il reste en effet 20% de femmes espagnoles qui sont victimes de violence, a-t-elle reconnu.

Pour présenter les progrès accomplis par la Slovaquie, Mme LUBICA ROZBOROVA a indiqué que son pays avait adopté une loi spécifique contre les discriminations de tous genres.  Les citoyens ont la possibilité de saisir la justice s’ils estiment être discriminés, a-t-elle ajouté, avec, si besoin, une assistance juridique fournie par le Centre national slovaque des droits de l’homme.  Elle a ensuite présenté un certain nombre de mesures visant à assurer l’autonomisation économique des femmes, notamment la protection des droits des mères sur le lieu de travail, ou encore des initiatives pour renforcer la possibilité de concilier vie professionnelle et vie familiale. 

Par ailleurs, le Gouvernement slovaque a mis en place une stratégie nationale sur l’intégration des Roms à l’horizon 2020, qui tient notamment compte de l’exigence de parité des sexes.  Des mesures sont aussi prises à l’échelle nationale pour favoriser l’implication des femmes dans les domaines des sciences et des technologies.

Après cette présentation, le délégué de la Pologne a demandé comment le Gouvernement slovaque s’assure-t-il que le secteur privé intègre les préceptes de l’autonomisation économique des femmes.  Justement, a expliqué Mme Rozborova (Slovaquie), un projet sera lancé la semaine prochaine pour renforcer les services de crèches en milieu professionnel.  Des contrats à temps partiel sont offerts aux femmes quand elles le souhaitent, tandis que des mesures ont été prises pour inciter le secteur privé à proposer l’option du télé-travail et du travail à domicile, grâce aux subventions du Gouvernement.

Qu’en est-il des violences faites aux femmes slovaques, a demandé pour sa part la représentante de l’Albanie.  Dans ce domaine, a indiqué Mme Rozborova, un centre national de coordination assure la supervision et la mise en œuvre du système de prévention des violences faites aux femmes.  Les auteurs de tels actes ignobles sont sujets à une procédure pénale spécifique avec notamment une mesure d’interdiction d’approcher les victimes.

Enfin, à son tour, le Vice-Ministre de la santé de la Tanzanie, M. HAMISI KIGWANGALLA, a expliqué que la lutte contre les discriminations à l’encontre des femmes était inscrite dans la Constitution tanzanienne.  La loi de 2004 sur le travail prévoit en outre que les employeurs doivent se garder de tout type de discrimination, y compris à l’encontre des femmes.  Il a indiqué que les autorités s’attèlent à lutter contre les violences faites aux femmes.  Elles ont placé l’autonomisation des femmes et filles au cœur des politiques nationales, dans une perspective transversale.  C’est au regard de ces efforts, que l’ancien Chef de l’État, M. Jakaya Mrisho Kikwete, a été nommé au sein du Groupe de haut niveau du Secrétaire général pour l’autonomisation économique des femmes.

Le Vice-Ministre en a profité pour demander à la communauté internationale d’offrir un soutien aux pays en développement pour que ces derniers puissent améliorer la collecte de données sexospécifiques et établir des rapports nationaux sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable, notamment l’objectif 5 portant sur l’égalité des sexes. 

Après cet exposé, la déléguée de la Namibie a voulu savoir d’où viennent les fonds que la Tanzanie consacre à l’autonomisation des femmes et filles. M. Kigwangalla a expliqué que les ressources sont pour la plupart locales, notant que 5% des recettes de toutes les municipalités est dévolu au financement de projets d’autonomisation des femmes.

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