8392e séance – matin
CS/13567

Bosnie-Herzégovine: le Conseil de sécurité autorise la reconduction pour un an de l’opération EUFOR ALTHEA et demande aux parties de hâter le rythme des réformes

Le Conseil de sécurité a, ce matin, autorisé les États Membres « à créer pour une nouvelle période de 12 mois » la force multinationale de stabilisation de l’Union européenne (EUFOR ALTHEA), reconduisant ainsi le mandat d’une opération qui joue, depuis 2004, « le rôle principal dans la stabilisation de la paix s’agissant des aspects militaires de l’Accord de paix » en Bosnie-Herzégovine, pays où viennent de se tenir d’importantes élections générales, dont les résultats définitifs seront annoncés aujourd’hui même.

Par la résolution 2443 (2018), adoptée à l’unanimité de ses 15 membres et saluée par le représentant de l’UE, le Conseil exhorte en outre les parties à l’Accord de paix à accélérer la mise en œuvre de réformes globales, « au bénéfice de tous les citoyens », et conformément à la perspective européenne en faveur de laquelle le pays s’est engagé.  À cet égard, les parties sont invitées à « s’abstenir de toute politique, action ou discours non constructif et semant la division ».

Or, la période préélectorale –les scrutins ont eu lieu le 7 octobre– a donné lieu à une escalade inquiétante de la « rhétorique clivante », avec des « propos haineux et des tentatives d’intimidation d’électeurs », a observé le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine.  M. Valentin Inzko a ajouté que la période postélectorale avait été marquée par des accusations d’irrégularités, la confiance de l’opinion publique dans l’intégrité du système électoral paraissant être « au plus bas ».

Si le processus de formation des parlements et du gouvernement débute tout juste, les futurs membres de la Présidence sont déjà connus: MM. Šefik Džaferović (SDA), Željko Komšić (DF) et Milorad Dodik (SNSD).  Selon la délégation de la Bosnie-Herzégovine, leurs prédécesseurs, toujours en poste jusqu’au 20 novembre, ne sont pas parvenus à s’entendre aujourd’hui sur le contenu de la déclaration devant le Conseil de sécurité.  « J’espère sincèrement que les nouveaux membres élus se mettront d’accord sur un modus operandi qui leur permettra de m’épargner, à l’avenir, une situation embarrassante comme celle-ci », s’est-il justifié.

Il se trouve cependant que la victoire de Željko Komšić sur le membre croate sortant Dragan Čović a conduit un grand nombre de responsables politiques à déclarer l’élection illégitime, « voire illégale ou anti-Dayton », le représentant de la Croatie estimant aujourd’hui que le principe d’égalité entre les trois peuples constitutifs du pays n’avait pas été respecté.  De son côté, celle de Milorad Dodik a également été contestée, dans la mesure où cet homme politique serbe a par le passé tenu des propos contre l’État de la Bosnie-Herzégovine, et continue de multiplier les provocations depuis son élection.

Alors que le pays est en pleine transition électorale, la formation des parlements et du gouvernement pourrait s’avérer plus compliquée que prévue.  « Le fait que les parties n’aient pas réussi à s’entendre sur la réforme électorale dans le sillage de la décision rendue en l’affaire Ljubiċ par la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine concernant l’élection indirecte des délégués à la Chambre des peuples de la Fédération pourrait compliquer encore la mise en place des autorités », prévient le Haut-Représentant dans le rapport qu’il était venu présenter au Conseil.

Le représentant de la Serbie a assuré qu’il souhaitait se distancier des « messages perturbateurs circonstanciés qui appartiennent au passé », ayant plutôt en vue l’amélioration du niveau de vie des populations des Balkans, avec la poursuite des efforts pour instaurer la stabilité, le développement et les relations de bon voisinage dans toute la région.

Après avoir jugé « politisée » la résolution adoptée en début de séance, la Fédération de Russie a accusé le Haut-Représentant d’avoir rendu « inéluctable l’incapacité des représentants politiques de Bosnie-Herzégovine » et d’avoir même, dans le district de Brčko, « attisé les tensions » et « entravé » le dialogue intrabosnien.  La délégation a reproché à M. Inzko d’avoir, depuis 10 ans, utilisé à mauvais escient ses ressources pour promouvoir les intérêts de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et de l’Union européenne au lieu de s’occuper à la mise en œuvre des questions civiles pour la paix.

« Le protectorat étranger a vécu », a-t-il tranché, avant de s’opposer catégoriquement à une intégration de la Bosnie-Herzégovine à l’OTAN.

Pour réaliser la perspective européenne dans laquelle elle se projette, la Bosnie-Herzégovine devra mettre en œuvre les réformes attendues d’elle, notamment dans les domaines de l’état de droit, des droits de l’homme et du développement économique et social, a fait observer la France.  D’autres membres du Conseil, comme la Suède, ont cité parmi les priorités la lutte contre la criminalité transnationale organisée et la question des migrations.  La hausse « spectaculaire » du nombre de migrants, près de 18 000 en octobre, alors qu’ils n’étaient que 758 en 2017, pourrait provoquer une crise à la fois humanitaire, sécuritaire et politique, a mis en garde le Haut-Représentant.

La Côte d’Ivoire a pour sa part salué, à la suite de M. Inzko, l’adoption des amendements requis depuis longtemps au Code de procédure pénale de la Bosnie-Herzégovine, en vue de combattre efficacement la corruption et la criminalité transnationale organisée « qui sont les principaux freins au décollage économique et social du pays ».  Pour le Haut-Représentant, cette proposition de compromis adoptée par les deux chambres, « après des mois de polémiques », constitue une « percée ».

LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE (S/2018/974)

Texte du projet de résolution (S/2018/989)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures relatives aux conflits dans l’ex-Yougoslavie et les déclarations de son président sur la question, y compris ses résolutions 1031 (1995) du 15 décembre 1995, 1088 (1996) du 12 décembre 1996, 1423 (2002) du 12 juillet 2002, 1491 (2003) du 11 juillet 2003, 1551 (2004) du 9 juillet 2004, 1575 (2004) du 22 novembre 2004, 1639 (2005) du 21 novembre 2005, 1722 (2006) du 21 novembre 2006, 1764 (2007) du 29 juin 2007, 1785 (2007) du 21 novembre 2007, 1845 (2008) du 20 novembre 2008, 1869 (2009) du 25 mars 2009, 1895 (2009) du 18 novembre 2009, 1948 (2010) du 18 novembre 2010, 2019 (2011) du 16 novembre 2011, 2074 (2012) du 14 novembre 2012, 2123 (2013) du 12 novembre 2013, 2183 (2014) du 11 novembre 2014, 2247 (2015) du 10 novembre 2015, 2315 (2016) du 8 novembre 2016 et 2384 (2017) du 7 novembre 2017,

Réaffirmant son attachement à un règlement politique des conflits dans l’ex-Yougoslavie qui sauvegarderait la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les États à l’intérieur de leurs frontières internationalement reconnues,

Se déclarant résolu à appuyer l’application de l’Accord-cadre général pour la paix en Bosnie-Herzégovine et de ses annexes (appelés collectivement Accord de paix, S/1995/999, annexe), ainsi que des décisions correspondantes du Conseil de mise en œuvre de la paix,

Prenant acte des rapports du Haut-Représentant, dont le plus récent date du 17 octobre 2018,

Encourageant les autorités de la Bosnie-Herzégovine à intensifier, avec l’aide de la communauté internationale, les efforts qu’elles accomplissent en vue d’éliminer les munitions excédentaires,

Exprimant ses remerciements au commandant et au personnel de la Force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA) ainsi qu’au personnel des autres organisations et organismes internationaux présents en Bosnie-Herzégovine, pour leur contribution à la mise en œuvre de l’Accord de paix,

Rappelant tous les accords sur le statut des forces visés à l’appendice B de l’annexe 1-A de l’Accord de paix et rappelant aux parties l’obligation qui leur est faite de continuer d’en appliquer les dispositions,

Rappelant également les dispositions de sa résolution 1551 (2004) concernant l’application à titre provisoire des accords sur le statut des forces figurant à l’appendice B de l’annexe 1-A de l’Accord de paix,

Se félicitant de la présence ininterrompue de l’EUFOR ALTHEA et saluant la volonté de l’Union européenne de continuer à ce stade de jouer un rôle militaire exécutif afin d’aider les autorités de la Bosnie-Herzégovine à maintenir un climat de sûreté et de sécurité, ainsi que sa décision de recentrer l’opération sur son mandat principal et de faire en sorte que celle-ci fasse l’objet d’une évaluation régulière, en fonction notamment de la situation sur le terrain,

Demandant une nouvelle fois aux autorités compétentes de la Bosnie-Herzégovine de prendre les mesures nécessaires pour mener à bien le programme « 5 plus 2 », qui demeure nécessaire pour la fermeture du Bureau du Haut-Représentant, comme l’a confirmé le Comité directeur du Conseil de mise en œuvre de la paix dans ses communiqués,

Réaffirmant les dispositions relatives au Haut-Représentant énoncées dans ses résolutions antérieures et réaffirmant également l’article V de l’annexe 10 de l’Accord de paix en ce qui concerne le pouvoir du Haut-Représentant, sur le théâtre des opérations, d’interpréter en dernier ressort la mise à effet du volet civil de cet accord,

Conscient de l’importance de la transition de la Bosnie-Herzégovine à un pays européen opérationnel, soucieux de réforme, moderne et démocratique,

Prenant note de l’Accord de paix et de l’attachement des dirigeants de la Bosnie-Herzégovine en faveur d’une perspective européenne, qui s’est notamment manifesté par la présentation de la demande d’adhésion à l’Union européenne faite par la Bosnie-Herzégovine en février 2016 et par le travail accompli pour répondre au questionnaire de l’Opinion de la Commission européenne par le biais du mécanisme de coordination sur les questions de l’Union européenne, encourageant la Bosnie-Herzégovine à répondre aux questions de suivi et rappelant que cet attachement doit se traduire d’urgence par des réformes globales et concrètes,

Observant avec préoccupation la persistance de politiques, d’actions et de discours non constructifs et semant la division en Bosnie-Herzégovine, et enjoignant de nouveau aux dirigeants politiques de promouvoir la réconciliation et la compréhension mutuelle,

Constatant avec satisfaction que l’exécution du programme de réforme a initialement fourni les premières mesures d’ajustement structurel à l’économie du pays, mais observant que son rythme s’est ralenti et soulignant qu’il est urgent d’accélérer la mise à effet de réformes globales, de manière inclusive et au bénéfice de tous les citoyens,

Soulignant qu’il faut que la Bosnie-Herzégovine redouble d’efforts en ce qui concerne le fonctionnement et l’indépendance de la magistrature, la répression de la corruption et de la criminalité organisée ainsi que la lutte contre le terrorisme et la prévention de la radicalisation,

Priant instamment toutes les parties concernées à s’employer de façon constructive à donner suite aux élections et soulignant qu’il importe de procéder sans tarder à la mise en place du gouvernement et de l’administration à tous les niveaux, dans l’intérêt de tous les citoyens,

Soulignant qu’il est urgent de répondre aux recommandations laissées sans suite du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) visant à améliorer le cadre électoral, ainsi qu’aux arrêts de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine et de la Cour européenne des droits de l’homme, soulignant que les réformes électorales devraient être abordées dans un esprit de consensus et de dialogue et faire avancer le pays vers des normes démocratiques modernes, et constatant avec regret que les réformes nécessaires n’ont pas été apportées au droit électoral préalablement à la tenue des élections du 7 octobre 2018,

Encourageant les parties à mettre en œuvre le Plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité de la Bosnie-Herzégovine de manière inclusive et attendant avec intérêt la poursuite de son application,

Prenant note également de l’examen stratégique prévu pour le début de 2019,

Constatant que la situation est restée calme et stable sur le plan de la sécurité et notant que les autorités de la Bosnie-Herzégovine se sont jusqu’ici montrées capables de faire face aux menaces qui pèsent sur la sûreté et la sécurité,

Constatant également que la situation dans la région continue de menacer la paix et la sécurité internationales,

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,

1.    Souligne de nouveau que c’est à l’ensemble des autorités de la Bosnie-Herzégovine qu’il incombe au premier chef de continuer à assurer l’application efficace de l’Accord de paix, constate que la communauté internationale et les principaux donateurs restent disposés à les y aider et leur demande de coopérer pleinement avec le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux;

2.    Se félicite de l’intention manifestée par l’Union européenne de poursuivre son opération militaire (EUFOR ALTHEA) en Bosnie-Herzégovine après novembre 2018;

3.    Autorise les États Membres, agissant par l’intermédiaire de l’Union européenne ou en coopération avec elle, à créer pour une nouvelle période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution une force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA) succédant juridiquement à la SFOR avec une structure de commandement et de direction des opérations unifiée, qui remplira ses missions liées à la mise en œuvre des dispositions des annexes 1-A et 2 de l’Accord de paix en coopération avec le quartier général de l’OTAN sur place, conformément aux arrangements qui ont été conclus entre l’OTAN et l’Union européenne et qui lui ont été communiqués par ces deux institutions dans leurs lettres du 19 novembre 2004, par lesquelles elles conviennent que l’EUFOR ALTHEA jouera le rôle principal dans la stabilisation de la paix s’agissant des aspects militaires de l’Accord de paix;

4.    Décide de renouveler l’autorisation qu’il a accordée au paragraphe 11 de sa résolution 2183 (2014) pour une période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution;

5.    Autorise les États Membres à prendre, en vertu des paragraphes 3 et 4 ci-dessus, toutes les mesures nécessaires pour faire appliquer et respecter les annexes 1‑A et 2 de l’Accord de paix, souligne que les parties continuent de répondre à égalité de l’observation des dispositions de ces annexes et qu’elles encourent à égalité les mesures coercitives que l’EUFOR ALTHEA et la présence de l’OTAN pourraient juger nécessaires pour assurer l’application des annexes en question et leur propre protection;

6.    Autorise également les États Membres à prendre, à la demande de l’EUFOR ALTHEA ou du quartier général de l’OTAN, toute mesure nécessaire pour défendre l’EUFOR ALTHEA ou la présence de l’OTAN et pour aider ces deux entités à remplir leur mission, et reconnaît à l’une comme à l’autre le droit de prendre toute mesure de protection nécessaire en cas d’attaque ou de menace;

7.    Autorise en outre les États Membres, agissant en vertu des paragraphes 3 et 4 ci-dessus et conformément à l’annexe 1-A de l’Accord de paix, à prendre toute mesure nécessaire afin de faire respecter les règles de fond et de procédure organisant la maîtrise de l’espace aérien de la Bosnie-Herzégovine pour l’aviation civile et militaire;

8.    Exhorte les parties à entreprendre de manière constructive la mise en place du gouvernement et de l’administration à tous les niveaux et à accélérer la mise en œuvre de réformes globales, de manière inclusive, au bénéfice de tous les citoyens et conformément à la perspective européenne en faveur de laquelle le pays s’est engagé et, à cet égard, les invite à s’abstenir de toute politique, de toute action ou de tout discours non constructif et semant la division;

9.    Demande instamment aux parties, conformément à l’Accord de paix, de respecter leur engagement de coopérer pleinement avec toutes les institutions participant à la mise en œuvre des mesures de paix établies, ainsi qu’il est prévu dans l’Accord de paix, notamment l’annexe 4;

10.   Réaffirme que, selon l’Accord de paix, la Bosnie-Herzégovine se compose de deux entités, dont l’existence est reconnue juridiquement par sa Constitution, et réaffirme également que toute modification de celle-ci doit être effectuée conformément à la procédure qui y est prévue;

11.   Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

M. VALENTIN INZKO, Bureau du Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, a estimé que l’évènement le plus significatif des six derniers mois dans le pays avait été la tenue des septièmes élections générales, le 7 octobre.  Si les observateurs internationaux ont qualifié les scrutins de « véritablement concurrentiels », les mois qui ont précédé ont donné lieu à une escalade inquiétante de la rhétorique clivante, avec des propos haineux et des tentatives d’intimidation des électeurs.  De manière regrettable, les principaux partis politiques ont accordé peu d’attention aux questions qui revêtent une importance particulière aux yeux de l’opinion publique, telles que l’état de droit, la corruption et le développement économique.  « De plus, la période postélectorale a été marquée par des accusations d’irrégularités, la confiance de l’opinion publique dans l’intégrité du système électoral paraissant être au plus bas », a noté le Haut-Représentant, pour qui son rétablissement est une priorité. 

L’annonce des résultats définitifs est attendue pour aujourd’hui, après quoi débutera la période de la formation des parlements et du Gouvernement, a-t-il annoncé.  Dans l’ensemble, les partis politiques alignés sur des positions ethniques semblent avoir remporté le soutien le plus important au sein des parlements, mais certaines formations politiques multiethniques paraissent avoir amélioré leurs résultats de manière significative depuis la dernière élection en date.  Dans la mesure où aucun parti n’a obtenu de majorité claire, il est encore trop tôt pour spéculer et déterminer quelles coalitions seront formées, a analysé M. Inzko.

« J’ai déjà informé le Conseil de sécurité de la possibilité de retards en raison de l’échec des parties à adopter une réforme électorale encadrant les élections indirectes à l’une des Chambres du Parlement de la Fédération », a indiqué le Haut-Représentant.  Et bien que des discussions aient eu lieu pour savoir si cette question serait prise en charge par la Commission électorale centrale de Bosnie-Herzégovine, le chef du principal parti croate a déclaré publiquement qu’il n’autoriserait pas la formation d’autorités tant que la loi électorale n’aurait pas été amendée afin de mettre en œuvre la décision de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine dans « l’affaire Ljubić », a-t-il précisé.

Si le processus de formation des parlements et des gouvernements débute tout juste, les futurs membres de la Présidence sont déjà connus: MM. Šefik Džaferović (SDA), Željko Komšić (DF) et Milorad Dodik (SNSD).  Or, la victoire de M. Komšić sur le membre croate sortant Dragan Čović a conduit un grand nombre de responsables politiques à déclarer l’élection illégitime, « voire illégale ou anti-Dayton », en dépit du fait qu’elle a été conduite selon les mêmes règles que celles qui régissaient la précédente élection, y compris la propre élection de M. Covic en 2014.  En outre, l’élection de M. Dodik en tant que membre serbe de la Présidence a été contestée, dans la mesure où celui-ci a par le passé tenu des propos contre l’État de la Bosnie-Herzégovine, et continue de multiplier les provocations depuis son élection.

En dépit d’un environnement politique difficile, l’intégration au sein de l’Union européenne (UE) demeure un des points positifs du paysage politique national, a estimé M. Inzko, en soulignant que les autorités de la Bosnie-Herzégovine travaillent désormais sur les réponses à apporter aux 650 questions de suivi complémentaires adressées en juin par l’Union européenne.  Mais de sérieuses déficiences demeurent dans le domaine de l’état de droit, a observé le Haut-Représentant.  Cette détérioration est reflétée par le fait que les autorités à tous les niveaux continuent d’ignorer ou de rejeter les décisions contraignantes du pouvoir judiciaire, comme en témoigne notamment l’incapacité des partis basés dans la Fédération à s’employer véritablement à rechercher un accord politique pour résoudre les problèmes découlant de la décision de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine en « l’affaire Ljubić ». 

Par ailleurs, il n’y a pas eu d’élections locales dans la ville de Mostar depuis 2008 en raison d’une autre décision restée sans effet de la Cour constitutionnelle, a constaté à regret le Haut-Représentant.  Il a également attiré l’attention sur le fait que les autorités n’exécutent toujours pas les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme en l’affaire « Sejdić et Finci » et dans les affaires connexes.  En effet, les autorités maintiennent en vigueur des dispositions discriminatoires, qui violent le droit fondamental de certaines catégories de citoyens de postuler à des fonctions publiques.  Enfin, plusieurs cantons de la Fédération n’ont pas encore modifié leur constitution, alors qu’ils en ont l’obligation pour l’harmonisation avec la Constitution de l’entité et pour assurer la pleine égalité des Serbes en tant que peuple constitutif: c’est une situation « inacceptable » selon le Haut-Représentant. 

Outre les élections, une des questions politiques les plus sensibles au cours des six derniers mois en Bosnie-Herzégovine a été la hausse spectaculaire du nombre de migrants, qui ont été près de 18 000 en octobre, contre 758 en 2017, et la réponse des autorités, a souligné le Haut-Représentant.  Compte tenu de la structure constitutionnelle complexe de la Bosnie-Herzégovine et des tensions politiques internes, il faut être conscient que cette situation pourrait dégénérer en crise humanitaire, sécuritaire et politique, a-t-il mis en garde.  En conclusion, le Haut-Représentant a émis quelques recommandations que les autorités de la Bosnie-Herzégovine seraient avisées de suivre selon lui.  Tout d’abord, des mesures doivent être prises pour renforcer l’état de droit.  Ensuite, les institutions étatiques ont besoin d’être soutenues dans leur fonctionnalité et leur indépendance.  Enfin, le développement économique doit être relancé.  Ceux qui considèrent que l’intégration européenne est leur objectif doivent faire preuve d’esprit de compromis et hâter le rythme des réformes, a exhorté M. Inzko. 

Avant toute déclaration, M. VASSILY A.  NEBENZIA (Fédération de Russie) a expliqué son vote.  Il s’est dit « très peu satisfait » des méthodes de travail suivies cette année pour adopter le projet de résolution.  Il a qualifié le texte de « politisé » et comparé cette expérience à celle de 2014, quand la Russie s’était abstenue pour les mêmes raisons.  « Les auteurs ont imposé des démarches politisées », a insisté le représentant, leur reprochant d’entraîner une crise de façon artificielle et de s’écarter du « bon sens ».  La tendance est préoccupante, a-t-il souligné en pointant du doigt plusieurs partenaires occidentaux qui ont décidé au cours de pourparlers d’adopter des « démarches douteuses ».  Aucun document du Conseil de sécurité ne devrait définir les priorités intérieures des États Membres des Nations Unies, et la Bosnie-Herzégovine ne fait pas exception, a-t-il martelé.  « Évitons les formulations pouvant être interprétées comme un cheminement non consensuel vers l’Union européenne », a-t-il conclu. 

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est dit attachée au rôle du Haut-Représentant et de son Bureau: le Haut-Représentant demeure l’autorité civile désignée pour mettre en œuvre l’Accord de paix.  Se félicitant du vote à l’unanimité d’aujourd’hui, elle a insisté sur le rôle essentiel du Bureau du Haut-Représentant pour maintenir la paix et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, pour qu’elle devienne un État européen moderne.  La déléguée a dit avoir ressenti de la « tristesse » à la lecture du rapport du Haut-Représentant « parce que certaines questions ne sont pas réglées et qu’elles se répètent ».  Constatant que la situation demeurait fragile, elle a qualifié le sort du pays de très important pour l’avenir de l’Europe.  « C’est notre crise régionale » a-t-elle appuyé: l’UE y a investi beaucoup de temps, d’argent et d’efforts. 

Le Royaume-Uni, a poursuivi la représentante, aurait préféré que la Russie, comme membre du Comité de pilotage, consacre ses efforts à faire progresser la Bosnie-Herzégovine et l’aide à se moderniser.  Depuis l’Accords de paix de Dayton, son chemin est orienté vers l’Europe, a souligné la représentante.  Concernant les élections, elle a loué le calme du processus, mais s’est dit préoccupée par les irrégularités, les tensions ethniques et la rhétorique politique nationaliste « dangereuse » qui « divise les populations ».  « La Bosnie-Herzégovine n’a pas besoin d’une vision rétrograde, mais d’un avenir de progrès et d’un rapprochement de l’UE et de l’OTAN, gage de stabilité pour la région », a-t-elle affirmé. 

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a salué l’adoption par l’Assemblée des amendements au Code de procédure criminel en vue de combattre efficacement la corruption et le crime organisé qui sont les principaux freins au décollage économique et social de la Bosnie-Herzégovine.  Cependant, cette dynamique positive ne doit pas faire perdre de vue les dysfonctionnements administratifs et institutionnels notamment lors des élections générales du 7 octobre 2018, a constaté le représentant qui a encouragé les autorités bosniennes à remédier aux lacunes observées dans l’organisation de ces élections et invité toutes les parties prenantes à formuler leurs griefs dans le cadre des procédures légales existantes. 

La Côte d’Ivoire, a-t-il ajouté, est préoccupée par la persistance des tensions ethniques.  Il a appelé tous les groupements politiques et l’ensemble des populations bosniennes à conjuguer leurs efforts en vue de préserver l’intégrité territoriale et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est félicité des progrès accomplis par la Bosnie-Herzégovine dans le domaine des réformes économiques, tout en se disant préoccupé de la décision de l’Assemblée nationale de la Republika Srpska d’abroger son rapport de 2004 sur Srebrenica, dans lequel elle avait officiellement reconnu l’implication des forces militaires et de police de la République dans les événements de juillet 1995 à Srebrenica, ce qui témoigne de la détérioration du processus de réconciliation ces dernières années.  Le représentant a cependant pris acte du déroulement sans heurts des élections générales, tout en regrettant que les recommandations visant à améliorer l’intégrité du système électoral n’aient pas été prises en compte.  Plaidant pour le plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, le représentant s’est félicité de l’adoption de la résolution prorogeant le mandat de l’EUFOR ALTHEA, en espérant que cette mission continuerait de faire son travail important et d’aider le pays dans son processus de réconciliation.

M. FRANCISCO TENYA (Pérou) s’est félicité de la bonne tenue des élections générales du 7 octobre mais a regretté que la loi électorale n’ait pu être amendée afin de permettre un processus démocratique plus significatif et que la confrontation ethnique ait prévalu sur les objectifs constructifs dont le pays a besoin pour consolider une paix durable.  Face à cette situation, la délégation a mis en avant la nécessité de renforcer l’état de droit, de consolider des institutions inclusives et de promouvoir le dialogue politique et la réconciliation.  Elle a salué les efforts visant à l’intégration européenne et au respect des jugements de la Cour constitutionnelle, tout en soulignant la nécessité urgente d’harmoniser les législations locales. 

La délégation s’est également félicitée des amendements au Code de procédure pénale visant à lutter plus efficacement contre le crime organisé et la corruption et a souligné l’importance de sauvegarder l’autonomie des différentes instances du système d’administration de la justice ainsi que de respecter le rôle de la presse et des organisations de la société civile pour garantir l’état de droit dans une société démocratique. 

Critiquant la rhétorique de haine et la glorification des criminels de guerre, la délégation a estimé que le rejet par l’Assemblée de la Republika Srpska du rapport sur le génocide de Srebrenica relève d’un négationnisme qu’il faut condamner.

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) a renouvelé son soutien en faveur du Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, en particulier au lendemain des élections, alors que le pays est toujours confronté à une rhétorique de division.  Il a soutenu l’EUFOR ALTHEA, qui protège l’intégrité du territoire et la souveraineté du pays, et s’est inquiété des forces cherchant à déstabiliser et à saper les institutions étatiques de la Bosnie-Herzégovine.  Il a répété que la position américaine n’avait pas changé: « les dirigeants de Bosnie-Herzégovine doivent prendre les décisions nécessaires pour l’intégration euro-atlantique du pays »; ils doivent lutter en faveur de l’état de droit, combattre la corruption, accroître les opportunités économiques, protéger les institutions et, de toute autre manière, répondre aux besoins de tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine, sans distinction d’appartenance ethnique ou de religion. 

« Il y a de quoi être optimiste », a poursuivi le représentant en voyant l’avenir de la Bosnie-Herzégovine dans le poète de 23 ans qui a organisé un concours national de poésie pour lutter contre le discours de haine.  Également, « nous voyons l’avenir du pays dans les travaux du Conseil interreligieux, qui vient de fêter ses 20 ans d’existence, et consacre son temps à promouvoir le dialogue interconfessionnel et à visiter les sites d’attaques contre des institutions religieuses, notamment quatre visites au cours de l’année écoulée ».  À cela, le représentant a ajouté les étudiants de Jajce, d’origine ethnique diverse, qui ont protesté contre la ségrégation accrue des écoles à l’égard des élèves musulmans.  Les États-Unis, a-t-il conclu, attendent avec impatience le moment où la Bosnie-Herzégovine satisfera pleinement aux objectifs et aux conditions de la fermeture du Bureau du Haut Représentant -« les conditions 5+2 »- établis par le Conseil de la mise en œuvre de la paix.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a dit que la prolongation aujourd’hui du mandat de l’EUFOR ALTHEA de 12 mois était une étape nécessaire pour apporter la paix et la durabilité dans la région.  Les membres du Conseil de sécurité ont déjà souligné en mai et les réussites et leurs préoccupations concernant les nombreux problèmes en Bosnie-Herzégovine.  Malheureusement, ces problèmes attendent toujours d’être résolus, a ajouté le représentant.  C’est pourquoi, il est nécessaire d’accélérer le processus de formation du Parlement conformément aux décisions de la Cour constitutionnelle du pays et d’un gouvernement fonctionnel à tous les niveaux.  Le principal défi reste l’élaboration de la réforme constitutionnelle afin d’améliorer l’administration publique. 

Le Gouvernement de Bosnie-Herzégovine devrait travailler étroitement avec le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale afin d’améliorer l’économie et mettre en œuvre les réformes pour améliorer le climat des affaires et de l’investissement.  La réforme menée par le Gouvernement du système financier devrait viser à réduire la part de l’économie informelle et la corruption.  Le rôle des citoyens dans ce domaine est inestimable. 

Les organisations non gouvernementales et les médias doivent être soutenus aux niveaux législatif et exécutif.  À cet égard, il est important d’accélérer l’adoption de stratégie nationale de gestion des finances publiques ainsi que les stratégies dans les domaines de l’énergie, de l’emploi et le programme national d’harmonisation du système juridique ainsi les normes de l’Union européenne. 

Le délégué a également rappelé la question de la migration et des réfugiés démontrée par les derniers événements dans les frontières avec la Croatie en octobre dernier.  Parallèlement à la solution aux problèmes prioritaires concernant l’accueil des migrants, il est nécessaire d’aborder à long terme le règlement de ce grand défi.  De cela dépendra de la stabilité non seulement en Bosnie-Herzégovine, mais également en Europe du Sud-Est.  Par conséquent, non seulement le Gouvernement devrait participer activement à ce processus, mais également les organisations internationales, les fondations ainsi que les structures européennes concernées.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a relevé que des étapes positives ont été franchies en Bosnie-Herzégovine, comme des amendements au Code de procédure pénale, mais s’est dit préoccupé par l’érosion de l’état de droit.  Cette situation combinée à des rhétoriques clivantes et révisionnistes deviennent toxiques pour la démocratie, a-t-il souligné.  M. van Oosterom a donc appelé la Bosnie-Herzégovine à renforcer l’état de droit à tous les niveaux, plaidant notamment pour que la loi électorale soit amendée de sorte que les instituions continuent à fonctionner correctement.

Concernant le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine et son Bureau, il a constaté que, vu le contexte, son action était plus que jamais cruciale pour appliquer l’Accord-cadre général pour la paix en Bosnie-Herzégovine.  Les Pays-Bas ont donc réaffirmé leur soutien au Bureau du Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, 23 ans après sa création.  M. van Oosterom a enfin rappelé que la stabilité était une condition sine qua non pour progresser dans l’application de l’Accord-cadre, et que l’EUFOR ALTHEA demeurait un élément clef pour maintenir un environnement sain et sécurisé en Bosnie-Herzégovine.  À ce titre, il s’est félicité de l’adoption à l’unanimité de la résolution renouvelant son mandat.

M. JOANNA WRONECKA (Pologne) a considéré qu’il y avait lieu de nourrir des inquiétudes sur la situation en Bosnie-Herzégovine, l’absence de danger imminent de conflit armé ne signifiant pas pour autant la stabilité.  Près d’un quart de siècle après l’échec des élites politiques du pays à projeter un sens de destinée commune dans lequel l’ensemble de ses peuples aurait pu se retrouver, les loyautés sont toujours alignées sur des appartenances ethniques, a regretté la représentante.  Elle a mis en garde contre les forces centrifuges alimentées par la rhétorique nationaliste, la glorification de criminels de guerre, l’absence de perspectives économiques, et la fragilité de l’État.  Mme Wronecka a demandé en conclusion aux partis politiques de s’employer rapidement à la formation du gouvernement et d’entreprendre la mise en œuvre du programme de réformes. 

M. SAMER MELKI (France) a salué l’organisation d’élections jugées « libres » par les observateurs de l’OSCE et souligné trois priorités auxquelles doivent répondre les nouvelles autorités, la première étant la cohésion nationale.  Les polémiques lancées par certains dirigeants politiques contribuent à attiser les tensions intercommunautaires et sapent les efforts visant à créer un climat de confiance entre les communautés, a-t-il noté en appelant les nouveaux dirigeants à rejeter les discours de nature à rouvrir les plaies du passé.  De même, il est inadmissible qu’après des actes inhumains, notamment le génocide de Srebrenica, des hommes politiques continuent d’ériger en exemple les responsables des crimes les plus graves qui soient. 

La justice est la deuxième priorité: « l’état de droit et le respect des droits de l’homme ne sont pas un luxe auquel seuls pourraient prétendre les pays prospères »; c’est au contraire la condition d’un développement économique et social juste et durable.  M. Melki a donc appelé les acteurs politiques à respecter les décisions prises par les instances judiciaires nationales et internationales, y compris sur la question de la réforme électorale, et a demandé aux autorités bosniennes des mesures fortes pour lutter contre la corruption.  Quant à la troisième priorité, la perspective européenne, il a attiré l’attention sur le devoir des responsables politiques bosniens de mettre en œuvre les réformes nécessaires, notamment dans le domaine de l’état de droit, des droits de l’homme et du développement économique et social.  En conclusion, M. Melki a plaidé pour qu’un esprit de réconciliation prévale, avec pour seul objectif l’intérêt de tous les citoyens bosniens. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a constaté que 23 ans après l’Accord de paix de Dayton, beaucoup a été réalisé en Bosnie-Herzégovine, mais qu’il restait des étapes importantes à franchir pour qu’elle devienne européenne et prospère.  Se félicitant de l’absence d’incidents durant les élections, il a en revanche déploré que la campagne ait été entachée par une rhétorique nationaliste, des divisions et des attaques de journalistes.  L’état de droit devrait être au cœur de la politique bosniaque, mais le chômage et la corruption font que l’émigration des jeunes est hélas une réalité, a-t-il déploré. 

Il a appelé à accentuer le rythme des réformes sans délai: pour l’Union européenne, une intégration supplémentaire dans les pays des Balkans occidentaux demeure une priorité, a-t-il souligné.  Mais les défis comme le développement durable, le crime organisé et les migrations doivent être relevés, a déclaré le représentant, qui a appelé à la coopération régionale et à des échanges régionaux accrus, conformément aux résolutions 2250 (2015) et 2419 (2018) du Conseil de sécurité.  La Suède s’est enfin réjouie du renouvellement du mandat de la force multinationale de stabilisation de l’Union européenne, EUFOR ALTHEA.

Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) s’est déclarée encouragé par les développements positifs constatés en Bosnie-Herzégovine au cours de la période à l’examen, citant en particulier l’engagement constant auprès de l’Union européenne dans le cadre de l’adhésion future de ce pays, et l’amélioration du Code de procédure pénale.  Il s’est néanmoins dit préoccupé par la persistance de la rhétorique clivante et des actions qui continuent de poser un défi à l’ordre constitutionnel et à l’intégrité de l’appareil judiciaire bosnien.  La représentante a également pris acte du désaccord constant au sujet de la modification de la loi électorale, soulignant à quel point, selon lui, cette question pourrait fragiliser encore plus la stabilité du pays.  Il a émis l’espoir que la décision de la Cour constitutionnelle relative à cette loi sera mise en œuvre conformément aux dispositions de l’Accord de paix de Dayton.

M. VASSILY A.  NEBENZIA (Fédération de Russie) a déploré que la qualité des rapports du Haut-Représentant ne fasse que se détériorer, et que « M. Valentin Inzko, ait rendu inéluctable l’incapacité des représentants politiques de Bosnie-Herzégovine ».  La Bosnie-Herzégovine continue de se développer, a-t-il argumenté: le chômage est en réduction et le pays croît.  Les élections d’octobre ont été une réussite; les problèmes du pays, qui apparaissent aussi dans tout autre état, ne sont pas insurmontables pour les Bosniens.  Dans le district de Brčko, la présence du Haut-Représentant n’a fait qu’entraver le dialogue intrabosnien et attiser les tensions. 

Au cours de ses 10 ans de présence, M. Inzko a utilisé à mauvais escient ses ressources pour promouvoir les intérêts de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et l’Union européenne au lieu de s’occuper à la mise en œuvre des questions civiles pour la paix.  Il doit éviter les commentaires à la veille des élections, comme il l’a fait lors d’un entretien à un journal autrichien la veille des élections.  M. Inzko a ainsi sapé les normes de son mandat, a déploré le représentant russe.  Ses conclusions sont douteuses, comme lorsqu’il parle de « corruption généralisée »: un commentaire politique sans fondement, selon lui. 

Concernant la ligne russe sur ce dossier, le pays cherche à respecter l’intégrité territoriale du pays et promouvoir l’égalité entre les trois peuples.  « Le protectorat étranger a fait son temps », a-t-il insisté.  Considérant que les influences artificielles qui s’exercent sur la Republika Srpska sont inacceptables, il s’est dit contre les sanctions à l’encontre des dirigeants de la Republika Srpska. 

Enfin, l’intégration euro-atlantique de la Bosnie-Herzégovine est une affaire intrabosniaque: il s’est formellement opposé à une intégration de la Bosnie à l’OTAN.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué l’adoption à l’unanimité aujourd’hui de la résolution 2443 (2018), qui témoigne de l’unité du Conseil de sécurité pour continuer d’accompagner la Bosnie-Herzégovine dans le rétablissement de l’état de droit.  Il s’est déclaré préoccupé par la prégnance de la rhétorique incendiaire qui sévit actuellement dans le pays, avant d’encourager le Parlement à se doter de nouveaux outils pour permettre au système judiciaire de lutter contre l’extrémisme et la criminalité organisée. 

Le représentant s’est en outre dit alarmé par l’afflux considérable de réfugiés dans le pays, par rapport aux chiffres constatés l’an dernier à la même époque.  Sa délégation a encouragé le Gouvernement de la Republika Srpska à fournir au Bureau du Haut-Représentant l’accès aux informations et documents officiels, qui est pourtant prévu à l’annexe 10 de l’Accord-cadre général pour la paix.

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a souligné que la Constitution bosnienne et les décisions du pouvoir judiciaire devaient être respectées, et a condamné la rhétorique nationaliste qui a eu cours dans le pays.  Se félicitant du calme des élections, elle a regretté qu’un consensus n’ait pas été trouvé en termes de réforme électorale, mais a loué la réforme du Code de procédure pénale et un facteur positif dans la recherche du développement et de la stabilité. 

Qualifiant la mise en œuvre du Plan 5+2 comme nécessaire pour que la mission du Bureau du Haut-Représentant prenne fin, la Bolivie a encouragé toutes les parties à placer les intérêts du peuple en priorité, et la communauté internationale à donner un appui aux demandeurs d’asiles cette année, d’autant que l’hiver approche.

M. MA ZHAOXU (Chine) a émis le souhait que davantage de progrès dans l’édification de l’État soient accomplis en Bosnie-Herzégovine, pour que les dividendes de la paix soient partagés par toutes les communautés.  Il s’est félicité de l’adoption de la résolution 2443 (2018) et de la prorogation du mandat de l’EUFOR ALTHEA, en espérant que la force de l’Union européenne continuerait de jouer un rôle dans le maintien de la stabilité à l’intérieur du pays. 

Après avoir rappelé que les résultats définitifs des élections générales du 7 octobre n’avaient pas encore été certifiés par la Commission électorale centrale, M. IVICA DRONJIC (Bosnie-Herzégovine) a déclaré que les nouveaux membres élus de la Présidence de Bosnie-Herzégovine prêteraient serment le 20 novembre.  Or, d’après la Constitution, la Présidence est responsable de la politique étrangère de son pays, qui suppose l’approbation par consensus des déclarations publiques faites au nom de la Présidence dans les organisations internationales.  Dans la mesure où il s’agit d’une période de transition, les membres sortants de la Présidence ne pouvaient à ce stade parvenir à un consensus sur le contenu de la déclaration à faire lors de la séance d’aujourd’hui, a expliqué le représentant.  Aussi s’est-il contenté de remercier le Haut-Représentant et les membres du Conseil, ainsi que l’Union européenne, qui a versé 7,2 millions de dollars à son pays pour agir dans le domaine des migrations et du contrôle des frontières.  Il a aussi remercié les Pays-Bas et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour avoir débloqué 245 400 dollars dédiés au financement du Projet « Explode + », qui vise à détruire le surplus national de munitions.  « Pour conclure, j’espère sincèrement que les nouveaux membres élus de la Présidence se mettront d’accord sur le modus operandi qui leur permettra de m’éviter à l’avenir d’être placé dans une position embarrassante comme celle-ci », a-t-il ajouté.

M. JOÃO VALE DE ALMEIDA de l’Union Européenne a réitéré son engagement sans équivoque en faveur de la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.  L’UE, a-t-il dit, s’attend à ce que tous les dirigeants du pays participent de manière constructive au programme de réformes en vue de sa future intégration.  À cet égard, l’UE se félicite du renouvellement du mandat de l’EUFOR ALTHEA, une mission qui soutient les efforts des autorités du pays dans le but de maintenir un environnement sécurisé.  Dans le cadre de la stratégie d’application de l’Accord-cadre général pour la paix en Bosnie-Herzégovine, le représentant a vu le prochain examen stratégique de 2019 comme une bonne base pour appuyer l’intégration de la Bosnie-Herzégovine dans l’UE tout en prenant en compte le facteur sécuritaire sur le terrain.  Reconnaissant qu’il fallait renforcer la coopération entre l’EUFOR et les acteurs internationaux sur le terrain, il a aussi dit que la Bosnie-Herzégovine devait accélérer les efforts pour détruire les stocks d’armes, d’explosifs et de munitions, ainsi que pour mener davantage d’opérations de déminage. 

M. MILAN MILANOVIĆ (Serbie) a rappelé que son pays était l’un des garants de l’Accord de Dayton, un accord qui est d’autant plus importants que la Bosnie-Herzégovine abrite 1,5 million de Serbes.  Or, ce n’est que la stabilité politique et le développement économique qui peuvent assurer le progrès de tous les peuples de Bosnie-Herzégovine.  Le représentant a indiqué voir émerger un certain nombre d’opinions différentes en ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, y compris sur la loi électorale et les amendements éventuels à y apporter.  Selon M. Milanović, il s’agit là de questions internes au pays qui devraient se résoudre par des accords entre acteurs politiques nationaux. 

La Serbie entend renforcer sa coopération avec son voisin et avec la Republika Srpska, dans le respect de l’Accord de Dayton, a assuré le représentant.  La Serbie entend aussi poursuivre ses relations avec la Bosnie-Herzégovine dans des domaines tels que les investissements, des projets économiques communs, l’énergie ou encore les infrastructures.  Les échanges commerciaux entre les deux pays sont solides et devraient même atteindre 2 milliards d’euros d’ici la fin de l’année, a indiqué M. Milanović avant de signaler que son pays est l’un des plus grands investisseurs étrangers en Bosnie-Herzégovine, avec plus d’un milliard d’euros investis. 

En ce qui concerne l’entrée dans l’UE, la Serbie entend mettre à disposition de la Bosnie-Herzégovine son expérience dans ce processus et souhaite le plein succès des réformes engagées pour son adhésion.  Le représentant a également dit vouloir se distancier des messages perturbateurs circonstanciés qui appartiennent au passé, ayant plutôt en vue d’améliorer le niveau de vie des populations des Balkans, avec la poursuite des efforts pour instaurer la stabilité, le développement et les relations de bon voisinage dans la région. 

En tant que seul État de l’Union européenne (UE) à disposer d’une frontière commune avec la Bosnie-Herzégovine, la Croatie se sent particulièrement responsable de la stabilité du pays, a affirmé M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie).  Concrètement, Zagreb souhaiterait que la Bosnie-Herzégovine intègre l’UE et l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), a-t-il précisé, avant d’appeler le pays à garantir l’égalité entre ses citoyens bosniaques, croates et serbes, « non pas seulement sur le papier, mais également dans la pratique ».

Sur le plan politique, M. Drobnjak a salué la tenue, le 7 octobre dernier, d’élections générales en Bosnie-Herzégovine, qui se sont selon lui déroulées de manière « globalement ordonnée » et « sans incidents majeurs ».  Le représentant a ainsi noté que le scrutin avait été qualifié de « véritablement concurrentiel » par les observateurs internationaux. 

Toutefois, il a estimé que le principe d’égalité entre les trois peuples constitutifs du pays n’avait pas été respecté.  À ses yeux, en effet, les Croates n’ont pas été en mesure d’élire l’un des leurs à la Présidence du pays, au mépris selon lui de l’Accord de Dayton, de la Constitution de la Bosnie-Herzégovine et de ses principes démocratiques.  « Ce n’est pas comme cela que le pays parviendra à tourner la page et à améliorer son fonctionnement », a estimé M. Drobnjak.  Bien au contraire, pour lui, cette « mauvaise utilisation » du processus électoral risque potentiellement d’alourdir « le fardeau des relations entre les peuples » et d’entraîner une perte de confiance des citoyens ordinaires dans leurs institutions démocratiques.  Or, selon lui, la complexité des équilibres politiques et juridiques du pays exiger une « vigilance de chaque instant » et l’élaboration de solution adaptée. 

Le représentant a rappelé que la Cour constitutionnelle du pays avait reconnu, en mai dernier, la représentation « légitime et proportionnelle » à tous les niveaux des trois peuples constitutifs de la Bosnie-Herzégovine comme le « principe général » de la Constitution du pays.  M. Drobnjak a appelé à faire en sorte que la réforme électorale en cours respecte ce principe.  Il a également appelé à ce que les résultats de l’élection d’octobre soient mis en œuvre de manière à entériner la décision de la Cour constitutionnelle sur la représentation légitime et proportionnelle, « que cela soit fait sur la base d’une solution ad hoc ou d’une solution permanente ».

À ses yeux, cependant, le refus actuel de mettre en œuvre l’arrêt de la Cour dans le cadre de la réforme électorale menace la stabilité du pays et laisse la place aux manœuvres et manipulations politiques.  « On ne le dira jamais assez, le principe de l’égalité entre Bosniaques, Croates et Serbes est le fondement même de la Bosnie-Herzégovine », a-t-il insisté, appelant les leaders politiques à travailler de manière constructive pour former des parlements et gouvernements à tous les niveaux de l’État fédéral.

La Croatie se tient depuis toujours prête à aider la Bosnie-Herzégovine pour améliorer sa capacité institutionnelle et administrative et remplir les critères nécessaires à son intégration à l’UE, a déclaré M. Drobnjak.  À ce titre, il a encouragé la Bosnie-Herzégovine à entamer « sans délais » des réformes dans plusieurs domaines, dont la justice, la lutte contre la corruption, l’économie, la gestion des frontières et la lutte contre le radicalisme politique et l’extrémisme religieux. 

Sur le plan sécuritaire, le représentant s’est prononcé en faveur du maintien de la force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA).  Il a encouragé les trois membres de la Présidence du pays à défendre les intérêts du pays, en respectant les sensibilités des différents peuples qu’ils représentent, mais également en se plaçant au-dessus des politiques nationalistes.

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