Forum de collaboration multipartite - matin et après-midi
ECOSOC/6926

Le Forum multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation du développement durable achève ses travaux entre « ombre » et « lumière »

« Les aspects lumineux » de la science, de la technologie et de l’innovation, véritables moteurs du développement durable, mais aussi ses « zones d’ombre », telles que les pertes d’emploi découlant de la robotisation et l’élargissement du fossé numérique entre les pays ont été simultanément évoqués, aujourd’hui, lors de la clôture du troisième Forum de collaboration multipartite sur ce thème. 

Ce Forum, coprésidé par le Mexique et le Japon, s’est réuni pendant deux jours pour partager des expériences et envisager des solutions, dans l’idée, selon la Présidente de l’ECOSOC, de relier les progrès dans ces domaines à l’objectif de « ne laisser personne de côté », véritable leitmotiv du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Ce Forum s’inscrit dans le cadre du Mécanisme de facilitation des technologies, processus découlant dudit Programme 2030 et du Programme d’action d’Addis-Abeba.  De nature plutôt technique, ce Forum a pris une tournure quelque peu philosophique lorsque le délégué du Japon, qui s’est exprimé dans l’une des quatre tables rondes de la journée, a agité le spectre d’une science sans conscience.

« N’oublions pas que la science, la technologie et l’innovation présentent des zones de lumière et des zones d’ombre », a-t-il dit.  Si elles permettent par exemple de relever des défis liés à la pénurie d’énergie, aux catastrophes naturelles ou aux déchets plastiques, le fossé entre ceux qui possèdent les données et technologies et ceux qui ne les possèdent pas peut se révéler très problématique, a-t-il mis en garde. 

Le délégué japonais a donc plaidé pour « une optimisation de leurs aspects lumineux » et souligné l’importance de structurer le savoir, d’équilibrer sa mise en commun et son individualisation, afin d’exploiter au mieux des ressources humaines limitées.  D’autres, ont mis l’accent sur le déploiement des technologies sur le terrain: le Ghana s’emploie ainsi à revoir sa politique pour combler le fossé entre la conception et l’application.

De son côté, un expert yéménite a reconnu « la grande appréhension » qui règne dans ce domaine, en fustigeant les « scénarios catastrophistes » qui accusent la robotisation de tous les torts.  De nombreux délégués, lors de ces deux jours, notamment celui du Bangladesh, qui s’exprimait au nom des pays les moins avancés, ont mis en garde contre les pertes d’emplois massives qu’une telle robotisation pourrait entraîner. 

Mais les aspects positifs ont été largement évoqués, notamment par un expert de la Banque mondiale, qui a jugé urgent de comprendre que la science, la technologie et l’innovation sont « les nouveaux moteurs de la croissance économique » et que les populations doivent avoir accès au capital et à l’innovation.  Un expert kényan a indiqué que ces secteurs jouent un rôle majeur pour aboutir à des villes « intelligentes » et plus résilientes.

Les incidences de la science, la technologie et l’innovation ne seront positives que si les pays sont bien préparés à ces nouveaux défis et potentialités, a résumé le Vice-Président mexicain du Forum, tandis que le Vice-Président japonais a rappelé que les décisions humaines sont cruciales pour tirer le meilleur profit dans ces domaines. 

Signe de l’intérêt de ces questions, une experte belge, jugeant que la technologie est « parent pauvre » des débats sur le développement durable, a demandé la création d’une entité chargée des technologies, qui pourrait s’appeler « ONU-Technologies ».  Le représentant de UN-Innovation network a semblé lui répondre en présentant le travail d’innovation conduit au sein de l’ONU, notamment en matière de drones et de données scientifiques.  « Deux jours de Forum, ce n’est pas assez! » a conclu le délégué du Mexique.  

FORUM SUR LA SCIENCE, LA TECHNOLOGIE ET L’INNOVATION

Troisième Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour la réalisation des objectifs de développement durable

Thème: « La science, la technologie et l’innovation au service de sociétés viables et résilientes – Focalisation sur les ODD 6, 7, 11, 12 et 15 »

Session 6: Débat interactif sur la science, la technologie et l’innovation et les feuilles de route nationales pour la réalisation des objectifs de développement durable et le renforcement des capacités

« Nous allons aujourd’hui préconiser l’intégration de la science, de la technologie et de l’innovation dans les plans nationaux de développement », a annoncé M. WILLIAM COLGLAZIER, membre du Center for Science Diplomacy, de l’American Association for the Advancement of Science, et modérateur de ce débat présidé par M. TOSHIYA HOSHINO (Japon).  Notant que la mise en œuvre de feuilles de route est un processus évolutif, il a souligné que les processus sont plus efficaces s’ils sont bien diffusés et régulièrement actualisés.

Au Ghana, a indiqué tout d’abord Mme PATRICIA APIAGYEI, Ministre adjointe de l’environnement, de la science de la technologie et de l’innovation, la feuille de route veut faire en sorte que les technologies fassent avancer la mise en œuvre de toutes les politiques nationales.  « On a beaucoup investi dans la recherche et le développement », a-t-elle assuré.  Le Ghana s’emploie actuellement à revoir sa politique pour combler le fossé entre la conception et l’application, et à renforcer les partenariats, notamment avec les milieux universitaires et les centres de recherche.  Un fonds pour la recherche sera doté annuellement de l’équivalent de 1% du PIB du pays, a-t-elle ajouté avant de mentionner aussi des mesures d’incitation pour pousser les entreprises à appuyer certains programmes scientifiques et technologiques. 

Pour ce qui est du Japon, « nous voulons créer la société 5.0, une société participative centrée sur l’être humain qui serait réalisée par la fusion entre l’espace cybernétique et physique », a expliqué de son côté M. TERUO KISHI, conseiller scientifique et technologique auprès du Ministère des affaires étrangères.  « N’oublions pas toutefois que la science, la technologie et l’innovation présentent des zones de lumière et des zones d’ombre. »  Si elles permettent par exemple de relever des défis liés à la pénurie d’énergie, aux catastrophes naturelles ou aux déchets plastiques, le fossé entre ceux qui possèdent les données et ceux qui ne les possèdent pas peut se révéler très problématique.  Ce qui a fait dire à M. Kishi que la science, la technologie et l’innovation doivent contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable grâce à « une optimisation de leurs aspects lumineux ».  M. Kishi a également souligné l’importance de structurer le savoir, d’équilibrer sa mise en commun et son individualisation, afin d’exploiter au mieux les ressources humaines limitées. 

La Jamaïque a adopté un plan pour la réalisation des objectifs de développement durable avec des ressources à la clef, a indiqué Mme AISHA JONES, Directrice de recherche à la Commission nationale sur la science et la technologie, en précisant que ce plan est aligné sur son programme « Vision 2030 », dans lequel la science, la technologie et l’innovation sont abordées de manière transversale.  Elle a d’ailleurs recommandé de décloisonner les activités dans ce domaine et de « renforcer l’interface science et politique ».  Faisant ensuite observer que « les trésors » des Caraïbes sont aussi une grande source de vulnérabilité, Mme Jones a préconisé de renforcer la coopération internationale dont sa région, qui ne représente que 0,005% de la population mondiale, dépend tellement. 

Nous avons identifié trois domaines d’action: les données, le financement et la mise en œuvre, dans lesquels la science, la technologie et l’innovation ont leur rôle à jouer, a indiqué un expert de la Banque mondiale, M. MAHMOUD MOHIELDIN, qui est Vice-président pour le Programme de développement durable à l’horizon 2030 de la Banque.  Les données n’ont de valeur que lorsqu’elles sont abondantes et de qualité, a-t-il ajouté, notamment quand on parle d’éradiquer la pauvreté.  Certes, il faut renforcer les capacités des peuples et des institutions, mais, si l’on ne veut laisser personne de côté, il faut pouvoir recenser tous les acteurs et leur fournir des services de base.  C’est ce que la Banque mondiale s’efforce de faire en Afrique, s’est félicité M. Mohieldin.  Il est urgent de comprendre que la science, la technologie et l’innovation sont « les nouveaux moteurs de la croissance économique » et que les populations doivent avoir accès au capital et à l’innovation, a-t-il lancé.  Il a aussi conseillé d’élever le dialogue politique pour qu’il y ait un partage de l’information au plus haut niveau, indiquant également que la Banque voulait, par son soutien financier, accélérer l’apprentissage. 

Avec l’aide de la Banque mondiale, le Gouvernement de la Géorgie est justement en train de réformer le financement de l’éducation supérieure s’est félicité le Ministre adjoint de l’éducation et de la science de ce pays. 

Moins d’un diplômé sur trois dans le domaine informatique et scientifique est une femme, a fait remarquer à ce propos le représentant de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).  Il a considéré que les feuilles de route nationales pour la science, la technologie et l’innovation ne peuvent pas être « vues isolément du reste ni détachées des défis internationaux ».  Il faut aussi aborder les questions de biodiversité, de climat, de santé publique et mettre en place des mesures d’incitation pour que les pays contribuent aux solutions nationales.  « L’OCDE continue d’agir en ce sens. »

La Vice-Secrétaire pour l’innovation du Chili a informé que son pays avait mis la science, la technologie et l’innovation au service de la satisfaction des besoins et de la réalisation des objectifs de développement durable.  Pour cela, il a fallu fédérer les capacités scientifiques et techniques, notamment en matière de ressources hydriques et de résilience face aux catastrophes naturelles, mais « les défis restent immenses ». 

Il faut veiller à un développement équilibré des services et impliquer divers réseaux d’acteurs pour favoriser les retombées bénéfiques au niveau national, a enchaîné la représentante de l’Université de Laponie

Le représentant de Technology Strategies Center du Japon est intervenu pour dire que chaque pays devrait élaborer des feuilles de route souples et se fixer une vision 2030 pour chacune des cibles des objectifs de développement durable.  « Établissons autant de feuilles de route que possible », a conclu M. KISHI, car l’avenir de la science, la technologie et l’innovation est incertain sans elles.  Enfin, M. MOHIELDIN a proposé que les débats d’aujourd’hui alimentent le prochain Forum politique de haut niveau pour le développement durable. 

Session 7: Débat interactif sur le thème « Réaliser le plein potentiel des connaissances locales et autochtones et des innovations locales pour la réalisation des objectifs de développement durable »

« Que sait-on aujourd’hui de la contribution des peuples autochtones à la réalisation des objectifs de développement durable?  Quelles recommandations peuvent-être formulées à cet égard? »  Telles sont les questions posées par M. PAULO GADELHA, Coordonnateur de « FIOCRUZ Strategy for the 2030 Agenda » de la Fondation Oswaldo Cruz, pour lancer le débat de cette deuxième table ronde de la journée.

La Directrice du programme pour les peuples autochtones et traditionnels de Conservation International, Mme MINNIE DEGAWAN, a voulu tout d’abord combattre les fausses idées sur le savoir traditionnel et autochtone, en précisant ce qu’il est exactement.  Ce savoir, a-t-elle ainsi souligné, a permis aux peuples autochtones de vivre pendant des centaines d’années.  Ce savoir s’est acquis au bout de plusieurs centaines de contact avec la Terre.  Il est transmis de génération en génération.  Son objectif est de garantir la survie de la communauté.  Mme Degawan a ensuite assuré que les peuples autochtones sont prêts à partager ce savoir pour le bien de tous.  « Les peuples autochtones ont quelque chose à donner et sont prêts à recevoir. »  L’experte a cependant prévenu que la croissance du savoir autochtone est menacée par les expropriations des terres autochtones.  Elle a donc recommandé le renforcement du pouvoir d’action de ces peuples, leur participation à ce genre de Forum au niveau mondial, la reconnaissance de leurs droits fonciers et la spécificité du savoir autochtone « qui n’est ni inférieur ni supérieur aux autres connaissances ». 

Le Directeur exécutif de « The Arctic Eider Society », Sanikiluaq, M. JOEL HEATH, a présenté les différents aspects du savoir de peuple autochtone inuit de l’Arctique dans les domaines de la pêche, de l’agriculture, de météorologie, de la protection des phoques, des connaissances qui peuvent être mises à la disposition et au service de la communauté.  Ces connaissances peuvent être utilisées pour la recherche et le développement, a précisé M. Heath pour qui il suffit tout simplement de suivre les exemples du peuple autochtone.  L’expert a aussi recommandé de mettre l’accent sur le développement de l’Internet dans le territoire autochtone pour faciliter la recherche et les échanges d’informations. 

L’importance du renforcement de la coopération entre les communautés autochtones et le milieu scientifique a précisément été l’objet de l’intervention de M. MULUBRHAN GEBREMIKAEL, UNEP-International Ecosystem Management Program, qui a pris l’exemple d’un projet qu’il mène en Éthiopie.  Ce projet consiste à collecter des informations « à la façon des autochtones » sur la météorologie, l’agriculture, l’élevage, la terre, les eaux, et l’environnement.  Les informations recueillies sont ensuite envoyées à d’autres communautés par l’intermédiaire des technologies de l’information et des communications pour leur permettre de prendre les décisions adéquates en matière agricole, sanitaire, d’élevage, environnementale.  Ces informations peuvent être également transmises aux scientifiques pour donner de la matière à leurs analyses et études. 

Pour sa part, Mme JOZELIN SOTO, Milpa Maguey Tierno de la Mujer Sss, a parlé de l’expérience au Mexique des femmes productrices de sisal qui se sont réunies au sein d’une coopérative.  Cette mise en commun leur a permis de transformer la filière et d’assurer de nouvelles formes de revenus et d’emplois.  Après 25 ans d’existence, il faut maintenant diffuser et développer cette expérience à l’extérieur, a conclu l’experte.  Elle a assuré que les membres de la coopérative sont en effet disposés à mobiliser leurs connaissances pour les autres et en même temps à apprendre de nouvelles techniques de production.  Elles cherchent à améliorer la production sur le long terme, à utiliser les énergies alternatives comme le solaire, et à mobiliser les technologies pour protéger l’environnement.  Le programme de reboisement pour contrer les changements climatiques a d’ailleurs permis d’éviter la disparition de 25 espèces de plantes.  La recommandation de Mme Soto a été de prendre en compte les besoins des femmes et des hommes avant de prendre une quelconque décision sur le développement et d’aider les femmes de la coopérative à réaliser leur objectif de « bien-vivre. » 

Le dialogue avec les délégations s’est focalisé sur l’importance du savoir traditionnel pour les communautés elles-mêmes et pour le reste de la société.  Une représentante de la société civile a insisté pour que la réalisation des objectifs de développement durable se fasse dans le respect du savoir autochtone dont l’ultime but est de vivre dans la paix, à commencer par la possibilité d’indépendance alimentaire des peuples autochtones.  Elle a ajouté que les peuples autochtones ont besoin des Nations Unies pour lutter contre le réchauffement climatique.

Les communautés autochtones ont des solutions abordables aux problèmes locaux, a ajouté le représentant de la Thaïlande en citant par exemple la conservation des eaux et la réduction des risques de catastrophe.  Mais il faut que les peuples autochtones puissent compter sur le soutien vigoureux des gouvernements, de la communauté internationale et des Nations Unies. 

Enfin, lOrganisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a insisté sur le lien entre le savoir traditionnel et les connaissances scientifiques qui doivent se compléter.  Il a appelé à poursuivre la réflexion et à mobiliser les gens qui s’activent dans différents types de programmes sur ce thème.  Le Modérateur a confirmé qu’il existait un espace pour une synergie entre le savoir autochtone et traditionnel et les autres formes de savoirs, pour que tout concoure à la réalisation des objectifs de développement durable.  Ces expériences peuvent être mises en commun en créant des ponts.  C’est le rôle des États Membres et des Nations Unies, a-t-il rappelé. 

Session 8: Débat interactif sur le thème « Appuyer la mise en œuvre du Mécanisme de facilitation des technologies – la voie à suivre pour une action commune »

Comment améliorer le Mécanisme de facilitation des technologies?  Voilà un thème important, a déclaré M. JUAN SANDOVAL-MENDIOLEA (Mexique), qui présidait ce débat centré sur un mécanisme qui est encore récent.  Alors qu’il est dans sa troisième année, le Mécanisme est essentiel au Programme de développement durable à l’horizon 2030, a souligné M. PETER GLUCKMAN, Conseiller scientifique principal auprès du Premier Ministre de la Nouvelle-Zélande, modérateur du débat.  Un Mécanisme qui vise à encourager la coopération au sein du système des Nations Unies et à l’extérieur. 

Pour « faciliter les technologies », comme le veut le Mécanisme, il faut notamment s’attaquer au problème de mise en pratique des inventions.  C’est en substance ce qu’a dit M. ALFRED WATKINS, Président de Global Solution Summit en indiquant que « ce qui fait défaut aujourd’hui, c’est le déploiement sur le terrain à grande échelle ».  Il faut en effet du temps pour mettre sur le marché les inventions, a-t-il remarqué en ironisant sur le fait qu’il est plus difficile de trouver un usager que d’inventer quelque chose.  L’expert a diagnostiqué un vrai problème de fragmentation dans la chaîne de déploiement des solutions, alors que pourtant « nous ne dépendons plus des inventions de la révolution industrielle, les solutions existent ». 

Ce problème de déploiement se retrouve en particulier pour les technologies spatiales, qui bénéficient trop peu au commun des mortels.  Mme SIMONETTA DI PIPPO, Directrice du Bureau des affaires spatiales des Nations Unies, a voulu attirer l’attention sur ce point en soulignant que l’espace est pourtant un élément central de la prise de décisions au XXIe siècle.  Elle a précisé que 40% des 169 indicateurs des objectifs de développement durable dépendent de l’accès à la science et à la technologie spatiales.  Raison de plus pour « combler le fossé spatial » et mettre l’espace au service du développement durable.  Ainsi, depuis 2006, le Bureau qu’elle dirige travaille de concert avec les États pour comprendre les difficultés auxquelles sont confrontées les zones urbaines, en privilégiant une approche multipartite.  « Il nous faut réfléchir à la façon dont nous devons maintenir le consensus sur l’utilisation rationnelle de l’espace extra-atmosphérique, même si ce défi politique ne sera pas facile », a-t-elle recommandé. 

Des efforts plus grands sont aussi attendus si nous voulons garantir l’eau et la nourriture pour tous d’ici à 2030, a averti à son tour Mme VEERLE VANDEWEERDE, Directrice chargée des politiques à la Global Sustainable Technology and Innovation Conference.  L’experte a parlé à cet égard d’instituts indépendants à but non lucratif qui réunissent tous les acteurs, innovateurs, capitaines d’industrie, ou autres, pour mobiliser les nouvelles technologies et contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.  En même temps, elle a déploré que la nécessité d’une transition technologique ne soit pas véritablement abordée quand on sort de cette salle.  « La technologie étant un peu le parent pauvre, il faudrait peut-être créer une entité chargée des technologies, ONU-Technologies », a-t-elle proposé. 

Un autre obstacle à surmonter pour mettre les technologies au service du développement durable, c’est la grande appréhension qui règne dans ce domaine, car beaucoup de scénarios catastrophistes ont accusé la robotisation de tous les torts, a fait remarquer M. RAFAT AL-AKHALI, Chef de Secrétariat of Pathways for Prosperity: Commission on Technology and Inclusive Development.  Pour prouver l’utilité avérée de certaines technologies, il a parlé de ce que fait son organisation, qui a lancé le premier module électoral par SMS.  Celui-ci a permis de mobiliser plus de 2 000 personnes pour surveiller les élections au Yémen.  Il a également cité la Fondation Bill Gates, qui met l’accent sur le potentiel de transformation des sociétés des pays en développement par les technologies: elle réunit des jeunes chefs d’entreprise, des économistes, des roboticiens et des dirigeants, afin d’éviter toute approche cloisonnée. 

Le représentant de l’Université des Nations Unies a recentré le débat sur l’outil de coopération que représente le Mécanisme de facilitation des technologies, un outil qui doit promouvoir un travail en commun dans le domaine de la science, de la technologie et de l’innovation.  Dans cette optique, un atelier révolutionnaire « Unis dans l’action » a récemment été organisé en Jordanie avec sept agences des Nations Unies pour réfléchir à cette coopération et mobiliser des synergies avec divers acteurs.

Abondant dans le même sens, une représentante de la société civile a invité à opérationnaliser le caractère pluripartite du Mécanisme, plaidant notamment pour que les mouvements sociaux y contribuent de manière proactive.  Il faut renforcer l’inclusion, a renchéri la représentante du Mexique, en évoquant les activités parallèles, dont le Sommet des solutions mondiales.  « Deux jours de Forum, ce n’est pas assez! »  

Pour le représentant du Guatemala, la grave situation que connaît actuellement son pays avec la récente éruption volcanique est en quelque sorte liée aux questions débattues aujourd’hui. 

Session 9: Débat interactif sur le thème « Science, technologie et innovation pour garantir l’accès à une énergie abordable, fiable, durable et moderne pour tous »

En guise d’introduction à la discussion, trois lauréats du concours « Call for innovations » ont présenté leurs produits respectifs qui ont en commun de tendre vers un avenir durable.  M. BEN JEFFREYS a ainsi présenté son invention baptisée « APEC » qui rend abordable le gaz domestique pour les familles en difficulté financière en Indonésie.  M. NDUA a, lui, créé le système « Jiko Raha », un fourneau économique pour la cuisson et pour la purification de l’eau.  Il travaille au Kenya.  Quant à Mme DINA BUCHBINDER, elle a parlé du projet « Education for Sharing » qui éduque et prépare les enfants pour un avenir de villes durables, en mettant l’accent sur l’enseignement de la science.

Le Directeur général adjoint de l’« International Institue for Applied system Analysis », Australie, M. NEBOJSA NAKICENOVIC, a reconnu, tout d’abord, les grandes synergies entre les énergies et les objectifs de développement durable.  Un secteur énergétique intégré et durable peut, par exemple, entraîner une hausse de 0,2% du PIB mondial.  Il faut donc se concentrer sur les synergies, a-t-il recommandé.  « Nous pouvons le faire comme l’ont fait les États-Unis en seulement 20 ans. »  Les avantages sont énormes, a-t-il affirmé.  Si les 7,7 milliards de personnes dans le monde ont accès à la téléphonie mobile, il faut faire de même pour l’accès à l’énergie car celle-ci est nécessaire pour charger les téléphones.  M. Nakicenovic a aussi insisté sur l’importance de mettre en œuvre, dans le même temps et ensemble, les 17 objectifs de développement durable. 

Un autre chiffre a été donné par le Directeur de recherche du Centre de recherche énergétique de l’Université de Sussex, Royaume-Uni, M. JIM WATSON: 29% du bouquet énergétique devrait être assuré par l’énergie renouvelable d’ici à 2030.  Pour y arriver, il a recommandé de suivre une approche systématique pour favoriser l’innovation et de fournir un appui à ce domaine par le biais de la fiscalité.  Le Japon l’a fait dans le secteur de l’énergie solaire et a été suivi en cela par l’Allemagne, a-t-il indiqué en assurant que ces initiatives avaient rendu très abordable l’énergie solaire.  « Ce que je propose pour progresser, a dit M. Watson, c’est de renforcer les capacités institutionnelles des pays en développement, adopter une approche intégrée des réseaux et abandonner petit à petit l’énergie fossile ».

La bioénergie a été défendue par le Directeur du développement des entreprises de NOVOZYMES, Brésil, M. DANIEL CARDINALI, qui a soutenu l’idée qu’elle peut aider à atteindre l’objectif 7 du développement durable sur l’énergie propre et abordable.  Pour cela, on a besoin de stabilité car les investissements qui restent à faire sont énormes, a-t-il prévenu.  Or, les investisseurs ont besoin de prévisibilité et de stabilité.  En attendant cela, l’expert a encouragé l’utilisation de l’éthanol pour remplacer l’énergie fossile utilisée par les automobiles.  Il a aussi recommandé de mettre en place un cadre encourageant pour l’avenir de l’utilisation de la bioénergie.  En résumé, il faut investir dans l’innovation pour pouvoir utiliser à terme des énergies alternatives aux énergies fossiles. 

Le Directeur général adjoint de la recherche et de l’innovation de la Commission européenne, M. JACK METTHEY, a parlé du cadre politique de l’Union européenne, dit « Energy union », dont l’objectif est d’accélérer l’innovation dans le domaine de l’énergie propre.  Ce cadre s’appuie sur trois axes: soutenir l’innovation, encourager le partenariat public-privé, mettre en place un cadre réglementaire de contrôle.  L’Europe consacre 3,3 milliards d’euros par an à la recherche, a-t-il aussi fait valoir avant de révéler que l’Union européenne venait de lancer une initiative dotée de 300 millions d’euros pour les innovations en matière d’énergie propre et renouvelable.  Les conseils qu’il donne pour avancer dans ce sens sont d’abandonner la subvention de l’énergie fossile, prendre en compte la santé et les changements climatiques, et appuyer les petits projets mis en œuvre au niveau local. 

Animée par Mme AGNES KIJAZI, Directrice générale de l’Agence météorologique de la République-Unie de Tanzanie, la discussion qui a suivi s’est focalisée sur les voies et moyens d’accélérer la réalisation de l’objectif 7 sur l’énergie propre et abordable. 

Le représentant du Japon a plaidé pour que chaque pays se dote d’une feuille de route sur l’énergie, arguant que cela permet de se concentrer sur chacune des trois cibles de l’objectif.  Le grand groupe des enfants et des jeunes a ensuite préconisé la décentralisation du secteur énergétique car, a-t-il expliqué, il faut associer toutes les parties prenantes si l’on veut renforcer la planification intégrée des secteurs de l’énergie et de l’eau. 

La Colombie a, pour sa part, jugé nécessaire de mettre en commun les efforts pour l’accès à l’énergie en Amérique latine où les sources énergétiques sont nombreuses.  C’est le problème de l’« abondance et du trop peu » en matière énergétique qu’il faut résoudre, a dit en écho le Directeur général adjoint de l’International Institue for Applied system Analysis.

Session 10: Débat interactif sur le thème « La science, la technologie et l’innovation pour des villes et des établissements humains ouverts à tous, sûrs, résilients et durables »

Les participants à cette discussion ont d’abord entendu les lauréats de l’appel à innovation du Forum.  Mme PATRICIA ALATA, de Lima (Pérou), a présenté son projet « Occupa Tu Calle » (« Occupe ta rue »), un observatoire qui se concentre sur de petites interventions en milieu urbain en recyclant des matériaux et en aidant les occupants de certains quartiers à « reconquérir l’espace public ».  Depuis 2014, près de 50 000 personnes ont utilisé nos espaces publics, s’est-elle enorgueillie. 

À son tour, M. SANTOSH POUDEL, de Pokhara, deuxième ville du Népal, a présenté son projet intitulé « Installations pour le traitement des déchets hospitaliers dans les villes ».  Pokhara compte 30 hôpitaux qui génèrent des déchets dangereux et contaminés.  Ceux-ci étaient auparavant mélangés avec des tonnes de déchets domestiques et finissaient dans les fleuves, jusqu’à ce que son organisation intervienne.  Aux gouvernements locaux qui n’étaient pas  en mesure de trier et d’évacuer, M. Poudel a offert des solutions avec un bon rapport qualité-prix dans le respect des normes environnementales.  Il a déjà investi 250 000 dollars et espère lever des fonds supplémentaires pour travailler avec d’autres villes. 

« C’est dans les villes que tout commence », a enchaîné le modérateur du débat, M. VAUGHAN TUREKIAN, Directeur de l’Académie nationale des sciences, d’ingénierie et de médecine des États-Unis.  Il était aussi, en 2016 et 2017, Codirecteur du Forum de collaboration multipartite sur la science, la technologie et l’innovation pour les objectifs de développement durable.  Le modérateur a estimé que « les villes doivent être des moteurs de la durabilité de notre avenir », arguant qu’aux États-Unis, 80% de la population vit déjà en zone urbaine. 

« C’est dans les villes que les décisions sont prises et que les politiques publiques sont mises en œuvre », a renchéri la première panéliste, Mme MARIA VICTORIA SUKENIK, Présidente du Groupe d’étude 5 sur la science, la technologie et l’innovation consacré à l’environnement, les changements climatiques et l’économie circulaire, également Vice-Présidente de United for Smart Sustainable Cities et Cconseillère au Ministère des communications de l’Argentine.  Elle copréside une plateforme mondiale ouverte, où toutes les parties prenantes sont invitées à apporter leur contribution et à présenter des idées permettant de faire le point sur la transition vers des villes intelligentes, notamment au moyen d’indicateurs de succès utilisés dans des projets pilotes, comme à Dubaï ou Singapour.  Elle travaille sur des sujets aussi variés que l’intelligence artificielle, les rayonnements ionisants, la compatibilité électromagnétique ou la participation des petites et moyennes entreprises.  Forte de cette expérience, elle a estimé très important de pouvoir parler la même langue d’une ville à l’autre, soulignant ainsi l’importance des normes internationales.  Elle a aussi annoncé la tenue, en novembre prochain, d’un forum des villes intelligentes à Santa Fe (Argentine). 

Une langue commune pour faciliter un effort collectif.  M. YUNUS ARIKA, Chef de la politique mondiale et de la sensibilisation à l’International Council for Local Environmental Initiatives (Turquie), a plaidé pour la mise en commun des efforts et présenté à ce propos un réseau qui compte 1 500 membres à travers le monde.  Il a relevé que divers facteurs influencent la qualité de vie dans les villes, en parlant en particulier des villes centenaires ou même millénaires.  « Vous devez innover pour servir vos citoyens », a-t-il lancé aux dirigeants, en prenant pour exemple la décision d’interdire les voitures ou d’investir dans une économie faible en carbone.  La politique de proximité est la clef du succès, a-t-il plaidé.  « Avec l’Accord de Paris et le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les villes font de plus en plus appel à nous pour rentrer en contact et échanger leurs bonnes pratiques », s’est-il félicité. 

M. KAMAL BHATTACHARYA, Directeur du centre d’innovation Safaricom Innovation Hub (Kenya), s’est intéressé tant aux effets des mégadonnées, de l’intelligence artificielle et des marchés émergents, qu’à l’amélioration des transports et des infrastructures physiques et numériques, sur des villes comme Nairobi ou Bangalore.  La première vague de villes intelligentes a poussé à réfléchir à la façon de mettre en place des mesures pour rendre les villes plus résilientes, a-t-il constaté, recommandant d’examiner les données disponibles sous ce prisme. 

Se prévalant d’« une vue optimiste de l’avenir de la vie urbaine », M. DAVID EDWARDS, professeur à l’École d’ingénierie et des sciences appliquées de Harvard University, a préconisé une meilleure approche en matière de santé, pour répondre aux problèmes des citadins tels que le diabète, la dépression, le manque de sommeil.  Dans les villes, a-t-il expliqué, il faut prendre en compte les réactions biologiques aux stimuli sensoriels et, notamment, les effets des appareils électroniques.  Selon lui, les informations cognitives devraient mener à de meilleurs comportements, tandis que les innovations devraient permettre de lutter contre des défis comme l’épidémie des opiacés. 

Sur les plans économique et social, un représentant de la société civile et de l’Initiative sur l’économie numérique a fait remarquer que la croissance fait augmenter le prix des loyers et la taille des bidonvilles.  Il a demandé aux gouvernements d’accroître leurs filets de sécurité sociale et la qualité de leurs services à la population, et aussi de respecter le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe.  En outre, les collectivités locales devraient prendre en compte l’incidence de la collecte des données sur le respect de la vie privée.  « Vivre en ville devrait être un choix et non pas une nécessité », a-t-il ajouté. 

Une autre partie prenante, s’exprimant au nom de Future Earth, a réitéré l’importance des sciences et de la recherche dans les villes et d’une plus grande coopération avec les collectivités locales à ce sujet.  Il a jugé difficile mais important de suivre une approche intégrée pour accélérer les changements sur le terrain.  Un autre intervenant a enchaîné sur le rôle central des villes dans la réalisation des objectifs de développement durable en expliquant que son pays, le Japon, encourageait les villes en leur remettant des prix.  Le représentant de Résilience Brokers a ensuite attiré l’attention de la salle sur un rapport mis au point avec la participation de son organisation, qui conclut à la nécessité d’une « collaboration plus approfondie entre les praticiens et la communauté de l’open data ». 

Enfin, le représentant de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a évoqué l’initiative « Atomes pour la paix et le développement » et le programme de coopération technique de l’AIEA qui accompagnent les États pour la concrétisation des objectifs de développement durable.  Il a appuyé l’utilisation d’outils nucléaires pour évaluer la qualité de l’air et réduire la pollution atmosphérique et l’impact environnemental des villes. 

Discussion interactive et remarques de clôture

Après que le Vice-Président du Forum, M. JUAN SANDOVAL-MENDIOLEA (Mexique), a demandé des recommandations pour améliorer le fonctionnement du Forum, le délégué du Mexique a rappelé que la résolution 72/242 demandait à cette instance de réfléchir aux défis posés par les technologies, dont l’intelligence artificielle, pour accompagner le développement durable.  Les incidences de ces outils ne seront positives que si les pays sont bien préparés à ces nouveaux défis et potentialités, a-t-il dit, en demandant une coopération internationale accrue.  Selon lui, ce Forum a rempli la mission qui lui avait été confiée.

Une partie prenante a loué la richesse des débats mais a déploré qu’ils se soient déroulés dans plusieurs salles.  Il faudrait plus de discussions axées sur des solutions concrètes, associant davantage les chercheurs, a proposé un autre intervenant.  Un autre a regretté le trop grand nombre de déclarations lues, estimant que cela nuit au caractère interactif du Forum.  Le délégué de l’Afrique du Sud a préconisé la création d’un Forum permanent sur ces questions, tandis que le délégué de la Banque mondiale a souligné la nécessité de disposer de ressources accrues. 

Dans sa déclaration de clôture, M. TOSHIYA HOSHINO, l’autre Vice-Président du Forum, est revenu sur le pessimisme exprimé par le délégué du Japon en indiquant que les décisions humaines sont cruciales pour tirer le meilleur profit de la science, de la technologie et de l’innovation.  « Nous nous sommes rassemblés au sein de ce forum pour servir nos peuples », a déclaré le Vice-Président Sandoval

Enfin, la Présidente de l’ECOSOC, Mme MARIA CHATARDOVA, a souligné les nombreux enseignements de ce Forum, en particulier les solutions évoquées pour préserver la biodiversité, pour garantir l’accès à une eau et une énergie durables ou bien encore pour faciliter la transition vers des villes durables.  Les progrès récents accomplis vers l’opérationnalisation de la plateforme numérique et la collaboration accrue pour répondre à l’accélération des changements technologiques sont quelques-unes des remarquables initiatives de ce Forum, a-t-elle dit.  Enfin, elle a souhaité que ce Forum devienne un véritable véhicule pour le changement. 

 

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