Cinquante-sixième session,
4e & 5e séances – matin & après-midi
SOC/4858

Éducation, santé, fiscalité, revenus, services sociaux de base: les différentes dimensions de la lutte contre la pauvreté sont examinées à la Commission du développement social

Dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, la lutte contre la pauvreté ne saurait être abordée sous le seul angle des revenus. C’est pourquoi la vingtaine de délégations, dont un bon nombre de ministres, qui ont pris la parole aujourd’hui à la Commission du développement social ont mis en avant aussi bien des politiques d’éducation, de santé, en faveur des personnes âgées comme de la petite enfance, que des mesures fiscales ou sociales qui, toutes, peuvent avoir un impact sur l’élimination de la pauvreté.

En présentant leurs « stratégies d’élimination de la pauvreté visant à parvenir à un développement durable pour tous », plusieurs des intervenants ont mis en avant les progrès obtenus dans un contexte de reprise économique mondiale qui, comme l’a rappelé le Vice-Ministre de la réhabilitation sociale de l’Indonésie, fonctionne aujourd’hui pratiquement à plein.  Ce sont aussi ses bonnes performances économiques sur une longue durée qui ont permis à l’Uruguay de réduire la pauvreté des trois quarts entre 2006 et 2016.

Dans un tel contexte, un représentant du Ministère du développement social de l’Uruguay a insisté sur la politique de justice sociale pratiquée par son pays, plaidant pour un avenir « d’égalité et non de privilèges », tandis que la Ministre de la famille et de la jeunesse de la Hongrie exposait divers aspects de sa politique nataliste pour lutter contre le vieillissement et la baisse de sa population, et que le Directeur du développement social de la Namibie mettait en avant diverses mesures destinées à apporter des services sociaux de base aux populations nomades.

Le débat général a mis en évidence l’importance de la coopération internationale et des partenariats pour surmonter, ensemble, les obstacles à l’élimination de la pauvreté.  À cet égard, la Ministre de la coopération nordique du Danemark a mis l’accent sur les efforts à fournir sur la durée.  Son pays, par exemple, consacre depuis 40 ans 0,7% de son PIB à l’aide publique au développement (APD).  Si cette aide ne saurait suffire à éradiquer la pauvreté, elle continue néanmoins de jouer un rôle essentiel au profit des plus délaissés, comme les réfugiés et les personnes marginalisées.

En même temps, s’il est logique que l’aide internationale et le système des Nations Unies accordent une attention prioritaire aux pays les moins avancés dans la réalisation des objectifs de développement durable, il ne faudrait pas pour autant abandonner les pays à revenu intermédiaire, sans les progrès desquels les objectifs de développement durable n’auraient aucune chance d’être réalisés, ont fait valoir le Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus comme la Directrice du développement social du Ministre des affaires étrangères d’El Salvador.

Dans l’après-midi, c’est sur une des « questions nouvelles » que s’est penchée la Commission du développement social dans le cadre d’un table ronde consacrée à « l’innovation et l’interconnectivité au service du développement social ».  Les différents panelistes ont abordé les changements sociaux induits par ces nouvelles technologies, qui permettent par exemple de mieux connecter vendeurs et acheteurs ou encore de diffuser plus largement idées et connaissances, mais peuvent aussi menacer les emplois ou remettre en cause des droits, sans oublier la question de la qualité de l’information ainsi diffusée.

A également été posée la question des compétences à apporter à chacun pour leur permettre d’évoluer au rythme des changements technologiques, sans oublier le fait que les progrès technologiques exacerbent les structures de pouvoir et qu’il faut donc veiller à ne pas reproduire des structures qui perpétuent les inégalités.

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, mercredi 31 janvier, avec deux tables rondes: celle du matin portera sur le vieillissement et celle de l’après-midi, sur le handicap.

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Thème prioritaire: stratégies d’élimination de la pauvreté visant à parvenir à un développement durable pour tous

Déclarations

Mme PATRONELLA KAGONYE, Ministre du travail et du bien-être social du Zimbabwe, a souligné que la lutte contre la pauvreté ne peut pas se faire en vase clos et qu’il faut des cadres politiques, économiques, sociaux et culturels élargis, notamment pour l’autonomisation des femmes, l’élimination des mariages précoces, l’éducation, les systèmes de santé, la sécurité alimentaire et la protection sociale.  Dans un pays où les femmes de son pays représentent 80% de la force de travail du secteur agricole, son gouvernement a mis sur pied un programme de réforme agraire qui a permis à 29% des Zimbabwéennes de devenir propriétaires, a indiqué la Ministre.  Elle a aussi signalé que le Zimbabwe avait signé la Charte africaine de la jeunesse et avait créé des « guichets jeunesses » au sein de certains ministères pour appuyer le développement de cette catégorie de la population.  En matière de scolarisation, la parité a été atteinte dans les écoles primaires, a-t-elle dit, avant d’expliquer que le Zimbabwe était toutefois devenu la victime de son succès, le pays faisant face à une importante fuite de cerveaux dans certains domaines stratégiques. 

Sur le plan de la santé, la Ministre a expliqué qu’une taxe sur l’utilisation des téléphones portables permet de lever quatre millions de dollars mensuels pour financer l’achat de médicaments essentiels.  Outre des programmes de transferts de fonds à l’intention des plus vulnérables, le Gouvernement a promulgué des lois pour protéger les droits des personnes handicapées et a créé un partenariat à l’intention des personnes albinos, a-t-elle ajouté.  Le pays est également doté d’une commission sur le genre et s’apprête à lancer une banque de microfinance pour les femmes afin de leur fournir des prêts à un taux avantageux, a indiqué la Ministre en précisant que cette initiative vise en premier lieu les femmes qui travaillent dans le secteur agricole ou informel.  Mme Kagonye a aussi fait savoir que depuis le mois de janvier 2016, il est interdit d’épouser une jeune femme de moins de 18 ans, et que les jeunes filles qui tombent enceintes peuvent se réinscrire à l’école après leur accouchement.  Le Gouvernement a également élaboré un programme national d’action pour combattre les mariages précoces.

Mme AMADOU AISSATA ISSA MAIGA, Ministre de la population du Niger, a déclaré que les autorités s’étaient engagées dans la lutte contre la pauvreté il y a déjà 20 ans.  Elles ont intégré le Programme de développement durable à l’horizon 2030 dans les stratégies nationales, dont le plan de développement social et économique 2017-2021, qui vise notamment à réduire de moitié le taux de pauvreté.  La Ministre a présenté plusieurs politiques, programmes et projets sectoriels élaborés dans ce cadre.  Elle a en particulier souligné les textes adoptés et les mesures prises en faveur des personnes handicapées: une loi fondamentale du pays et toute une série de textes prévoient la pleine intégration des personnes handicapées, dans le cadre d’une stratégie nationale de réinsertion sociale de ces personnes, adoptée en août 2017. 

La Ministre a également mis en avant une série de mesures prises en faveur des personnes âgées, dont la protection est inscrite dans la Constitution de 2010.  Parmi les mesures prises, elle a cité le renforcement de la gratuité des soins grâce à un fonds social dans le secteur de la santé, la création d’un conseil national des personnes âgées et l’institutionnalisation d’une semaine de solidarité.  Ces différents efforts n’ont certes pas éliminé la pauvreté au Niger, a reconnu la Ministre, mais elles ont permis de la faire baisser, de 62,1% en 2005 à 59,5% en 2009, avant un nouveau recul de 2,8 points entre 2011 et 2014.  En conclusion, elle a souhaité une mutualisation des efforts de l’État nigérien et de ses partenaires pour éradiquer la pauvreté. 

Mme ANTOINETTE DINGA DZONGO, Ministre des affaires sociales et de l’action humanitaire de la République du Congo, a estimé que la précarité économique était la dimension déterminante de la vulnérabilité de la majorité des ménages congolais.  Elle a expliqué que ces vulnérabilités et détresses sont accentuées par la forte dépendance de l’économie du pays à la seule rente pétrolière et par l’attitude d’une partie de la jeunesse qui, pourtant en proie au chômage et au manque de qualification, refuse ou est insuffisamment sensibilisée à la nécessaire préemption du secteur agricole.  En raison des difficultés financières du moment, a-t-elle indiqué, l’action du Gouvernement est orientée vers l’extension de la protection sociale à l’ensemble de la population et la prise en compte systématique de la dimension « inclusion productive des personnes et communautés ».

La priorité, a poursuivi la Ministre, est accordé aux filets sociaux dans le cadre des projets Lisungi et TELEMA.  Sont privilégiés, entre autres, la combinaison des transferts monétaires, les microcrédits, ainsi que la promotion de la fréquentation scolaire et des centres de santé.  Elle a aussi parlé de la mise en fonction du dispositif de deux Centres d’information des Nations Unies (CINU) communautaires d’incubation des entreprises rurales, qui ont été mis sur pied à titre expérimental dans deux départements du pays.  Depuis quelques mois, a poursuivi la Ministre, le Congo est en pourparlers avec le Fonds monétaire international (FMI) pour négocier un accord financier visant à soutenir son programme économique à moyen terme.  En outre, a-t-elle ajouté, une réflexion est d’ores et déjà en cours pour tirer au mieux partie de l’économique numérique, du dividende démographique et de l’économie sociale et solidaire.

M. JUAN EDUARDO FAÚNDEZ MOLINA, Vice-Ministre du développement social du Chili, a fait observer que les changements sociaux progressaient plus lentement que la découverte des problèmes.  Il a estimé que les organismes internationaux avaient un rôle essentiel à jouer comme acteurs neutres soucieux du bien commun.  Rappelant les aspects multidimensionnels de la pauvreté, le Vice-Ministre a expliqué que le Chili avait modifié son approche de la question.  Le pays a ainsi renoncé à une approche strictement liée au revenu pour aborder l’aspect multidimensionnel de la pauvreté, ce qui a fortement modifié les chiffres des personnes effectivement pauvres.  Le Gouvernement sortant entrera dans l’Histoire comme celui qui a le plus fortement amélioré la protection sociale dans le pays depuis le retour de la démocratie, a affirmé le Ministre. 

M. ALEXEY CHERKASOV, Ministre adjoint du travail et de la protection sociale de la Fédération de Russie, a expliqué que l’aide humanitaire sociale prend différentes formes dans son pays.  Il a indiqué que malgré la persistance de la crise économique et l’application de sanctions unilatérales à l’encontre de son pays, son gouvernement avait réussi à augmenter la liste des versements sociaux qu’il offre à la population.  Précisant ensuite que les familles avec enfants sont les plus vulnérables, il a fait part d’un train de mesures adopté en décembre 2017 pour les aider, de même que les femmes mères d’un premier ou deuxième enfant.  De leur côté, les enfants ont accès à une éducation primaire ou supérieure, a-t-il assuré.

M. Cherkasov a ensuite indiqué que le Gouvernement russe veillait à l’augmentation des salaires: d’ici à 2018, le salaire minimum devrait être équivalent au revenu minimum.  Le salaire des docteurs, des enseignants, des travailleurs de la culture, entre autres, a déjà augmenté, a-t-il précisé.  Le Ministre adjoint a aussi parlé de la création, en 2017, d’un projet de développement stratégique qui cible notamment des domaines d’action dans la santé, l’emploi, l’entreprenariat et l’environnement urbain.  Le Gouvernement prévoit aussi de combattre la mortalité infantile en établissant un système d’aide médicale pour les femmes enceintes ou qui viennent d’accoucher ainsi qu’à l’intention des nouveaux nés et des personnes qui vivent loin des centres médicaux.  D’autres initiatives visent par ailleurs à renforcer le rôle de la « famille traditionnelle », a indiqué M. Cherkasov.

M. EDI SUHARTO, Vice-Ministre de la réhabilitation sociale de l’Indonésie, a jugé prometteurs les résultats obtenus dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en ce qui concerne l’objectif d’éradication de la pauvreté d’autant que, pour la première fois depuis la crise financière de 2008, l’économie mondiale fonctionne pratiquement à plein régime.  Néanmoins a-t-il ajouté, la pauvreté et les inégalités continuent de freiner les efforts en vue du développement durable.  L’Indonésie a pour sa part intégré les objectifs de développement durable dans sa stratégie de développement national, en renforçant ses capacités institutionnelles et en assurant la participation de tous les acteurs concernés.  M. Suharto a fait état d’un taux de pauvreté ramené à 10,7% en 2016 dans son pays, pour un objectif de 7% en 2019.  Néanmoins, une pauvreté chronique, multidimensionnelle demeure et elle ne pourra pas être vaincue par la seule amélioration des revenus, a reconnu le Vice-Ministre. 

Parmi les résultats obtenus par son pays, M. Suharto a mis en avant l’éducation et a annoncé que 95% des enfants, garçons et filles, étaient désormais scolarisés en primaire et plus de 72% dans le secondaire.  En outre, des campagnes de sensibilisation visent à promouvoir une éducation inclusive des enfants handicapés.  Par ailleurs, les institutions de l’État ont été réorientées en vue d’assurer la participation de chacun aux objectifs de développement durable.  Le Gouvernement a ainsi formé une équipe nationale d’accélération de lutte contre la pauvreté, qui regroupe une quinzaine d’institutions et de ministères et vise à formuler de nouvelles politiques et programmes.  Enfin, M. Suharto a appelé au renforcement des partenariats mondiaux et de la coopération Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire et a salué le travail de la Commission du développement social, présentée comme un forum intergouvernemental indispensable pour fournir des recommandations aux États Membres.

Mme TAMADER ALRAMMAH, Ministre adjoint de la localisation directe et Directrice générale du bien-être social de l’Arabie saoudite, a souligné que la pauvreté n’est pas uniquement de nature économique, d’où l’importance de mettre en place des stratégies adéquates dans chaque pays.  Elle a parlé du programme Vision 2030 établi par son Gouvernement qui vise à assurer la sécurité alimentaire, à renforcer la participation des femmes au marché du travail et à permettre aux foyers productifs de contribuer à l’économie du pays.  Un programme de protection sociale cible en particulier les ménages les plus vulnérables, tandis qu’une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté vise principalement les femmes.  Le Gouvernement a aussi alloué 9,15 milliards de dollars à un programme d’aide pour les foyers à revenu limité ou moyen.

En outre, l’État garantit à chaque citoyen l’aide sociale nécessaire en cas de handicap ou de maladie, a poursuivi la Ministre adjoint avant de citer aussi la création de plusieurs foyers pour personnes âgées.  Un plan national a également été lancé pour aider les personnes handicapées, notamment pour les intégrer au marché du travail.  Mme Alrammah a aussi parlé des initiatives lancées pour aider les jeunes sur ce même plan et pour les pousser à devenir des leaders.  L’éducation est gratuite à tous les niveaux et plus de 250 000 Saoudiens et Saoudiennes ont reçu des bourses pour étudier à l’étranger, a ajouté la Ministre adjoint avant de mentionner aussi d’autres initiatives en faveur des personnes âgées.

Mme KAREN ELLEMANN, Ministre des pêcheries et de l’égalité des chances et Ministre de la coopération nordique du Danemark, a rappelé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 constituait une « feuille de route collective ».  La quête de l’élimination de la pauvreté a progressé depuis 30 ans mais nous n’avons pas atteint nos objectifs, a rappelé la Ministre, qui a développé quatre points.  Mme Ellemann a d’abord appelé à la mise en place de partenariats forts, incluant le secteur privé, citant en exemple les partenariats « P4G » pour une croissance verte et la réalisation des objectifs de développement durable mis en place par son pays.  Ces efforts de développement doivent en outre se faire sur le long terme, a poursuivi la Ministre, qui a rappelé que son pays allait en 2018 pour la quarantième année consécutive consacrer 0,7% de son PIB à l’aide publique au développement (APD), laquelle ne peut suffire à éradiquer la pauvreté mais continue néanmoins de jouer un rôle essentiel au profit de ceux qui sont le plus délaissés, comme les réfugiés et les personnes marginalisées. 

Mme Ellemann a ensuite invité à se concentrer sur l’égalité de genre et sur la jeunesse.  En s’attachant à promouvoir la jeunesse, et notamment les filles, en leur garantissant éducation, santé et travail, services et respect de leurs droits, ces personnes verront leur vie s’améliorer considérablement, a affirmé la Ministre.  Enfin, elle a appelé à accorder une attention particulière aux personnes déplacées ou qui vivent dans des pays affectés par des conflits, dont la moitié vit encore dans la pauvreté extrême.  Mme Ellemann a enfin rappelé que le Danemark est candidat à un siège au Conseil des droits de l’homme pour 2020-2021, et que la réalisation des objectifs de développement durable est un élément central de sa candidature.  « Si nous parvenons dans les délais à éradiquer la pauvreté, nous aurons alors réalisé un des droits les plus fondamentaux: le droit à la dignité », a conclu la Ministre

Mme GABRIELA AGOSTO, Secrétaire exécutive du Conseil national pour la coordination des politiques sociales de l’Argentine, a prôné des stratégies régionales et mondiales pour éradiquer la pauvreté, en utilisant l’innovation pour combiner les trois dimensions du développement durable.  Elle a appelé les gouvernements à jouer un rôle actif en la matière.  Celui de son pays a approfondi ses stratégies de promotion des femmes et des autochtones et vise en premier lieu l’établissement d’un revenu minimum, la qualité de vie et la lutte contre la pauvreté intergénérationnelle, a-t-elle indiqué.  Un réseau intégral de protection universelle vise en outre à améliorer les conditions de vie des enfants qui ne bénéficient pas des allocations.  En ce qui concerne les personnes âgées argentines, elles peuvent continuer de travailler si elles le souhaitent jusqu’à ce qu’elles soient éligibles pour obtenir la sécurité sociale, tandis que le niveau d’un million de retraités a été ajusté aux besoins.

D’autres initiatives visent les premières années de vie des enfants, a poursuivi Mme Agosto qui a mentionné le plan national de la petite enfance lancé en 2016 pour venir en aide aux plus vulnérables, moyennant la création d’espaces de prise en charge dans tout le pays et des programmes de nutrition infantile.  Elle a précisé que cette initiative avait permis à de nombreuses femmes de retourner sur le marché du travail.  Dans le domaine de l’emploi, des programmes existent pour aider les jeunes à intégrer le marché du travail, a aussi fait valoir Mme Agosto.

Mme KATALIN NOVÁK, Ministre d’État chargée de la famille et de la jeunesse de la Hongrie, a rappelé que la population de son pays avait fortement diminué au cours des dernières décennies et a mis l’accent sur la nécessité d’une politique de la famille.  Elle a insisté sur le rôle des parents, précisant que les aides sociales étaient en Hongrie disponibles pour les parents qui scolarisent leurs enfants, ce qui avait permis de lutter contre la déscolarisation.  Mme Novák a ensuite énuméré toute une série de mesures destinées à encourager les naissances: politique fiscale nataliste, distribution de trois à quatre repas gratuits par jour, y compris pendant les vacances, à près de 50% des enfants qui vont en maternelle, ainsi qu’à l’ensemble des enfants d’une famille qui compte un enfant handicapé, entre autres.  C’est en ayant une mentalité profamille que nous pourrons éliminer la pauvreté, a poursuivi la Ministre, qui a ensuite passé la parole à la représentante de la jeunesse de Hongrie.  Celle-ci a parlé du défi que représente la population vieillissante de son pays.  « On ne peut pas considérer comme un acquis le fait qu’il y aura dans quelques années un représentant des jeunes pour poursuivre mon travail », a-t-elle lancé. 

M. IBRAHIM ADAM IBRAHIM MOHAMED, Ministre d’État au sein du Ministère du bien-être social et de la sécurité sociale du Soudan, a indiqué que son pays avait élaboré différentes stratégies de lutte contre la pauvreté, dont une stratégie nationale étalée sur 25 ans qui vise notamment à favoriser l’emploi des jeunes, augmenter les salaires et faciliter l’accès à l’éducation.  Le Gouvernement espère aussi permettre à l’ensemble de la population d’avoir accès à l’eau potable d’ici à 2020, a-t-il ajouté.  Le Ministre a aussi parlé de la Charte pour l’intégration sociale, établie à l’échelle du pays en vue de l’autonomisation des pauvres, et de diverses initiatives dans le domaine de la microfinance.  Le Soudan, a-t-il ajouté, accorde aussi une attention particulière à la parité hommes-femmes et aux personnes handicapées, moyennant la promulgation de lois pour renforcer leur participation dans toutes les sphères du pays.  Par ailleurs, un projet de recensement social est en cours pour déterminer les besoins et priorités de la population.  Le Ministre a aussi plaidé en faveur du renforcement de la coopération, notamment en ce qui concerne l’accès aux crédits, appelant par ailleurs à l’interdiction de la production d’armes, qu’il considère comme un important facteur de pauvreté.

M. ANDREI DAPKIUNAS, Vice-Ministre des affaires étrangères du Bélarus, a déclaré que « nous n’éliminerons jamais la pauvreté si nous ne nous engageons pas à garantir l’égalité des chances ».  C’est donc ce qu’a fait le Bélarus au plan national, a-t-il expliqué, avec la mise en place d’un système d’éducation et de santé de qualité, ainsi qu’un système social et le lancement de partenariat public-privé.  À cet égard, le Vice-Ministre a rappelé la nécessité de disposer de données statistiques et ventilées de qualité. 

M. Dapkiunas a ensuite jugé logique que le système de Nations Unies concentre son attention et ses efforts de développement durable sur les pays les moins avancés, mais il a averti que si le système de Nations Unies en venait à abandonner les uns après les autres les pays à revenu intermédiaire, il serait impossible de réaliser les objectifs de développement durable.  Le Vice-Ministre a ensuite dénoncé les mesures imposées unilatéralement par certains États, les accusant de servir des intérêts égoïstes et de saper les efforts de développement durable.  Enfin, M. Dapkiunas a appelé à la mise en place de « partenariats sincères et solides » et a annoncé à cet égard la tenue, dans trois semaines à Minsk, d’un forum régional sur les partenariats en tant que contribution de son pays aux efforts collectifs. 

M. PUTTIPAT LERTCHAOWASIT (Thaïlande) s’est félicité de la rapide réduction de la pauvreté à laquelle on assiste dans le monde, mais a relevé que ces progrès étaient très inégaux et encore insuffisants.  Il a souhaité que les travaux de la Commission du développement social se poursuivent sur la lancée de la seconde Décennie pour l’éradication de la pauvreté, qui s’est achevée l’an dernier.  Le représentant a ensuite mis en avant les réalisations de son pays en matière de lutte contre la pauvreté, en faisant remonter les efforts aux années 1940.  Il a notamment rappelé que son pays avait été cité en exemple par la Banque mondiale comme un exemple de développement économique remarquable, puisque la Thaïlande est passée en une génération du statut de pays à faible revenu à celui de pays à revenu moyen supérieur. 

Tout en reconnaissant des défis encore à relever, le représentant a notamment insisté sur les efforts du pays pour garantir à tous l’accès à la santé et une éducation de qualité, celle-ci permettant à 90% des enfants de bénéficier de 15 années de scolarité, signalant aussi les efforts de promotion des femmes et des jeunes en misant sur l’égalité de traitement.  Il a aussi mentionné les efforts entrepris par le Gouvernement pour connecter à Internet 70 000 communautés rurales et notamment les personnes ayant des besoins spécifiques, comme les personnes handicapées, ainsi que pour autonomiser les personnes âgées et leur assurer une retraite.  En conclusion, le représentant a appelé les participants à la session de la Commission de traduire en mesures concrètes les engagements pris en faveur du développement durable.

M. OLIVER ARROYO, Directeur général de l’évaluation et du suivi des programmes sociaux du Mexique, a expliqué que son gouvernement visait à renforcer la participation citoyenne.  Son action se fonde notamment sur la Stratégie nationale d’inclusion, a-t-il indiqué.  Il a insisté sur l’importance d’avoir un emploi formel pour combattre la pauvreté, précisant que plus de trois millions d’emplois formels avaient été créés entre 2012 et janvier 2018.  Des initiatives viennent par ailleurs à combattre la malnutrition et l’insécurité alimentaire, a-t-il ajouté avant de vanter les mérites de la stratégie d’éducation primaire qui a permis à 3,6 millions d’enfants mexicains de prendre le chemin de l’école.  Il a aussi parlé des progrès réalisés pour combler le fossé numérique, avec une hausse de 4,8 millions de personnes ayant accès à Internet.  En outre, 2,2 millions de personnes ont été extirpées de la pauvreté extrême entre 2012 et 2016, a-t-il dit.  Passant au travail de la Commission du développement social, M. Arroyo a appelé à modifier son mandat, en mettant un terme aux doublons, arguant qu’il lui fallait aborder les questions à son ordre du jour sous un angle adapté au siècle actuel.

Mme SOPIO KILADZE, Présidente du Comité pour l’intégration civile et les droits de l’homme du Parlement de Géorgie, a rappelé que certaines causes de la pauvreté variaient d’un pays à l’autre.  La Géorgie a pour sa part entrepris des réformes fondamentales en faveur de la protection des droits de l’homme, notamment les droits civils et politiques, et a ainsi atteint un haut niveau de protection, reconnu par ses partenaires et la majorité de la société géorgienne.  Et pourtant, a reconnu Mme Kiladze, la pauvreté reste un défi majeur à la protection et la promotion des droits de l’homme dans le pays, où le niveau de pauvreté est estimé à 21%. 

L’État a adopté deux grandes politiques pour parvenir au développement durable, a expliqué Mme Kiladze: la « Stratégie Géorgie 2020 » et le « Programme 2030 ».  Pour assurer l’éradication de la pauvreté, le Parlement national joue un rôle important, a-t-elle ajouté, en citant notamment la réforme de l’institution des travailleurs sociaux, une volonté de réforme du marché du travail pour améliorer l’emploi et l’élaboration d’un code de l’enfance.  Enfin, Mme Kiladze a annoncé que se tiendrait à Tbilissi à la fin du mois de mai une conférence pour discuter de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Mme AVIVIT BAR-ILAN, Chef de bureau du Département des organisations internationales du Ministère des affaires étrangères d’Israël, a déclaré que le moment était venu d’écouter les jeunes et leurs idées innovantes afin de bâtir avec eux un avenir durable.  Elle a expliqué qu’en Israël, de plus en plus de jeunes choisissent de prendre une année sabbatique entre le lycée et leur service militaire, l’occasion de faire du bénévolat ou de participer à un programme de leadership.  À ses yeux, de tels programmes leur donnent l’occasion de contribuer à la société et d’instiguer un véritable changement social.  C’est comme cela qu’il est possible d’instiller la responsabilité et de bâtir le leadership, a-t-elle commenté.

Mme Bar-Ilan a ensuite regretté que les personnes âgées souffrent trop souvent d’exclusion sociale en raison de leur âge, ce qui leur fait courir un risque disproportionné de ne pas toucher un revenu adéquat ou de ne pas accéder facilement à des soins de qualité.  Pour répondre à ce problème, elle a préconisé d’établir des liens entre les populations vieillissantes et les jeunes.  Elle a aussi prôné l’inclusion des personnes handicapées, citant en exemple la société Call Yachol, un centre d’appel qui emploie près de 200 personnes dont la majorité a un handicap physique, émotionnel ou sensoriel.  L’inclusion, a-t-elle déclaré, est la direction que prend l’avenir.

M. JEAN-MARIE BOUVERAT (Suisse) a expliqué qu’à l’échelle d’un petit pays décentralisé comme la Suisse, « l’ensemble des acteurs concernés doit tirer à la même corde » pour éliminer la pauvreté.  « La Confédération, les cantons et les communes s’y efforcent depuis 2010 sur la base d’une stratégie globale, concrétisée par un programme national pour les années 2014 à 2018 ».  Il est important que la lutte contre la pauvreté s’opère dans le respect de l’égalité de traitement, a-t-il aussi expliqué.  Le délégué a indiqué que l’un des objectifs de son pays, notamment par sa coopération au développement, est la promotion de la résilience et la préparation des communautés vulnérables, en particulier face aux changements climatiques.  « En apportant une protection sociale aux populations déplacées par des crises humanitaires, il est possible de soulager la pression sur l’environnement et les ressources naturelles, par exemple infligée par le déboisement pour le fuel. »  Mettant également en garde contre le délitement des solidarités familiales et locales, le représentant a souhaité valoriser l’aide prodiguée au sein de la famille et du voisinage et appelé à un « équilibre intelligent » entre l’action des pouvoirs publics et celle des acteurs privés.  « Ailleurs à travers le monde, les ressources publiques font parfois défaut mais les liens familiaux et de voisinage témoignent d’une grande solidité », a-t-il conclu. 

Mme VALERIE MATLOU, Directrice en chef pour le développement économique de l’Afrique du Sud, a rappelé que cette année marque le centenaire de l’anniversaire de Nelson Mandela, celui qui avait déclaré que « la pauvreté est une attaque contre la dignité de ceux qui la subisse ».  Elle a plaidé en faveur de l’empathie, avant d’énumérer les mesures lancées par son pays en vue d’aider les personnes âgées.  Un plan d’action a été élaboré à leur intention en 2012 et l’Afrique du Sud accueillera la prochaine réunion du BRICS sur le vieillissement de la population, a-t-elle indiqué.

En matière de création d’emplois, Mme Matlou a relevé que les jeunes sont souvent exclus du marché du travail, faute de compétences.  Aussi, les jeunes qui sont à la tête de leur foyer ont accès à des subventions et des programmes d’aide à l’éducation supérieure, tandis que le Gouvernement a lancé diverses initiatives pour combattre la pauvreté intergénérationnelle.  Mme Matlou a appelé à éliminer le cycle de la pauvreté pour que les jeunes ne deviennent pas des adultes qui la transmettront à leur tour.  L’Afrique du Sud a par ailleurs adopté un plan pour garantir des moyens de subsistance pérennes.  Dans le cadre de la stratégie sur le handicap, le Gouvernement a établi un livre blanc qui est en train d’être mis en œuvre, a indiqué Mme Matlou qui a aussi appelé à harmoniser l’Agenda 2063 de l’Union africaine avec les objectifs du NEPAD.

M. FEDERICO BARRETO, Directeur général de la jeunesse au Ministère du développement social de l’Uruguay, a mis en avant la croissance économique sans précédent dont son pays a bénéficié, avec un taux moyen de 4,55% par an depuis 14 ans, qui permet au pays d’afficher aujourd’hui le PIB le plus élevé de toute l’Amérique latine.  Ceci ne serait pourtant pas un véritable succès si ces avantages n’étaient pas répartis de manière juste, a ajouté M. Barreto.  Or, grâce à des politiques économiques et sociales progressistes, le pays a ramené la pauvreté de 36% en 2006 à 9,4% 10 ans plus tard, et la pauvreté extrême de 2,6 à 0,2% avec une nettement meilleure distribution des revenus. 

Répétant qu’il ne pouvait y avoir de développement social durable si la croissance économique n’était pas justement répartie, M. Barreto a énuméré diverses mesures prises par le Gouvernement, par exemple en matière de progressivité de l’impôt ou encore de négociations sociales, de transferts financiers aux familles les plus vulnérables ou d’accès au marché du travail.  La stratégie pour un développement durable misant sur la justice et l’égalité sociale doit être totale, a affirmé M. Barretto en citant le droit à la protection sanitaire institué en 2007 dans son pays, qui a permis d’assurer la couverture de santé de la presque totalité de la population, mais aussi une réforme du travail qui a fait passer le secteur informel de 40% à 25% entre 2003 et 2015, avec pour objectif la garantie d’un travail décent pour tous.  Depuis 2015 existe par ailleurs un système national intégral de soins de qualité et le travail des donneurs de soin, rémunéré ou non, a été reconnu, notamment celui des femmes.  M. Barreto a également mis l’accent sur le système d’enseignement public, gratuit et autonome du pays, où l’enseignement primaire est universel.

M. Barreto a également relevé la transition démographique dans laquelle est engagé son pays qui, grâce notamment à ses progrès sanitaires, voit se prolonger l’espérance de vie, tandis que les familles évoluent et se diversifient avec une augmentation des divorces et une diminution des mariages et de la natalité.  Il a donc fallu créer un système national intégré de soin qui accompagne tous les Uruguayens en situation de dépendance, aussi bien dans la petite enfance que dans le grand âge, ou encore les personnes handicapées.  Face aux défis actuels et à venir, M. Barreto a plaidé pour des institutions et un État vigoureux capables d’assurer la justice.  « L’avenir que nous voulons n’est pas un avenir de privilèges mais d’égalité », a-t-il affirmé, appelant la jeunesse du monde à lutter contre les injustices qui persistent et en faveur de davantage de démocratie pour et par tous, partout sur la planète car, a-t-il conclu, il n’y aura pas de transformations réelles de nos sociétés si elles ne dépassent pas les frontières. 

Mme JOSEPHINE MURIUKI, Directrice du développement social du Kenya, a fait part de l’objectif de son pays de combattre l’insécurité alimentaire et de favoriser l’accès à la santé et à un logement abordable.  Le Kenya a fait de l’expansion de l’irrigation et de la modernisation de l’agriculture une priorité, a-t-elle ajouté.  En outre, face au fléau du chômage des jeunes, elle a mentionné les nombreuses initiatives lancées pour favoriser l’éducation à tous les niveaux, ainsi que l’enseignement des nouvelles technologies.  Des ordinateurs sont par exemple fournis à tous les étudiants, a-t-elle illustré.  La déléguée a aussi indiqué que le lancement de services accessibles avec des téléphones mobiles a atteint 67% de la population.  En ce qui concerne les femmes et les jeunes, différents fonds ont été lancés pour favoriser leur accès aux services financiers et faciliter leur entrepreneuriat.  Un dispositif social existe par ailleurs au bénéfice des Kényans de plus de 65 ans, a-t-elle aussi signalé.

Mme LEMUS, Directrice du développement social au Ministre des affaires étrangères d’El Salvador, a expliqué que le pays disposait depuis l’an dernier d’une stratégie d’élimination de la pauvreté extrême, qui donne la priorité à divers groupes spécifiques, comme les personnes handicapées ou les jeunes enfants.  En outre, un système de retraite universelle a été mis en place et le prix des denrées de base a été baissé, tout en facilitant l’accès aux services sociaux de base.  La représentante a également parlé de la nouvelle politique nationale de l’emploi décent et de ce que font les autorités pour lutter contre la malnutrition par le biais de programmes de cantines scolaires.  Ces efforts se fondent sur le caractère multidimensionnel de la pauvreté, a expliqué Mme Lemus en soulignant que la pauvreté ne se mesure pas seulement en revenus, mais aussi à l’aune d’autres critères comme l’accès aux services sociaux.

Jamais il n’a existé une approche aussi multidimensionnelle que celle des objectifs de développement durable, a poursuivi Mme Lemus, qui a mis l’accent sur les difficultés auxquelles font face les pays à revenu intermédiaire, qui ne doivent pas être oubliés.  El Salvador participe activement non seulement aux négociations sur la résolution de fond qui sera adoptée à la fin de la session, mais aussi sur les méthodes de travail de la Commission, a-t-elle indiqué à cette occasion.  Elle a lancé un appel pour que le système de Nations Unies soutienne davantage les pays qui ont lancé de telles initiatives, en faisant observer que le système actuel tendait à conduire à une réduction de l’aide aux pays à revenu intermédiaire.  Elle a ainsi estimé que le rapport du Secrétaire général ne rendait pas suffisamment compte des efforts des pays à revenu intermédiaire dans la lutte pour l’éradication de la pauvreté ou la réalisation des objectifs de développement durable.  Enfin, a-t-elle assuré, El Salvador continuera d’appuyer les efforts en vue de l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant en faveur des personnes âgées.

M. MAGINO CORPORAN LORENZO, Directeur du Conseil national sur le handicap de la République dominicaine, a indiqué que la pauvreté avait chuté de 11% dans son pays entre 2012 et 2016.  Il a fait valoir qu’une commission de haut niveau pour le développement durable avait été mise sur pied et qu’une feuille de route avait été élaborée pour éliminer la pauvreté sous toutes ses formes.  Un programme a aussi été lancé pour aider les jeunes et les émanciper, a-t-il ajouté.  Cette vision stratégique vise à assurer le plein emploi des jeunes et favoriser leur accès au marché du travail, a précisé le délégué. 

M. Lorenzo a aussi parlé de la création de programmes innovants en matière de stages, d’heures de compensation pour les retraités, de différents programmes de formation et d’autres mesures pour assurer la contribution des personnes âgées.  Une équipe consultative sur l’égalité entre les sexes et l’âge a aussi été constituée, a-t-il ajouté.  Le délégué a ensuite plaidé pour un instrument juridiquement contraignant sur la mise en œuvre du Plan d’action de Madrid sur le vieillissement, avant de parler des initiatives qui existent pour promouvoir le tourisme accessible.

M. ALBERT DIWA, Directeur du développement social de la Namibie, a expliqué que la pauvreté restait un défi pour une partie de la population malgré les politiques mises en place par le pays pour y remédier depuis son indépendance en 1990.  Il a cité comme exemple des mesures permettant de renforcer la résilience des populations, avec notamment la mise en place de filets de protection sociale.  La Namibie s’est dotée en 2015 d’un ministère pour éradiquer la pauvreté, qui a mis en place une feuille de route reposant sur une série de priorités comme l’égalité hommes-femmes ou les services sociaux de base.

Le pays se heurte toutefois à d’énormes difficultés, a-t-il poursuivi, notamment dans le secteur de l’emploi informel, dans lequel il est très difficile de garantir une protection sociale.  Il a reconnu qu’il fallait en particulier faire davantage en faveur de la jeunesse pour rompre le cercle vicieux des emplois précaires et de la transmission intergénérationnelle de la pauvreté.  M. Diwa a également mis l’accent sur les efforts consentis au profit des populations nomades, que ce soit en matière d’éducation ou de services de santé itinérants.  Dans un pays où 80% de la population rurale dépend de l’agriculture pour survivre, des investissements dans ce secteur sont particulièrement nécessaires, a aussi indiqué M. Diwa, qui a mentionné des mesures dans ce domaine comme la distribution de semences et des aides aux éleveurs. 

Table ronde de haut niveau sur le thème « Questions nouvelles: pour des sociétés durables et résilientes: l’innovation et l’interconnectivité au service du développement social »

Le coup d’envoi de cette table ronde a été donné par le modérateur, M. JEREMY MILLARD, Conseiller auprès de l’Institut technologique du Danemark, qui a souligné que loin d’être neutre, la technologie était en fait une construction sociale et qu’il revenait à tous d’utiliser au mieux cette « manifestation physique de la civilisation humaine » qui pénètre désormais chaque aspect de notre vie.

Alors que la planète en est à sa quatrième révolution industrielle, il a souligné à quel point les mondes numérique, physique et biologique se télescopent, permettant par exemple de partager un même objet aux quatre coins du monde grâce aux imprimantes 3D.  Outre les changements sociaux positifs que cela présage, le tableau se noircit par endroit, l’utilisation de robots menaçant par exemple 37% des emplois aux États-Unis.  De même, si des outils comme Uber et Airbnb ont permis de créer une nouvelle économie qui met en lien facilement vendeur et acheteur de services, ils ont aussi conduit de nombreuses personnes à perdre leur droit en matière d’emploi.

L’époque actuelle est des plus intéressante, riche en changements qu’aucun gouvernement ou société ne parvient réellement à suivre, a relevé le modérateur avant de poser la question suivante: « quelles mesures appliquer pour que la technologie soit mise au bien de sociétés humaines? »

Dr. GONG SENG, chercheur et Vice-Président du Centre de savoir international sur le développement de la Chine, a cité le cas de la province enclavée de Chongqing, en Chine, qui a connu une croissance socioéconomique remarquable -quatre points de plus que la moyenne nationale- en raison notamment des investissements apportés au secteur du transport qui ont permis d’augmenter nettement le nombre de sorties et voies d’autoroute, de voies ferroviaires, ainsi que de voies aériennes.  Ce succès s’est soldé par le retour d’une population qui avait autrefois cherché fortune ailleurs. 

Autre phénomène, l’augmentation notable, ces huit dernières années, des villages taobao, des localités autrefois mourantes qui se sont spécialisées dans le commerce en ligne et ont connu ainsi une véritable revitalisation.  Selon les dernières prévisions, la Chine pourrait en compter 5 500 d’ici à 2020, ce qui représenterait la création potentielle de trois millions d’emplois.  Si l’on veut tirer pleinement profit de la technologie, a conclu ce paneliste, il faut avant tout renforcer l’apprentissage et les capacités d’adaptation des individus.

« La préparation est le mot clef de la question de la résilience », a renchéri Mme NOOR AL MALIKI AL JEHANI, Directrice exécutive de l’Institut international de la famille de Doha, avant d’expliquer combien les technologies de l’information et des communications (TIC) avaient transformé le monde arabe: Internet pénètre désormais 60% du territoire et Facebook compte 80 millions d’utilisateurs, sans oublier WhatsApp, Instagram, YouTube et Twitter.  Autre titre des bienfaits, la panéliste a cité le rôle des TIC en termes d’apprentissage, soulignant par ailleurs que l’interconnectivité est bénéfique pour la participation des jeunes au cyberespace et pour la diversification des opportunités notamment en matière de recherche d’emplois et de militantisme, comme cela a été le cas pendant les évènements du printemps arabe. 

L’interconnectivité peut toutefois être lourde de risques en raison de la pauvreté, de l’analphabétisme (16% chez les jeunes) et du risque de conflit dans la région, sans oublier le taux important de chômage chez les jeunes, a-t-elle tempéré.  Elle a également parlé des obstacles que rencontrent les femmes en raison des stéréotypes sexistes et des écarts en matière d’alphabétisation numérique.  En outre, elle a averti que les médias sociaux représentent une menace pour les liens familiaux, avec des contacts interpersonnels directs moins nombreux.  L’experte a donc insisté sur l’importance d’adopter des politiques pour aider les personnes à se sevrer des médias sociaux et davantage sensibiliser aux risques liés à l’usage de la toile.  Elle a aussi appelé à intégrer à titre prioritaire l’égalité des sexes aux mesures de promotion des TIC et à augmenter les investissements dans l’éducation à la technologie.

Ces technologies sont ancrées dans les systèmes sociaux et les valeurs sociétales évoluent en fonction des technologies, a pour sa part remarqué M. WALTER VALDIVIA, chercheur à l’Arizona State University et professeur à la Johns Hopkins University et à la George Mason University.  On croit que les marchés privés se taillent la part du lion alors que ce sont les technologies émergentes qui façonnent les marchés et acquièrent une position hégémonique dans leur espace.  Il a aussi noté un creusement des inégalités en raison de l’économie très dynamique qu’alimentent les technologies.  Le progrès technologique exacerbe les structures de pouvoir, et il faut veiller à ne pas reproduire les structures qui perpétuent les inégalités, a-t-il averti. 

Aussi, ce panéliste a appelé à imaginer une forme de gouvernance de l’innovation technologique qui s’inspire davantage des valeurs démocratiques.  Il faut promouvoir la technologie, mais de manière à la rendre plus inclusive et propice au développement et en donnant la possibilité pour une participation de chacun, a-t-il résumé.

Mme MARIA GARRIDO, chercheuse et professeure à l’Université de Washington – Groupe sur la technologie et le changement social, a réfléchi aux moyens de de faire accéder tout un chacun à l’information pour bénéficier des services à la création de sociétés.  Avec 45% de la population connectée en 2016, il importe à ses yeux de faire baisser le coût de la connectivité mobile qui, en l’état actuel, pourrait assurer la connectivité de 80% des habitants de la planète.  Elle a cité la création, dans certaines communautés d’Amérique latine, de réseaux communautaires mobiles dans des régions qui ne sont pas desservies par les grandes sociétés de télécommunication.

De plus, alors que seules 40% des femmes dans les pays en développement sont connectées, comparé à 80% dans les pays développés, elle a aussi jugé urgent d’assurer la parité en matière de connectivité, en misant notamment sur l’éducation et la participation des femmes dans les filières science, technologie, ingénierie et mathématiques ainsi qu’aux ateliers de programmation informatique.  L’innovation dépend de la liberté de penser différemment, a-t-elle aussi estimé, souhaitant que les politiques sociales confirment cette liberté.  De plus, alors que seulement 65 pays récoltent des données sur les femmes et les TIC, elle a appelé à faire en sorte que chacun compte.

Mme DONNA SCHEEDER, ancienne Présidente de la Fédération internationale des associations et institutions de bibliothèques, a fait observer que l’infrastructure et la connectivité ne sont que les premiers éléments à mettre en place pour combler la fracture numérique dans le monde.  Elle a souligné qu’aucun développement ne peut se faire sans accès à l’information et qu’il ne peut y avoir de véritable accès à l’information sans bibliothèques.  Elle s’est inquiétée de la pauvreté de l’information qui circule en ligne, estimant que cette question ne suscite pas suffisamment de préoccupations.  Alors que plus de la moitié de la population du monde échappe aux bienfaits de l’interconnectivité, elle a constaté que la fracture numérique, que ce soit entre riches et pauvres, hommes et femmes, milieu rural et milieu urbain, ou encore entre personnes hautement compétentes et celles qui le sont moins, fait que des pans entiers de la société sont incapables des tirer pleinement profit des avancées technologiques.

La panéliste a préconisé la création de contenu dans la langue locale des utilisateurs pour leur donner confiance et goût dans l’utilisation des outils qu’offre Internet.  Les bibliothèques, qui sont souvent le seul espace où tout le monde se retrouve, ont donc un rôle civique notable à remplir, a-t-elle souligné en plaidant en faveur d’un accès public à Internet dans les bibliothèques.  Les bibliothèques, a-t-elle affirmé, sont un véritable outil à brandir face à la fracture numérique.

La discussion qui s’est lancée avec les délégations a confirmé la nécessité de faire bénéficier à toute la population des atouts du numérique et des technologies, non sans émettre des avertissements sur les risques encourus.  La Représentante d’Haïti a fait observer que l’interconnectivité offrait d’ailleurs la possibilité d’une « citoyenneté globale ».

Le représentant de l’Allemagne a ainsi recommandé une bonne gestion des outils numériques en veillant à fournir des compétences à chacun pour leur permettre d’évoluer au rythme des changements technologiques.  L’experte de l’Université de Washington a misé sur l’alphabétisation et préconisé une formation avancée en matière de programmation, ainsi que le développement de compétences analytiques logiques essentielles.  Un apprentissage continu en ligne s’avèrera essentiel, a prédit pour sa part la panéliste de la Fédération internationale des associations et institutions de bibliothèques.

Leur emboitant le pas, la représentante du Costa Rica a parlé des contributions de la robotique au développement.  De son côté, la représentante de l’Argentine a préconisé une autonomisation en ligne généralisée des services publics offerts à la population, faisant observer que cela permet aux citoyens d’effectuer de nombreuses démarches sans devoir se rendre dans la capitale pour les faire. 

« Les connections doivent avant tout permettre de gagner du temps », a enchaîné le panéliste du Centre de savoir international sur le développement de la Chine, reprenant l’exemple des villages taobao: si les jeunes générations privilégiaient auparavant de s’établir dans les villes, le commerce en ligne leur permet maintenant de rester dans leur région et d’ouvrir un commerce localement. 

Pour éviter les effets indésirables des technologies, la déléguée de la Hongrie a plaidé pour une meilleure prise de conscience des jeunes au sujet des risques de leur utilisation, notamment pour Internet.  Son collègue du Ghana s’est montré préoccupé par ces scènes de repas familial où chacun est collé à son écran.  Il a voulu savoir comment la connectivité pouvait être utilisée pour véritablement rassembler les communautés au lieu de les fragmenter.

Il faut décider de se déconnecter pour se reconnecter avec les individus qui nous entourent, a répondu l’intervenant de l’Institut international de la famille de Doha pour qui il revient aux familles de prendre la décision de créer des espaces sans wifi ou de se promener ensemble dans des espaces publics sans se connecter.  Il faut donc créer plus d’espaces publics capables de favoriser les relations interpersonnelles, a soumis comme idée le panéliste de l’Université de Washington.  Au final, il faut rétablir l’équilibre entre la vie en ligne et la vie physique, a résumé le modérateur.

L’expert de l’Arizona State University a conseillé pour cela de faire preuve de leadership et d’insister sur l’importance des relations interpersonnelles.  Il faudrait envisager des sanctions en cas d’utilisation d’un téléphone portable à table, a-t-il proposé en imaginant une peine pour les contrevenants: ils seraient contraints de suivre le « compte Twitter du Président » pendant deux heures!  Contrastant avec cette idée, la panéliste de la Fédération internationale des associations et institutions de bibliothèques a cité l’exemple de sa mère qui avait refusé d’acheter une machine à laver la vaisselle car elle voyait dans cette corvée un véritable moment d’échanges pour la famille. 

Suite à cet échange, les représentants de l’Afrique du Sud et du Kenya ont donné un tour d’horizon de l’usage que font leurs pays de la technologie pour combattre la pauvreté.  De même pour leur homologue du Burkina Faso, pays où les TIC sont utilisées pour faciliter le paiement des impôts.  Soulignant que la pauvreté dans son pays a un visage rural, il a conseillé d’aborder avec tact la question de l’utilisation des technologies, sans perdre de vue l’importance du capital humain.  Il a également mis en évidence le revers de la médaille: on connaît aujourd’hui mieux les autres communautés que la sienne propre.  Pour la délégation de Cuba, l’accès numérique doit viser l’amélioration du bien-être de la personne et passe par une véritable coopération internationale. 

La discussion a aussi soulevé plusieurs questions.  « Que peut faire la Commission pour mettre les progrès techniques au service du progrès social? » a demandé l’Union européenne, appuyée par une ONG.  « Que font les gouvernements pour aider les laissés pour compte », a interrogé la Fédération internationale du vieillissementSoroptimist a souligné que les femmes ont besoin de beaucoup plus que l’accès au numérique, tandis qu’une autre ONG s’est inquiétée du risque d’agression en ligne et a appelé à généraliser les programmes de lutte en la matière.

Suite à ces commentaires, la panéliste de l’Institut international de la famille de Doha a insisté sur le rôle de l’éducation, jugeant par ailleurs nécessaire de repenser l’accès des enfants au numérique.  Elle a aussi déploré le manque de réglementation des sociétés technologiques.  Le panéliste du Centre de savoir international sur le développement de la Chine a insisté sur l’importance de l’apprentissage continu.  Celui d’Arizona State University a proposé que chaque pays définisse la meilleure façon d’encourager la concurrence des moteurs de recherche, entre autres.  Enfin, le représentant de l’Université de Washington a rappelé que les sociétés technologiques ont des visées commerciales et a jugé souhaitable qu’elles soient conviées aux discussions de l’ONU pour les aider à prendre conscience de ce que l’on attend d’elles. 

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