Troisième session,
42e séance – matin
MER/2112

Négociations sur la biodiversité marine: les délégations débattent de la responsabilité et de la portée des études d’impact sur l’environnement

Au quatrième jour du nouveau cycle de négociations intergouvernementales pour l’élaboration d’un instrument international sur la protection de la biodiversité marine, les débats ont été animés, ce matin, par le Groupe de travail officieux sur les études d’impact sur l’environnement, lesquelles constituent l’un des principaux volets du futur accord.  À cette occasion, les délégations ont principalement fait valoir la primauté de l’État partie dès lors qu’il s’agit d’évaluer l’impact sur l’environnement d’une activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle. 

Comme lors des premières journées, les délégations ont progressé article par article, en se basant sur l’avant-projet d’accord qui a été élaboré par Mme Rena Lee, la Présidente de la Conférence intergouvernementale, avec l’aide de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer.  Ce document reprend les quatre principaux thèmes retenus en 2011 pour le périmètre du futur instrument, dont celui des « études d’impact sur l’environnement ».  Les débats de ce matin ont porté sur trois des 20 articles de ce chapitre. 

En ouverture de la discussion sur le paragraphe 1 de l’article 30, intitulé « Vérification préliminaire », la Palestine, au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a proposé de supprimer la référence au promoteur de l’activité prévue, jugeant que c’est à l’État partie et à lui seul de déterminer si l’évaluation de l’impact sur l’environnement est requise.  De même, le G77 a souhaité que soit retirée la mention d’une « activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle ».  Cette double position a été partagée par l’ensemble des intervenants, notamment par les pays du groupe CLAM (Core Latin American) et de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Elle a même donné lieu à un rapprochement inattendu entre le G77 et les États-Unis –exceptionnellement en phase sur tous les alinéas de l’article- que les autres délégations n’ont pas manqué de saluer.  Favorable à une vérification plus générale s’agissant des conditions de vérification préliminaires, l’Union européenne a elle aussi approuvé ce paragraphe.

S’agissant du paragraphe 2, la première phrase a été validée par une majorité de délégations.  Les débats ont essentiellement porté sur le caractère « préliminaire » de la vérification et sur la deuxième phrase, selon laquelle l’étude d’impact s’impose « si l’activité prévue doit être exécutée à l’intérieur ou à proximité d’une zone désignée pour son importance ou sa vulnérabilité ».  L’Union européenne a demandé la suppression de ces deux mentions, rejointe par la Nouvelle-Zélande et le Canada.  Celui-ci a du reste relevé que la deuxième partie du paragraphe est déjà visée par l’article 27 du projet d’accord relatif aux « zones désignées comme importantes ou vulnérables sur les plans écologique ou biologique ».  Le Japon a lui estimé que ce paragraphe n’est pas nécessaire puisqu’il incombe aux États parties de décider si le seuil prévu par l’article 206 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est atteint. 

Le paragraphe 3, consacré au cas de figure où il n’y aurait pas lieu de procéder à une évaluation de l’impact sur l’environnement, a été plus discuté.  Nombre de délégations ont notamment contesté le principe d’une vérification des informations fournies par l’État partie à l’organe (ou le réseau) scientifique et technique qui serait créé par le futur instrument.  Les États-Unis, rejoints par le Japon et le Canada, ont catégoriquement rejeté cette possibilité, écartant également celle d’un contrôle par une organisation intergouvernementale.  Ils ont en revanche estimé utile de rendre publiques les informations ayant conduit un État partie à renoncer à une évaluation, une suggestion également formulée par la Norvège.  La Fédération de Russie a, quant à elle, proposé de supprimer ce paragraphe, rappelant son opposition à la création d’une institution scientifique dans le cadre de l’accord. 

Passant à l’article 31, intitulé « Détermination de la portée des études », les délégations ont débattu du paragraphe 1 qui envisage les « procédures » que les États parties devraient établir à cette fin.  Si le G77, le groupe CLAM et le groupe des États d’Afrique ont soutenu le libellé proposé, les États-Unis, le Canada et la Norvège ont à nouveau fait valoir que lesdites procédures devraient être celles, internes, de l’État partie.  De leur côté, les Philippines se sont déclarées favorables à l’établissement de procédures par un organe scientifique et technique. 

Aucun consensus ne s’est dégagé non plus sur le paragraphe 2 portant sur « l’identification des principaux [impacts] [enjeux] environnementaux [, sociaux, économiques, culturels et autres] ».  Si la plupart des intervenants ont approuvé l’inclusion de cette question dans le futur accord, ils se sont divisés sur les termes et sur la deuxième partie relative à la détermination de solutions de remplacement et des effets potentiels de l’activité prévue.  La Norvège, tout comme l’Union européenne et le Canada, a souhaité savoir quel serait le niveau de détail du futur accord, tandis que Singapour a jugé prématuré, à ce stade, de faire référence aux aspects socioéconomiques, jugeant plus pertinent d’en rester aux enjeux environnementaux. 

Le paragraphe 1 de l’article 32 intitulé « Étude d’impact et évaluation » a été généralement approuvé comme suit: « Un État partie qui a déterminé qu’une activité prévue relevant de sa juridiction ou de son contrôle nécessitait une étude d’impact sur l’environnement en vertu du présent Accord veille à ce que la prévision et l’évaluation des impacts dans une telle étude soient effectuées conformément à la présente partie, en utilisant les meilleures informations scientifiques et connaissances traditionnelles disponibles ».  Le paragraphe 2, qui dispose que « rien […] n’empêche les États Parties, en particulier les petits États insulaires en développement, de mener des études d’impact sur l’environnement conjointes », a, lui aussi, été globalement validé. 

Les délégations se sont davantage divisées sur le paragraphe 3, relatif à la question de savoir à qui il revient de se charger de l’étude d’impact.  Si le G77 a appuyé la variante 1 selon laquelle un État partie peut charger un tiers de cette tâche, l’Union européenne a déclaré ne pas pouvoir l’approuver sans savoir qui est le tiers.  Le Canada s’est, quant à lui, dit favorable à cette variante parce qu’elle ne crée pas d’obligation pour les États parties.  La variante 2, qui prévoit que l’étude soit menée par un consultant indépendant nommé par un groupe d’experts désigné par l’organe scientifique et technique, a été largement rejetée.  Au nom des petits États insulaires en développement, les Îles Salomon ont néanmoins proposé de fondre les deux variantes de ce paragraphe avec le paragraphe 4 relatif à l’établissement d’une liste d’experts.  Alors que certaines voix ont plaidé pour le rattachement de ces articles au chapitre sur le renforcement des capacités, la Norvège a vu dans cette idée de fusion une « bonne idée ».  « Mais qui assumerait les coûts et qui chargerait les experts de ces tâches? » s’est-elle interrogée. 

La Conférence intergouvernementale poursuivra ses travaux demain matin, vendredi 23 août, à 10 heures, en débattant au sein de son Groupe de travail officieux sur les études d’impact sur les ressources génétiques marines, y compris les questions liées au partage des avantages.

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