Cinquante-septième session,
6e et 7e séances plénières, Matin & après-midi
SOC/4876

La Commission du développement social se préoccupe du sort des plus vulnérables face aux catastrophes naturelles

Les graves répercussions des catastrophes naturelles sur les catégories les plus vulnérables de nos sociétés, qui affectent en moyenne 350 millions de personnes chaque année, ont mobilisé ce matin l’attention de la Commission du développement social réunie pour un « débat de haut niveau ».  L’après-midi a été consacré à un dialogue interactif avec des hauts responsables du système des Nations Unies, qui ont débattu sur les politiques budgétaires, salariales et sociales nécessaires à la lutte contre les inégalités.

Le débat de haut niveau du matin portait sur des « questions nouvelles » que la Commission a mises à son ordre du jour cette année, précisément sur le thème suivant: « réduire les inégalités en donnant des moyens d’agir aux personnes touchées par des catastrophes naturelles ou anthropiques: tenir compte des conséquences particulières qu’ont ces catastrophes pour les personnes handicapées, les personnes âgées et les jeunes ».

Face à la prévalence croissante des catastrophes naturelles qui, entre 1998 et 2017, ont provoqué la mort de 1,3 million de personnes et fait 4,4 milliards de blessés, les délégations ont constaté que le degré de résilience dépend fortement du niveau socioéconomique des populations et de leur facilité d’accès aux secours.  Or, les personnes handicapées, les personnes âgées et les jeunes subissent de manière disproportionnée les conséquences négatives de ces phénomènes, notamment en raison de leur mobilité réduite.

Cette situation a été illustrée de manière frappante par la Présidente de l’American Association of Retired Persons Fondation (AARP) qui a indiqué que trois quarts des décès provoqués par le passage de l’ouragan Katrina, à la Nouvelle-Orléans, avaient été recensés chez les personnes de plus de 60 ans, alors que celles-ci ne représentaient que 15% de la population locale.  Et pendant le récent incendie « Camp Fire » qui a détruit la ville de Paradise, en Californie, où la moitié de la population était âgée, de nombreux seniors n’avaient aucun moyen de transport pour évacuer.

Sachant qu’en 2035 la population de plus de 65 ans sera plus nombreuse que les jeunes, l’experte a recommandé de donner la priorité à l’autonomisation des personnes âgées vivant dans les zones à risque de catastrophes, et à leur inclusion dans les efforts de planification.  Il faut également élaborer des codes d’accessibilité pour la reconstruction post-catastrophe.

Mais par-dessus tout, il faut tenir compte de l’impact de la pauvreté sur la vulnérabilité des personnes âgées, des handicapés ou des jeunes, a-t-elle insisté.  D’ailleurs, après le passage de l’ouragan Maria, à Puerto Rico, le taux de mortalité le plus élevé était chez les habitants pauvres et âgés, y compris ceux qui étaient restés chez eux et qui manquaient de vivres, d’électricité et de soins.

Le manque de mobilité des personnes vulnérables était également au centre des préoccupations du Directeur de la politique mondiale de « Influencing and Research in the Action on Disability and Development International », qui a indiqué qu’au Bangladesh, après le passage du cyclone Sidr en 2007, personne n’avait pensé à porter secours aux handicapés cloîtrés chez eux.

De son côté, le Directeur du Bureau pour le développement social au sein du Ministère des affaires étrangères de la République islamique d’Iran a attiré l’attention sur la vulnérabilité particulière des personnes souffrant de handicap psychosocial ou mental qui, s’est-il inquiété, ne sont souvent pas prises en compte lors de l’élaboration des dispositifs de secours qui pensent avant tout aux handicapés moteurs.  Alors que seulement 17% des handicapés seraient au fait des plans d’évacuation en cas de catastrophe, il a suggéré d’élaborer un système de communication qui privilégie le visuel, expliquant que certaines personnes souffrant de handicap psychosocial ou mental ont du mal à s’exprimer ou à réagir aux éléments textuels.

Pour ce qui est des jeunes, de nombreuses délégations ont exhorté à tirer parti de leur expertise dans les technologies de l’information et des communications (TIC) pour compléter les activités de secours sur le terrain.  À titre d’exemple, un membre du Conseil national de la jeunesse du Népal a indiqué que lors du séisme qui a frappé son pays en 2015, le déploiement d’un système de cartographie par GPS mis sur pied par des jeunes avait permis de surmonter les barrières de communication et d’accélérer l’acheminement des secours.

Les discussions se sont également focalisées sur le rôle des ONG locales, considérées par beaucoup comme « absolument cruciales ».  Des appels ont toutefois été lancés pour veiller à ce que les ONG les plus importantes ne volent pas la couverture des plus petites.  Certains panélistes ont d’ailleurs constaté que les ONG locales s’avèrent souvent plus efficaces sur le terrain, mais qu’elles sont souvent exclues des exercices de simulation.  D’autres ont en outre jugé inacceptable de prétendre que le coût de l’assistance aux personnes âgées est trop élevé.

La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, jeudi 14 février, à partir de 10 heures.

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

Débat de haut niveau sur des questions nouvelles: « réduire les inégalités en donnant des moyens d’agir aux personnes touchées par des catastrophes naturelles ou anthropiques: tenir compte des conséquences particulières qu’ont ces catastrophes pour les personnes handicapées, les personnes âgées et les jeunes »

Ce débat a été l’occasion d’examiner les moyens de réduire la vulnérabilité de ces catégories de personnes face à la prévalence croissante des catastrophes naturelles qui, entre 1998 et 2017, ont provoqué la mort de 1,3 millions de personnes et fait 4,4 milliards de blessés.

La modératrice de la discussion, Mme CHARLOTTE MCCLAIN-NHLAPO, Conseillère mondiale pour le handicap au Pôle mondial d’expertise en développement social, urbain et rural, et résilience du Groupe de la Banque mondiale, a présenté le contexte dans lequel des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes affectent 350 millions de personnes chaque année.  Le degré de résilience dépend fortement du niveau socioéconomique des populations et de leur facilité d’accès aux secours, a-t-elle relevé en soulignant le cas des personnes handicapées, des personnes âgées et des jeunes qui subissent de manière disproportionnée les conséquences négatives de ces phénomènes. 

Interventions liminaires

M. MESBAH ANSARI DOGAHEH, Directeur du Bureau pour le développement social au sein du Ministère des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, a rappelé l’adoption de certains textes phares en matière de gestion des catastrophes, citant par exemple la Stratégie d’Incheon visant à faire du droit une réalité pour les personnes handicapées en Asie et dans le Pacifique.  Ce texte invite à tenir compte du handicap lors de l’élaboration des stratégies de réponse et de gestion.  Il a aussi mentionné le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015–2030.

L’expert s’est attardé sur la situation des personnes handicapées, notamment les plus vulnérables de cette catégorie, les personnes souffrant d’un handicap psychosocial ou mental.  Il a donné un exemple de bonne préparation en racontant ce qui s’était passé à Urakawa, dans le nord du Japon, lors du tsunami de 2011: les personnes souffrant d’un handicap psychosocial avaient été évacuées en premier, le résultat d’une formation prodiguée avant la catastrophe.  De même en Iran, après le séisme qui a frappé Kermanshah en 2017, certaines ONG ont dépêché des équipes sur place pour venir en aide aux personnes souffrant d’autisme et prodiguer des conseils à leur famille.

M. Dogaheh a rapporté que selon un sondage effectué à l’échelon international, seulement 17% des handicapés étaient au fait des plans d’évacuation en cas de catastrophe.  Il a aussi fait observer que lors de l’élaboration des plans de secours, on tient plus souvent compte des personnes souffrant de handicaps physiques que psychosociaux ou mentaux.  Afin de mieux inclure ces dernières, il a suggéré d’élaborer un système de communication qui privilégie le visuel, expliquant que certaines de ces personnes ont du mal à s’exprimer ou à réagir aux éléments textuels.  Il faut donc prévoir des posters, des panneaux, ou encore des plans lumineux. 

Le cas du Bangladesh, pays particulièrement exposé aux catastrophes, a ensuite été présenté par M. MOSHARRAF HOSSAIN, Directeur de la politique mondiale de « Influencing and Research in the Action on Disability and Development International ».  En 2007, après le passage du cyclone Sidr, les habitants s’étaient mobilisés pour porter les secours, mais personne n’avait pensé aux handicapés cloîtrés chez eux.  Une campagne de porte à porte avait cependant été lancée par une ONG pour laquelle travaillait M. Hossain afin de les identifier et de leur venir en aide.  Cette campagne avait donné lieu à des propositions présentées au Gouvernement, portant notamment sur l’importance de créer des abris adaptés aux besoins des personnes handicapées.

Le panéliste a aussi rappelé l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza, à Dhaka en 2013, qui avait fait plus de 1 000 morts.  De nombreuses personnes blessées lors de cette catastrophe souffrent à présent d’un handicap à vie.  Il a averti que les catastrophes industrielles frappent durement les pays en développement qui n’ont pas les infrastructures adéquates pour y parer.

M. Hossain a également parlé de l’accueil que réserve le Bangladesh à plus d’un million de réfugiés rohingya, précisant que selon les estimations, près de 15% de cette population souffre d’un handicap.  Des efforts sont déployés pour renforcer l’inclusion de ces derniers, a-t-il assuré.

L’expert a conclu son exposé par un appel à mobiliser les collectivités, pour qu’elles mettent en œuvre des stratégies de gestion des catastrophes et identifient des solutions.  Il faut aussi assurer la participation des personnes marginalisées et créer un environnement respectueux des droits des personnes handicapées.  Placer l’inclusion au cœur de l’action des Nations Unies et responsabiliser le secteur privé et les gouvernements sont d’autres recommandations que M. Hossain a faites, en insistant sur l’importance de verser des dommages et intérêts aux victimes.

Sur un autre continent, aux États-Unis, un adulte sur quatre vit avec une forme de handicap.  C’est ce qu’a indiqué Mme MARCIE ROTH, Présidente de « Partnership for Inclusive Disaster Strategies », en précisant que si on tient compte des enfants, des personnes âgées, des personnes souffrant de maladies chroniques et autres, c’est plutôt 80% de la population qui souffrent de lacunes en matière de mobilité et qui sont, de ce fait, particulièrement vulnérables en cas de catastrophe.  En outre, les personnes à la fois handicapées et âgées ont deux à quatre fois plus de risques d’être blessées ou de mourir en cas de catastrophe, a-t-elle ajouté.  Mme Roth a ensuite cité les mérites de l’Équipe spéciale du Comité permanent interorganisations sur la prise en compte des personnes handicapées dans l’action humanitaire.

Aux États-Unis et dans les Caraïbes, ce sont les personnes âgées qui sont les plus touchées par les catastrophes naturelles, a enchaîné Mme LISA MARSH RYERSON, Président de l’American Association of Retired Persons Fondation (AARP).  Elle a notamment indiqué que trois quarts des décès provoqués par le passage de l’ouragan Katrina, à la Nouvelle-Orléans, avaient été recensés parmi les personnes de plus de 60 ans, alors que celles-ci ne représentaient que 15% de la population locale.  Les personnes de plus 65 ans étaient également surreprésentés parmi les morts après la tempête Sandy.

La panéliste a expliqué qu’il est difficile à ces personnes, voire impossible, d’accéder aux sites d’évacuation, faute de moyens de transport.  En outre, certaines d’entre elles rechignent à quitter leur domicile, par crainte de se retrouver dans un lieu qui ne leur est pas familier.

Elle a ensuite rappelé les 3 000 morts résultant du passage de l’ouragan Maria, à Puerto Rico, précisant qu’une fois encore, le taux de mortalité le plus élevé était chez les habitants pauvres et âgés, surtout les hommes de plus de 65 ans.  Ceux qui étaient restés chez eux avaient peu d’accès aux vivres, à l’électricité et aux soins, les hôpitaux ayant été mis hors d’usage.  D’où l’importance, lors de l’élaboration des plans de secours, de tenir compte de l’approvisionnement en électricité, car de nombreux médicaments, pour le diabète notamment, doivent être maintenus au frais.

Sachant qu’en 2035, la population de plus de 65 ans sera plus nombreuse que les jeunes, l’experte a recommandé de donner la priorité à l’autonomisation des personnes âgées vivant dans les zones à risque de catastrophes, et à leur inclusion dans les efforts de planification.  Il faut également élaborer des codes d’accessibilité pour la reconstruction, a-t-elle insisté, avant de recommander l’organisation d’ateliers pour dispenser des informations pertinentes aux personnes âgées sur les plans de gestion de catastrophe.  Pendant les récents incendies de forêts en Californie, notamment le « Camp Fire » qui a détruit la ville de Paradise où la moitié de la population était âgée, de nombreux seniors n’avaient aucun moyen de transport pour évacuer, a-t-elle indiqué à titre d’exemple.

Mais par-dessus tout, a souligné Mme Ryerson, il faut tenir compte de l’impact de la pauvreté sur la vulnérabilité des personnes âgées, des handicapés ou des jeunes.  Les communautés les plus pauvres sont souvent les plus durement touchées.  Et lorsque que la valeur immobilière s’effondre après une catastrophe, ces personnes n’ont souvent pas les moyens de faire les réparations nécessaires, ni de reconstruire en plus solide.  Un logement sûr et abordable est la base du bien-être, a-t-elle insisté.  Or, ceux qui n’ont pas les moyens de se déplacer, n’ont pas non plus les ressources nécessaires pour atténuer l’impact des catastrophes.  Avant d’être une question de politique ou de logistique, c’est une question morale.  « Pourquoi continuons-nous d’accepter que les personnes les plus vulnérables vivent dans les endroits les plus vulnérables? »  Il faut des mesures concrètes pour changer cet équilibre, a-t-elle martelé.

Commentateurs

M. ABDULLAH EREN, Conseiller principal du Président turc et Directeur de l’Agence pour les Turcs vivant à l’étranger et communautés liées, a indiqué que quatre millions de Syriens sont actuellement accueillis par la Turquie, et que nombre de ces réfugiés sont intégrés à la vie sociale du pays.  Le Gouvernement a adopté une politique de porte ouverte pour leur venir en aide à la suite du conflit.  Leur protection ne s’est jamais faite dans le cadre d’un campagne politique, a-t-il précisé, mais plutôt pour répondre à un impératif humanitaire.  En outre, 500 000 jeunes Syriens suivent une éducation supérieure en Turquie, et 12 000 élèves réfugiés bénéficient d’une bourse d’études qui, a-t-il précisé, fonctionne comme un instrument d’inclusion sociale.

Les jeunes sont aussi durement touchés par les catastrophes naturelles, a rappelé Mme JOLLY AMATYA, Membre du Conseil national de la jeunesse du Népal et Directrice exécutive de l’Initiative pour les fermes piscicoles durables, en expliquant qu’ils se retrouvent souvent séparés de leurs proches ou contraints d’interrompre leur scolarisation.  Elle s’est inquiétée du fait que de nombreuses zones propices aux catastrophes ne sont dotées d’aucune stratégie de secours, encore moins pour les personnes vulnérables.  Dans de nombreux cas, c’est la politique du « chacun pour soi » qui prime, a-t-elle déploré.

Lors du séisme qui a frappé le Népal en 2015 et qui a touché huit millions de personnes, les technologies de l’information et des communications (TIC) déployées par les jeunes ont été essentielles pour surmonter les barrières de communication, a relevé Mme Amatya.  Elle a cité notamment le déploiement d’un système de cartographie par GPS pour accélérer l’acheminement des secours.  À son avis, tous les plans de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration) doivent comporter un cadre permettant d’évaluer et de déployer rapidement les technologies appropriées, tout en tirant parti du savoir local.

Débat interactif

Le débat a surtout été l’occasion pour les États Membres de dresser, à l’instar de l’Union européenne, la liste des initiatives prises à l’échelon national ou régional pour venir en aide aux personnes âgées, handicapées ou jeunes en cas de catastrophe.

L’Argentine a notamment expliqué avoir créé une cohorte de Casques blancs pour venir en aide aux sinistrés.  Le Maroc a indiqué disposer d’une politique de prise en charge des enfants autistes, tandis que la France a parlé des plans d’information mis en place à l’intention des personnes âgées en cas de canicule.  Le Royaume-Uni s’est enorgueilli d’avoir organisé le premier sommet mondial sur les catastrophes humanitaires et le handicap.

De son côté, le Brésil a indiqué qu’après l’effondrement, au début du mois, d’un barrage à Brumadinho, les personnes vulnérables avaient été secourues à titre prioritaire.  Et en Ukraine des équipes de soutien psychosocial ont été mises en place à proximité de la Ligne de contact dans l’est du pays afin de venir en aide aux personnes dont la mobilité est réduite en raison du conflit.  Cette délégation s’est également interrogée sur le meilleur moyen d’établir des liens entre les politiques humanitaires et de développement.

Les Philippines ont parlé de l’impact sur les jeunes du conflit contre les Moro dans la région de Mindanao.  La délégation a suggéré que les jeunes victimes de conflit puissent suivre un mentorat pour ensuite devenir des conseillers pour leurs pairs.  Il faut aussi renforcer les politiques relatives à la santé mentale, revoir à la hausse les allocations budgétaires en faveur des jeunes, et tirer parti de l’expertise des jeunes dans les nouvelles technologies, a-t-elle ajouté.

Sur ce dernier point, la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a fait savoir qu’en Mongolie, pendant un hiver particulièrement rigoureux qui a décimé les cheptels, des groupes de jeunes s’étaient organisés pour fournir des informations aux communautés les plus touchées.

La déléguée jeunesse de la Suisse est par ailleurs intervenue pour parler de la « grève du climat » lancé par les jeunes suisses et du phénomène des réfugiés environnementaux.  Ces jeunes font face à un risque accru de chômage et le phénomène risque de creuser les inégalités sociales. 

En ce qui concerne les plans de secours, Soroptimist International a souligné qu’ils doivent tenir compte des évolutions urbaines et démographiques.  S’il faut mettre une population âgée ou handicapée à l’abri, y aura-t-il moyen de recharger les chaises roulantes électriques, de dispenser des informations en langue des signes, ou encore de secourir des animaux domestiques auxquels sont souvent très attachées les personnes âgées?

De son côté, la Finlande a appelé à réfléchir au rôle à octroyer aux ONG locales pour venir en aide aux sinistrés, à la suite de quoi la Présidente de « Partnership for Inclusive Disaster Strategies » a souligné que le rôle des ONG est absolument crucial.  Il faut toutefois prendre garde à ce que les ONG les plus importantes ne volent pas la couverture des plus petites, a-t-elle dit.  Elle a aussi jugé nécessaire d’inclure la responsabilité dans les indicateurs de succès des opérations de secours.  En outre, il n’est pas acceptable de prétendre que le coût de l’assistance aux personnes âgées est trop élevé, s’est offusquée la panéliste.  Dans une même veine, l’experte d’American Association of Retired Persons (AARP) a déploré que l’on considère trop souvent les personnes vulnérables comme des problèmes à régler plutôt que comme des atouts.

Abordant la question de l’allocation des ressources, le Directeur de la politique mondiale de « Influencing and Research in the Action on Disability and Development International » a constaté que les ONG communautaires sont souvent plus efficaces que les grandes ONG.  Or, les exercices de simulation incluent trop rarement les ONG locales, ainsi que les personnes handicapées elles-mêmes, a noté le Directeur du Bureau pour le développement social au sein du Ministère des affaires étrangères de la République islamique d’Iran qui a, en outre, attiré l’attention sur le problème des troubles post-traumatiques.

Le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes est également intervenu, ainsi que la République arabe syrienne qui a déclaré que la Turquie envoie des réfugiés syriens vers la Grèce dans « des bateaux de la mort » afin de « se soustraire à ses responsabilités dans le cadre d’un pacte conclu avec l’Europe ».  Il a également accusé le Gouvernement turc de vouloir exploiter les réfugiés syriens dans le cadre du prochain scrutin électoral.

Cette intervention a valu au représentant de la Turquie d’exercer son droit de réponse pour rejeter les accusation « infondées » de la délégation syrienne tout en précisant qu’il ne comptait pas « l’honorer » en répondant aux « propos infondés d’un régime qui a perdu depuis longtemps toute légitimité ».

Le représentant syrien a ensuite présenté une motion d’ordre pour demander que le nom officiel de son pays soit utilisé.

Dialogue interactif sur le thème prioritaire avec des hauts responsables du système des Nations Unies

Examen des plans et programmes d’action pertinents des Nations Unies concernant la situation d’un groupe social

L’objectif de ce dialogue, a rappelé la Vice-Présidente de la Commission, Mme CAROLINA POPOVOCI, de la République de Moldova, est d’assurer la cohérence politique aux niveaux mondial, régional et national dans la lutte contre les inégalités et la promotion de l’inclusion sociale. 

La Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CELAC), Mme ALICIA BÁRCENA, a alerté sur l’urgence qu’il y a à réaliser les objectifs de développement durable dans sa région et a insisté sur le principe de l’égalité qui est « un droit » et une condition préalable au progrès économique.  L’égalité a un lien direct avec la productivité, a-t-elle dit en prenant comme exemple les pays nordiques.  En ce qui concerne l’Amérique latine, la région la plus inégale au monde selon Mme Bárcena, la situation s’est détériorée à nouveau en 2015.  On y recense 109 millions de pauvres et 60 millions de très pauvres.  Mme Bárcena a aussi fait remarquer que « la pauvreté a le visage des enfants » et qu’elle touche aussi fortement les peuples autochtones.

La première des solutions à ce problème doit être trouvée dans le travail, a recommandé la Secrétaire exécutive.  Or, 64% des travailleurs de la région sont employés dans le secteur informel.  En outre, plus de la moitié de la population d’Amérique latine ne contribue pas à la fiscalité.  Quant aux femmes, 60% d’entre elles travaillent mais ne sont pas rémunérées.  L’autre solution est la double inclusion: l’inclusion sociale et l’insertion professionnelle.  Il faut donc des politiques publiques supplémentaires dans les domaines de l’insertion professionnelle et de la protection sociale si l’on veut arriver à réduire les inégalités et augmenter les revenus des ménages, a fait observer Mme Bárcena.  Il faut par exemple augmenter les dépenses sociales, faciliter les transferts de fonds et lutter contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites qui coûtent 304 milliards en manque à gagner.  Elle a aussi invité à se préparer aux nouvelles technologies qui changent la donne. 

Si les problèmes sont les mêmes pour les autres commissions économiques et sociales, comme l’a fait remarquer M. MOUNIR TABET, Secrétaire exécutif par intérim de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), la situation au sein de la CESAO s’est aggravée avec les guerres et leurs conséquences comme les migrations forcées.  À cela s’ajoute la forte proportion de jeunes dans la région.  En outre, en 2050, il devrait y avoir plus de 100 millions de personnes âgées, ce qui requiert une politique adaptée.  La région compte aussi plus de 29 millions de réfugiés dont 20 millions de Syriens, ce qui pèse énormément sur les budgets des pays riverains. 

Au sein de la CESAO, plus 70% de la population n’est pas couverte par la protection sociale, a encore signalé M. Tabet tout en indiquant que plusieurs pays ont amélioré l’aide destinée aux groupes vulnérables, avec un meilleur recensement des membres de ces groupes et des données fiables.  La CESAO a élaboré des politiques pour une meilleure réinsertion des jeunes, a poursuivi M. Tabet en citant notamment les politiques inclusives sur le chômage des jeunes qui ont été menées en Jordanie.  Les jeunes peuvent être des acteurs du développement économique et social, a-t-il rappelé avant de parler aussi des personnes âgées qui peuvent être des outils du progrès si on les intègre dans les processus de prise de décisions.  En conclusion, le Secrétaire exécutif a recommandé de revoir les politiques budgétaires pour qu’elles tiennent mieux compte des besoins de ces groupes sociaux.  La CESAO a d’ailleurs créé un système de suivi des dépenses sociales dans trois pays afin d’avoir un ensemble de données qui enrichiront la réflexion politique en vue de parvenir au développement social. 

M. KAVEH ZAHEDI, Directeur exécutif adjoint pour le développement durable de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a évoqué quelques défis auxquels est confrontée la CESAP, comme la présence dans la région de quelques multimilliardaires qui vivent aux côtés d’un grand nombre de pauvres.  Il a insisté sur l’importance de la protection sociale qui permet de créer une population active dynamique.  Chaque dollar investi dans la protection sociale rapporte 10 fois plus pour le développement social, a relevé M. Zahedi en insistant sur l’importance de l’investissement social qui a des retombées majeures pour la réalisation des objectifs de développement durable.  Une hausse de 11% des investissements dans le secteur social permettrait de sortir de la pauvreté plus de trois millions de personnes, a-t-il encore illustré.  Outre l’amélioration de la protection sociale, le Directeur exécutif a préconisé l’investissement dans la lutte contre les inégalités technologiques qui actuellement se creusent.  La CESAP a élaboré des outils et des politiques facilement adaptables par les pays membres dans le domaine de la protection sociale. 

Lutter contre les inégalités est possible, a assuré M. ABDOULAYE MAR DIEYE, Administrateur adjoint et Directeur du Bureau d’appui à l’élaboration des politiques et programmes du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), en préconisant pour cela d’« adopter des politiques, sur les plans budgétaire, salarial et dans le domaine de la protection sociale ».  Il faut, premièrement, élargir l’assiette fiscale des pays en développement, car plus les ressources nationales seront importantes, plus elles pourront être orientées vers le développement social.  L’ONU estime d’ailleurs que les pays à faible revenu devront augmenter leurs dépenses publiques annuelles de 30% pour réaliser les objectifs de développement durable.  Chaque dollar investi pour améliorer l’administration fiscale peut rapporter 100 dollars par les impôts collectés.  Deuxièmement, M. Mar Dieye a prévenu des risques des politiques de redistribution menées par de nombreux gouvernements pour attirer les investissements privés: il en résulte un manque à gagner en termes de ressources fiscales dont ces pays ont pourtant besoin pour leur développement.  En troisième lieu, il a indiqué qu’il était important de réfléchir aux politiques macroéconomiques pour lutter contre les inégalités et pour éviter les défaillances du marché.  Le PNUD milite pour que les pays adoptent des politiques intégrées leur permettant de faire des progrès et assurer que personne ne soit laissé sur le côté, en utilisant le Programme de développement durable à l’horizon 2030 comme cadre de travail. 

M. VINICIUS CARVALHO PINHEIRO, Représentant spécial de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a tiré la sonnette d’alarme en faisant l’état des lieux de la réalisation des objectifs de développement durable.  Trop d’indicateurs ne bougent pas, a-t-il dit en s’alarmant en particulier de la stagnation des salaires et de l’absence de protection sociale pour des centaines de millions de personnes.  Comment se remettre sur la voie pour atteindre ces objectifs? a demandé M. Pinheiro.

La protection sociale « universelle » est au cœur des débats actuellement, a remarqué M. PAUL LADD, Directeur de l’Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social, qui a préconisé, pour y parvenir, une sorte de filet de sécurité pour accueillir « ceux qui ont échoué momentanément sur la route de la fortune ».  Ensuite, une politique fiscale progressive est essentielle car elle permet de s’attaquer au problème de la concentration de richesses entre les mains d’une poignée de riches qui privent les gouvernements de moyens pour assurer le progrès social.  M. Ladd a également souligné l’importance de la transparence des politiques avant de recommander de bien tenir compte des conséquences des changements technologiques et climatiques. 

Débat interactif

Le modérateur, M. ELLIOTT HARRIS, Économiste en chef et Sous-Secrétaire général pour le développement économique au Département des affaires économiques et sociales, a lancé la discussion en priant les États Membres de partager leurs expériences individuelles en matière de protection sociale et de réduction des inégalités. 

La Finlande a dit qu’en dépit du modèle social nordique « tant vanté », les pays nordiques sont confrontés au problème de la pauvreté intergénérationnelle.  La CESAP a d’ailleurs reconnu l’importance de cette question pour sa région.  C’est aussi la première commission économique à tenir compte du handicap dans ses politiques et programmes, a-t-il rappelé.  Le PNUD a reconnu l’importance de s’attaquer à la pauvreté horizontale, qui découle notamment du manque de gouvernance.  En effet, dans beaucoup de pays, des pans entiers de territoires échappent à l’administration en général et à l’administration fiscale en particulier. 

La protection sociale a prouvé son efficacité à renforcer la résilience des populations après la crise financière de 2008, a rappelé le modérateur.  « Qu’en pensez-vous? »

La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l'agriculture a fait remarquer combien la protection sociale est essentielle pour réduire la pauvreté rurale, en particulier.  Elle doit être combinée avec des politiques encourageant la productivité pour avoir des résultats concrets à long terme.  En effet, les investissements productifs associés à la protection sociale peuvent créer des cercles vertueux de développement local, accélérer les efforts pour atteindre l’objectif « zéro faim » et créer des moyens de subsistance ruraux. 

La représentante de Soroptimist International a recommandé notamment l’optimisation des dépenses pour l’égalité des sexes, et pour les soins aux enfants, aux personnes âgées et aux personnes atteintes du VIH/sida.  Elle a aussi recommandé de protéger les droits des travailleurs sociaux et l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. 

Une représentante de la société civile a demandé si une sorte de « taxe Tobin » était envisageable, c’est-à-dire une taxation des transactions monétaires internationales visant à limiter la volatilité des taux de change.  « C’est très difficile », a répondu le représentant du PNUD en rappelant l’initiative menée par l’ancien Président français Jacques Chirac sur la question.  « Le monde n’est pas près de l’accepter, mais attendons de voir ce qui se passera à la prochaine réunion du G20 », a-t-il dit avant d’inviter à militer pour le « civisme fiscal ».  Les pays doivent s’efforcer de collecter plus d’impôts afin de mieux financer leur développement, a-t-il martelé.  Le représentant de la CESAP a fait une comparaison: « alors que nous sommes en train de ramer, la taxe Tobin, ce serait comme faire du sprint ».  Il a mis l’accent sur le vieillissement de la population et la prise en charge de cette question qui ne doit pas être abordée seulement du point de vue économique selon lui. 

Le représentant de la CESAO a, quant à lui, dénoncé les pertes financières dues aux flux financiers illicites: « Quand 2 dollars entrent dans la région, c’est 3 qui en sortent. »  Il a aussi fustigé les exemptions fiscales qui sont comme « une course vers le bas » sur la voie du développement social.

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