Soixante-quinzième session,
Dialogue virtuel – matin & après-midi
AG/SHC/4297

La Troisième Commission examine la situation des défenseurs des droits de l’homme

La situation des défenseurs des droits de l’homme dans le contexte de la pandémie de COVID-19 a mobilisé, aujourd’hui, l’attention de la Troisième Commission chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, lors d’un dialogue virtuel avec les titulaires de mandats également marquée par des appels à se mobiliser contre les disparitions forcées et à promouvoir un ordre international démocratique et équitable.

Les délégations ont tout d’abord entendu la Rapporteuse spéciale sur la  situation des défenseurs et défenseuses des droits humains alerter que la pandémie a été utilisée dans le monde entier comme excuse pour les attaquer davantage et que de nombreux défenseurs, y compris des médecins, ont été pris pour cible pour avoir dit la vérité au sujet du virus et de ses conséquences.

De nombreuses vies auraient pu être sauvées dans le monde et les dommages aux communautés et aux économies auraient pu être ralentis ou évités si les défenseurs qui ont révélé la vérité sur la pandémie et ses conséquences avaient été écoutés, a notamment insisté Mme Mary Lawlor.  La COVID-19 est une alarme mondiale effrayante et nous avons besoin que la voix des défenseurs des droits de l’homme soit entendue et qu’elle joue un rôle central dans la reconstruction de sociétés nouvelles et meilleures pendant et après la pandémie, a-t-elle affirmé.

En relation avec cette thématique, le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association a attiré l’attention sur les mouvements et organisations de femmes qui « transforment notre façon de penser le pouvoir et nous poussent tous à agir immédiatement pour construire un monde plus équitable ».

Pourtant, les contributions des femmes et des filles continuent d’être « sous-estimées, sous-financées et discréditées ».  Confrontées à des « schémas bien documentés de répression étatique », les femmes font aussi face à des menaces supplémentaires « basées sur le genre, l’intersectionnalité et profondément enracinées dans des normes sociales discriminatoires », s’est inquiété M. Clement Nyaletsossi Voule qui a recommandé aux États de traduire en actes leurs promesses en matière d’égalité des sexes et d’accélérer les efforts visant à mettre fin à la violence sexiste en ligne et hors ligne. 

La problématique de la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a permis de concentrer les débats sur l’interaction entre les politiques économiques et les mesures de sauvegarde des institutions financières internationales (IFI) et la bonne gouvernance au niveau local.  À cette occasion, l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a jugé crucial que les réformes économiques liées aux prêts internationaux et introduites après la phase d’urgence pour faire face aux conséquences à grande échelle de la pandémie de COVID-19 sur les droits de l’homme soient soigneusement évaluées à l’aune de ces droits.

M. Livingstone Sewanyanaa a en outre estimé que l’attention portée à la lutte contre la corruption ne doit en aucun cas être réduite pendant la pandémie de COVID-19.  Il est crucial que les fonds fournis aux États pendant cette crise soient effectivement utilisés pour sauver des vies, préserver la santé publique et soutenir les moyens de subsistance, a-t-il souligné.

Les États Membres ont également suivi, dans l’après-midi, l’exposé du Président du Comité des disparitions forcées, M. Mohammed Ayat, qui s’est inquiété que le nombre d’action urgente soumise au Comité atteindra bientôt le nombre « fatidique » de 1 000 tandis que la coopération avec les États n’a permis de « localiser que 88 personnes ».  Une inquiétude partagée par le Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, M. Tae-Ung Baik, qui a alerté que l’impunité a un « effet multiplicateur » qui non seulement cause plus de souffrance aux victimes et à leurs familles mais conduit aussi souvent à de nouvelles disparitions.

La couverture des dialogues interactifs de ce jour a été compromise par une série de problèmes techniques.

La Troisième Commission poursuivra son examen de la promotion et de la protection des droits de l’homme mardi 20 octobre, à partir de 10 heures.

PROMOTION ET PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

Déclarations liminaires de titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, suivies d’un dialogue interactif

Exposé

Mme Mary LAWLOR, Rapporteusespéciale sur lasituationdes défenseurs et défenseuses des droits humains, a déclaré que les défenseurs des droits de l’homme sont « des individus à la fois ordinaires et extraordinaires » qui, en dépit de risques personnels importants, continuent de travailler chaque jour de manière non violente pour les droits des autres.  

Elle a indiqué que, depuis sa prise de fonctions en mai dernier, elle s’est entretenue en ligne avec des centaines de défenseurs des droits de l’homme.   « J’ai appris de première main comment la pandémie a été utilisée dans le monde entier comme excuse pour les attaquer davantage », a-t-elle alerté, s’inquiétant notamment du sort des nombreux défenseurs, y compris des médecins, qui ont été pris pour cible pour avoir dit la vérité au sujet du virus et de ses conséquences.  Lorsqu’ils sont menacés, ou que leurs familles le sont, de nouvelles restrictions de voyage les empêchent de se rendre dans une zone plus sûre.  Confinés chez eux, certains défenseurs ont l’impression d’être devenus une cible immobile.

Sur tous les continents, les défenseurs sont en danger et continuent, année après année, d’être tués par centaines pour leur travail pacifique en faveur des droits de l’homme, a-t-elle déploré.  Ces meurtres ne sont pas des actes de violence commis au hasard et ne sont pas inévitables, a signalé Mme Lawlor, enjoignant les gouvernements à ne pas rester silencieux.  La responsabilité principale de mettre un terme à ces assassinats incombe aux gouvernements, et nous avons besoin de votre leadership, a-t-elle lancé, ajoutant que la corruption et l’impunité sont les moteurs de ces attaques.  Elle a également déploré le fait que les Gouvernements ignorent trop souvent les menaces de mort lancées contre les défenseurs des droits de l’homme.

La Rapporteuse spéciale a indiqué que son prochain rapport au Conseil des droits de l’homme, en mars 2021, portera sur l’assassinat des défenseurs des droits de l’homme et qu’elle entend également axer ses travaux sur la situation des défenseurs les plus marginalisés et les plus vulnérables.  Ce n’est pas la défense des droits de l’homme qui rend ces courageux individus vulnérables, mais l’inaction de ceux dont le devoir est de les protéger, a-t-elle lancé.

Son mandat se concentrera également sur les défenseurs des droits des réfugiés et des migrants, ceux qui travaillent sur la crise climatique, les droits fonciers, les droits des peuples autochtones, les droits environnementaux et les défenseurs qui travaillent dans des régions isolées et éloignées.  Les défenseurs des droits de l’homme qui purgent de longues peines de prison et qui disparaissent au fil des ans ne seront pas non plus oubliés, a-t-elle assuré, de même que le problème des représailles dont sont la cible les défenseurs qui coopèrent avec le système des Nations Unies.  Le mandat portera également sur les répercussions des entreprises et des institutions financières internationales sur le travail des défenseurs qui sont nombreux à être tués, chaque année, après avoir protesté contre des projets d’entreprises qui menacent les droits fonciers ou des peuples autochtones.

La Rapporteuse spéciale a encouragé tous les gouvernements à mettre en œuvre des politiques et des pratiques visant à prévenir les attaques contre les défenseurs des droits de l’homme.  Les gouvernements ont un rôle essentiel à jouer dans la promotion de la contribution positive des défenseurs des droits de l’homme à la société, a-t-elle souligné.  

La pandémie de COVID-19 est une alarme mondiale effrayante qui nous rappelle notre fragilité et notre interdépendance.  Nous avons besoin que la voix des défenseurs des droits de l’homme soit entendue et qu’elle joue un rôle central dans la reconstruction de sociétés nouvelles et meilleures pendant et après la pandémie, a-t-elle dit.  De nombreuses vies auraient pu être sauvées dans le monde et les dommages aux communautés et aux économies auraient pu être ralentis ou évités si les défenseurs qui ont révélé la vérité sur la pandémie et ses conséquences avaient été écoutés.  

« Faire taire les défenseurs des droits humains est un danger pour nous tous et il est dans notre intérêt à tous de les protéger ainsi que leur travail », a-t-elle insisté

Dialogue interactif

Dans un premier temps, la Géorgie a décrié les tentatives de faire taire certains défenseurs de droits de l’homme dans les régions occupées de la Géorgie.  La Pologne a ensuite voulu savoir dans quelle mesure la pandémie a affecté l’action des défenseurs des droits de la personne.

À son tour, la France a fait part de sa préoccupation face à la hausse des cas de représailles dans le monde contre les défenseurs des droits de l’homme, et notamment les femmes défenseures, les défenseurs des droits des femmes et les défenseurs des droits des personnes LGBTI.  L’impunité ne saurait être tolérée et les États doivent prévenir ce phénomène et le réprimer en se dotant d’un arsenal juridique approprié, a souligné la délégation.

La Chine a, quant à elle, fait observer qu’il n’y a pas de définition internationale du concept des défenseurs des droits de l’homme.  Dès lors, ils ne doivent pas être considérés comme un groupe spécial, a-t-elle estimé.  Tout en condamnant les actes de représailles contre les défenseurs des droits de l’homme, la délégation s’est emportée contre les États-Unis qui essaient de s’ingérer dans « nos affaires internes » et a exhorté ce pays à cesser la diffusion de messages erronés.

Suite à ces questions et observations, la Rapporteuse spéciale sur lasituationdes défenseurs et défenseuses des droits humains, a précisé qu’il a été convenu de définir les défenseurs des droits de l’homme comme des personnes qui, à titre individuel ou en association avec d’autres, travaillent de façon pacifique à la promotion des droits et libertés fondamentales universellement reconnus, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l’homme.  Cette Déclaration a été adoptée par consensus après 13 années de négociations, a-t-elle rappelé.  Elle a précisé qu’elle est « très stricte » dans son application de la définition de défenseur des droits de l’homme.  « Je sais faire la différence entre un militant politique et un défenseur des droits de l’homme », a-t-elle martelé.  

S’agissant de la question des représailles, elle a jugé la situation extrêmement préoccupante, notamment lorsque des États attaquent des personnes qui travaillent avec les Nations Unies.  Cela sape le système complet des droits de la personne, s’est-elle inquiétée.  Elle a préconisé, à cet égard, de mettre en place des mesures concrètes comme, par exemple, la reddition de comptes et la réparation pour contrer cette situation.  Elle a aussi engagé à adopter des cadres législatifs exhaustifs et de politiques publiques appropriées afin de mieux protéger les défenseurs des droits de l’homme au niveau national, le tout complété par des mécanismes de protection.  Elle a également plaidé pour un engagement politique adéquat en faveur du travail légitime des défenseurs et défenseuses des droits de l’homme.  

La Rapporteuse spéciale a par ailleurs appelé à veiller à ce que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme soit correctement financé et engagé les gouvernements à accepter les demandes de visites qui leur sont adressé.  « Même si nous ne sommes pas toujours d’accord, nous pouvons au moins échanger », a-t-elle lancé, évoquant le dialogue qu’elle a eu ces dernières semaines avec le Bahreïn, l’Iran et le Burundi.  À cet égard, elle s’est félicitée de la libération d’un défenseur des droits de l’homme au Bahreïn et d’un autre en Iran.  Elle a promis de dédier une partie de ses prochains rapports aux mesures positives prises par les États.  

La couverture de ce dialogue interactif a été compromise par une série de problèmes techniques.

Exposé

M. CLEMENT NYALETSOSSI VOULE, Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, a indiqué que son rapport est consacré à la « célébration du pouvoir et de la résilience » des mouvements et organisations de femmes et de leurs contributions à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Le rapport relève que les femmes sont à l’avant-garde des luttes mondiales, de la dénonciation des inégalités économiques à la promotion d’une justice climatique en passant par le combat contre la pandémie de COVID-19.  « Les femmes s’organisent en ligne ou hors ligne, dirigent et inspirent des millions de personnes à rejoindre les mouvements et les révolutions démocratiques », a observé M. Voule, notant que ces organisations « transforment notre façon de penser le pouvoir et nous poussent tous à agir immédiatement pour construire un monde plus équitable ».  De fait, même dans les moments les plus difficiles, « le libre exercice par les femmes de leur droit de se réunir pacifiquement et de s’associer bénéficie à l’ensemble de la société », a-t-il souligné.

Pourtant, les contributions des femmes et des filles continuent d’être « sous-estimées, sous-financées et discréditées ».  Confrontées à des « schémas bien documentés de répression étatique », les femmes font aussi face à des menaces supplémentaires « basées sur le genre, l’intersectionnalité et profondément enracinées dans des normes sociales discriminatoires », a constaté le Rapporteur spécial, avant de détailler les obstacles qui se dressent « lorsqu’elles choisissent de faire valoir leurs droits à la liberté de réunion pacifique et d’association ».

Au sein de la famille et de la communauté, les femmes restent confrontées à une discrimination structurelle et à des stéréotypes néfastes, a-t-il expliqué.  Dans les espaces publics et lors des manifestations pacifiques, elles continuent d’être victimes de harcèlement sexuel et de viol.  Au travail, elles sont surreprésentées dans le secteur informel et systématiquement exclues du droit de s’organiser et former des syndicats.  Dans la sphère publique numérique, les activistes femmes sont l’objet de violences sexistes en ligne qui restent impunies.  De plus, les organisations et mouvements de femmes sont sous-financés et font face à des restrictions croissantes de leur accès à des ressources essentielles.

Pour changer cette réalité, M. Voule recommande aux États de « traduire en actes leurs promesses en matière d’égalité des sexes » et d’accélérer les efforts visant à mettre fin à la violence sexiste en ligne et hors ligne.  Il les invite également à soutenir les organisations et les mouvements dirigés par des femmes et à veiller à ce qu’ils disposent des ressources nécessaires pour continuer à diriger, mobiliser et inspirer les gens dans le monde entier.

En troisième lieu, le Rapporteur spécial exhorte les États à « transformer le monde du travail » pour garantir à toutes les femmes le droit de s’organiser, de former des syndicats et d’y adhérer.  Enfin, il leur suggère d’inclure une « approche intersectionnelle des politiques » dans le but de favoriser la participation des femmes à la vie publique et de garantir qu’aucune ne soit laissée pour compte, ce qui, selon lui, « est d’autant plus important à l’ère de la COVID-19 ».

Avant de conclure, M. Voule a rappelé qu’il avait lancé, en avril dernier, un ensemble de 10 principes directeurs et indications fournissant des recommandations aux États et à d’autres acteurs clés « pour garantir que leurs réponses à la pandémie COVID-19 ne portent pas atteinte aux droits à la liberté de réunion et d’association pacifiques ». Il a encouragé les gouvernements à visiter le site qu’il a mis en place sur cette question.

Dialogue interactif

Le thème retenu par M. Voule pour son dernier rapport a suscité la surprise de la Fédération de Russie qui, tout en reconnaissant l’importance de lutter contre toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes, n’a pas observé une évolution de l’ampleur signalée par le Rapporteur spécial.  Celui-ci aurait pu choisir un thème qui reflète mieux les problèmes liés au droit à la liberté de réunion pacifique et d’association, a-t-elle ajouté, encourageant l’expert à se pencher, par exemple, sur les incidences du nationalisme et des mouvements d’extrême droite, ainsi que sur la question de l’ingérence de certains États dans les manifestations.

La République tchèque a en revanche jugé opportun que son rapport porte sur les droits des femmes alors que l’on célèbre, cette année, plusieurs anniversaires importants en lien avec cette question.  Alors que la pandémie de COVID-19 menace l’exercice de ces droits, comment votre mandat peut-il contribuer à reconstruire en mieux, a-t-elle demandé.

Comment les États Membres peuvent-ils faire face aux difficultés auxquelles sont confrontées les femmes et les filles pendant la pandémie et garantir l’exercice par ces dernières de la liberté de réunion en ligne et hors ligne, s’est interrogée l’Union européenne, pointant les assauts que subissent les associations de femmes au sein de l’espace civique, notamment au Bélarus.  Comment lutter plus efficacement contre la violence et le harcèlement sexuel dont sont souvent victimes les femmes arrêtées arbitrairement pour leur participation à ces manifestations, a souhaité savoir la Suisse qui a relevé que les femmes sont confrontées à des risques élevés de harcèlement et violence sexuelles durant les manifestations et en cas d’arrestation.

Les Pays-Bas ont, eux, observé que les réseaux sociaux sont devenus un milieu hostile pour les femmes, alors qu’ils devraient leur permettre d’étendre leurs contacts et d’accroître leur action associative.  Ils ont appelé les États à s’acquitter de leurs responsabilités en matière de protection des femmes en ligne, s’interrogeant sur le rôle que peut jouer la communauté internationale face à ce phénomène.  Le Royaume-Uni a, lui aussi, dénoncé les violences sexistes en ligne et a voulu savoir comment faire d’Internet un forum garantissant la liberté de réunion pacifique et d’association des femmes.  Quelles recommandations faites-vous pour éliminer les normes sociales néfastes et protéger les femmes contre les représailles, en ligne et hors ligne, a voulu savoir l’Estonie, au nom des pays baltes et nordiques.

Alors qu’Internet fait l’objet de coupures, de tactiques de surveillance et de répression visant des militants, le mandat du Rapporteur spécial est plus important que jamais, ont affirmé de leur côté les États-Unis.  La délégation a notamment dénoncé la situation au Bélarus, où le Gouvernement continue d’emprisonner arbitrairement et de commettre des abus contre des opposants et des journalistes; au Nicaragua, où toute dissension est punie et des intimidations sont menées contre des dignitaires religieux; et au Cambodge, où des manifestations de défenseurs des droits humains sont réprimées.  En Chine, a-t-elle ajouté, le Parti communiste chinois interdit la jouissance des droits de réunion pacifique et d’association dans le Xinjiang, où les minorités religieuses sont persécutées.  Face à cette situation, où souhaitez-vous mener des visites d’établissement des faits ces prochaines années, s’est-elle enquise.

Avant de critiquer les autres, les États-Unis feraient mieux de balayer devant leur porte, a rétorqué la Chine, évoquant des cas de violence raciale et de répression policière aux États-Unis, ainsi que le refus de ce pays de ratifier certaines conventions internationales.  Elle l’a invité à abandonner cette « mentalité de guerre froide », décriant que la délégation américaine ait profité de cette enceinte pour proférer des allégations mensongères sur la situation des droits humains en Chine où la liberté de réunion pacifique et d’association est un droit fondamental que garantit sa Constitution.

Que comptez-vous faire pour mettre en valeur la contribution des femmes à la paix, à la sécurité et au développement durable, par le biais de l’exercice à leur droit d’association, a demandé à son tour le Mexique au Rapporteur spécial.  Le Liban a, pour sa part, rappelé le rôle central que jouent les femmes dans les appels au changement et dans la protection des défenseurs des droits de l’homme dans le monde.  À cet égard, la délégation a mis en exergue l’aspiration de son pays à parvenir à l’égalité entre les sexes.

En réponse à ces questions et commentaires, le Rapporteur spécial a remercié les délégations qui ont reconnu que son rapport portait sur une question primordiale, a fortiori en ces circonstances difficiles dues à la pandémie de COVID-19.  Il s’agit d’attirer l’attention sur les riches contributions des femmes à notre développement mais aussi à la paix et à la sécurité, a-t-il fait valoir.  S’adressant à la Fédération de Russie, il a expliqué qu’il s’était concentré sur les droits des femmes car les engagements pris en la matière, depuis 25 ans, ne sont pas suffisamment honorés.  À ses yeux, ce sujet est « tout à fait d’actualité » et certainement pas moins important que d’autres.  La communauté internationale doit joindre le geste à la parole et veiller à ce que les engagements pris de longue date pour la protection des femmes se concrétisent.  Il a relevé à cet égard que les mouvements de femmes « changent la donne », notamment en luttant en première ligne contre la COVID-19 et en participant à l’édification de la démocratie.

Le Rapporteur spécial a ensuite indiqué que son rapport formule des recommandations pour faire cesser les violences sexuelles et sexistes lors des manifestations pacifiques.  Il indique également qu’il est essentiel que les États prennent des mesures concrètes pour protéger les femmes et l’exercice par ces dernières de leur droit d’association.  Il est fondamental qu’elles puissent se réunir librement, a-t-il insisté, tout en reconnaissant que cet objectif est entravé par le fait que bon nombre de femmes travaillent dans le secteur informel.

S’agissant des violences en ligne, M. Voule a rappelé la responsabilité cruciale des États dans la lutte contre les pratiques visant à stigmatiser et diffamer les femmes.  Observant que les groupes de femmes sont souvent dépourvus de moyens et isolés, il a appelé la communauté des bailleurs de fonds à garantir leur accès aux financements.  Enfin, il a indiqué avoir adressé des demandes de visite à plusieurs pays et a espéré que les invitations en souffrance pourront être honorées quand la situation sanitaire le permettra.

Exposé

Pour son troisième rapport, M. LIVINGSTONE SEWANYANA, Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a décidé de se concentrer sur l’interaction entre les politiques économiques et les mesures de sauvegarde des institutions financières internationales (IFI) et la bonne gouvernance au niveau local.  Pour ce faire, il a examiné les questions sous trois volets à savoir, l’engagement des parties prenantes et les questions de participation publique, de transparence et de représailles, la réactivité de l’État aux besoins de la population et les mesures régressives et la lutte contre la corruption.

Les IFI auxquelles il fait référence dans son rapport sont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, la Banque africaine de développement, la Banque asiatique de développement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la Banque européenne d’investissement et la Banque interaméricaine de développement.

Abordant l’engagement des parties prenantes, il a souligné que toutes les IFI ont adopté des garanties environnementales et sociales qui tiennent compte de l’engagement des parties prenantes, certaines institutions ayant adopté des normes spécifiques sur le sujet, exigeant des emprunteurs qu’ils s’engagent de manière ouverte et transparente avec les parties prenantes touchées par le projet.  Toutefois, malgré ces garanties globalement solides, l’engagement des parties prenantes au niveau des projets reste un problème régulier dans de nombreux pays, ce qui est un motif de préoccupation.

Plus généralement, un environnement favorable au niveau local où les IFI décident d’investir est, à ses yeux, essentiel.  Toutefois, l’évaluation de l’environnement favorable à cette participation au niveau des projets et des pays n’est souvent pas couverte dans le cadre de la diligence raisonnable avant de prendre une décision d’investissement.

Il est également primordial d’informer rapidement les parties prenantes, a-t-il enchaîné, et plusieurs IFI ont mis en place des politiques de publication concernant l’accès à l’information pour les projets qu’elles financent.  Toutefois, les questions de confidentialité font que, sous prétexte de protéger des informations « sensibles », les intérêts des clients l’emportent sur le droit d’accès à l’information des communautés concernées.

Par ailleurs, les personnes qui souhaitent participer à des consultations sur des projets de développement financés par les IFI, les critiques ou les simples opposants à ces projets font de plus en plus souvent l’objet de représailles flagrantes.  Ces actes vont de l’intimidation, de la stigmatisation, de la criminalisation et du harcèlement judiciaire aux attaques physiques et aux assassinats.  Il s’est dit extrêmement préoccupé par ces actes qui se produisent dans différentes parties du monde, dans un contexte de fermeture de l’espace de la société civile à l’échelle mondiale.

La bonne gouvernance est également liée à l’obligation des États parties, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de prendre des mesures en vue d’assurer progressivement le plein exercice de tous les droits économiques, sociaux et culturels.  Il s’agit là d’une obligation primordiale en vertu du Pacte, mais les États parties peuvent se trouver dans une situation où ils ne sont pas en mesure de l’honorer en raison des mesures rétrogrades qu’ils sont obligés de prendre, dictées par les conditions de prêt imposées par les IFI.

Tout en saluant la réponse rapide et coordonnée de la communauté internationale à la pandémie de COVID-19, il a mis en garde contre l’imposition de mesures rétrogrades dans le contexte actuel.  Il est crucial que les réformes économiques liées aux prêts internationaux et introduites après la phase d’urgence pour faire face aux conséquences à grande échelle et très probablement durables de la pandémie sur les droits de l’homme, notamment les mesures d’austérité, soient soigneusement évaluées par rapport aux normes des droits de l’homme.

S’agissant de la lutte contre la corruption, « obstacle majeur à la réalisation des droits de l’homme », il a estimé que le rôle des IFI est certainement d’une importance capitale pour freiner le phénomène, notamment en appuyant la réforme de la gouvernance dans les pays clients et en adoptant des mesures de lutte dans le cadre de leurs activités opérationnelles.

Notant que les IFI n’ont pas de pouvoirs de répression pénale en ce qui concerne les allégations de corruption, il les a appelées à signaler automatiquement tout cas de fraude et de corruption directement aux autorités nationales.  Si ces autorités se montrent réticentes à examiner les cas qui leur sont soumis, les IFI doivent faire pression sur les autorités pour qu’elles prennent les mesures nécessaires.  L’Expert indépendant a en outre estimé que l’attention portée à la lutte contre la corruption ne doit en aucun cas être réduite pendant la pandémie de COVID-19.  Il est crucial que les fonds fournis aux États pendant cette crise soient effectivement utilisés pour sauver des vies, préserver la santé publique et soutenir les moyens de subsistance, a-t-il souligné.

Dialogue interactif

L’Azerbaïdjan, au nom du Mouvement des pays non alignés, tout en reconnaissant l’importance de la promotion de la démocratie au niveau national et de la démocratisation du système de gouvernance internationale, s’est opposé à toute tentative politiquement motivée de promotion de la démocratie, notamment en marginalisant ou en excluant des pays non alignés d’une participation pleine et égale aux organes intergouvernementaux de l’ONU.

La Fédération de Russie a exhorté les institutions financières internationales à mener leurs activités sur une base dépolitisée et à respecter la souveraineté et les intérêts légitimes des États, garantissant ainsi leur contribution importante à la réalisation d’un ordre international démocratique et juste.

Le Venezuela a jugé urgent que les IFI accordent la priorité au développement social et à la protection de l’environnement et non pas à la garantie de dividendes maximales à leurs actionnaires.  La délégation a également condamné les mesures coercitives unilatérales, rejointe en cela par la Chine et Cuba qui a voulu savoir quelles étaient les répercussions de ces mesures sur les droits de l’homme et appelé, en outre, à réformer les IFI qui ne sont ni « transparentes, ni démocratiques ».

Répondant aux questions et observations des délégations, l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable a souligné qu’un ordre international juste et équitable suppose la mise en œuvre de bonnes pratiques, tel que le multilatéralisme.  La Charte de 1945, élaborée sur les cendres de la Seconde Guerre mondiale, reflète justement le besoin d’unité dans l’action et de l’état de droit.  C’était une urgence à l’époque, a-t-il signalé.

Lorsqu’il s’agit de moyens de subsistance, de pauvreté, de lutte contre le chômage, il n’y a pas de place pour l’unilatéralisme, a-t-il poursuivi.  Ce dont nous avons besoin, c’est d’unité et d’un multilatéralisme fort.  À l’heure de la COVID-19, il est nécessaire d’être unis dans l’action au Nord comme au Sud, et les IFI ont un rôle important à jouer dans ce contexte, en raison notamment de leur pouvoir: elles prêtent de l’argent, fournissent des conseils et sont donc en mesure de favoriser l’avènement d’un contexte propice.  C’est pourquoi, elles doivent, en plus d’être démocratiques, jouer de leur pouvoir pour aider les défavorisés, les marginalisés, et ceux qui font l’objet de discrimination, a-t-il lancé, rejoignant les appels lancés en faveur de la mise en place d’un nouvel ordre international démocratique.

Exposé

M. MOHAMMED AYAT, Président du Comité des disparitions forcées, a présenté le rapport des dix-septième et dix-huitième sessions du Comité.  Il a indiqué qu’une campagne de ratification avait été lancée, en 2018, pour doubler les ratifications de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées d’ici à 2022.  Cependant, nous sommes encore très loin de cet objectif, car seuls 63 États Membres ont ratifié ce texte.  Entre temps, des dizaines de milliers de disparation forcées sont perpétrées au quotidien, a-t-il déploré, avant d’annoncer que le nombre d’action urgente soumise au Comité atteindra bientôt de chiffre « fatidique » de 1 000.  Et pendant ce temps, la coopération avec les États n’a permis de localiser que 88 personnes.

M. Ayat a ensuite indiqué qu’une troisième communication individuelle avait été présentée à l’encontre d’un État Membre, à savoir la France.  Il a aussi fait savoir que le Mexique vient de reconnaître la compétence du Comité, mais que seulement 23 États ont reconnu la compétence du Comité pour examiner les plaintes interétatiques, avertissant que cela représente un obstacle à une mise en œuvre plus efficace de la Convention.

Le Comité a par ailleurs pu examiner les rapports initiaux de la Bolivie et de la Slovaquie, mais l’examen des rapports de la Mongolie et de la Suisse a dû être reporté en raison de la COVID-19.  Une liste de questions a en outre été rédigé en raison de l’absence de rapport provenant du Niger, une procédure qui est autorisée lorsque la présentation du rapport initial retarde de plus de cinq ans.

M. Ayat a ensuite indiqué que le Comité avait examiné des informations complémentaires présentées par l’Iraq, lors du premier dialogue en ligne organisé par un organe de traités.

Les interactions en ligne doivent cependant demeurer une mesure exceptionnelle et ne peuvent se substituer au dialogue en présentiel, a-t-il toutefois estimé.

Il a également signé que le Comité ne peut continuer à fonctionner avec le même temps et les mêmes ressources qui lui ont été alloués à ses débuts, le nombre d’actions en urgence s’étant notamment démultiplié.  Il est également nécessaire de compenser les experts pour le travail accompli en ligne dans des conditions très difficiles.  Si rien n’est fait, notre génération devra assumer la responsabilité d’avoir détruit un système dont le monde a cruellement besoin, a-t-il prévenu.

Dialogue interactif

L’Iraq a regretté que le Président du Comité n’ait pas mentionné le fait que l’Iraq avait présenté 42 réponses, se déclarant en outre gravement préoccupé par le fait que le Comité continue d’enregistrer des cas présumés de terroristes.  Comment faire en sorte que les plaignants aient utilisé tous les moyens nationaux mis à leur disposition avant de saisir le Comité, s’est enquis la délégation qui a en outre estimé que le Comité ne dispose pas de mécanismes appropriés pour examiner les cas qu’il reçoit.

Quelle est votre évaluation de la mise en œuvre de la Convention, 10 ans après son entrée en vigueur, a demandé l’Union européenne, avant que le Japon fasse part de son plein appui au Comité.  L’Argentine qui a indiqué qu’elle dirige, avec la France, la troisième campagne d’universalisation de la Convention, a insisté sur la gravité extrême que représentent les disparitions forcées.  Elle a salué les contributions du Comité qui aide l’Argentine à renforcer sa législation nationale en la matière.

De son côté, l’Inde a noté que les défenseuses des droits de l’homme sont particulièrement vulnérables aux disparitions forcées et que plus de 2 000 affaires demeurent non élucidées au Pakistan, dont celle de M. Idris Khattak qui a disparu l’an dernier.  Comment renforcer la coopération pour lutter contre les disparitions forcées et aider les défenseurs des droits de l’homme?

Le Président du Comité a indiqué que le Comité travaille dans une philosophie d’accompagnement des pays pour les aider à appliquer les dispositions de la Convention.  Il a reconnu que l’Iraq fait face à des préoccupations sécuritaires et s’est félicité de sa coopération et du dialogue fructueux engagé entre ce pays et le Comité.  Il a cependant estimé que les réponses apportées aux actions d’urgence réclamées par le Comité sont parfois insuffisantes.

M. Ayat a ensuite déploré les retards rencontrés dans la présentation de certains rapports.  Il a estimé que le Comité a fait preuve d’un engagement évident dans le cadre de la crise de COVID-19 où il y a eu des initiatives pionnières.  Un effort est toutefois à faire de la part des États pour obtenir plus de ratifications de la Convention et de déclarations de compétence du Comité.

S’agissant de la situation des défenseurs des droits de l’homme, il a indiqué qu’une procédure d’urgence peut être utilisée pour aider ces personnes lorsqu’elles sont victimes de disparitions forcées.

Exposé

M. TAE-UNG BAIK, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a commencé par exprimer sa préoccupation concernant l’impact de la COVID-19 sur les disparitions forcées.  Non seulement elles se sont poursuivies pendant la pandémie, mais celle-ci a généré de nouveaux contextes de disparitions forcées, a-t-il averti.  Dans ce contexte, le Groupe de travail a publié huit directives sur la COVID-19 avec le Comité des disparitions forcées, afin de bien préciser que les disparitions forcées doivent rester « strictement interdites en toutes circonstances » et que les recherches et enquêtes ne peuvent être interrompues.

Dans son rapport annuel, le Groupe de travail a indiqué avoir transmis 699 nouveaux cas de disparition forcée à 26 États, dont 105 dans le cadre de la procédure d’action d’urgence.  Ces chiffres ne reflètent toutefois pas l’ampleur du phénomène, a admis M. Baik, en se disant également préoccupé par le nombre croissant de signalement de cas de disparitions perpétrées par des acteurs non étatiques exerçant un contrôle effectif ou des fonctions quasi gouvernementales dans certains territoires.  En outre, a-t-il ajouté, le Groupe de travail s’inquiète du fait qu’un certain nombre d’États continuent de justifier des enlèvements sur le sol étranger pour des retours forcés sous prétexte de lutter contre le terrorisme.

Évoquant les visites effectuées par le Groupe de travail au Kirghizistan, en juin 2019, et au Tadjikistan, en juillet 2019, le Président-Rapporteur a remercié ces deux Gouvernements pour leur coopération.  Il s’est félicité que le Gouvernement kirghize ait procédé à des améliorations législatives, notamment une nouvelle infraction pénale de disparition forcée.  Cependant, un certain nombre de personnes disparues et de dépouilles n’ont toujours pas été identifiées en raison des violences interethniques qui ont éclaté dans les provinces du Sud en 2010, a-t-il noté, en encourageant le Gouvernement à poursuivre ses efforts dans ce sens.  S’agissant du Tadjikistan, il a déploré que les violations des droits de l’homme commises pendant la guerre civile n’aient pas encore été reconnues.  Selon lui, un processus d’enquête, d’exhumation et d’identification des dépouilles des personnes portées disparues doit être lancé d’urgence afin qu’elles puissent être remises à leurs familles.  Il a néanmoins salué le fait que le pays ait renforcé l’obligation de notifier et d’enregistrer toutes les mesures d’arrestation et de détention.

Le Président-Rapporteur s’est ensuite référé à son rapport thématique sur les normes et les politiques publiques pour une enquête efficace sur les disparitions forcées, relevant à cette occasion que l’impunité a un « effet multiplicateur » qui non seulement cause plus de souffrance aux victimes et à leurs familles mais conduit aussi souvent à de nouvelles disparitions.  Pour M. Baik, l’implication des États exige que les enquêtes soient menées par un organe doté de l’indépendance et de l’autonomie nécessaires.  De surcroît, a-t-il encore fait valoir, l’enquête sur les disparitions forcées ne doit pas remplacer mais compléter la recherche de personnes disparues.  À cet égard, le Groupe de travail juge primordial d’inclure dans les enquêtes criminelles des avancées scientifiques telles que la géolocalisation des appels téléphoniques, l’utilisation d’images satellite ou encore le recours à l’ADN pour l’identification.  Il exhorte également les États à mener des enquêtes systématiques sur les archives militaires, de renseignement et de police, et à élaborer des politiques de déclassification, de divulgation et de conservation des archives.

Dialogue interactif

Notant que les mesures de quarantaine et de privation de liberté prises dans le cadre de la pandémie de COVID-19 peuvent aggraver la situation, l’Union européenne a appelé tous les États à coopérer avec le Groupe de travail, notamment en répondant positivement à ses demandes de visite.  Dans ce contexte, s’est-elle interrogée, comment garantir que la question des disparitions forcées ou involontaires fasse l’objet d’une pleine attention de la communauté internationale?

Le Pakistan a indiqué avoir mis sur pied une commission d’enquête sur les cas de disparitions forcées.  Cette structure, qui collabore avec les travaux du Groupe de travail, est dotée du financement nécessaire à son action et peut être contactée par les membres des familles concernées, a indiqué la délégation, avant de condamner les déclarations de l’Inde concernant son pays.  Enjoignant les autorités indiennes à répondre aux demandes d’informations des familles de disparus au Jammu-et-Cachemire, elle a demandé à M. Baik quelles mesures ont été prises pour que les auteurs de ces crimes rendent des comptes.

La Fédération de Russie a constaté à son tour que, malgré les mesures prises par la communauté internationale pour lutter contre les disparitions forcées, la situation est loin de s’améliorer.  Chaque cas doit faire l’objet d’une enquête et les coupables doivent être traduits en justice, a-t-elle plaidé, déplorant que ce ne soit pas la pratique dans certains pays comme l’Ukraine, où sont signalés des cas de détention arbitraire et de torture, suivis de disparitions.  De plus, les autorités ukrainiennes ne montrent pas d’empressement pour poursuivre les auteurs de ces actes, a accusé la délégation qui a invité le Groupe de travail à suivre de près la situation dans ce pays.

De leur côté, les États-Unis ont accusé le Gouvernement iranien de continuer à faire disparaître des personnes, comme cela a été le cas lors des manifestations de 2019, et se sont dit inquiets des disparitions signalées de Tatars et de défenseurs des droits de l’homme dans la péninsule de Crimée sous occupation russe.  La délégation a également évoqué la disparition de nombreuses personnes en Syrie, sans que les autorités de ce pays fournissent aux familles des informations ou des voies de recours.  Quelles mesures permettraient de pousser ces États à répondre de leurs actes? a-t-elle demandé.

À son tour, la République arabe syrienne a dénoncé la démarche systématique des États-Unis qui utilisent cette plateforme pour diffamer le Gouvernement syrien, accusant en outre ce pays de financer des activités terroristes contre le peuple syrien.  La délégation a par ailleurs souhaité savoir quels types de ressources le Groupe de travail utilise pour recueillir ses informations.

La France a rappelé à son tour que, depuis le début des travaux du Groupe de travail il y a 40 ans, plus de 58 000 cas de disparition ont pu être recensés, ce qui a contribué à la quête de vérité et à la lutte contre l’impunité.  Dix ans après l’entrée en vigueur de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, elle a appelé tous les États à ratifier ce texte fondamental et à reconnaître la compétence du Comité.

Dénonçant un « problème mondial », le Japon a mis l’accent sur les enlèvements de ressortissants japonais par la RPDC.  Les familles des victimes ne rajeunissent pas, des parents décèdent, il n’y a donc pas de temps à perdre, a souligné la délégation en appelant au retour de toutes les personnes enlevées.

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a réfuté les « allégations mensongères » du Japon.  La question des enlèvements a été réglée de manière complète et irréversible, a affirmé lé délégation, accusant le Gouvernement japonais de manipuler cette question à des fins politique afin de faire oublier ses crimes de guerre, notamment l’enrôlement de force et le génocide de Coréens innocents.

Le Japon a repris la parole pour s’inscrire en faux contre les déclarations et « fausses perceptions » de la RPDC.  La question des enlèvements doit être réglée sans plus attendre car les familles des victimes continuent de vieillir, a de nouveau insisté la délégation.  Exhortant la RPDC à rendre les personnes enlevées le plus rapidement possible, elle a estimé que les deux pays doivent œuvrer ensemble pour un avenir radieux.

Ce dossier est clos, a répondu la RPDC.  Le Japon continue à s’accrocher à une question réglée et s’efforce d’éviter de verser des réparations pour ses crimes passés, a argué la délégation, regrettant que ce pays ne s’affranchisse pas de ses obligations morales.

En réponse aux questions et observations des délégations, le Président-Rapporteur du Groupe de travail a souligné que l’objectif du Groupe de travail est d’aider les familles dans leur quête de vérité et les gouvernements dans le respect de la Convention.  Le contexte de pandémie actuel complique ses travaux dans la mesure où des disparitions liées à la quarantaine se produisent sans que les membres des familles en soient informés.  Cela redouble les souffrances, a-t-il déploré, appelant les États à mettre un terme à ces pratiques et à communiquer avec les familles concernées.

S’adressant au Pakistan, le Président-Rapporteur l’a remercié pour sa coopération mais s’est dit inquiet des plaintes que continue de recevoir le Groupe de travail, et a demandé à pouvoir effectuer une visite de suivi.  Évoquant les échanges entre le Pakistan et l’Inde sur ces « questions sensibles », il a répété qu’il importe avant tout, au niveau international, que les disparitions forcées n’aient pas lieu, quelles que soient les circonstances.

M. Baik a par ailleurs indiqué que son Groupe de travail a effectué une visite de pays en Ukraine et examine tous les cas de disparitions forcées qui se produisent en temps de conflit armé.  Il a insisté sur l’importance pour les gouvernements de dialoguer, préconisant notamment la poursuite du dialogue entre le Japon et la RPDC afin d’atténuer les souffrances des familles de personnes disparues.  Il a d’autre part demandé à la RPDC d’accepter sa demande de visite avant d’inviter le Gouvernement syrien à poursuivre son dialogue avec le Groupe de travail.

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