SC/14319

Conseil de sécurité: à l’approche du retrait de la MONUSCO, la Représentante spéciale pour la RDC appelle la coalition au pouvoir à choisir la confiance mutuelle

En République démocratique du Congo (RDC), les membres de la coalition Cap pour le changement et le Front commun pour le Congo, qui hier encore étaient politiquement opposés, doivent surmonter leurs différences et bâtir une confiance mutuelle dans un contexte où les situations politique et sécuritaire demeurent fragiles et menacent les acquis, a demandé cet après-midi la Représentante spéciale du Secrétaire général pour ce pays lors d’une réunion du Conseil de sécurité.

Mme Leila Zerrougui, qui dirige aussi la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en RDC (MONUSCO), s’est exprimée par visioconférence, comme du reste les membres du Conseil, qui l’ont écoutée présenter le rapport trimestriel du Secrétaire général sur la situation dans ce pays et les activités de la Mission, engagée dans l’élaboration d’une stratégie de retrait.  Son appel intervient dans un contexte où la situation politique congolaise reste polarisée, notamment entre membres de la coalition.

Des tensions « croissantes » sont en effet manifestes, souligne le Secrétaire général, qui revient notamment dans son rapport sur celles survenues le 17 juillet dernier, lorsque le Président Félix Tshisekedi a procédé à des nominations au sein de plusieurs organes civils, militaires et judiciaires.  Des députés affiliés au Front commun pour le Congo, de l’ancien président Kabila, ont en outre tenté de présenter des projets de loi de réforme judiciaire mais ils se sont heurtés à une résistance de la part de Cap pour le changement, de la coalition de l’opposition et d’organisations de la société civile, « qui ont dit craindre que de tels projets de loi ne portent atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire ». 

L’appel à l’unité lancé par la Représentante spéciale a notamment trouvé un écho chez les États africains membres du Conseil de sécurité, le groupe A3 + 1, formé de l’Afrique du Sud, du Niger et de la Tunisie, plus les Saint-Vincent-et-les Grenadines.  Pour ces délégations, la situation politique actuelle est une « occasion rare » pour les dirigeants congolais de construire un avenir stable et un pays unifié.  Le Président au pouvoir et son prédécesseur doivent continuer d’apaiser leurs tensions, comme ils l’ont fait à l’occasion de leurs réaffirmations publiques: « Cela est vital pour une réconciliation nationale et une paix durables », ont prévenu les A3+1.

Si la Fédération de Russie a appuyé l’appel à toutes les parties pour qu’elles renoncent au partisanisme, elle a toutefois affirmé qu’une ingérence dans les affaires internes de la RDC reste « inacceptable ».   L’engagement public des dirigeants en faveur d’une coopération entre les partis cohabitant au sein de la coalition est quoi qu’il en soit un « signe positif », s’est pour sa part réjouie la Chine.

La Représentante spéciale a également évoqué la Stratégie de retrait commune de la MONUSCO que le Secrétaire général s’est engagé à faire parvenir au Conseil de sécurité d’ici au 20 octobre.  Dans son rapport, il se dit résolu à faire en sorte que la réduction des effectifs de la Mission et son retrait soient soigneusement échelonnés, assortis de conditions et menés à bien conformément aux objectifs de référence convenus.  « L’élaboration de cette stratégie représente une occasion unique de définir la forme de partenariat entre l’ONU et le Gouvernement congolais qui permettra de préserver les gains chèrement acquis des 20 dernières années, dans les phases de transition progressive et de retrait de la Mission », assure le Chef de l’Organisation.

Des progrès ont été accomplis dans l’élaboration de cette stratégie de transition, qui doit permettre le transfert progressif des tâches accomplies par la MONUSCO vers les autorités congolaises.  L’accord signé avec le Gouvernement prévoit que la Mission renforce sa présence dans les Kivu et en Ituri, où des conflits actifs persistent, réduise sa présence au Tanganyika et se retire des provinces du Kasaï et du Kasaï-Central, a précisé la Représentante spéciale.

Pour les délégations de la France, de l’Allemagne et de l’Estonie, la stratégie de retrait ne devrait se faire que sur la base de « conditions et de repères réalistes » qui inscrivent la réforme du secteur de la sécurité au cœur même du processus.  En tout état de cause, son appropriation nationale par la RDC est « cruciale » pour en assurer la pérennité, a insisté le Royaume-Uni.

Mais compte tenu du climat de violences qui a causé plus de 1 300 pertes civiles au cours du seul premier semestre de 2020, les États-Unis ont déclaré soutenir le déploiement de trois nouvelles unités au sein de la Brigade d’intervention de la Force.  Dans ce contexte, la France a soutenu, et jugé « indispensable », une réforme de ladite Brigade, pour qu’elle atteigne sa pleine capacité opérationnelle.  Aucune décision ne doit être prise sans considérer la situation sur le terrain et tenir compte des points de vue de Kinshasa, des États de la région et des pays pourvoyeurs de contingents, a estimé de son côté la Russie.

Mme LEÏLA ZERROUGUI, Représentante spéciale et Chef de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) a indiqué que son exposé est une mise à jour de la situation en République démocratique du Congo (RDC), axée sur les tensions politiques continues dans le pays, les progrès accomplis s’agissant de la mission de transition, ainsi que les efforts déployés pour protéger les civils.  La haut fonctionnaire a commencé par indiquer qu’en dépit de la pandémie de COVID-19, la MONUSCO maintient ses opérations et assume son mandat.  Elle s’est ainsi dotée d’un certain nombre de mesures et de procédures visant à garantir que la Mission ne devienne pas un vecteur de transmission du virus, parmi lesquelles la mise en place de capacités de dépistage et de traitement et des quarantaines imposées aux personnels en rotation de retour de l’étranger.  En dépit de ces mesures, des personnels civils et en uniforme de la Mission ont été testés positifs à la COVID-19, a-t-elle indiqué. 

Mme Zerrougui a rappelé que, lors de sa dernière intervention devant le Conseil, elle avait souligné la dualité de la situation en RDC.  D’un côté, en dépit des divergences, la classe politique congolaise accepte et apprécie les opportunités  offertes par la coalition au pouvoir, le « Cap pour le changement et Front commun pour le Congo  ».  De l’autre cependant, des tensions persistantes sont observées entre les membres de ladite coalition,  menaçant la stabilisation à long terme du pays.  À cela, s’ajoutent les risques de politisation dans le choix des candidats pour l’élection présidentielle de 2023, un sujet qui devient une fixation, au détriment des mesures de réformes de la gouvernance et de stabilisation dont le pays a grandement besoin, a mis en garde la Représentante spéciale.  La situation politique reste donc fragile et pourrait même effacer les gains acquis, a-t-elle prévenu, en appelant les membres de la Coalition, qui hier encore étaient résolus à ne pas surmonter leurs différences à choisir la confiance mutuelle.  Cela doit aussi être l’objectif de la société civile et des partis d’opposition, qui doivent eux aussi faire en sorte que le transfert pacifique du pouvoir devienne une norme en RDC.  Pour parvenir à cet objectif, Mme Zerrougui a assuré ne pas ménager ses efforts et user de ses bons offices, en multipliant les entrevues avec les acteurs politiques nationaux pour leur rappeler leurs obligations et les inviter à mettre en œuvre les réformes pour répondre aux besoins pressants de la population. 

La Représentante spéciale a ensuite informé le Conseil que ses membres devraient prochainement recevoir la stratégie de transition conjointe vers un retrait de la Mission qu’ils lui avaient demandée.  Les discussions avec le Gouvernement sont en cours et le Président congolais, M. Félix Tshisekedi ,a souligné son souhait d’une transition graduelle et responsable, insistant sur la nécessité d’un transfert progressif des tâches de la MONUSCO vers le Gouvernement, en coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies. 

Mais compte tenu de la complexité de l’environnement en RDC, la Stratégie conjointe est basée sur une série de stratégies régionales spécifiques, adaptées aux besoins particuliers des six provinces, hors Kinshasa, où la Mission  est encore présente.  L’accord signé avec le Gouvernement prévoit que la MONUSCO devra graduellement consolider sa présence dans les trois provinces où persistent des conflits actifs, c’est-à-dire dans les Kivu ainsi qu’en Ituri.  Parallèlement, la  Mission  devrait se retirer de la région du Kasaï, qui entrera dans la phase de consolidation post-conflit « relativement bientôt », a précisé Mme Zerrougui.  Au Tanganyika, les récentes améliorations dans la situation sécuritaire devraient permettre à la Mission de réduire sa présence militaire, en dépit de l’activité continue des groupes armés locaux et des conflits intercommunautaires de basse intensité qui sévissent dans certaines zones, a-t-elle encore expliqué.  

En ce qui concerne la protection des civils, qui figure au cœur des activités de la Mission, Mme Zerrougui a expliqué que cette tâche allait au-delà de la simple conduite d’opérations militaires: la MONUSCO coopère à cet égard avec les autorités congolaises, les communautés locales, la société civile, les organisations de femmes et de jeunes ainsi qu’avec l’équipe de pays des Nations Unies, la Banque Mondiale, le Fonds de consolidation de la paix et les autres partenaires multilatéraux du développement.  Pour autant, la stabilisation de l’est du pays dépendra pour une large mesure du démantèlement des groupes armés et de la réintégration  durable des ex-combattants au sein de leur communautés.   Il est  vital, dans ce contexte, d’éviter de répéter les expériences du passé, a-t-elle préconisé, faisant allusion aux mesures d’amnistie et d’intégration dans les forces armées congolaises dont ont bénéficié des ex-combattants.  Le fait pour eux d’avoir obtenu des postes de haut rang a été vu comme une forme d’incitation à constituer des groupes armés, conduisant à de nouveaux cycles de violence, a-t-elle prévenu, en appelant à briser ce cercle.  

La France a d’abord axé son intervention sur l’adaptation de la réponse aux défis sécuritaires, constatant que certaines régions de RDC entrent dans une phase de stabilisation.  Les autorités congolaises doivent, selon la délégation, continuer à consolider les progrès accomplis dans le renforcement des institutions et le développement socioéconomique afin de prendre le relais de la MONUSCO qui a entamé son retrait.  Toutefois, a-t-elle noté, d’autres régions sont toujours le théâtre de violences contre les civils et les forces de sécurité.  En outre, la violence sexuelle persiste.  À ses yeux, c’est dans ces régions, en Ituri et dans les Kivu, que les efforts de la Mission doivent être recentrés pour atteindre les conditions de son retrait.  Il a également estimé qu’une approche régionale reste indispensable car la violence dans l’est du pays est perpétrée par des groupes armés nationaux et étrangers. 

Pour la France, la stratégie conjointe en cours d’élaboration avec les autorités congolaises pour permettre un transfert progressif des tâches de la MONUSCO doit s’attaquer aux causes profondes des conflits.  Il importe, a-t-elle dit, qu’elle comporte des indicateurs clairs et réalistes en termes de désarmement, de démobilisation, de rapatriement, de réintégration et de réinstallation des groupes armés étrangers.  La stratégie doit aussi tenir compte de la réforme du secteur de la sécurité, de l’état de droit et du contrôle de l’exploitation des ressources naturelles. 

Observant par ailleurs que le nombre des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire est en hausse, en particulier dans l’Est, la délégation a jugé que le Comité des sanctions 1533 peut faire davantage pour y répondre.  Elle a plaidé pour l’élaboration d’une stratégie nationale de lutte contre l’impunité et la mise en œuvre de mécanismes de justice transitionnelle, invitant en outre les autorités congolaises à continuer à coopérer pleinement avec la CPI.  

La France s’est ensuite félicitée de la fin de la deuxième épidémie d’Ebola, dans l’est du pays, et de l’épidémie de rougeole.  Cependant, a-t-il ajouté, les efforts doivent se poursuivre pour lutter contre la COVID-19, le choléra et l’épidémie d’Ebola qui a éclaté dans l’Ouest.  Elle s’est aussi déclarée préoccupée par le risque de famine, assurant le Gouvernement du plein soutien de la France à cet égard.  La France a d’autre part appelé à la vigilance en ce qui concerne la protection des hôpitaux et du personnel humanitaire, avant de saluer la mobilisation de la MONUSCO pour contribuer à la sécurité du Dr. Mukwege et de la clinique de Panzi. 

Enfin, la délégation a souhaité que l’amélioration de l’action de la MONUSCO reste au centre des préoccupations du Conseil lors du prochain renouvellement de son mandat.  À cet égard, toutes les mesures possibles doivent être prises pour qu’elle atteigne sa pleine capacité opérationnelle, a-t-elle dit, estimant qu’une réforme de la brigade d’intervention de la Force est également indispensable.  Elle a encouragé le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents à poursuivre leurs discussions afin de parvenir rapidement à la mise en œuvre des décisions du Conseil sur ce point.  Avant de conclure, M. de Rivière a souhaité que la résolution 1325 (2000) devienne une réalité pour les femmes et les hommes congolais, et que la résolution 2538 (2020) soit mise en œuvre de manière opérationnelle au sein de la MONUSCO. 

Le Viet Nam a salué les efforts en cours pour garantir un environnement propice au processus politique en RDC, malgré des tensions persistantes.  Les efforts diplomatiques régionaux avec les pays voisins, ainsi que le rôle des organisations sous-régionales sont également positifs.  Cependant, la délégation s’est dit préoccupée par la détérioration continue de la situation sécuritaire dans certaines parties de l’est de la RDC, en particulier au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en Ituri où de nombreuses attaques récentes ont fait des dizaines de morts parmi les civils et ont également affecté le personnel des Nations Unies sur le terrain.  Le Viet Nam a fermement condamné ces attaques et exhorté toutes les parties à tenir compte de l’appel au cessez-le-feu lancé par le Secrétaire général.  

En outre, le Viet Nam est également préoccupé par la situation humanitaire en RDC, où plus de 25,6 millions de personnes ont actuellement besoin d’assistance.  Divers défis sanitaires, notamment la pandémie de COVID-19, la réémergence d’Ebola, la rougeole et d’autres maladies dangereuses exercent une pression de plus en plus forte sur la situation socioéconomique et humanitaire déjà désastreuse dans de nombreuses régions de la RDC.  Dès lors, la délégation a appelé à un plus grand soutien de la communauté internationale à ce pays en ce moment critique.  Elle a plaidé en faveur d’une approche globale pour s’attaquer aux causes profondes des conflits qui mettraient davantage l’accent sur le renforcement du dialogue intercommunautaire, le règlement des problèmes socioéconomiques et l’exploitation et le commerce illégaux des ressources naturelles.  La délégation a également salué les engagements du Président Tshisekedi et de ses homologues en faveur de la coopération et de la réconciliation dans la région ainsi que la contribution apportée par la SADC, la CEEAC, la CIRGL ainsi que l’UA dans ce domaine. 

L’Afrique du Sud a axé son intervention, prononcée également au nom du Niger, de la Tunisie et de Saint-Vincent-et-les Grenadines (A3+1) sur les efforts continus des Congolais en vue de régler leurs différends de façon pacifique, ainsi que le dialogue constructif en cours visant à atténuer les tensions politiques, comme l’engagement et les réaffirmations publiques du Président Félix Tshisekedi et de l’ancien Président, M. Joseph Kabila, en faveur de la coalition.  «  Cela est vital pour une réconciliation nationale et une paix durables », a estimé le représentant sudafricain.   

Sur le plan sécuritaire, il a exprimé une profonde préoccupation face à l’instabilité et à l’insécurité actuelles dues aux hostilités perpétrées par des groupes armés dans le Nord-Kivu, d’autant que les Forces démocratiques alliées mènent des attaques contre les civils, les Forces armées nationales (FARDC) et la MONUSCO.  Parallèlement, au Sud-Kivu, le redéploiement des FARDC dans d’autres zones de l’est du pays a créé un vide sécuritaire, conduisant au recrutement actif par certains groupes armés, a observé l’Afrique du Sud.  Il s’est néanmoins dit encouragé par les progrès accomplis dans les accords de paix entre le Gouvernement congolais et les groupes armés dans la province de l’Ituri ; tout en se déclarant alarmé par le retard pris dans la mise en œuvre du processus de démobilisation et de réinsertion, attribué en partie à la pandémie de COVID-19. 

Dans un tel contexte, le représentant a mis l’accent sur le caractère central du Cadre PSC en tant que solution à long terme pour instaurer la stabilité dans l’est de la RDC.  Il a pris note de la présence de la Force consolidée dans la province de l’Ituri afin de répondre à la violence milicienne, et dans le territoire de Béni, pour répondre à la menace posée par l’ADF.  Le représentant a en outre mis en garde contre un retrait hâtif de la MONUSCO et conseillé de suivre le plan élaboré et visant au renforcement des capacités institutionnelles étatiques à mesure que la MONUSCO réduit sa présence dans le pays. 

Les A3+1, a poursuivi l’Afrique du Sud, demeurent aussi préoccupés de la situation humanitaire même si le nombre de nouveaux cas de COVID-19 est en baisse.  Par ailleurs, la réponse multisectorielle à l’épidémie d’Ebola tendant au renforcement a pâti d’un manque de financement et d’accès décentralisé au dépistage et aux traitements et mérite un suivi et une assistance de la communauté internationale.  Notant que plus de 21 millions de personnes souffrent d’une crise ou du pire degré d’insécurité alimentaire, les A3+1 ont réitéré leur inquiétude face aux déplacements massifs dans l’est du pays à la suite des affrontements entre groupes armés, à la violence intercommunautaire et aux pluies torrentielles ainsi qu’aux inondations.  L’Afrique du Sud a appelé en leur nom à soutenir les autorités congolaises pour pallier l’impact négatif des défis humanitaires, notamment par des arrangements financiers flexibles en vue de favoriser les efforts nationaux en matière de développement. 

Les États-Unis ont commencé par saluer les actions de la MONUSCO qui ont permis de protéger les civils et de poursuivre les programmes de DDR malgré la pandémie de COVID-19 et la violence accrue dans l’est de la RDC.  Profondément troublée par la montée de la violence au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en Ituri, la délégation a appelé à utiliser tous les outils disponibles pour œuvrer à la résolution pacifique des moteurs historiques des conflits et mettre fin à l’impunité.  C’est une priorité politique pour les États-Unis, qui ont ajouté que l’ambassadeur américain à Kinshasa s’est rendu la semaine dernière dans le Nord et le Sud-Kivu pour y rencontrer des responsables clefs et des représentants de la société civile et évaluer avec eux comment le partenariat américano-congolais peut profiter aux populations locales. 

Avec plus de 1 300 civils tués par des attaques au cours du seul premier semestre de 2020, il est clair que la MONUSCO pourrait bénéficier d’un soutien opérationnel supplémentaire, a estimé la délégation, qui a soutenu les efforts de l’ONU pour ajouter trois nouvelles unités de la Force de réaction rapide à la Brigade d’intervention de la force.  Ces nouvelles unités, associées à l’augmentation du nombre d’officiers d’état-major et de nouvelles capacités de renseignement, permettront à la Mission de contrer plus efficacement les menaces.  La voie vers une paix durable exigera des solutions politiques aux conflits localisés, a poursuivi la délégation, ainsi qu’une meilleure gouvernance.  Elle s’est dit encouragée par la reddition initiale de plus de 450 combattants du NDCR en août et a demandé instamment que le Gouvernement fasse plus de progrès en termes de désarmement, de démobilisation et de réintégration du groupe armé FRPI.  Les États-Unis ont ensuite félicité le Gouvernement congolais pour les mesures prises en vue d’améliorer la gouvernance et les droits de l’homme, lutter contre l’impunité et mettre fin à la traite des personnes et au recrutement d’enfants soldats, espérant que des progrès supplémentaires seraient faits en ce sens.  Ils ont salué les mesures prises par le Président Tshisekedi pour professionnaliser l’armée congolaise en nommant de nouveaux dirigeants cet été, ainsi que pour la nomination de la première femme juge à la Cour constitutionnelle et celle d’une nouvelle directrice de l’unité d’enquête financière de la RDC. 

Par rapport aux récentes allégations d’exploitation et d’abus sexuels généralisés par des individus qui prétendaient être employés par des organisations internationales et des agences de secours privées au Nord-Kivu dans le cadre de la riposte à Ebola, les États-Unis ont appelé ces organisations à mener une enquête approfondie et à établir les responsabilités.  La délégation a également exprimé ses préoccupations par rapport à des allégations similaires faites à l’encontre des soldats de la paix et des civils de la MONUSCO.  Elle a exhorté tous les pays fournisseurs de contingents et de policiers à appliquer la politique de tolérance zéro de l’ONU et à traiter rapidement et de manière crédible les allégations criminelles.  La MONUSCO et l’ONU doivent prendre la prévention au sérieux, notamment en rapatriant les contingents qui affichent un modèle de comportement abusif, a tranché la délégation. 

Avant de conclure, elle a dit attendre avec intérêt de prendre connaissance plus tard ce mois-ci de la stratégie de sortie conjointe avec des repères mesurables pour transférer progressivement les tâches de la MONUSCO aux autorités congolaises, à l’équipe de pays des Nations Unies et aux autres parties prenantes et ce, dans le but de parvenir à un retrait responsable de la MONUSCO dans les années à venir. 

Après avoir rappelé que la région des Grands Lacs a un grand potentiel pour une paix durable, l’Indonésie a appelé à œuvrer à la résolution de l’ensemble des problèmes qui s’y posent, y compris la promotion de mesures non militaires pour faire face à la menace posée par les groupes armés, ainsi que la réintégration communautaire.  Nous devons maintenir l’élan de paix amorcé par la RDC depuis janvier 2019, a estimé la délégation en exhortant tous les partenaires à en profiter pour renforcer leur soutien et leur assistance à la RDC et à la région. La mentalité de silo ne fonctionne plus, a poursuivi la délégation invitant tout le système des Nations Unies et ses partenaires dans la région à travailler ensemble pour faire en sorte que la RDC continue sur une voie pacifique et que son peuple puisse connaître la paix, la stabilité et la prospérité, même au-delà des élections de 2023.  À cet égard, le rôle des pays voisins et des organisations régionales ne saurait être sous-estimé pour aider à maintenir ce climat pacifique, a estimé l’Indonésie. 

Elle a également plaidé en faveur d’une augmentation de l’aide humanitaire dans le pays et s’est associée au Secrétaire général pour féliciter le Gouvernement congolais d’avoir pris des mesures rapides et décisives pour limiter la propagation du virus de COVID-19.  Le pays reste néanmoins confronté à la réémergence d’Ebola; et selon le dernier rapport sur la sécurité alimentaire, près de 22 millions de personnes en RDC sont actuellement en situation d’insécurité alimentaire aiguë et il faut permettre un large accès aux efforts humanitaires.  La délégation a continué d’appuyer les efforts de la MONUSCO et de ses dirigeants, a assuré la délégation.  À cette fin, elle a appelé à garantir la sûreté et la sécurité des soldats de la paix.  Les attaques croissantes de groupes armés, tels que les ADF, ont fait de nombreuses victimes innocentes, a-t-elle rappelé en citant le cas d’un ingénieur indonésien, soldat de la paix qui est mort en juin dernier.  Pour pouvoir s’acquitter de son mandat de protection des civils, la MONUSCO doit en premier lieu pouvoir se défendre, a tranché l’Indonésie, en martelant à nouveau que la sûreté et la sécurité des soldats de la paix restent une priorité. 

La Chine a estimé que la poursuite de la coopération entre les différents partis de la coalition était la clef de voûte de la stabilité du pays.  Qualifiant de « signe positif » que les deux partis aient publiquement réaffirmé leur engagement, elle a encouragé leurs dirigeants, notamment le Président Tshisekedi, à œuvrer de concert avec les parties prenantes concernées, à dépasser les « intérêts partisans » et à travailler pour la paix, la stabilité et le développement de la RDC. 

Il convient de s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits, compte tenu de la fréquence et de l’intensité croissantes, depuis le début de cette année, des hostilités au Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri, a-t-elle indiqué, en rappelant que le Secrétaire général met l’accent dans son rapport sur la concurrence pour la terre, les ressources et le pouvoir.  La Chine a salué, du reste, le fait que les stratégies provinciales de la MONUSCO abordent les causes du conflit, et espéré qu’elles apporteront des solutions viables, susceptibles d’accélérer le développement de la RDC et de promouvoir un développement partagé par tous.  Elle a également formé l’espoir que le cadre du DDR sera défini le plus tôt possible par le Gouvernement, permettant ainsi une stabilité sociale durable et une sécurité à long terme. 

La Chine a réitéré que tous les ajustements à venir s’agissant de la MONUSCO se fassent graduellement, de sorte d’éviter tout vide sécuritaire et de remettre en question des décennies d’opérations de maintien de la paix.  Au vu de la gravité de la situation humanitaire, exacerbée par la propagation de COVID-19 et d’Ebola à des millions de personnes en proie à l’insécurité alimentaire, la communauté internationale doit redoubler d’efforts, a insisté la délégation, en indiquant que son pays continuera à fournir une assistance concrète à la RDC. S’agissant des progrès enregistrés par le Comité 1533, la Chine a réaffirmé que les sanctions sont « des moyens et non une fin en soi », et que le Groupe d’experts devrait s’acquitter de son mandat avec « professionnalisme et impartialité ».  Elle a conseillé aux experts d’éviter d’inclure dans les rapports des informations non vérifiées. 

L’Estonie a commencé par saluer les actions de la MONUSCO ayant permis la protection des civils et la poursuite des programmes de DDR malgré la pandémie de COVID-19 et la violence accrue dans l’est de la RDC.  « De nombreux groupes armés n’ont pas répondu à l’appel en faveur d’un cessez-le-feu mondial et poursuivent leurs attaques  », a-t-elle regretté, en ajoutant que cette violence continuera d’exiger une réponse rapide, robuste et efficace de la MONUSCO, en particulier de sa force de réaction rapide et de ses brigades d’intervention, en collaboration avec les FARDC. 

La MONUSCO a fait état d’une augmentation significative du nombre d’abus et de violations des droits de l’homme, 2140 au dernier trimestre.  Un chiffre qui met en évidence les défis auxquels la Mission est confrontée et les plans possibles pour sa sortie de la RDC, a noté la délégation, en insistant sur le fait que le transfert progressif des responsabilités de la MONUSCO ne doit pas s’accompagner de revers dans les progrès accomplis.  L’élaboration de la stratégie de transition conjointe et de ses repères doit être menée en collaboration avec les principaux partenaires humanitaires et d’autres organisations internationales et nationales de la société civile, a préconisé l’Estonie.  En coopération étroite avec les autorités congolaises, il faut s’attaquer au grand nombre de violations des droits de l’homme qui reste un problème majeur, a poursuivi la délégation, pour laquelle il est impératif de lutter contre une culture d’impunité et d’instaurer la confiance dans les forces de sécurité nationales.  Elle a souligné que le renforcement de l’état de droit et des institutions judiciaires est un élément essentiel des efforts visant à s’attaquer aux causes profondes des conflits. 

L’Allemagne s’est dit préoccupée par la persistance de la violence dans les Kivu et en Ituri, où la protection des civils contre les attaques des groupes armés, en particulier des ADF, reste un défi majeur.  Elle s’est toutefois réjouie de « certains signaux positifs », comme l’engagement de paix pris dans le territoire de Mahagi, en Ituri, tout en se disant préoccupée de la hausse des violations des droits de l’homme, et notamment des violences sexuelles et sexistes. 

La délégation a jugé la situation humanitaire « alarmante », notamment pour les femmes et les enfants, et a demandé à la communauté internationale d’appuyer le plan d’intervention humanitaire, encore considérablement sous-financé.  L’Allemagne a, à ce jour, versé environ 70 millions d’euros pour des mesures d’assistance humanitaire en 2020, y compris pour des mesures de réponse concernant Ebola et COVID-19.  

À propos de la situation politique et les efforts de réforme, la délégation a jugé que le pays avait « remarquablement bien traversé » jusqu’à présent l’épidémie d’Ebola et la pandémie de COVID-19, tout en soulignant qu’il faut traiter les répercussions socioéconomiques.  Elle a lancé un appel à un engagement constructif des acteurs politiques en RDC, encourageant le Gouvernement à poursuivre son travail sur les réformes indispensables en matière de sécurité, de justice et d’économie.  « Nous ne devons pas seulement nous tourner vers l’année électorale 2023 » a ajouté l’Allemagne, pour qui des institutions démocratiques fortes, le respect de l’état de droit, une participation égale et significative des femmes à la lutte contre l’impunité et la corruption seront alors essentiels. 

La délégation a apporté le soutien de son pays à la MONUSCO, « indispensable pour soutenir la RDC », notamment pour ce qui est protéger les civils et pour l’est du pays.  L’Allemagne encourage la Mission à poursuivre son processus de réforme conformément à la résolution 2502 (2019) et aux recommandations du rapport Cruz.  Elle a noté avec préoccupation de nouvelles allégations de cas d’exploitation et d’abus sexuels commis par des membres de la Mission et demandé des enquêtes appropriées de la part des pays fournisseurs de contingents et de police et du Bureau des services de contrôle interne.  La délégation a par ailleurs plaidé pour une reconfiguration de la MONUSCO « basée sur des conditions et des repères réalistes » qui place la réforme du secteur de la sécurité au cœur du processus, afin de garantir la pérennisation des progrès accomplis et de créer des liens étroits avec les nouveaux efforts de consolidation de la paix. 

Le Royaume-Uni a assuré être toujours attaché à participer à la stabilité à long-terme de la RDC.  Il a jugé critique que le Gouvernement congolais adopte une réforme du secteur de la sécurité, sur la base d’une stratégie nationale globale. La délégation a estimé aussi que le Gouvernement devrait soutenir la feuille de route du programme de désarmement, démobilisation et réintégration de la MONUSCO, notamment en nommant un point focal et en développant un cadre national complet sur le sujet.  Elle a dit attendre enfin que la RDC adopte une stratégie nationale de justice transitionnelle capable de s’attaquer à la question de l’impunité dans le pays.

En tant que second donateur bilatéral de la RDC, le Royaume-Uni reste aussi un partenaire humanitaire et de développement.  La délégation a souhaité que soient ouvertes des enquêtes sur les allégations de violences sexuelles, autant que des efforts sur la protection des civils.  Sa délégation attend en outre une prompte mise en œuvre du mandat et des réformes de la MONUSCO et de sa brigade d’intervention, ainsi que la stratégie de retrait de la Mission, qui doit s’accompagner d’une transition conditionnelle, basée sur des données claires et mesurables.  Une appropriation nationale de cette stratégie sera en outre « cruciale »pour assurer sa pérennité, a encore estimé le Royaume-Uni.

La Fédération de Russie a relevé que la situation dans l’est de la République démocratique du Congo était « loin de la stabilisation » et l’appel du Secrétaire général à un cessez-le-feu global ignoré.  Elle s’est inquiétée en particulier de la flambée de violences, observée récemment dans l’Ituri et le Nord-Kivu.  En dépit des opérations militaires actuelles des FARC, l’ADF poursuit ses violentes attaques contre les civils et accentuer la pression sur les soldats congolais et les Casques bleus, a-t-elle remarqué, renvoyant également à l’intensification des raids de la part d’autres groupes armés, qui ne cessent de gagner en nombre, ainsi que de la violence interethnique, notamment dans le territoire de Djugu.  

La résurgence du virus Ebola dans la province de l’Équateur et la propagation de la pandémie de coronavirus ne font qu’aggraver une situation sécuritaire et humanitaire complexe, a constaté la Fédération de Russie, qui a aussi évoqué la persistance des tensions au sein de la coalition gouvernementale à Kinshasa, autre facteur négatif.  Elle a dès lors pleinement appuyé l’appel du Secrétaire général à toutes les parties prenantes congolaises pour qu’elles renoncent aux attitudes partisanes «  étroites » et s’attèlent, ensemble, à jeter les bases de la paix et la stabilité dans le pays.  

« L’ingérence dans les affaires internes de la RDC est inacceptable », a soutenu la Russie.  En revanche, elle a salué la contribution de la MONUSCO, notamment de la Force de la brigade d’intervention dans la lutte contre les groupes armés et la protection des civils dans les provinces orientales, la facilitation des processus de réconciliation et l’appui au cadre national du DDR et aux feuilles de route provinciales, par le biais de ses bons offices, ainsi que l’amélioration de la coordination entre la MONUSCO et les FARDC, ainsi que l’élargissement de la zone opérationnelle de la Force dans la province de l’Ituri. 

Au sujet des sanctions, la Russie est d’avis que les restrictions imposées au pays ne devraient pas affecter l’efficacité des opérations militaires effectuées par les FARC pour contrer les groupes armés.  Elle a espéré voir dans le courant de ce mois une stratégie conjointe de transition progressive et de retrait responsable de la MONUSCO du pays, conformément à la décision du Conseil l’an dernier.  Toute décision dans ce contexte devrait être prise en prenant pleinement en considération la situation sur le terrain et une fois que les points de vue exprimés par Kinshasa, par les États de la région et par les pays pourvoyeurs de contingents auront été soigneusement pris en compte.  Elle a enfin assuré qu’en tant que membre du Groupe des amis de la région des Grands Lacs, la Russie persévérera dans l’assistance à la paix et au processus de stabilisation en République démocratique du Congo.  Elle a d’ailleurs fourni à ce pays deux laboratoires mobiles de tests microbiologiques ainsi que du matériel de protection personnel, a précisé la délégation.

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