SC/14392

Le Président de la Cour internationale de Justice avance trois propositions pour renforcer la coopération encore « basique » entre la Cour et le Conseil de sécurité

Le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Abdulqawi Ahmed Yusuf, a fait, ce matin, devant le Conseil de sécurité, trois propositions en vue de renforcer la coopération entre les deux organes.  Il a invité le Conseil à demander plus souvent un avis consultatif à la Cour, à lui rendre visite tous les trois ans et à obtenir des États qu’ils acceptent la juridiction obligatoire de la CIJ.  Professant leur « respect » pour la Cour, les délégations ont salué ces propositions et en ont avancé d’autres, afin d’étoffer une coopération encore « basique », selon l’expression de la République dominicaine. 

« La vitalité de la coopération entre nos deux organes est d’ordre qualitatif, plutôt que quantitatif », a reconnu le Président de la CIJ, à l’entame de sa déclaration.   Le Conseil n’a en effet utilisé qu’une seule fois le pouvoir que lui confère l’Article 36 de la Charte des Nations Unies de soumettre un différend juridique à la Cour, en l’occurrence dans l’affaire du détroit de Corfou.  Le Conseil n’a également demandé qu’une seule fois à la CIJ un avis consultatif, au titre de l’Article 96 de la Charte, et c’était au sujet de la Namibie. 

Le Président a aussi rappelé que le Conseil a recours au droit international, tel qu’interprété par la CIJ, pour identifier les menaces à la paix et à la sécurité internationales.  Le Conseil a ainsi établi une corrélation entre violations du droit international et menaces à la paix et à la sécurité internationales, tandis que la portée du droit international a été élargie pour faire face aux menaces posées par les acteurs non étatiques.    

Au titre de sa première proposition pour renforcer la coopération entre la Cour et le Conseil, M. Yusuf a tenu à faire une distinction entre le renvoi d’un différend juridique et la demande d’un avis consultatif.  Le Président a en effet dit comprendre la « réticence » du Conseil de soumettre un tel différend sans le consentement des parties.  En revanche, un avis consultatif n’est pas juridiquement contraignant, a poursuivi M. Yusuf, en invitant le Conseil à demander davantage un tel avis, pour prévenir les conflits, comme l’y invite d’ailleurs l’Assemblée générale.  

Le Président a rappelé que la dernière visite du Conseil à la Cour remonte à août 2014 et a préconisé que ce dernier se déplace à La Haye tous les trois ans, en soulignant que le Conseil participe au renouvellement par tiers tous les trois ans des juges de la CIJ.  Une telle visite pouvant donc être l’occasion pour les membres du Conseil et de la CIJ de discuter de sujets communs, a affirmé le Président. 

Enfin, il a proposé que le Conseil envisage dans ses déclarations présidentielles de soumettre un différend juridique à la Cour, comme il l’a fait dans trois déclarations, en 2000, 2010 et, la dernière fois, en 2012.  Le Conseil pourrait inviter les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter la juridiction obligatoire de la Cour, a conclu M. Yusuf, en rappelant que 74 États seulement reconnaissent cette juridiction obligatoire.   À ce stade, a d’ailleurs fait observer la Belgique, un seul membre permanent du Conseil sur cinq et cinq membres élus ont reconnu ladite juridiction. 

La Cour, a souligné la Fédération de Russie, est le seul organe à avoir obtenu le statut d’« organe intergouvernemental de justice » dont l’idée est plus ancienne que les Nations Unies elle-même.  Son éloignement « physique » des querelles politiques est, à cet égard, très symbolique, a-t-elle estimé, en rappelant que 178 affaires lui ont été renvoyées depuis sa création.  « Notre respect pour la Cour reste inchangé et nous l’encourageons à lancer des procédures judiciaires de bonne foi et à se garder de les manipuler. »

Le Conseil doit faire davantage appel à la Cour, a embrayé l’Indonésie, à l’instar de la République dominicaine, qui s’est dite intéressée par l’avis de la Cour sur la justice transitionnelle.   L’Allemagne a soulevé une autre question, celle de la menace que peut constituer pour la sécurité internationale le non-respect des décisions de la CIJ. 

Lorsque ces décisions sont ignorées, il est impératif que le Conseil envisage de faire des recommandations pour y donner effet, conformément à l’Article 94 de la Charte, a plaidé Saint-Vincent-et-les Grenadines.   La Belgique et l’Afrique du Sud ont exhorté le Conseil à « innover » et à inviter le Président de la Cour à lui faire des présentations en cas de non-respect de ses avis ou ordonnances, qui menacerait la paix et la sécurité internationales.  

Le Conseil devrait, a dit l’Estonie, envisager des mesures pour empêcher le recours au droit de veto en cas de différends juridiques qui, « de manière générale », doivent être renvoyées à la Cour.   Enfin, le Niger a encouragé la pratique de la Cour consistant à permettre aux étudiants de diverses régions du monde de se familiariser avec son travail.  Aussi l’Allemagne, l’Afrique du Sud ou encore les États-Unis ont-ils salué la résolution que l’Assemblée générale a adoptée, la semaine dernière, sur la création du Fonds d’affectation spéciale pour le Programme relatif aux « Judicial Fellows » de la CIJ afin de promouvoir la participation des stagiaires issus des pays en développement. 

M. ABDULQAWI AHMED YUSUF, Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), a estimé que le partenariat entre la Cour et le Conseil de sécurité est déjà solide, mais qu’il peut encore être renforcé.  Le Conseil n’a utilisé qu’une seule fois le pouvoir que lui confère l’Article 36 de la Charte des Nations Unies de soumettre un différend juridique à la Cour, en l’occurrence dans l’affaire du détroit de Corfou.  Le Conseil n’a également demandé qu’une seule fois à la CIJ un avis consultatif, au titre de l’Article 96 de la Charte, et c’était au sujet de la Namibie.  Si le Conseil n’a que peu recouru aux compétences de la Cour, c’est parce que la vitalité de la coopération entre les deux organes est d’ordre « qualitatif, plutôt que quantitatif », a déclaré le Président. 

Il a rappelé que le détroit de Corfou a été la première affaire de la CIJ.  En lui soumettant ce différend en 1947, le Conseil a participé au démarrage des activités de la Cour et évité qu’un différend ne dégénère en une guerre ouverte opposant plusieurs protagonistes.  Cette affaire montre que la coopération entre les deux organes peut aboutir à des résultats efficaces.  Le Président a rappelé que cette affaire a été l’occasion de réaffirmer que la politique de la force n’a plus sa place dans les relations internationales.  La Cour, dans son arrêt, a réaffirmé qu’entre États indépendants, le respect de la souveraineté est essentiel aux relations internationales, tout en apportant des éclaircissements sur la responsabilité des États pour des faits illicites commis sur leur territoire.  Le Président a insisté sur la pertinence de cet arrêt pour les questions actuelles de terrorisme, de cyberattaque ou de dommages environnementaux transfrontaliers.  M. Yusuf a également souligné que cette affaire est l’une des rares où la CIJ a désigné des experts pour obtenir leurs opinions sur des sujets techniques ou scientifiques. 

Le Président a ensuite souligné l’importance de l’avis consultatif sur les conséquences juridiques de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie.  Il a rappelé que le régime d’apartheid sud-africain avait décidé de rester en Namibie après la cessation du mandat de l’Assemblée générale.  Cet avis a contribué à la promotion de l’état de droit, du principe d’égalité et d’autodétermination des peuples et ouvert la voie à des mesures concrètes en vue de l’indépendance de la Namibie. 

Le Président a aussi rappelé que le Conseil a recouru au droit international, tel qu’interprété par la CIJ, pour identifier les menaces à la paix et à la sécurité internationales.  Dans sa résolution 1296 (2000), le Conseil a établi une corrélation entre violations du droit international et menaces à la paix et à la sécurité internationales, en indiquant que la commission de violations du droit peut constituer une telle menace.  Par ailleurs, la portée du droit international a été élargie pour faire face aux menaces posées par les acteurs non étatiques.  

M. Yusuf a proposé trois pistes pour renforcer la coopération entre la Cour et le Conseil.  Il a d’abord suggéré que le Conseil fasse davantage appel à la Cour, en faisant une distinction entre le renvoi d’un différend juridique et la demande d’un avis consultatif.  Le Président a en effet dit comprendre la réticence du Conseil de soumettre un tel différend, sauf si les parties sont d’accord.  Sans le consentement des parties, il est difficile pour le Conseil de soumettre un différend à la CIJ, a-t-il reconnu.  En revanche, un avis consultatif n’est pas juridiquement contraignant.  M. Yusuf a indiqué que l’Assemblée générale recommande au Conseil, aux fins de prévention des conflits, de demander un tel avis consultatif, elle-même ne pouvant le faire.  Le Conseil devrait user de cette possibilité plus souvent, a déclaré le Président. 

Deuxièmement, M. Yusuf a proposé, en vue de l’élargissement du dialogue entre les deux organes, que le Conseil rende visite à la Cour tous les trois ans par exemple.  Sa dernière visite remonte à août 2014.  Il a rappelé que le Conseil participe au renouvellement par tiers tous les trois ans des juges de la CIJ, une telle visite pouvant donc être l’occasion pour les membres du Conseil et de la CIJ de discuter de sujets communs. 

Enfin, le Président a proposé que le Conseil envisage dans ses déclarations présidentielles de soumettre un différend juridique à la Cour, comme il l’a fait dans trois déclarations, en 2000, 2010 et 2012.  Le Conseil pourrait insister sur le rôle clef de la CIJ et inviter les États qui ne l’ont pas encore fait à accepter la juridiction obligatoire de la Cour.  Il n’y a pas eu de déclaration de ce type depuis 2012, a déclaré M. Yusuf, en rappelant que 74 États seulement reconnaissent cette juridiction obligatoire. 

Le Viet Nam a appelé à une coopération renforcée entre le Conseil de sécurité et la CIJ, relevant que l’affaire du détroit de Corfou est « la première et l’unique » dans laquelle le Conseil a recommandé aux parties de référer leur différend à la Cour.  La délégation a également noté que parmi les 28 avis consultatifs émis par la CIJ, un seul a été rendu à la demande du Conseil de sécurité, à savoir l’avis consultatif sur la Namibie de 1970. 

La délégation a appelé au renforcement du dialogue entre les deux organes sur des questions plus importantes, relevant que la Cour a souvent été appelée à traiter des affaires liées à des situation de conflit armé dont est saisi le Conseil de sécurité.  Elle s’est déclarée convaincue que l’expertise judiciaire de la Cour apportera une contribution significative aux travaux du Conseil de sécurité pour traiter des questions juridiques internationales « brûlantes » qui pourraient se poser dans le contexte de situations de conflit ou d’après conflit.  Insistant sur l’importance du renforcement des capacités, elle a salué les efforts déployés par la CIJ pour familiariser les jeunes diplômés en droit avec son travail et le règlement des différends internationaux. 

La Fédération de Russie a commenté le principe de l’obligation faite aux États de régler pacifiquement leurs différends, dont la CIJ est l’un des principaux instruments.  Elle a souligné que l’un des éléments fondamentaux de ce principe est la liberté qu’ont les États d’opter pour la méthode la plus adaptée à leur réalité.  Aucun prétexte ne saurait nier cette liberté, a tranché la délégation pour laquelle ce qui compte, c’est le dialogue et la volonté de trouver des solutions mutuellement acceptables.  La nécessité de régler pacifiquement les différends et de créer un organe intergouvernemental de justice est plus ancienne que les Nations Unies elle-même, et il est vrai que la CIJ est la seule à avoir obtenu ce statut.  Son éloignement « physique  » des querelles politiques est, à cet égard, très symbolique, a souligné la Fédération de Russie. 

À ce jour, a-t-elle compté, 178 affaires ont été renvoyées à la CIJ depuis sa création, ce qui illustre le rôle primordial de la Cour.  Le respect des normes et principes du droit international est le principal garant d’une paix et d’une sécurité stables.  Notre respect pour la Cour, a confessé la Fédération de Russie, reste inchangé et nous l’encourageons à lancer des procédures judiciaires de bonne foi et à se garder de les manipuler. 

L’Indonésie a déclaré que la paix et la sécurité internationales dépendent, entre autres, d’une coopération effective entre le Conseil de sécurité et la CIJ.  Le Conseil de sécurité doit donc être encouragé à dialoguer et à interagir davantage avec la Cour, les deux organes étant complémentaires.  La délégation a souligné le rôle critique que joue le droit international pour promouvoir « la stabilité et l’ordre » dans les relations internationales.  En cette époque difficile, marquée par une augmentation des disputes dans différentes parties du globe, il est important de prévenir leur escalade et de les résoudre, dans la mesure du possible, en suivant les procédures judiciaires appropriées, a-t-elle estimé.  La délégation a rappelé que la Charte confère au Conseil des outils lui permettant de procéder au règlement pacifique des différends entre États en faisant usage de la juridiction de la Cour ou en demandant des avis consultatifs sur des questions juridiques qui pourraient apparaître dans le cadre de ses travaux.  Or, les chiffres indiquent que pendant de nombreuses années, le Conseil s’est abstenu de recourir à cette disposition, a déploré la délégation qui a encouragé le Conseil à faire usage de ces outils. 

 La République dominicaine a rappelé que la création de la Cour visait à assurer harmonie et paix dans le monde.  Il n’y a pas de paix sans justice et son corollaire l’état de droit.  La relation entre le Conseil de sécurité et la Cour est restée « basique » au cours des années, a constaté la délégation, en proposant au Conseil d’étudier plus avant les possibilités d’une plus grande coopération avec cette Cour, en tant que mécanisme de règlement pacifique des différends.  La République dominicaine a d’ailleurs rappelé qu’au cours de ces dernières décennies, la majorité des différends en Amérique latine ont été renvoyés à la Cour.  Ces affaires étaient pour la plupart des différends territoriaux, et la saisine de la Cour a permis d’éviter des guerres.  La délégation a aussi demandé au Conseil de solliciter l’avis de la Cour sur la justice transitionnelle.  Elle a conclu en martelant que « la coexistence pacifique doit être la règle et la guerre, l’exception ».  

Le Niger a déclaré que conformément aux idéaux de la Charte à laquelle il a adhérée dès 1960, il a toujours privilégié le règlement pacifique des différends avec ses voisins, à travers la saisine de la CIJ.  La capacité de la Cour à rendre des décisions dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales, qui à titre principal relève du Conseil de sécurité, est un aspect extrêmement important des compétences qu’il faut continuer à promouvoir, afin de renforcer la complémentarité entre les deux organes.  

Le Niger a encouragé la Cour à continuer à rendre ses décisions en toute objectivité et impartialité, comme elle l’a toujours fait, afin d’encourager les États ayant des litiges à emprunter la voie du règlement pacifique à travers la justice.  Cela ne pourrait que renforcer l’état de droit aux niveaux national et international et assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Le Niger a également encouragé la pratique de la Cour consistant à permettre aux étudiants de diverses régions géographiques et linguistiques de se familiariser avec son travail, et développer leurs compétences dans le domaine du règlement pacifique des différends internationaux. 

Pour le Niger, cette pratique pourrait être envisagée par le Conseil, afin de permettre à ces jeunes de se familiariser avec l’organe, mais aussi les inciter à faire des recherches et études comparatives du Conseil de sécurité et de la CIJ.  La délégation a en outre invité la Cour à entreprendre des relations avec les institutions judiciaires nationales en général et celles des pays en situation de conflit ou de postconflit en particulier, afin de mieux renforcer leur capacité à prendre en charge certaines questions. 

L’Allemagne a déclaré que la Cour et le Conseil sont essentiels pour le respect du droit international, grâce à un ordre mondial fondé sur des règles applicables à tous.  Tous les États sont tenus de respecter les décisions rendues par les cours et tribunaux internationaux, même si elles sont contraires à leurs intérêts particuliers.  L’Allemagne a souhaité que l’on mette l’accent sur la menace que peut constituer pour la sécurité internationale le non-respect des décisions de la CIJ.  Elle a jugé important que l’on se rappelle qu’il y a 10 ans, la Cour a rendu un avis consultatif sur la conformité avec le droit international, de la déclaration d’indépendance du Kosovo.  Il est important, a souligné l’Allemagne, que davantage de pays respectent le caractère obligatoire de la juridiction de la CIJ. 

Elle a insisté sur une bonne coopération entre la CIJ et le Conseil pour faire face à des défis, comme les menaces à la sécurité internationale et celles des changements climatiques ou des pandémies.  Enfin, l’Allemagne s’est félicitée de l’adoption, cette semaine, par l'Assemblée générale d’une résolution intitulée « Fonds d’affectation spéciale pour le Programme relatif aux Judicial Fellows de la Cour internationale de Justice », permettant l’octroi de bourses à des ressortissants de divers horizons afin qu’ils se familiarisent avec le travail de la CIJ. 

Saint-Vincent-et-les Grenadines a estimé qu’en cette « nouvelle ère », marquée par des questions complexes liées au terrorisme et aux changements climatiques, une approche globale et pragmatique de l’ensemble du système de l’ONU est plus que jamais essentielle.  La délégation a rappelé que le Chapitre VI de la Charte envisage une « relation symbiotique » entre le Conseil de sécurité et la CIJ, grâce à laquelle le Conseil de sécurité remplirait son mandat non pas en agissant seul, mais en voyant ses travaux renforcés par les « contributions précieuses » de la Cour.  À ses yeux, le Conseil de sécurité devrait encourager les États Membres à recourir au principal organe judiciaire de l’ONU pour procéder au règlement pacifique de leurs différends.  La délégation a de plus estimé que dans les cas où les jugements de la CIJ sont ignorés, il est impératif que le Conseil de sécurité envisage de faire des recommandations pour donner effet aux directives de la Cour, conformément à l’Article 94 de la Charte. 

La Belgique a salué cette réunion qui permet une grande réflexion sur la coopération entre le Conseil de sécurité et la Cour.  Le droit international est la pierre angulaire du système international et la Cour a un rôle central à jouer dans le renforcement de l’état de droit au niveau international, a souligné la Belgique.  Elle a ajouté que les règles et des institutions communes sont « essentielles » au maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Le large éventail des saisines de la Cour montre son utilité. 

La Belgique a regretté qu’un seul membre permanent du Conseil sur cinq et cinq membres élus ont reconnu la juridiction obligatoire de la Cour.  Cette situation a donné lieu à très peu de demandes de saisines de la Cour par le Conseil.  Les renvois devraient devenir plus fréquents, a insisté la Belgique, jugeant que le Conseil peut également donner suite aux mesures provisoires prises à la suite des décisions de la Cour.  Le Conseil peut aussi innover, en invitant le Président de la Cour à lui faire des présentations en cas de non-respect de ses avis ou ordonnances qui menacerait la paix et la sécurité internationales.  La Belgique a, à son tour, salué la création du programme des bourses de la Cour qui devrait avoir un effet positif sur le développement du droit international.  

La Chine a dit qu’il faut bien définir les principes cardinaux de la Charte des Nations Unies, notamment ceux relatifs à la non-ingérence dans les affaires intérieures et au règlement pacifique des différends.  Le Conseil, a-t-elle estimé, devrait représenter la volonté de tous les États Membres en matière de maintien de la paix et la sécurité internationales, et la Cour devrait régler les affaires, dans le plein respect de la Charte des Nations Unies et en évitant « les deux poids, deux mesures ».

Pour la Chine, le Conseil de sécurité devrait appuyer l’indépendance de la Cour.  Les deux organes se doivent de remplir leurs devoirs respectifs et coopérer pour obtenir des États le respect du droit international et l’abandon des mesures unilatérales.  La Chine a promis de continuer de défendre l’ordre international fondé sur le droit et a prôné des relations internationales marquées par l’égalité entre les États et le respect mutuel. 

L’Estonie a réitéré d’emblée que la Charte des Nations Unies est irremplaçable pour un ordre international fondé sur des règles.  Elle représente un cadre pour les négociations multilatérales et le règlement des différends.  La CIJ contribue, à cet égard, grandement au multilatéralisme, en promouvant l’état de droit au niveau international.  La jurisprudence de la Cour, a estimé l’Estonie, a un impact plus important que ses avis consultatifs.  Elle a invité le Conseil de sécurité à approfondir le rôle complémentaire qu’il pourrait jouer avec la CIJ dans le règlement pacifique des conflits.  En vertu de la Charte, le Conseil peut demander à la CIJ de rendre un avis consultatif et il peut prendre des mesures concrètes pour garantir la mise en œuvre d’un jugement de la Cour, a rappelé l’Estonie, regrettant que ce pouvoir du Conseil ait été « sous-utilisé », au cours des 75 dernières années.  Un recours plus systématique du Conseil à la CIJ serait positif pour le maintien de la paix et la sécurité internationales. 

Les différends juridiques devraient de manière générale être renvoyés à la CIJ, a exigé la délégation qui a demandé aux membres du Conseil de mettre en place des initiatives pour empêcher le recours au droit de veto dans les cas de crimes graves mais aussi quand il s’agit de régler des différents juridiques.  Constatant qu’à ce jour, seuls 5 des 15 membres actuels du Conseil, dont l’Estonie, ont accepté la juridiction obligatoire de la CIJ et en tout, seulement 75 États Membres de l’ONU, l’Estonie a jugé « impératif » de changer cette situation. 

 Le Royaume-Uni a déclaré que le CIJ joue un rôle clef pour aider les États à résoudre leurs différends de manière pacifique et éviter de devoir recourir au Conseil de sécurité.  Il a rappelé que l’Article 1 de la Charte appelle à des mesures collectives efficaces en vue de réaliser, par des moyens pacifiques, conformément aux principes de la justice et du droit international, l’ajustement ou le règlement de différends.  Le Royaume-Uni a estimé que le droit international pourrait être promu si davantage d’États reconnaissaient la juridiction obligatoire de la CIJ.  Il a souligné l’importance de la réunion annuelle entre la CIJ et le Conseil de sécurité qui s’est tenue, il y a quelques semaines, afin d’examiner les moyens d’améliorer la coopération et la complémentarité des deux organes dans l’intérêt du maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

Pour les États-Unis, la CIJ joue un rôle fondamental pour préserver la paix et la sécurité internationales, et sa charge croissante de travail démontre que les États reconnaissent de plus en plus qu’il vaut mieux passer par elle pour le règlement pacifique des différends.  Lorsque les situations se détériorent, il ne faut pas oublier ce que la Cour peut faire, avant que le Conseil n’intervienne, ont souligné les États-Unis, insistant également sur le principe du consentement des États.  De même, la délégation a rappelé que de nombreux différends sont réglés par d’autres moyens judiciaires sans implication de la CIJ, notamment les Cours de justice à compétence régionale.  Les États-Unis ont demandé de ne pas prendre le travail de la CIJ pour « argent comptant », rappelant qu’à une époque, les différends étaient le plus souvent régler par la voie militaire. 

En outre, la délégation a rappelé que c’est l’Université de New York qui a initié, en 1999, le programme dit des « Judicial fellows ».  Pour les États-Unis, il est important que les jeunes diplômés des pays en développement puissent également bénéficier de ce programme afin de renforcer l’état de droit et sensibiliser sur le travail de la CIJ, en matière de maintien de la paix et la sécurité internationales.  C’est dans cette optique que les États-Unis ont coparrainé la résolution de l’Assemblée générale. 

La Tunisie a tout d’abord salué l’adoption, en début de semaine par l’Assemblée générale, d’une résolution établissant un fonds de contributions volontaires pour appuyer le Judicial Fellows Programme de la Cour.  Elle a ensuite appelé au renforcement de l’interaction et de la coopération entre le Conseil de sécurité et la CIJ afin d’atténuer les tensions et d’assurer la paix en recourant au droit international.  Le Conseil de sécurité devrait notamment envisager de saisir la Cour et de lui demander d’émettre des avis consultatifs afin de résoudre les différends internationaux et contribuer à la clarification et au développement ultérieur du droit international.  Il est essentiel qu’une réflexion juridique créative soit rendue possible dans les limites de la Charte, afin de développer des normes et des instruments régissant des relations ordonnées entre les États et contrer efficacement les menaces émergentes du XXIe siècle, a insisté la délégation.

La France a dit que les mandats de la Cour et du Conseil sont complémentaires pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Les décisions de la Cour contribuent en effet à l’apaisement des relations entre États et les aident à parvenir à une solution lorsque les autres moyens de règlement pacifique des différends ne le permettent pas.  La France a mis l’accent sur la contribution décisive de la Cour à la résolution des litiges frontaliers, en particulier sur le continent africain. 

Rappelant que la Charte consacre les missions et les liens entre les deux organes, elle a précisé que le Conseil de sécurité doit tenir compte du fait que les parties à un différend d’ordre juridique devraient d’une manière générale soumettre ce différend à la Cour, conformément à son Statut.  Lorsque la Cour a rendu une décision, le Conseil peut ensuite intervenir pour en assurer la pleine exécution, a précisé la France, avant de souligner que l’absence de saisine du Conseil au titre de l’Article 94, paragraphe 2, de la Charte tend à démontrer l’autorité des arrêts de la Cour. 

La France a ajouté que le Conseil peut, comme l’Assemblée générale, saisir la Cour lorsque, à l’occasion de ses travaux, se posent à lui des questions juridiques nécessitant clarification.  Ces avis ont pour objectif une meilleure compréhension du droit international, et ne sauraient se substituer aux arrêts pour trancher des différends bilatéraux. 

En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, la France a dit attacher une importance capitale à la Cour et avoir de nombreux traités qui comportent des clauses compromissoires en ce sens.  Tel est par exemple le cas du Protocole facultatif à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, qui a fondé la compétence de la Cour dans l’affaire relatives aux immunités et procédures pénales ayant donné lieu à l’arrêt du 11 décembre dernier.  Nous sommes jusqu’à présent, a souligné la France, le seul État à avoir accepté en pratique la procédure d’acceptation d’une demande faite par un autre État, également appelée le « forum prorogatum ». 

La France a dit appuyer la Cour dans son fonctionnement et a salué l’adoption cette semaine par l’Assemblée générale d’une résolution, coparrainée par elle-même, portant création d’un fonds d’affectation spéciale pour le programme de bourses.  La France a estimé que cette initiative améliorera la diversité géographique et linguistique des participants au programme, sélectionnés sur la seule base de leurs mérites et talents.  La France a formé le vœu que la Cour et le Conseil continueront à apporter ensemble, dans le cadre défini par la Charte, des réponses aux défis d’aujourd’hui qui constituent aussi les potentielles sources de conflits de demain, dont la santé, l’utilisation d’Internet à des fins terroristes, et bien entendu la protection de l’environnement et la lutte contre les changements climatiques. 

L’Afrique du Sud a déclaré que depuis la création de la Cour permanente d’arbitrage à La Haye en 1899, le règlement des différends, par des moyens pacifiques plutôt que par la force, a été un des piliers du droit international et de la diplomatie.  Si les différends sont une part « inévitable » des relations internationales, le droit international, a souligné l’Afrique du Sud, ne connaît pas de juridiction obligatoire.  Le règlement pacifique des différends, quels qu’en soient les moyens, demeure volontaire mais son importance ne saurait être sous-estimée.  Une nouvelle fois, a dit l’Afrique, nous soulignons l’importance de la CIJ, comme principal organe judiciaire des Nations Unies.

Le Conseil de sécurité joue un rôle important dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, mais celui de la CIJ dans le règlement pacifique des conflits, avant qu’ils ne deviennent une menace à cette paix et cette sécurité internationales, demeure un des piliers les plus importants du système international.  L’Afrique du Sud a plaidé, dans ce cadre, pour le renforcement de la coopération entre le Conseil et la CIJ, regrettant qu’au fil des années, le Conseil n’ait pas vraiment exploité le potentiel de la Cour, alors qu’il pourrait en bénéficier grandement.

Réaliser la paix et faire taire les armes ne peuvent avoir un caractère pérenne que si ces efforts vont main dans la main avec la justice.  Le Conseil devrait donc encourager les États impliqués dans une situation de menace à la paix et à la sécurité internationales, à saisir la Cour.  Il pourrait aussi user de son pouvoir de demander des avis consultatifs sur des questions juridiques.  Le Conseil, a poursuivi l’Afrique du Sud, pourrait inviter le Président de la CIJ à l’informer de tout non-respect de décisions qui pourrait constituer une menace à la paix et à la sécurité internationales.

En tant que pays en développement, l’Afrique du Sud a souligné l’importance du renforcement des capacités dans le domaine juridique.  Elle a salué le Programme Judicial Fellows mais a ajouté que si admirable soit-il, ce Programme n’est malheureusement pas accessible aux étudiants du monde en développement, compte tenu du manque de ressources dont souffrent les universités des pays du Sud pour financer leurs étudiants.

L’Afrique du Sud a donc félicité le Président de la CIJ pour sa détermination à élargir  le programme.

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