SG/SM/19963

L’ONU et l’Union africaine doivent continuer à travailler ensemble pour aider les peuples de Libye et du Sahel à assurer leur avenir politique, sécuritaire et économique, souligne le Secrétaire général

On trouvera ci-après le discours que le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a prononcé le 8 février à Addis-Abeba, au Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine sur la Libye et le Sahel:

Je remercie le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine d’avoir organisé cette réunion et de m’avoir invité à m’exprimer sur un enjeu vital: comment enrayer la spirale de la violence en Libye et renforcer la stabilité au Sahel?

Je suis reconnaissant au Conseil et à l’ensemble de l’Union africaine pour le partenariat avec l’ONU sur toutes les questions de paix et de sécurité, et en particulier pour votre engagement à mettre fin au conflit libyen.

Depuis avril dernier, la lutte pour la capitale libyenne a tué et blessé des milliers de personnes, dont des centaines de civils.

Le droit international humanitaire et le droit international des droits humains ont été maintes et maintes fois bafoués de part et d’autre.

Plus de 170 000 personnes ont dû quitter leur domicile.

Migrants et réfugiés, dont certains sont piégés à proximité des combats dans des centres de détention ont également été atteints et continuent de souffrir dans des conditions terribles.

Cette escalade a permis aux groupes terroristes de gagner en présence et en influence dans la région.  Elle a favorisé l’arrivée d’armes et de combattants étrangers, la traite des êtres humains et d’autres activités criminelles.

Tout cela a exacerbé les tensions et les conflits locaux existants, érodant le tissu social, submergeant les mécanismes de résolution des conflits et mettant à rude épreuve des structures de gouvernance déjà fragiles dans les pays du Sahel.

Aujourd’hui, la situation sécuritaire et humanitaire à travers le Sahel se détériore constamment, est de plus en plus interconnectée avec le lac Tchad et menace de se propager aux côtes du golfe de Guinée.  Les attaques armées contre les forces de sécurité et les civils ne connaissent pas de frontières et sont à chaque fois plus sophistiquées.

Le nombre d’agents de sécurité et de civils tués cette année au Burkina Faso, au Mali et au Niger représente un triste record.

Les civils ayant besoin d’aide humanitaire ou touchés par la violence ont également augmenté de façon alarmante – en 2019, le nombre de déplacés internes au Burkina Faso a été multiplié par 10!  Rien que dans le centre du Sahel, plus de trois millions de personnes ont besoin d’une assistance immédiate.  L’aggravation de la violence a aussi privé plus de 400 000 enfants d’éducation, emportant également leur espoir d’une vie meilleure.

La confiance des populations locales dans leurs forces de sécurité, leurs gouvernements et la communauté internationale, y compris les Nations Unies, s’est érodée.

Il est évident que le dispositif dont nous disposons sur place, avec ses différentes composantes, est insuffisant pour vaincre le terrorisme, qui au contraire gagne du terrain et devient une menace régionale, continentale et globale.

Une mobilisation courageuse et concertée pour mettre fin aux crises en Libye et au Sahel est non seulement nécessaire mais urgente.  Nous devons répondre aux appels.  Nous devons entendre l’appel des gouvernements pour un soutien accru de la communauté internationale à leur sécurité et en faveur de l’aide au développement.

Je me réjouis de la décision de la CEDEAO de renforcer les mandats de lutte contre le terrorisme dans la région et je salue les importantes ressources promises jusqu’à présent.  La CEDEAO illustre le leadership nécessaire pour mobiliser tous les acteurs, y compris la société civile locale, afin d’apporter une réponse efficace et durable à l’extrémisme violent.

Récemment, les chefs d’État des pays du G5 Sahel et de la France se sont réunis à Pau et se sont collectivement engagés à redoubler d’efforts dans quatre domaines critiques: la lutte contre le terrorisme; le renforcement des capacités des forces régionales; le retour de l’autorité de l’État; ainsi que l’aide au développement.

Je salue la tenue de l’Assemblée générale de l’Alliance Sahel en marge du Sommet des chefs d’État du G5 Sahel, qui atteste de cette volonté de répondre à la crise à travers une approche plus intégrée.

La Force conjointe G5-Sahel doit être au centre de ces efforts. La MINUSMA continuera de la soutenir, dans les limites de son mandat et de ses capacités.

Mais comme je l’ai dit à de nombreuses reprises, les forces africaines doivent disposer d’un mandat clair du Conseil de sécurité, au titre du Chapitre VII de la Charte, et de financements stables et prévisibles, basés sur des contributions obligatoires.

C’est évident pour le G5 Sahel aujourd’hui mais aussi pour la plus large coalition qu’il faut bâtir pour vaincre le terrorisme en Afrique.

L’ONU continue de soutenir la mise en œuvre de l’Accord de paix au Mali, autre pierre angulaire sans laquelle il ne peut y avoir de stabilité dans la région.

Mais nous savons aussi que l’on ne pourra jamais mettre fin à l’extrémisme violent avec uniquement des solutions sécuritaires.  Le développement reste le meilleur instrument de prévention pour la paix.  Le développement a aussi besoin de la paix.  Dans un contexte où la crise climatique et la raréfaction des ressources exacerbe les tensions et accroit le désespoir des populations, nous devons nous attaquer aux causes profondes.

Nous devons offrir à des populations qui ont tant souffert, notamment les jeunes, les personnes handicapées et les femmes, des réponses politiques et des perspectives d’avenir et de développement durable.  Nous devons les inclure dans les processus de décision pour qu’ils puissent contribuer à bâtir un avenir meilleur pour leur pays.

J’appelle la communauté internationale à intensifier ses efforts, notamment dans le cadre du Programme d’Investissement Prioritaire des pays de la région appuyé par la mise en œuvre de la Stratégie Intégrée des Nations Unies pour le Sahel. 

Supporting peace and stability in Libya and the Sahel is a priority for the United Nations and the African Union.  The recent summits of Pau, Berlin and Brazzaville, as well as today’s meeting demonstrate our collective commitment, but I call on the international community to do more to support local and regional actors.  The fight against terrorism is a shared responsibility and cannot be outsourced to the region or the continent.

At the same time, it is essential for the Libyan parties and states in the Sahel to find and steer nationally-owned solutions to their own internal challenges. 

Unfortunately, as it has become increasingly clear, Libya’s descent into an ever deeper and more destructive conflict has been fuelled by the participation of outside powers.

Foreign intervention has escalated rapidly, in particular over the course of the last six to nine months.

The Berlin International Conference on Libya, which President Moussa Faki Mahamat and I attended on January 19, provided a glimmer of hope.

Members of the international community committed to ensuring a peaceful resolution of the crisis.

And they pledged to end foreign intervention, including the provision of arms and mercenaries.

All agreed that the incessant, blatant violations of the Security Council-imposed arms embargo must stop, and supported advancing good faith dialogues on political, economic and military issues in a Libyan-owned and Libyan-led process.

But the truth is, arms continue to flow in and military operations have recommenced, further compounding an already difficult humanitarian situation.  The continued violations of the arms embargo are nothing short of a scandal.

Nevertheless, the United Nations remains deeply engaged in supporting the three Libyan dialogue tracks.

This week’s meetings of the 5+5 military commission in Geneva, convened by my Special Representative, give us some hope that ending the military escalation is possible.  We desperately need an effective and lasting ceasefire.

I want the United Nations to back all meaningful efforts and work hand in hand with our partners, in particular the African Union.  I am aware of, and I share the deep frustration of the African Union with the situation in Libya since 2011.  The proposal made by this body to the United Nations Security Council led to an inconclusive discussion in which the Secretariat was not asked to participate.  I have conveyed more than once to the Member States of the Security Council my availability to help find the best way to institutionalize the cooperation between the AU and the UN on Libya.

There are things we can do now.

I am encouraged by the work of the African Union High-Level Committee on Libya, which President Sassou Nguesso convened in Brazzaville last week.  We fully support the African Union’s initiative for a future Libyan reconciliation meeting in Africa.

We are willing to receive in our premises in Tripoli African Union representation and to associate AU representatives in all working groups for intra-Libyan dialogue, including outlined those outlined by the Berlin conference.

Libyan national reconciliation is needed urgently.  We must ensure that all international initiatives are closely aligned and mutually supportive.

We should also aim to include women in our efforts as we know – and nowhere has this been more evident than in Africa – that including the other half of the affected population greatly enhances our chances for a lasting peace.

The United Nations and the African Union, together with other key regional actors and organizations, must continue to work closely together to support the people of Libyans and the Sahel as they secure their economic, security and political future.

I count on your unwavering commitment.

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