Soixante-quinzième session,
50e séance plénière – après-midi
AG/12310

L’Assemblée générale envisage une conférence mondiale sur le Plan d’action des Nations Unies pour la protection des sites religieux

Aujourd’hui dans une résolution*, présentée par l’Arabe saoudite et adoptée sans vote, l’Assemblée générale a invité le Secrétaire général de l’ONU à convoquer une conférence mondiale, réunissant entités des Nations Unies, États Membres, personnalités politiques, chefs religieux, organisations d’inspiration religieuse, médias, société civile et autres parties prenantes, pour mobiliser un soutien politique en faveur du Plan d’action des Nations Unies pour la protection des sites religieux.  

Élaboré par l’Alliance des civilisations des Nations Unies, le Plan d’action s’articule autour du thème « Unis et solidaires: exercer son culte dans la paix et la sécurité ».  Dans la résolution intitulée « Promouvoir la culture de la paix et de la tolérance pour la protection des sites religieux », l’Assemblée générale rappelle que 20% des biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO ont un caractère religieux ou spirituel.  

Or, les sites religieux et les objets rituels sont de plus en plus fréquemment la cible d’attaques conduites par des terroristes et des milices hors-la-loi, à la suite desquelles ils sont altérés, complètement détruits ou soumis au vol et au trafic.  L’Assemblée condamne ces actes et ceux qui visent à « faire disparaître ou à transformer par la force » tout site religieux.  

Elle justifie l’idée de la conférence mondiale par la nécessité de mener une action globale, en incluant toutes les régions, dans une logique de prévention et de responsabilité, contre les actes commis par des acteurs étatiques et non étatiques, dont les groupes terroristes, dans les situations de conflit comme en temps de paix.  Un débat d’idées « ouvert, constructif et respectueux » et un dialogue interreligieux, interconfessionnel et interculturel aux niveaux local, national, régional et international peuvent jouer un rôle positif dans la lutte contre la haine religieuse, l’incitation à la haine et la violence, estime l’Assemblée générale.  

Au nom de l’Union européenne et d’autres pays dont les États-Unis, le Portugal a rappelé les « grandes références » que sont les résolutions sur la liberté de religion et sur la lutte contre l’intolérance religieuse négociées dans « l’enceinte idoine » qu’est la Troisième Commission chargée des questions sociales, culturelles et humanitaires.  Le Portugal a insisté sur la liberté d’expression et le rôle des médias, « un des pilier les plus incontournables de la démocratie ». 

Nous aurions préféré, a-t-il avoué, que la résolution se concentre sur la protection des sites religieux, pour éviter les doublons avec des résolutions déjà adoptées.  Il aurait fallu mettre davantage l’accent sur les droits de la personne et les libertés d’expression, de religion et de croyance, dont celles de ne pas croire ou de changer de confession.  Mais, a reconnu le Portugal, le texte a été amélioré par rapport à la première version, grâce à des négociations transparentes et inclusives et c’est la raison pour laquelle l’Union européenne s’est jointe au consensus.  Défenseurs « acharnés » de la liberté d’expression, les États-Unis ont regretté la confusion, dans la résolution, entre « discours » et « actes » de « violence », ce qui peut compromettre cette liberté.  Les libertés de religion et d’expression se renforcent, ont martelé les États-Unis.  

À son tour, l’Inde a dénoncé l’attaque, perpétrée en décembre 2020, contre un temple hindou historique au Pakistan, avec le soutien des forces de l’ordre locales.  L’ONU et l’Alliance des civilisations, a-t-elle conseillé, ne devraient pas céder à la sélectivité, au risque d’empêcher la promotion de la culture de paix.  Il est ironique, a relevé l’Inde, de voir le pays où des minorités sont écrasées se porter coauteur de la résolution.  Ce texte, a-t-elle prévenu, ne saurait être un paravent pour des pays comme le Pakistan.  

Ce dernier a rejeté ces allégations infondées, affirmant que ce n’est pas la première fois que l’Inde feint de se préoccuper des droits des minorités dans d’autres pays pendant qu’elle viole elle-même ceux des siennes.  Le Pakistan a déroulé une longue liste des « graves violations » commises sur le territoire indien contre les Musulmans, dont l’interdiction des mariages interconfessionnelles.  Nous avons, a argué le Pakistan, dûment arrêté et poursuivi ceux qui ont profané le temple hindou et toutes nos autorités ont condamné cet acte.  En revanche, nous attendons toujours que l’Inde poursuive en justice les auteurs du « massacre de Delhi ».  Balayez devant votre porte au lieu de faire semblant de vous préoccuper des droits des minorités ailleurs, a lancé le Pakistan.  

Les attaques contre les mosquées, les églises, les synagogues et les temples rappellent l’impératif d’agir ensemble, a commenté le Maroc.  Ce sont des actes abjectes qui appellent à un effort collectif.  La coopération internationale, régionale et sous-régionale est essentielle pour prévenir et réprimer efficacement les attaques contre les lieux de culte.  S’étant engagé activement dans les négociations sur la résolution pendant quatre mois, le Maroc s’est réjoui d’une adoption consensuelle.  Il a conclu en saluant le rôle de chef de file de l’Alliance des civilisations des Nations Unies. 

Dans la longue intervention qu’il a faite en séance informelle, avant l’adoption de la résolution, le  Président de l’Assemblée a fait le bilan de ces quatre derniers mois qui ont commencé par la Semaine de haut niveau, du 21 septembre au 2 octobre, avec la célébration du soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, le débat général, le Sommet sur la biodiversité, la commémoration du vingt-cinquième anniversaire de la Conférence mondiale de Beijing sur les femmes et la Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires.  Le Président n’a pas oublié de mentionner la session extraordinaire sur la pandémie de COVID-19, les 3 et 4 décembre, où là encore les appels au renforcement du multilatéralisme se sont multipliés.  

Pour le reste de sa Présidence, qui sera largement dominée par la pandémie et ses conséquences sanitaires, sociales et économiques, M. Volkan Bozkir a cité parmi ses priorités l’action humanitaire, avec un accent particulier sur les plus vulnérables; la protection du personnel de maintien de la paix; l’accès aux vaccins contre la COVID-19; et l’intensification des efforts pour accélérer la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Le Président de l’Assemblée générale a aussi cité la lutte contre les conséquences des changements climatiques et la protection des océans et des mers. 

La pandémie n’est pas née du vide, a-t-il souligné.  Si nous ne trouvons pas les moyens de vivre en équilibre avec la nature, nous risquons d’autres crises et il est temps que les États Membres s’accordent sur les réformes nécessaires pour hisser l’ONU à la hauteur des problèmes actuels, a conclu le Président dont l’intervention a été commentée par son homologue du Conseil économique et social (ECOSOC), les Groupes des États d’Afrique et d’Amérique latine et des Caraïbes, l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), l’Union européenne, le Groupe des pays les moins avancés (PMA), l’Alliance des petits États insulaires et une vingtaine d’autres délégations. 

Le Président de l’Assemblée générale, qui a répondu aux questions soulevées par ces dernières, a par ailleurs indiqué que la Libye, le Niger et le Zimbabwe ont effectué les paiements nécessaires pour ramener leurs arriérés en deçà du seuil prévu par l’Article 19 de la Charte des Nations Unies. 

L’Assemblée a prévu une séance publique le jeudi 28 janvier à partir de 10 heures pour entendre le Secrétaire général de l’ONU présenter ses propres priorités. 

*A/75/L.54

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