Soixante-seizième session,
18e séance – matin
AG/12372

Assemblée générale: des États réagissent à « Notre Programme commun », les 12 propositions du Secrétaire général pour hâter l’application des accords existants

Aujourd’hui à l’Assemblée générale, une vingtaine d’États a réagi au rapport* du Secrétaire général intitulé « Notre Programme commun », lequel fait 12 propositions, sous la forme d’un programme d’action, pour hâter la mise en œuvre des accords existants, notamment les objectifs de développement durable.

La séance a été un avant-goût de la réunion officieuse que l’Assemblée a prévue le 25 octobre, pour examiner en profondeur, « Notre Programme commun » dans lequel le Secrétaire général considère que le moment est venu de renouer avec la solidarité mondiale, de refonder le contrat social entre gouvernants et citoyens et de mettre fin à l’« infodémie » qui fait des ravages aux quatre coins de la planète.

Il estime aussi que le moment est venu de changer la manière de mesurer la prospérité et le progrès économiques, d’en faire plus pour les jeunes générations et les générations futures et de mettre sur pied un système multilatéral plus solide et plus inclusif dont le socle serait le système des Nations Unies.  Le Secrétaire général exprime son intention de convoquer un « Sommet de l’avenir » pour forger un nouveau consensus mondial sur ce à quoi notre avenir devrait ressembler et sur les moyens que nous pouvons déployer aujourd’hui pour le faire advenir.

Les 12 propositions de M. António Guterres, a estimé l’Équateur, sont véritablement le début d’une réponse concrète et pas seulement un thème de discussion pour des enceintes comme celle-ci.  Abondant dans ce sens, le Cameroun a exigé une « action concrète » pour passer de la rhétorique et des promesses non tenues, à des résultats.  Il a plaidé pour un système des Nations Unies crédible, audible et légitime, « dans lequel l’Afrique a toute sa place », y compris au Conseil de sécurité.  Il faut, a acquiescé le Costa Rica, hisser l’ONU à la hauteur des défis et ne pas oublier que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est un élément essentiel de « Notre Programme commun », lequel vient renforcer les promesses faites à une planète lasse des conflits, des changements climatiques et désormais d’une pandémie.

L’Union européenne a accueilli ce Programme comme « une contribution tangible » au renforcement du système international, heureuse des prochaines consultations prévues le 25 octobre.  Étant donné que « Notre Programme commun » contient un certain nombre de notions, de terminologies et autres propositions de nature à avoir des incidences « majeures » sur le rôle, le fonctionnement et le travail de l’Organisation, il est impératif que les États puissent l’étudier de manière plus approfondie, a renchéri Cuba.

Nous n’avons toujours pas, a par exemple fait observer la Fédération de Russie, de définition agréée d’un « bien public mondial », alors que le Secrétaire général exprime, dans « Notre Programme commun », son intention de demander à un « Conseil consultatif de haut niveau », dirigé par d’anciens chefs d’État et de gouvernement, de dresser la liste des biens publics mondiaux qui pourraient grandement bénéficier d’une gouvernance améliorée.  La Fédération de Russie a aussi épinglé des conclusions « ambigües », rejetant l’idée d’un lien « inextricable » entre climat et sécurité et d’un rapprochement systématique entre paix et sécurité, droits de l’homme et égalité des sexes.

Le Brésil a, quant à lui, dénoncé le fait que le concept de « développement durable » semble avoir pris une autre tournure, faisant fi des liens avec la croissance économique et le développement social.  « Notre Programme commun », a constaté à son tour la Malaisie, ne met pas suffisamment l’accent sur le règlement des conflits et encore moins sur un mécanisme censé traiter de leurs causes sous-jacentes.  Il fait également très peu mention de la plus grande menace à la paix et à la sécurité internationales: le terrorisme, a martelé l’Inde. 

« Notre Programme commun » appelant à « un multilatéralisme revitalisé », la Fédération de Russie a prévenu que la coopération multilatérale doit s’appuyer sur les décisions des organes statutaires de l’ONU.  Elle s’est dite réticente aux approches dites « multipartites » impliquant, outre les États, les ONG, les entreprises et les municipalités, une tendance visant à brouiller le caractère « interétatique » de l’Organisation.  La Fédération de Russie a aussi insisté sur la répartition des mandats entre les différents organes des Nations Unies.  À ce propos, le Pakistan a jugé « problématique » de vouloir changer la nature du Conseil de tutelle, un organe créé pour accompagner la décolonisation, laquelle reste une tâche inachevée.  Dans « Notre Programme commun », le Secrétaire général se propose en effet de revisiter le rôle du Conseil et d’en faire un organe multipartite chargé de remédier aux problèmes émergents et, surtout, un espace de délibération qui permettrait d’agir au nom des générations futures.

Toujours aujourd’hui, l’Assemble générale a suivi la recommandation** de sa Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires et décidé que les Comores, Sao Tomé-et-Principe et la Somalie seront autorisées à participer à ses votes jusqu’à la fin de cette session, parce que « le non-paiement par ces pays de la totalité du montant minimum requis pour éviter l’application de l’Article 19 de la Charte est dû à des circonstances indépendantes de leur volonté ».  

L’Article 19 dispose qu’un État Membre des Nations Unies en retard dans le paiement de sa contribution aux dépenses de l’Organisation ne peut participer au vote à l’Assemblée générale si le montant de ses arriérés est égal ou supérieur à la contribution due par lui pour les deux années complètes écoulées.  L’Assemblée générale peut néanmoins autoriser cet État à participer au vote si elle constate que le manquement est dû à des circonstances indépendantes de sa volonté.

L’Assemblée a prévu une autre séance publique jeudi 14 octobre, à partir de 10 heures, pour élire des membres du Conseil des droits de l’homme et saluer la mémoire d’Abdelaziz Bouteflika, ancien Président de l’Algérie.

* A/75/982
** A/76/383

APPLICATION ET SUIVI INTÉGRÉS ET COORDONNÉS DES TEXTES ISSUS DES GRANDES CONFÉRENCES ET RÉUNIONS AU SOMMET ORGANISÉES PAR LES NATIONS UNIES DANS LES DOMAINES ÉCONOMIQUE ET SOCIAL ET DANS LES DOMAINES CONNEXES

Pour l’examen de cette question, l’Assemblée générale était saisie du rapport du Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel sur la troisième Décennie du développement industriel de l’Afrique (2016-2025) (A/76/275).  Le rapport fait le point sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des programmes de la troisième Décennie du développement industriel de l’Afrique (2016 2025) au cours de la période allant de juillet 2020 à juin 2021.  Il décrit les activités et interventions en cours, achevées et nouvelles et présente les étapes franchies et les résultats obtenus jusqu’ici.  Il rend compte des efforts collaboratifs consentis par la communauté internationale pour mobiliser, aux niveaux régional, multilatéral et bilatéral, les ressources financières et non financières nécessaires à l’aboutissement des programmes de la troisième Décennie.

RENFORCEMENT DU SYSTÈME DES NATIONS UNIES

L’Assemblée générale était saisie d’une note du Secrétaire général sur la coopération internationale face aux difficultés connues par les gens de mer à cause de la pandémie de COVID-19 et en appui aux chaînes d’approvisionnement mondiales (A/76/327).

Le Secrétaire général explique que l’Assemblée générale l’a prié, en collaboration avec l’Organisation maritime internationale (OMI), l’Organisation internationale du Travail (OIT), la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), ainsi que les autres entités compétentes du système des Nations Unies, de l’informer de la situation relative aux changements d’équipage pendant la pandémie de COVID-19, dans le cadre du rapport de l’OMI établi à partir des travaux de l’Équipe de gestion des crises pour les gens de mer et de la section spéciale consacrée à la question dans l’Étude sur les transports maritimes de la CNUCED.  Le Secrétaire général renvoie, par conséquent, l’Assemblée au chapitre 5 de l’Étude sur les transports maritimes de la CNUCED (UNCTAD/RMT/2021).

Débat conjoint

La mise en œuvre de la feuille de route qu’est « Notre Programme commun » est, a estimé Mme IMANE BENZIANE (Maroc), une forte reconnaissance que notre Organisation est le cadre de coopération efficace le plus idoine et approprié et la plateforme d’action multilatérale par excellence, pour relever les défis mondiaux et renforcer la solidarité internationale.  Afin de concrétiser les 12 engagements cruciaux du Programme, nous avons besoin de renforcer notre action commune pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable, sachant que moins de 10 ans nous séparent du délai de 2030, a pressé la représentante.

La pandémie de COVID-19, a-t-elle poursuivi, a eu un impact très négatif sur toute la planète, et constitue la principale menace à la sécurité humaine.  Elle a revigoré l’attention internationale portée au défi des changements climatiques, tant les liens entre les aires thématiques des changements climatiques, de la dégradation de la biodiversité, et de la sécurité sanitaire sont devenus davantage évidents.  Elle a estimé que le chevauchement de ces deux grandes menaces planétaires, à savoir la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques, devrait catalyser l’émergence d’un nouvel agenda multilatéral basé sur une approche holistique aux défis mondiaux.

L’accès équitable et immédiat aux vaccins, par le biais d’un plan de vaccination mondial, comme mentionné dans « Notre Programme commun », est indispensable pour aider tous les pays, en particulier les pays africains et les moins avancés, à surmonter cette phase aiguë de la pandémie.  La représentante a aussi soutenu l’idée que les vaccins soient des biens publics mondiaux.  Le Maroc, qui soutient l’élaboration d’un traité international sur les épidémies, entend, a indiqué la représentante, organiser une conférence internationale, au courant de 2022, sur la préparation et la réponse aux pandémies, en coopération avec le Rwanda, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et la Banque mondiale.  Elle a également indiqué que son pays a mis en œuvre un projet ambitieux de fabrication locale des vaccins contre la COVID-19.

Aujourd’hui, a ajouté la représentante, nous avons besoin d’un multilatéralisme plus ouvert, efficace, solide et pragmatique, afin d’assurer le renforcement de la solidarité internationale qui devrait encadrer le monde post-COVID-19.  La représentante en a profité pour réitérer la position du Maroc pour une réforme du Conseil de sécurité et son soutien infaillible à la position africaine contenue dans le consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte.  Le Maroc, a-t-elle ajouté, soutient également les demandes du Groupe arabe.  La représentante a aussi plaidé pour une revitalisation harmonieuse des travaux des grandes Commissions de l’Assemblée générale, en éliminant les lacunes, les chevauchements et les doubles emplois qu’il pourrait y avoir entre les questions inscrites à l’ordre du jour.  L’alignement de l’ordre du jour de l’Assemblée générale avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est « une nécessité impérieuse », a-t-elle souligné, en conclusion.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a appelé à la promotion du multilatéralisme, à un financement adéquat du développement et à la mise à disposition des vaccins contre les pandémies, sans oublier les efforts renouvelés pour la paix et la sécurité internationales.  Dans ce contexte, a fait observer le représentant, la lutte contre le terrorisme est de la plus grande importance.  Pourtant, s’est-il étonné, le terme « terrorisme » n’apparaît que deux fois dans « Notre Programme commun », alors que l’expression « changements climatiques » y revient une vingtaine de fois.  Pour l’Inde, a souligné le représentant, le terrorisme est bien la plus grande menace à la paix et sécurité internationales et, à ce titre, il mérite plus d’attention.  En ce qui concerne les changements climatiques, l’Inde, a affirmé le représentant, est l’un des rares pays du G20 à respecter ses engagements.  Il est crucial que les pays en développement bénéficient d’une aide plus significative en matière d’adaptation et d’atténuation aux effets des changements climatiques.  Il faut, dans ce cadre, tenir compte de la situation spécifique de chaque pays, tout en se mettant d’accord sur les résultats communs, a prescrit le représentant.

Appuyant fermement le contenu de « Notre Programme commun », M. SYED MOHD HASRIN AIDID (Malaisie) a attiré l’attention sur l’objectif de la Malaisie de devenir un pays à neutralité carbone d’ici à 2050.  Il a ensuite dit espérer, au cours de cette session, une réflexion sur la situation des pays affectés par les mesures unilatérales coercitives lesquelles sont une violation de la Charte et du droit international, compte tenu de leur impact négatif sur la liberté de commerce et le développement.  Il a réitéré l’appel de son pays à la levée de toutes les sanctions, en particulier pendant la pandémie de COVID-19, parce que « le temps est à la solidarité, pas à l’exclusion ».

Le représentant a aussi regretté que « Notre Programme commun » ne mette pas suffisamment l’accent sur le règlement des conflits et encore moins sur un mécanisme censé traiter des causes sous-jacentes des conflits.  Il a aussi relevé l’absence d’un appel à un cessez-le-feu mondial.  Initiatrice de la Déclaration conjointe sur un cessez-le-feu mondial, appuyée par plus de 170 pays, la Malaisie, a dit son représentant, est fermement convaincue que cet appel et cet élan doivent être « solidifiés ».  Le représentant a également appelé à davantage d’efforts contre les crises géopolitiques.  Le risque d’une guerre mondiale n’est pas tout à fait écarté, a-t-il estimé, en réclamant le respect des engagements en faveur d’un monde exempt d’armes nucléaires.  La course aux armements ne saurait faire partie de « Notre Programme commun », a-t-il insisté.  

Le représentant a conclu sur le renforcement des Nations Unies et rappelé les États Membres à leur obligation de payer leur contribution à temps et en totalité.  Ce n’est pas un choix mais une nécessité pour permettre à l’Organisation d’exécuter ses mandats de la manière la plus efficace.  Quant à la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, il a rappelé qu’avec l’Équateur, la Finlande et l’UNITAR, son pays a organisé le premier atelier sur la transition, le mois dernier, pour faciliter un passage sans heurt d’une présidence de l’Assemblée à l’autre et renforcer la mémoire institutionnelle.  La réforme de l’Organisation ne saurait être complète sans celle du Conseil de sécurité, a conclu le représentant, jugeant qu’il faut rendre cette instance plus démocratique, s’agissant de sa composition et de son processus de prise de décisions.

La leçon la plus frappante à tirer des crises actuelles est peut-être la fragmentation de notre système international, a estimé Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica).  « Notre Programme commun » nous invite à nous diriger vers un monde plus inclusif, plus équitable et plus résilient.  Il faut, a-t-elle demandé, hisser l’ONU à la hauteur de ce défi et ne pas oublier que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 est un élément essentiel de « Notre Programme commun », lequel vient renforcer les promesses faites à une planète lasse des conflits, des changements climatiques et désormais d’une pandémie.  Cette pandémie est grave et continuera sans doute parmi les populations non vaccinées.  Mais, a poursuivi la représentante, la pandémie n’excuse pas le renoncement à nos obligations en vertu des droits de l’homme ni l’affaiblissement de nos normes démocratiques.  La pandémie n’est pas non plus responsable des conflits que nous n’arrivons pas à régler ou que nous tentons de régler avec des résolutions sans effet.  Les sociétés sont surarmées et le système multilatéral perd de sa vitalité.  « Notre Programme commun » nous appelle, a conclu la représentante, à agir.  « Allons-nous maintenir ce cap ou le changer? ».  « Changeons de cap », a-t-elle préconisé.

M. PIEPER, de l’Union européenne, a qualifié « Notre Programme commun » de « contribution tangible » au renforcement du système international.  Il s’est aussi félicité de ce que le Président de l’Assemblée générale se soit proposé pour en assurer le suivi.  Il s’est donc dit favorable à l’adoption d’une résolution « courte ».

Étant donné que « Notre Programme commun » contient un certain nombre de notions, de terminologies et autres propositions de nature à avoir des incidences « majeures » sur le rôle, le fonctionnement et le travail de l’Organisation, il est impératif que les États puissent l’étudier de manière plus approfondie, a plaidé M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba).  Il a donc défendu l’idée de consultations intergouvernementales afin de dégager « un terrain d’entente ».  Nous devons, a-t-il conclu, avancer vers un ordre international plus juste et plus équitable, qui promeut la paix, le développement et la prospérité pour tous.

Au nom d’un groupe de pays, M. MARTIN BILLE HERMANN (Danemark) a salué le fait qu’avant le 25 octobre prochain, les États Membres auront le temps d’examiner en profondeur « Notre Programme commun », au cours de consultations officieuses.  Nous devons analyser les recommandations contenues dans un rapport que nous avons nous-mêmes commandité, a souligné le représentant.

M. EVGENY Y. VARGANOV (Fédération de Russie) a dit souscrire à l’appel du Secrétaire général dans « Notre Programme commun » qui souligne la nécessité de renforcer les relations internationales afin de parvenir à un ordre mondial multipolaire et équitable.  Malheureusement, a alerté le représentant, nous voyons une tendance différente: la désunion s’aggrave au sein de la communauté internationale, menaçant sérieusement la capacité de relever les défis traditionnels et nouveaux comme ceux de la santé, de l’espace numérique, du climat ou encore des inégalités sociales.  Répondant à l’appel à la solidarité du Secrétaire général, la Fédération de Russie, a affirmé le représentant, est prête à coopérer pour renforcer le rôle du Conseil économique et social (ECOSOC), notamment une interaction plus étroite avec le G20.  Il a appelé à une réforme inclusive du système économique mondial, y compris le système fiscal international.  Il a aussi appelé à une meilleure régulation du secteur de l’intelligence artificielle pour limiter l’influence des géants de la technologie et améliorer la gouvernance de l’Internet.

Poursuivant, le représentant a estimé que certaines conclusions de « Notre Programme commun » ont un caractère « ambigu » et rompent avec le cadre des travaux de l’Organisation.  Il est inapproprié, a-t-il estimé, de lier aussi étroitement les questions des droits de l’homme et d’égalité des sexes à celles de la paix et de la sécurité internationales.  De même, il est contre-productif de vouloir établir un lien « inextricable » entre climat et sécurité.  Le délégué a insisté sur la répartition des mandats entre les différents organes de l’ONU, mettant en garde contre « une confusion » qui ne conduirait qu’à des chevauchements et l’inefficacité globale de l’Organisation.  Sur la question des changements climatiques, il a jugé inopportun d’obliger les pays à aller au-delà des engagements convenus dans l’Accord de Paris.  La tentation de vouloir obtenir « d’un seul coup » des objectifs climatiques plus ambitieux pourrait créer de graves déséquilibres énergétiques et même « des cataclysmes », a pronostiqué le représentant.  En ce qui concerne le désarmement, il s’est agacé de l’accent mis sur le Traité d’interdiction des armes nucléaires qui ne bénéficie pas d’un soutien universel. 

Pour le représentant, la coopération multilatérale devrait s’appuyer principalement sur les décisions des organes statutaires de l’ONU.  Trop souvent, s’est-t-il encore agacé, des initiatives sont prises pour créer des « plateformes » et discuter des problèmes mondiaux urgents avec des structures non gouvernementales.  Cette approche est contraire aux prérogatives exclusives de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, qui connaissent un certain succès en matière de réunions d’urgence.  La Fédération de Russie, a ensuite prévenu le représentant, n’est pas à ce stade prête à adhérer au concept de « bien public commun » tant promu dans les documents de l’ONU.  Il faut d’abord une discussion intergouvernementale sur le sujet.  De même, le représentant s’est dit réticent aux approches dites « multipartites », impliquant outre les États, les ONG, les entreprises, les municipalités.  Cette tendance tend à brouiller le caractère « interétatique » de l’Organisation qui perdra encore plus en efficacité « avec de telles innovations ».  Les avis des autres parties intéressées ou experts peuvent tout à fait bien être recueillis dans leur pays, a tranché le représentant.

Ne regardons pas les propositions de « Notre Programme commun », « comme on fait son marché », a mis en garde M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil), en ajoutant « c’est parfois le cas aux Nations Unies, et ce, depuis des années ».  Le représentant s’est dit déçu de la manière dont est abordée la question du développement, malgré l’engagement de ne laisser personne de côté.  Cet engagement, a-t-il souligné, renvoie à des questions très importantes telles que la lutte contre la pauvreté et la promotion du libre-échange.  Or, ces questions ne sont pas traitées comme il se doit dans « Notre Programme commun ».  Le représentant a dénoncé le fait que le concept de « développement durable » ait pris une autre tournure, faisant fi des liens avec la croissance économique et le développement social.

S’agissant de la pandémie de COVID-19, il s’est réjoui que les propositions du Secrétaire général rejoignent « notre pensée ».  Nous devons nous préparer aux crises de demain et régler le problème des inégalités d’accès aux médicaments et aux vaccins.  Mais, a prévenu le représentant, nous ne devons pas oublier que nous n’avons toujours pas de définition agréée d’un « bien public mondial ».  Il a, à son tour, insisté sur la nécessité de réformer l’ONU, en particulier le Conseil de sécurité.

Mme ANDJONGO (Cameroun) a jugé que, dans le contexte international actuel, il n’y a que deux options: le chaos ou le sursaut.  Ce chaos est représenté par les crises comme la pandémie actuelle, les changements climatiques et les inégalités créées par ces phénomènes, qui ne sont, ni une fatalité, ni un accident.  La représentante a donc exigé une action concrète, qui fait passer la rhétorique et les promesses non tenues, à des résultats.  Pour cela, il faut une ONU réformée et tournée vers le développement.  « Notre Programme commun » est un programme qui nécessite de l’action, a insisté la représentante qui a plaidé pour un système international inclusif, ayant pour « pierre angulaire » un système des Nations Unies crédible, audible et légitime, dans lequel l’Afrique a sa place, notamment au sein du Conseil de sécurité.  Ce n’est que comme cela que nous vaincrons la pandémie de COVID-19 et assurerons la survie de la planète, a déclaré sa représentante.

M. YOSEPH KASSAYE (Éthiopie) a salué l’Accord de libre-échange continental en Afrique, même s’il tarde à se mettre en route du fait des retards sur certains points qui n’ont pu être traités du fait de la pandémie de COVID-19.  L’appui à l’Accord est crucial pour permettre aux États africains de renforcer leur résilience, bâtir une économie plus verte et ainsi se relever de la pandémie.  Le Gouvernement éthiopien, a-t-il dit, a placé l’industrialisation au centre de son action, en lui donnant une place de choix dans son Plan de développement décennal.  Il y a deux mois, l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) a lancé le premier centre de créativité en Éthiopie, afin de favoriser l’industrialisation et l’entrepreneuriat.  Au sujet de « Notre Programme commun », le représentant a souligné l’importance d’un multilatéralisme renforcé, avec l’ONU en son centre.

M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a indiqué que son pays sera présent à la prochaine Conférence des États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26) à Glasgow, pour discuter des questions soulevées par « Notre Programme commun » et celles qui n’y figurent pas, afin de faire avancer les enjeux communs.  Ce Programme, a avoué le représentant, « pèche par excès de pessimisme ».  Les actions sont possibles et les États Membres doivent tenir dûment compte des 12 propositions du Secrétaire général et les considérer comme le début d’une réponse concrète et pas seulement comme des thèmes de discussion dans les enceintes comme celle-ci.  Nous sommes disposés à apporter notre contribution à cet objectif, a assuré le représentant. 

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a indiqué que son pays a mis en place des réformes systémiques afin de réaliser les objectifs de développement durable.  « Ne laisser personne de côté » ne doit pas seulement être un slogan.  Il faut véritablement le mettre en pratique.  Ces objectifs et l’Accord de Paris sur le climat sont « nos boussoles », a affirmé le représentant, en indiquant que son pays compte y travailler comme membre du Conseil économique et social (ECOSOC) et Présidente du G20 l’année prochaine.  Au sujet de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les gens de mer, il a déclaré que son pays s’est engagé à prendre des mesures concrètes pour régler leurs problèmes, dont la mise à disposition de ports pour faciliter le rapatriement des équipages.

Nous sommes prêts à discuter de « Notre Programme commun », a promis Mme JIANG HUA (Chine).  Elle a voulu que l’on tienne compte de l’avis des nombreux pays qui sont encore aux prises avec les difficultés nées de la pandémie ou les changements climatiques.  Il faut, a-t-elle estimé, avancer dans la lutte contre la pauvreté et pour le développement durable et le développement vert, en tenant dûment compte des besoins et priorités spécifiques de chaque État.  Il est également primordial que les jeunes et la société civile puissent faire entendre leurs voix, afin de garantir un développement inclusif.  Les propositions de « Notre Programme commun » sont bonnes mais il nous faut un consensus, a conclu la représentante.

Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a souligné que la commémoration du soixante-quinzième anniversaire des Nations Unies avait permis de réaffirmer l’attachement de la communauté internationale au multilatéralisme mais aussi d’évaluer les défis actuels et émergents.  La liste des défis est longue, a reconnu la représentante, citant le problème de la dette extérieure, des changements climatiques, des pandémies et de la pauvreté.  L’Argentine, a-t-elle dit, réaffirme une fois encore son soutien inébranlable à toute discussion de nature à renforcer le rôle des Nations Unies et la coordination entre les États, afin de garantir un scénario international plus inclusif.  Le rapport du Secrétaire général n’est pas un document isolé, a rappelé la représentante, ajoutant qu’il doit être lu parallèlement aux instruments pertinents qui traitent des mêmes questions.  « Notre Programme commun » nous propose une feuille de route.  Discutons de ses propositions pour parvenir à un accord car nous, les États Membres, sommes les seuls à pouvoir mener ce processus.  Nous espérons, a conclu la représentante, pouvoir étudier toutes les questions de fond à la prochaine réunion, le 25 octobre.

Bâtir l’avenir ne veut pas dire oublier le passé, a déclaré M. MOHAMMAD AAMIR KHAN (Pakistan).  Commençons d’abord par mettre en œuvre les accords passés, dont ceux liés à la gestion des crises, et par nous attaquer aux causes sous-jacentes des inégalités.  L’un des principes de la Charte, a-t-il tenu à rappeler, est la non-ingérence dans les affaires intérieures des États.  Le socle de l’ordre international, c’est la souveraineté nationale.  Le représentant a plaidé pour un multilatéralisme « ouvert », défendant, entre autres, l’idée que tous les membres de l’Assemblée générale aient leur mot à dire dans la sélection des ONG qui participent à leurs travaux.  Il a par ailleurs jugé « problématique » de vouloir changer la nature du Conseil de tutelle, un organe créé pour accompagner la décolonisation laquelle reste une tâche inachevée.  En faire « une instance multilatérale » nécessiterait un amendement à la Charte, a prévenu le représentant qui a aussi rappelé que les questions de « l’espace extra-atmosphérique » et de « la gestion des océans » sont déjà examinées par d’autres instances multilatérales.

M. BÁLINT MOGYORÓSI (Hongrie) a dit appuyer le système international, mais dans le respect des intérêts nationaux de chaque État.  Il a rejeté l’idée d’« une gouvernance mondiale centralisée », privilégiant des gouvernements « forts » qui coopèrent sur les grandes questions internationales.  Par exemple, a insisté le représentant, chaque État devrait pouvoir décider de sa politique migratoire, sans pression extérieure.  L’émigration ne doit pas être encouragée et les pays d’origine doivent assumer leurs responsabilités.  La Hongrie, a dit son représentant, continuera de rejeter toute mention du Pacte de Marrakech sur des migrations sûres, ordonnées et régulières, dont elle n’est pas partie.

Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a jugé essentiel de lancer un débat sur la manière de faire avancer les engagements clefs contenus dans « Notre Programme commun ».  Il ne fait aucun doute que le monde a beaucoup changé, de même que le multilatéralisme, a-t-elle relevé, ajoutant que la COVID-19 est une épreuve pour l’ensemble du système multilatéral.  Il nous incombe, a dit la représentante, d’orienter notre approche vers l’action car le multilatéralisme est une nécessité et pas une option.  Revenant à la résolution sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, elle a estimé qu’une des mesures les plus pragmatiques a été de préserver la primauté du débat général annuel et limiter le nombre des manifestations parallèles.  Un système multilatéral, a poursuivi la représentant, n’est pas possible sans un Conseil de sécurité plus transparent, plus démocratique et plus représentatif.  Les conséquences de la pandémie sur la paix et la sécurité internationales exigent de renforcer l’inclusivité dans les décisions du Conseil, a-t-elle plaidé, encourageant la promotion de résultats substantiels permettant la modernisation de l’ONU, tout en préservant sa légitimité et son efficacité.

M. JASSER JIMÉNEZ (Nicaragua) a noté que « Notre Programme commun » contient des concepts qui ne font pas l’unanimité.  Il a promis un avis plus détaillé à la séance prévue le 25 octobre prochain.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.