Soixante-seizième session,
19e séance plénière – après-midi
AG/J/3646

Sixième Commission: les États insulaires s’alarment de l’élévation du niveau de la mer et de ses conséquences au regard du droit international

Poursuivant cet après-midi son examen du rapport de la Commission du droit international (CDI), la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a terminé ses échanges sur les points du premier groupe de chapitres à l’étude, à savoir la protection de l’atmosphère, l’application à titre provisoire des traités et les autres décisions et conclusions de la CDI.  Elle a ensuite abordé deux autres chapitres: l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international et l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.

Concernant le premier groupe de chapitres, la Pologne est revenue sur le format des documents présentés à la Sixième Commission -le Guide de l’application à titre provisoire des traités et le projet de directives sur la protection de l’atmosphère- estimant qu’il reflète une tendance de plus en plus fréquente dans les travaux de la CDI: l’élaboration d’instruments qui, dès le départ, sont considérés comme non contraignants, au lieu de projets d’article pouvant devenir des conventions.  Quant à la Fédération de Russie, elle a souhaité que la CDI éclaircisse le format qu’elle donne à ses produits finaux.  La Commission doit intégrer à son programme de travail des sujets qui soient d’un réel intérêt pratique pour les États, a ajouté le délégué russe, en demandant notamment que l’élévation du niveau de la mer reçoive une attention urgente. 

Justement, la délégation de Samoa, au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a été la première à se concentrer sur ce phénomène d’une grande actualité.  Samoa a rappelé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, bien que d’une importance cruciale pour l’établissement d’un régime juridique efficace pour la gouvernance des océans, ne traite pas explicitement de l’impact de l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques sur les zones maritimes, ni des droits et privilèges qui en découlent.  Or, l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques soulève de graves problèmes de droit international pour les petits États insulaires en développement.

Ces problèmes, l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) y est aussi très sensible.  C’est par la voix d’Antigua-et-Barbuda que l’Alliance a reconnu l’existence d’une lacune concernant les lignes de bases dont le tracé est régi par la Convention de 1982.  Les chefs d’État de l’AOSIS ont déjà conjointement déclaré que leurs droits devaient être préservés dans ce domaine, a rappelé leur représentante.  Nombre de petits États insulaires en développement (PEID) ont pris des dispositions pour protéger leur ligne maritime.

C’est dans ce sens que le Sommet du Forum des îles du Pacifique a marqué son cinquantième anniversaire en approuvant, le 6 août dernier, la Déclaration sur la préservation des zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques.  Comme expliqué par Samoa, cette Déclaration affirme qu’une fois que les îles du Pacifique ont établi et notifié leurs zones maritimes au Secrétaire général de l’ONU, ces zones maritimes et les droits qui en découlent ne doivent pas être réduits, quels que soient les effets physiques de l’élévation du niveau de la mer.  Au nom du Forum des îles du Pacifique, Fidji a précisé dans la foulée que leur approche sur cette question permet à la fois de préserver les zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques et de maintenir l’intégrité de la Convention sur le droit de la mer.  La Déclaration susmentionnée est le signe d’un « engagement mutuel profond » et « d’une étape forte, décisive » pour sauvegarder les foyers et les intérêts des peuples du Pacifique, et pour maintenir la paix et la sécurité, a renforcé Fidji.  Le phénomène a fait l’objet d’un récent rapport alarmant du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

L’Islande, s’exprimant à son tour au nom des pays nordiques, a également mis en lumière une autre problématique liée à l’élévation du niveau de la mer: outre la possibilité que le territoire des États soit partiellement ou totalement sous l’eau, l’élévation du niveau de la mer peut accroître la dégradation des sols, les inondations périodiques et la contamination de l’eau douce.  « Il s’agit d’une menace à plusieurs niveaux », notamment pour les petits États insulaires en développement qui ont peu contribué aux changements climatiques mais qui risquent d’en souffrir le plus, a regretté l’Islande.  

Par ailleurs, la sixième Commission a adopté en début de réunion, sans mise aux voix, un projet de résolution par lequel l’Assemblée générale déciderait d’inviter l’Alliance solaire internationale à participer à ses travaux en qualité d’observateur.  L’Alliance solaire internationale est une initiative conjointe de la France et de l’Inde, lancée lors de la COP21 en 2015.  Elle répond pleinement, comme l’ont rappelé les délégués de ces deux pays, aux objectifs de développement durable, notamment l’objectif 7 pour une énergie propre et d’un coût abordable.

La Sixième Commission poursuivra ses travaux demain, vendredi 29 octobre, à 10 heures.

OCTROI DU STATUT D’OBSERVATEUR AUPRÈS DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE À L’ALLIANCE SOLAIRE INTERNATIONALE - A/76/192

DÉCISION SUR LE PROJET DE RÉSOLUTION A/C.6/76/L.2

Examen des chapitre IV (Protection de l’atmosphère), V (Application à titre provisoire des traités) et X (Autres décisions et conclusions de la Commission)

Suite des déclarations

Abordant le chapitre sur la protection de l’atmosphère, M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a proposé d’enrichir les définitions de la « pollution atmosphérique » et de la « dégradation atmosphérique » telles que figurant dans la directive 1.  S’agissant de la directive 5 sur l’utilisation durable de l’atmosphère, il a souhaité que l’accent soit mis sur la réduction des effets négatifs que le secteur énergétique produit sur l’atmosphère.  Il faut pour cela encourager l’adoption de politiques ou de programmes visant à accroître le rôle des systèmes énergétiques écologiquement rationnels et économiquement rentables.  Pour la directive 6 sur l’utilisation équitable et raisonnable de l’atmosphère, il a insisté sur le principe des responsabilités communes mais différenciées.  Concernant la directive 7 sur la modification intentionnelle à grande échelle de l’atmosphère, M. Nyanid a recommandé la prudence, sous réserve de toute règle applicable de droit international.  En lien avec la directive 8 sur la coopération internationale, il a appelé à la « création d’une autorité internationale chargée de la protection de l’atmosphère ainsi que d’un observatoire mondial de la planète ».  Pour ce qui est de la directive 10 sur la mise en œuvre, il a suggéré qu’on se limite à évoquer le libellé des mécanismes institutionnels internes de chaque pays, étant entendu que la pratique en la matière n’est pas uniforme.  Enfin, s’agissant de la directive 11 sur le contrôle du respect des obligations, le représentant a conseillé que les procédures d’assistance aux États se fassent à la demande de l’État concerné, « de manière transparente, non accusatoire et non punitive ». 

Revenant ensuite sur les directives relatives à l’application à titre provisoire des traités, M. Nyanid a souligné certaines ambigüités dans la terminologie.  Il s’est également interrogé sur la directive 4 (« Forme de l’accord »): d’après lui, la préoccupation majeure demeure celle de la ratification parlementaire, et une déclaration d’un État ne peut pas outrepasser les dispositions constitutionnelles qui l’habilitent en matière conventionnelle. 

Mme MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a estimé que les documents présentés -le Guide de l’application à titre provisoire des traités et le projet de directives sur la protection de l’atmosphère– reflètent une tendance de plus en plus fréquente dans les travaux de la Commission du droit international (CDI): l’élaboration d’instruments qui, dès le départ, sont considérés comme non contraignants, au lieu de projets d’article pouvant devenir des conventions.  Selon elle, une telle approche a du mérite dans certaines circonstances, car tous les sujets ne se prêtent pas à une transposition dans des projets d’article potentiellement destinés à devenir des conventions.  La déléguée a relevé que le Guide de l’application à titre provisoire des traités s’inscrit dans la pratique de la CDI de commenter et de clarifier différentes dispositions de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  L’importance de ce « Code des traités » démontre sans aucun doute la pertinence d’une telle méthodologie, a-t-elle conclu.  

M. MICHAEL STELLAKATOS LOVERDOS (Grèce) s’est félicité de l’adoption par la Commission du droit international (CDI) d’un ensemble de 12 directives et commentaires sur la protection de l’atmosphère.  Étant donné que diverses activités humaines, souvent réglementées par des règles spécifiques, ont un impact sur l’atmosphère, le représentant a noté avec appréciation la directive 9 visant à assurer la compatibilité, l’entraide et la complémentarité entre le droit relatif à la protection de l’atmosphère et les normes pertinentes issues d’autres branches du droit international. 

Pour ce qui est du Guide de l’application à titre provisoire des traités, M. Loverdos a jugé qu’il constitue un outil précieux d’orientation et d’assistance aux États et aux organisations internationales sur le droit applicable, à la lumière de la pratique contemporaine.  Elle a appuyé l’approche pragmatique de la CDI, qui reconnaît l’utilité mais aussi le caractère flexible et intrinsèquement « volontaire » de l’application à titre provisoire.  Mais elle a mis en garde contre son utilisation comme substitut à l’entrée en vigueur, qui reste la « vocation naturelle » des traités, ou comme moyen de contourner les procédures internes.  La déléguée s’est également félicitée que le Guide soit en général destiné à refléter la lex lata.  Elle a salué la retenue exercée par la CDI en ce qui concerne les aspects de l’application provisoire pour lesquels la pratique n’est pas encore suffisamment développée.  Il aurait cependant été utile, a-t-elle jugé, que la CDI précise quelles sont les règles du droit international, à l’exception de l’article 25 des Conventions de Vienne de 1969 et 1986 sur le droit des traités, qui reflètent la loi applicable en la matière pour chaque projet de directive du Guide. 

M. MUHAMMAD TAUFAN (Indonésie) a salué les directives 3, 4 et 8 du projet de la Commission du droit international (CDI) sur la protection de l’atmosphère relatives à l’obligation de protection, à l’évaluation de l’impact sur l’environnement des activités projetées relevant de la juridiction des États et à la coopération internationale.  « Ces obligations sont inséparables et se renforcent mutuellement. »  Le délégué a rappelé que l’ensemble des acteurs économiques doit être associé à cette obligation d’évaluer l’impact.  Il a jugé impérative la coopération internationale en matière de protection de l’atmosphère, y compris en ce qui concerne le respect des normes existantes.  La bonne foi des pays est d’une importance capitale dans le renforcement de la coopération internationale, a-t-il poursuivi. 

Le délégué a salué l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités.  Même si l’Indonésie n’est pas partie à la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, ce texte doit être la base pour le développement par la CDI d’un ensemble de directives guidant les États en la matière, a-t-il indiqué.  « Il revient aux États concernés de décider de ce qui leur convient le mieux s’agissant de l’application à titre provisoire des traités. »  Enfin, le délégué a souhaité disposer de davantage d’informations de la part des États et des organisations internationales sur leur pratique dans ce domaine.  

Mme BEATRICE MAILLE (Canada) a salué les efforts de la Commission du droit international (CDI) et du Rapporteur spécial pour l’élaboration du Guide de l’application à titre provisoire des traités, qui fournira une base de référence commune à la communauté internationale.  Elle a rappelé que l’article 25 de la Convention de Vienne sur le droit des traités fait depuis longtemps autorité en la matière d’application provisoire des traités. Toutefois, a-t-elle précisé, sa mise en œuvre a créé certaines incertitudes, et la publication du Guide contribue à clarifier cela.  La déléguée a saisi cette occasion pour présenter la pratique du Canada en la matière, indiquant notamment que l’application à titre provisoire d’un traité ne peut y prendre effet qu’après sa signature.  Et si une mesure législative est nécessaire, l’application à titre provisoire est retardée jusqu’à ce que cette mesure soit prise. 

S’agissant de la protection de l’atmosphère, la déléguée a reconnu que la dégradation atmosphérique est extrêmement préoccupante, et fait des observations sur les directives présentées.  Elle a rappelé qu’un certain nombre de cadres internationaux traitent déjà de ce sujet.  Il importe, a-t-elle insisté, de veiller à ce que l’interprétation et la mise en œuvre des directives en question ne contredisent pas ce qui est déjà traité ailleurs.  Par ailleurs, elle a considéré que les directives présentées ne sont pas juridiquement contraignantes.  Par ailleurs, la déléguée du Canada a tenu à dénoncer « la détention arbitraire comme moyen de pression entre les États », déclarant que son utilisation est contraire au droit international. 

M. SERGEI A. LEONIDCHENKO (Fédération de Russie) a souligné l’adaptation des méthodes de travail de la Commission du droit international (CDI) en raison de la pandémie, avant de rappeler l’importance des réunions en présentiel.  « Le format à distance a été une épreuve dont la CDI s’est très bien sortie. »  Il a demandé que l’élévation du niveau de la mer en droit international reçoive une attention urgente.  La Commission doit intégrer à son programme de travail des sujets qui soient d’un réel intérêt pratique pour les États, a-t-il dit, en souhaitant un examen prioritaire des questions urgentes.  Les questions structurelles, comme la détermination des sources du droit international, ne sont pas urgentes selon lui.  Il a également souhaité que la CDI éclaircisse le format qu’elle donne à ses produits finaux.  

S’agissant du sujet « Application à titre provisoire des traités », le délégué a jugé que le Guide adopté par la CDI sera utile pour les États, avant de préciser qu’une telle application revêt un « caractère d’exception. »  Cette application à titre provisoire ne doit pas constituer un détournement des procédures nationales d’incorporation des traités.  Enfin, il a souhaité que la CDI se penche sur deux nouveaux sujets: la prévention et la répression de la piraterie armée et les conséquences juridiques de la pandémie de COVID-19. 

Compte tenu de l’impact significatif de la Commission du droit international (CDI) sur le développement de la pratique des États relative à l’application à titre provisoire des traités, M. ALEKSANDAR GAJIĆ (Serbie), a estimé que des travaux supplémentaires seraient certainement nécessaires afin de compléter le sujet et de fournir des directives appropriées dans ce domaine « très sensible ».  Pour la Serbie, l’un des problèmes concernant l’application à titre provisoire des traités est contenu dans la directive 3 qui stipule : « Un traité ou une partie d’un traité s’applique à titre provisoire en attendant son entrée en vigueur entre les États ou organisations internationales concernés, lorsque le traité lui-même en dispose ainsi, ou lorsqu’il en a été ainsi convenu d’une autre manière. »  Ce sont les termes « à titre provisoire en attendant son entrée » qui sont problématiques, a-t-il précisé, car pendant l’application provisoire, on ne sait pas si un traité entrera en vigueur ou non. 

La définition même de l’application à titre provisoire des traités devrait refléter le commencement et la fin de l’application provisoire, a poursuivi M. Gajić.  Si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce que l’application à titre provisoire prenne fin lorsqu’un traité entre en vigueur, cela pourrait ne pas être le cas pour diverses raisons, a-t-il argué.  La question de savoir si l’État ou l’organisation internationale exprimera son consentement à être lié par un traité est, au moment de l’application à titre provisoire, incertaine, et il semble que cela devrait être clairement reflété dans les directives et les commentaires correspondants. 

M. MOHAMED FAIZ BOUCHEDOUB (Algérie) a salué l’adaptation des méthodes de travail de la Commission du droit international (CDI) aux contraintes imposées par la pandémie, ce qui a permis des avancées remarquables dans un contexte difficile.  Il a loué le travail accompli sur la protection de l’atmosphère et souligné l’importance de la directive 5 sur l’utilisation durable de l’atmosphère.  S’agissant du sujet « Application à titre provisoire des traités », le délégué a rappelé l’importance du principe « Pactu sunt servanda » (les traités doivent être respectés) et le caractère exceptionnel d’une telle application à titre provisoire.  Cette application doit aussi se faire de bonne foi.  La CDI doit intégrer à son programme de travail des sujets qui soient d’un réel intérêt pour les États, a-t-il ensuite fait valoir.  Enfin, le délégué a espéré la tenue en 2022 du Séminaire de droit international. 

M. MARVIN IKONDERE (Ouganda) a rappelé que la Commission du droit international (CDI) a été établie en 1947 pour exécuter le mandat de l’Assemblée générale défini à l’Article 13 de la Charte des Nations Unies, à savoir qu’elle « provoque des études et fait des recommandations en vue (…) d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification ».  Le délégué ougandais s’est ainsi dit heureux de constater que la Commission continue de s’acquitter de cette tâche, malgré les contraintes auxquelles elle doit faire face.  Concernant le sujet « Protection de l’atmosphère », il a souligné l’importance de l’appel à la coopération internationale qui figure dans la directive 8. 

M. JAMES WAWERU (Kenya) a estimé que le projet de directives sur la protection de l’atmosphère a atteint un « équilibre délicat » s’agissant de la relation globale des diverses règles relatives aux écosystèmes et des autres domaines du droit international.  Ce projet est une bonne base de départ, a dit le délégué.  Il a souligné l’importance pour son pays de la protection de l’environnement et appelé la communauté internationale à agir en faveur d’une telle protection.  Il a appuyé la recommandation faite par la Commission du droit international (CDI) à l’Assemblée générale de prendre acte du projet de directives sur la protection de l’atmosphère et d’en assurer la plus large diffusion possible. 

Le délégué du Kenya s’est ensuite félicité de l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé du projet de directives et d’un projet d’annexes contenant des exemples de dispositions relatives à l’application à titre provisoire.  Ce Guide est un outil flexible à disposition des États, a-t-il dit.  En prévision des élections à la CDI, le délégué a salué les pays qui ont, comme le sien, proposé des femmes comme candidates.  « Nous sommes sur le point d’écrire l’histoire en faisant de la CDI le reflet du visage des États Membres et en veillant à un bon équilibre entre les sexes. »  En conclusion, il a souhaité que les délégations aient à l’esprit de telles considérations en choisissant leurs candidats. 

Mme TZVETY ROMANSKA (Bulgarie) a salué l’adoption par la Commission du droit international (CDI) de l’ensemble du projet de directives sur la protection de l’atmosphère, composé d’un projet de préambule et de 12 projets de directive, ainsi que les commentaires y relatifs.  Elle a noté que la Commission précise que, bien que le principe pollueur-payeur et le principe de précaution ne s’appliquent pas à ces orientations, leur pertinence juridique n’est en aucun cas contestée par le texte.  Concernant l’application à titre provisoire des traités, Mme Romanska a jugé très fructueux l’effort entrepris par le Rapporteur spécial pour fournir des exemples détaillés de traités bilatéraux et multilatéraux utiles à ce sujet et de la pratique dans toutes les zones géographiques.  Elle a apprécié l’effet pratique des directives, car elles fournissent des orientations et des éclaircissements sur les questions laissées sans réponse par l’article 25 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.  

Par ailleurs, la représentante a remercié les membres de la CDI pour la réunion commémorative virtuelle organisée à la mémoire du juge Alexander Yankov, ancien Président de la Commission, éminent juriste bulgare.  Enfin, elle a vu dans les prochaines élections des membres de la Commission l’occasion de se rapprocher de l’objectif d’une meilleure parité hommes-femmes dans sa composition. 

Concernant la protection de l’atmosphère, Mme AZELA GUERRERO ARUMPAC-MARTE (Philippines) a noté que le projet de directives indiquait plusieurs « obligations positives » pour les États, ce qui semble incompatible avec sa nature de document juridiquement non contraignant.  Par ailleurs, elle s’est félicitée de l’adoption par la Commission du droit international (CDI) du Guide de l’application à titre provisoire des traités et des commentaires y relatifs.  Concernant la forme des travaux, la déléguée a salué l’engagement et les progrès réalisés par la CDI, malgré les reports causés par la pandémie de COVID-19.  Elle a également pris note des défis posés par un format de travail hybride, avec différents fuseaux horaires, et de l’impact qui en découle en termes de diminution du temps de travail pour les négociations et les prises de décision, ainsi que sur la collégialité, pourtant une caractéristique de l’engagement de la CDI. 

La déléguée a aussi pointé avec inquiétude les contraintes budgétaires qui pèsent sur la CDI, entravant la participation de tous les membres à la session annuelle, ainsi que la présence de l’ensemble du secrétariat technique.  Elle a souhaité que les ressources nécessaires soient allouées pour le fonctionnement de la CDI et de son Secrétariat, ainsi que pour les rapporteurs spéciaux, y compris leurs honoraires, et appuyé en ce sens la création d’un fonds d’affectation spéciale. 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DOUZIÈME SESSION - A/76/10

Examen des chapitres VI (Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État) et IX (Élévation du niveau de la mer au regard du droit international)

Déclarations

M. FATUMANAVA-O-UPOLU III PA’OLELEI LUTERU (Samoa), au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a rappelé que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, bien que d’une importance cruciale pour l’établissement d’un régime juridique efficace pour la gouvernance des océans, ne traite pas explicitement de l’impact de l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques sur les zones maritimes ni des droits et privilèges qui en découlent.  Le délégué a rappelé qu’actuellement, le niveau moyen des eaux le long des côtes, tel qu’indiqué sur les cartes à grande échelle officiellement reconnues par les États côtiers concernés, est utilisé comme ligne de base pour mesurer les zones maritimes dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Ces points physiques changeront probablement à l’avenir en raison de l’élévation du niveau de la mer, mais la Convention n’indique pas explicitement ce que cela signifie pour les zones maritimes et les droits qui en découlent, a-t-il fait remarquer. 

Il est indéniable que l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques soulève de graves problèmes de droit international pour les petits États insulaires en développement de la région.  Ces États, a poursuivi le délégué, sont d’avis que ce phénomène concerne la communauté internationale dans son ensemble.  La Déclaration des dirigeants du Forum des îles du Pacifique sur « la préservation des zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques », adoptée en août dernier, affirme qu’une fois que les îles du Pacifique ont établi et notifié leurs zones maritimes au Secrétaire général de l’ONU, ces zones maritimes et les droits qui en découlent ne doivent pas être réduits, quels que soient les effets physiques de l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques.

Les questions relatives au statut d’État, à l’apatridie et aux migrations induites par le climat concernent directement sa région, avec la possibilité que les territoires des petits États insulaires soient entièrement submergés en raison des changements climatiques, a averti le délégué de Samoa.  En vertu du droit international, il existe une présomption qu’un État, une fois établi, continuera d’être un État, en particulier s’il a un territoire et une population définis, entre autres facteurs, a-t-il rappelé.  Dans ce contexte, il a souligné l’urgence d’aborder les implications en droit international de l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques. 

S’agissant de l’élévation du niveau de la mer, Mme DANIELA GAUCI, déléguée de l’Union européenne, a dit attendre avec intérêt le second rapport du Groupe d’études sur la question de la protection des personnes touchées par ce phénomène.  Elle a rappelé le profond attachement de l’Union européenne à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, en notant que le Groupe d’études ne proposera pas d’amendement à ladite Convention.  C’est à la lumière d’une telle approche globale que les questions juridiques soulevées par ce sujet doivent être considérées et discutées, a affirmé Mme Gauci. En conclusion, elle a appelé à la poursuite des discussions sur ce sujet dans le plein respect de l’intégrité de la Convention précitée.

Mme HARM OBO PIF (Fidji), au nom du Forum des îles du Pacifique, s’est félicitée du futur programme de travail du Groupe d’étude de la Commission du droit international (CDI), consacré à la protection des personnes touchées par l’élévation du niveau de la mer, question qui sera abordée lors de la prochaine session.  En tant que grands États océaniques au sein du « continent bleu » qu’est l’océan Pacifique, les pays du Forum entretiennent « un lien profond avec l’océan, qui est au cœur de leur géographie, de leur culture et de leur économie », a pointé Mme Harm.  Leur développement passé, présent et futur, repose sur des droits et des privilèges garantis par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982. 

L’élévation du niveau de la mer a été confirmée, de manière alarmante, comme un problème réel et urgent par un récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a souligné la déléguée du Forum des îles du Pacifique.  Elle a noté également que le Groupe d’étude de la CDI avait encouragé les États à fournir des informations sur leurs pratiques et leur opinio juris.  L’approche du Forum sur cette question permet à la fois de préserver les zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques et de maintenir l’intégrité de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.  Mme Harm a rappelé leur engagement de longue date à l’égard de la Convention, en tant que cadre juridique mondial de toute activité liée aux océans. 

Le 6 août 2021, le Sommet du Forum des îles du Pacifique a marqué son 50e anniversaire en approuvant la Déclaration sur la préservation des zones maritimes face à l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques.  Mme Harm a expliqué que cette déclaration était le signe d’un « engagement mutuel profond » et « d’une étape forte, décisive » pour sauvegarder les foyers et les intérêts des peuples du Pacifique, et pour maintenir la paix et la sécurité. 

Mme ASHA CECILY CHALLENGER (Antigua-et-Barbuda), au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a considéré comme de la plus haute importance la question de la prévisibilité et des incertitudes concernant les zones maritimes. Elle a appelé à délimiter les lignes de bases et les droits qui en découlent.  Les chefs d’État de l’AOSIS ont déjà conjointement déclaré que leurs droits devaient être préservés dans ce domaine, a-t-elle rappelé.  Nombre de petits États insulaires en développement (PEID) ont pris des dispositions pour protéger leur ligne maritime grâce à leur « droit interne », entre autres.  

Comme noté l’an dernier, ces pratiques d’État peuvent démontrer l’apparition de « règles coutumières » et de « pratiques utiles » pour l’application de la Convention sur le droit de la mer, a poursuivi la déléguée.  Certes, a-t-elle nuancé, cela ne suffit peut-être pas pour tirer des conclusions disant qu’il y a des règles coutumières générales.  Enfin, l’AOSIS reconnaît l’existence d’une lacune concernant les lignes de bases.  « Nous souhaitons comprendre comment la Convention de Genève de 1958, négociée alors que de nombreux pays concernés étaient sous domination coloniale, est encore pertinente pour la période actuelle », a pointé la représentante.  Elle a enfin encouragé la Commission du droit international (CDI) à continuer de prendre en considération le point de vue des PEID, afin qu’ils soient sur un pied d’égalité avec le reste des États Membres. 

Mme ANNA PÁLA SVERRISDÓTTI (Islande), au nom des pays nordiques, a reconnu que certains États risquaient d’être affectés de manière disproportionnée par les changements climatiques.  Outre la possibilité que le territoire des États soit partiellement ou totalement sous l’eau, l’élévation du niveau de la mer peut, a-t-elle dit, accroître la dégradation des sols, les inondations périodiques et la contamination de l’eau douce.  « Il s’agit d’une menace à plusieurs niveaux », notamment pour les petits États insulaires en développement (PIED), qui ont peu contribué aux changements climatiques mais qui risquent d’en souffrir le plus. 

Citant les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), la représentante a appelé la Commission du droit international (CDI) à considérer l’élévation du niveau de la mer liée aux changements climatiques comme un « fait scientifiquement prouvé ».  Elle a réaffirmé l’importance de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, qui définit le cadre juridique dans lequel doivent être menées toutes les activités touchant les océans et les mers.  Comme tout autre instrument juridique, la Convention doit être interprétée à la lumière de l’évolution des circonstances, a appuyé la déléguée, bien qu’il semble « prématuré » à ce stade pour les pays nordiques de se prononcer sur les « implications juridiques précises » de l’application de la Convention.  Car il est évident, d’après les travaux actuels du Groupe d’étude de la CDI, que plusieurs questions doivent encore être explorées et discutées.  C’est pourquoi les pays nordiques sont favorables à l’extension des travaux de la Commission, notamment concernant la pratique des États et l’opinio juris.  

Si cela s’avère utile, les pays nordiques sont également favorables à ce que la Commission fasse appel à des experts scientifiques et techniques, de manière sélective et limitée.  Dans le cadre du droit de la mer, « il existe une interaction croissante entre les aspects juridique, scientifique et technique », a jugé Mme Sverrisdótti.  Bien placée pour aider les États à « accroître la clarté juridique » sur diverses questions liées à l’élévation du niveau de la mer, la CDI ne doit pas oublier la distinction entre les aspects juridiques et politiques de la lutte contre les changements climatiques.  En l’occurrence, les pays nordiques se sont engagés à prendre des mesures urgentes pour lutter contre les changements climatiques et, simultanément, à participer à une discussion juridique structurée.

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