8814e séance - matin
CS/14575

Le Conseil de sécurité examine la situation en Afrique de l’Ouest et au Sahel, marquée par un fort climat d’insécurité et un recul de la démocratie

Le Conseil de sécurité a examiné, ce matin, l’évolution de la situation en Afrique de l’Ouest et au Sahel, marquée par un climat d’insécurité dans le Sahel et le bassin du lac Tchad, et « l’impression croissante d’un recul de la démocratie dans toute la région », d’après le rapport du Secrétaire général sur la question, présenté par son Représentant spécial et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS).

À la suite d’élections présidentielle et législatives, de nouveaux gouvernements ont été installés dans plusieurs pays de la région, a souligné M. Khatir Mahamat Saleh Annadif, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest.  Au Niger, par exemple, on a assisté au tout premier transfert de pouvoir d’un président élu à un autre, même si la tentative de coup d’État qui a suivi démontre que pour renforcer la cohésion sociale et l’unité nationale, il faut faire preuve d’une vigilance constante et déployer des efforts soutenus.  M. Annadif a également salué des avancées encourageantes en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Togo ou encore en Guinée.

Mais ce tableau positif a-t-il regretté, a été assombri par les attentats qui continuent d’être perpétrés dans le Sahel et le bassin du lac Tchad par des groupes terroristes et extrémistes violents, les enlèvements, le banditisme et les violences intercommunautaires, qui ont entraîné une nouvelle augmentation de l’insécurité et des déplacements dans un certain nombre de pays.

Outre les défis sécuritaires, M. Annadif a mis l’accent sur les défis liés aux processus électoraux, à la représentation des femmes et des jeunes dans les instances de décision et aux changements climatiques.  Si les retombées de la pandémie de COVID-19 ont été moins graves que ce que l’on craignait initialement, celle-ci a néanmoins entraîné un ralentissement de l’économie et une forte augmentation de la pauvreté, des inégalités et de la vulnérabilité aux violences sexuelles et fondées sur le genre, un sujet sur lequel a témoigné la Présidente du Réseau ivoirien pour la défense des droits de l’enfant et de la femme (RIDDEF), Mme Chantal Ayemou.  Elle a déploré que les mutilations génitales féminines ainsi que les mariages forcés et précoces, bien que proscrits par la loi, persistent dans la région, et insisté sur le droit à l’éducation des filles et l’accès des femmes à la propriété foncière.

De nombreuses délégations se sont inquiétées de la situation humanitaire de la sous-région, où, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, près de 29 millions de personnes au Sahel ont eu besoin d’assistance et de protection en 2021, soit cinq millions de plus qu’au début de 2020.

S’exprimant au nom des A3+1, à savoir le Kenya, le Niger, la Tunisie et Saint-Vincent-et-les Grenadines, le Niger s’est félicité de l’approche régionale adoptée par l’UNOWAS sur la question du lien entre climat et sécurité, notamment par le lancement du groupe de travail régional sur les changements climatiques, l’environnement, la sécurité et le développement en Afrique de l’Ouest, un approche susceptible de produire des « solutions intégrées et harmonisées » aux risques liés aux changements climatiques.

Sur le plan sécuritaire, le groupe a salué les progrès « remarquables » réalisés dans la poursuite de l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, qui a également été renforcée par un mécanisme de suivi et d’analyse des incidents civils.  Toutefois, malgré les efforts nationaux, régionaux et internationaux jusque-là déployés pour combattre le terrorisme, il est regrettable de constater une détérioration de la situation sécuritaire dans la zone d’opérations.  Conjuguée à l’impact de la pandémie de la COVID-19, cette crise expose les pays de la région à une situation socioéconomique particulièrement difficile, a averti le Niger. 

Rappelant que des centaines de civils et de membres des forces de défense et de sécurité ont été tués ces derniers mois, au Burkina Faso, au Mali et au Niger, la France a jugé indispensable de doter les pays de la région des moyens de lutter contre le terrorisme.  « Pour cela, la Force conjointe du G5 Sahel doit être soutenue », a insisté le représentant avant de souligner qu’il attendait avec impatience le rapport du Secrétaire général, en septembre, qui examinera des options pour améliorer ce soutien.  Pour prévenir une extension de l’insécurité, la France a encouragé l’UNOWAS et les Nations Unies à mener des actions de prévention au sud du Mali, au sud-ouest du Burkina Faso et au nord de la Côte d’Ivoire, en s’appuyant sur le Fonds pour la consolidation de la paix.

Le représentant du Royaume-Uni a indiqué que son pays soutenait les partenaires africains pour trouver des solutions régionales, notamment par le biais du Groupe des amis du golfe de Guinée du G7, qu’il copréside avec le Sénégal.  Il a expliqué que le Royaume-Uni a négocié un plan d’action pour sauver des millions de personnes de la famine, dont 267 millions de livres d’aide destinée aux communautés du nord-est du Nigéria.

Notant que l’UNOWAS est confronté à des défis « vastes et difficiles » pour faciliter la médiation politique, fournir une assistance aux institutions de l’État et mettre en œuvre la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, le représentant russe a déclaré que son succès dépend de son travail conjoint avec l’Union africaine, le Groupe de cinq pays du Sahel et la Commission du bassin du lac Tchad.

Face à tous ces défis et la nécessité de restaurer la confiance entre l’État et les populations, les délégations ont salué le lancement, par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de la Facilité de stabilisation du Liptako-Gourma qui vise à redéployer l’autorité de l’État et à fournir des services aux populations dans les territoires reculés du Sahel.  « Ces objectifs sont en phase avec ceux du "sursaut civil et politique" agréés au Sommet de Ndjamena », a-t-il aussi été dit.

S’agissant de la sécurité maritime dans le golfe de Guinée, les membres du Conseil se sont inquiétés de l’augmentation de la piraterie dans ces eaux.  L’Inde a ainsi noté 17 incidents de piraterie au cours des derniers mois dont certains ont touché des marins indiens.  Des mesures sont nécessaires dans le golfe de Guinée, qui reste « le point chaud » de la piraterie dans le monde, a renforcé la Norvège avant de préciser que cette menace pour la navigation internationale a des effets néfastes sur le développement durable des États côtiers, ainsi que d’autres pays de l’intérieur.

CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST - S/2021/612

M. KHATIR MAHAMAT SALEH ANNADIF, Représentant spécial du Secrétaire général pourl’Afrique de l’Ouest et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), a expliqué que le rapport examiné aujourd’hui s’articule autour des principaux défis que rencontrent les pays de la sous-région.  À cet égard, il a cité les défis sécuritaires, les défis liés aux processus électoraux, les défis liés à la représentation des femmes et des jeunes dans les instances de décisions et les défis liés aux changements climatiques.  

Il a d’abord estimé que les défis sécuritaires créés par les actes terroristes dans le Liptako-Gourma et dans le bassin du lac Tchad ainsi que par la criminalité le long des côtes du golfe de Guinée doivent être abordés sous l’angle régional.  Après avoir souligné que les risques d’une jonction entre la menace venant de la mer et celle venant du Sahel sont réels, le Chef de l’UNOWAS a salué l’Initiative d’Accra, exemple d’approche régionale, qui regroupe le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Togo.

M. Annadif a noté une nette amélioration de la coordination entre le plan d’action de la CEDEAO, la stratégie régionale de stabilisation du bassin du lac Tchad et la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, afin de consolider cette approche globale et une stabilisation à long terme.  

S’agissant des défis liés aux processus électoraux, conséquence d’un déficit de dialogue politique et surtout du manque de consensus sur les principes fondamentaux des différents scrutins, il a indiqué que l’UNOWAS, en coordination avec la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), déploie des efforts pour améliorer les échanges entre les ministres de la justice, la coopération judiciaire et le partage d’expériences entre les principaux acteurs qui devraient promouvoir l’état de droit dans la région conformément au Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance de la CEDEAO.  Il a indiqué que les prochaines élections à Cabo Verde et en Gambie se présentent sous de meilleurs auspices.  

S’agissant de la question des femmes, le Représentant spécial a noté une dynamique positive en cours pour ce qui concerne la représentation des femmes et des jeunes dans les instances de décisions, avant de saluer les avancées des législations nationales sur les quotas ou sur la parité.  Par ailleurs, il a assuré que le système des Nations Unies est pleinement mobilisé pour veiller à ce que l’aide au développement atteigne efficacement les populations du Sahel grâce à des réponses inclusives, durables et centrées sur les personnes.  « Nous avons renforcé l’autonomisation des femmes et des filles et la promotion de l’égalité des genres, notamment à travers le Groupe des amis des femmes du Sahel récemment créé », a-t-il précisé avant de citer une approche en direction des jeunes en tant qu’agents de changement et de transformation, et pas seulement en tant que bénéficiaires. 

Face aux conflits persistants entre agriculteurs et éleveurs dans la région, M. Annadif a indiqué que l’UNOWAS continue de coprésider un groupe de travail régional des Nations Unies sur les questions d’agriculteurs-éleveurs et la prévention des conflits.  « Compte tenu de l’urgence de lutter contre l’insécurité climatique, l’UNOWAS, en collaboration avec des agences des Nations Unies, a lancé un groupe de travail régional des Nations Unies sur les changements climatiques, la sécurité, l’environnement et le développement », a-t-il encore signalé. 

Tout en notant que l’Afrique de l’Ouest et le Sahel ont plutôt bien résisté à la pandémie de COVID-19, grâce à des efforts concertés aux niveaux national et régional, le Chef de l’UNOWAS a exhorté les Nations Unies et les partenaires bilatéraux et multilatéraux à continuer d’accompagner les pays, car la pandémie continue d’affecter la sécurité et la situation socioéconomique des populations. 

Mme CHANTAL AYEMOU, Présidente du Réseau ivoirien pour la défense des droits de l’enfant et de la femme (RIDDEF), a consacré son intervention par vidéoconférence aux avancées majeures enregistrées depuis la conférence de Beijing et aux défis prioritaires en matière de réalisation des droits des filles et des femmes en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest.  À ce titre, Mme Ayemou a cité l’adoption de la loi réprimant les mutilations génitales féminines, la réforme de la sécurité permettant l’ouverture de l’École militaire préparatoire technique et de la Gendarmerie aux jeunes filles, la création de l’Observatoire national de l’équité et du genre ainsi que l’adoption de la loi sur l’école obligatoire pour tous les enfants âgés de 6 à 16 ans. 

L’intervenante a également évoqué l’adoption en Côte d’Ivoire de la loi sur la participation politique des femmes aux Assemblées, exigeant 30% de représentation des femmes sur les listes des partis politiques.  Toutefois, a-t-elle nuancé, malgré ces dispositifs favorables à l’égalité des sexes dans plusieurs pays de la région, les inégalités persistent.  En 2020, la Côte d’Ivoire occupait sur ce point le cent cinquante-troisième rang sur 162 pays selon le PNUD.  L’occasion pour Mme Ayemou d’énumérer les défis auxquels font face la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest, rappelant que seulement 39,42% des filles scolarisées au primaire arrivent au secondaire: la mortalité liée à la maternité avec 239 décès pour 100 000 naissances, contre 12 décès pour 100 000 naissances dans les pays développés; l’accès à la propriété foncière pour les femmes qui reste marginal; les mutilations génitales féminines ainsi que les mariages forcés et précoces qui persistent bien que proscrits par la loi. 

Pour remédier à cette situation, la Présidente du RIDDEF a fait quelques recommandations aux États Membres, suggérant notamment de mettre en place des programmes holistiques d’appui à la scolarisation pour la réalisation du droit à l’éducation de la fille.  Elle a également préconisé d’adopter une approche multisectorielle dans la résolution des questions de santé de la femme, et de garantir des voies de recours aux femmes pour améliorer leur accès à la propriété foncière.  

Enfin, pour lutter contre les violences basées sur le genre, Mme Ayemou a préconisé l’adoption d’une loi spécifique.  Quant à l’amélioration de la représentativité des femmes dans les instances de prise de décisions, elle passe, selon elle, par un renforcement des institutions étatiques de promotion du leadership féminin en politique et par l’amélioration de la représentation politique de la femme à travers des lois spécifiques.  

S’agissant de la sécurité des femmes face aux effets des changements climatiques, la Présidente de la RIDDEF a suggéré de sensibiliser les politiques et programmes climatiques en Afrique de l’Ouest à la question du genre et de permettre aux femmes de prendre des initiatives. 

S’exprimant au nom des A3+1, à savoir le Kenya, Saint-Vincent-et-les Grenadines, la Tunisie et le Niger, M. ABDOU ABARRY (Niger), s’est félicité de l’approche régionale adoptée par l’UNOWAS sur la question du lien entre climat et sécurité, notamment par le lancement du groupe de travail régional sur les changements climatiques, l’environnement, la sécurité et le développement en Afrique de l’Ouest, une approche susceptible de produire des « solutions intégrées et harmonisées » aux risques liés aux changements climatiques. 

Sur le plan sécuritaire, le groupe a salué les progrès remarquables réalisés dans la poursuite de l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, qui a également été renforcée par un mécanisme de suivi et d’analyse des incidents civils (CITAC/MISAD).  Toutefois, malgré les efforts nationaux, régionaux et internationaux jusque-là déployés pour combattre le terrorisme, il est regrettable de constater une détérioration de la situation sécuritaire dans la zone d’opérations.  Conjuguée à l’impact de la pandémie de COVID-19, cette crise expose les pays de la région à une situation socioéconomique particulièrement difficile.  

Pour les A3+1, il est dès lors nécessaire d’évaluer les besoins en vue de répondre aux différentes menaces de même qu’il est nécessaire de rationaliser et d’harmoniser les stratégies tant sur le plan sécuritaire, que sur celui du développement, ont-ils préconisé.  « Le soutien de l’UNOWAS est, à cet égard, autant nécessaire pour renforcer les partenariats régionaux et sous-régionaux que pour faire face aux menaces transfrontalières et transversales, à la paix et à la sécurité », a ajouté le Niger.  Dans le même ordre d’idées, le plan d’action 2020-2024 de la CEDEAO pour l’éradication du terrorisme devrait être davantage soutenu, en termes de financement, a-t-il précisé.

M. Abarry a ensuite affirmé que la région ouest-africaine n’est « ni productrice ni consommatrice de ces drogues »; elle est simplement victime de sa fragilité en matière de sécurité et de contrôle des frontières, ce qui en fait une zone de transit, a-t-il argué.  « Par conséquent, tant que les régions d’origine et de destination finale n’assumeront pas correctement leurs responsabilités pour prévenir la production et trouver une solution durable à la consommation croissante des drogues, les efforts des Nations Unies et des pays d’Afrique de l’Ouest resteront vains », a mis en garde le A3+1.

Sur le plan humanitaire, les effets de la COVID-19 et l’insécurité alimentaire, les niveaux élevés de déplacement et les effets néfastes des changements climatiques, qui ont augmenté à un rythme inquiétant, appellent des actions de solidarité urgentes avec la région, a poursuivi le représentant.  Toutefois, si les vaccins ont progressivement commencé à atteindre la région, la lenteur de ce processus et les quantités limitées reçues, de même que les réticences de certaines populations à se faire administrer le vaccin, suscitent de vives inquiétudes.  Par ailleurs, les A3+1 soulignent la nécessité d’accroître les contributions au Plan de réponse humanitaire pour le Sahel, qui, à la mi-juin, n’avait reçu que 16% des 2,7 milliards de dollars nécessaires à sa mise en œuvre. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a considéré que la gouvernance démocratique est cruciale pour la paix et la stabilité à long terme en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Elle s’est félicitée des transitions démocratiques récentes au Niger et des efforts soutenus de réconciliation au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Togo.  En même temps, elle s’est dite préoccupée par la tendance actuelle au renversement des valeurs démocratiques dans la région, en particulier les évènements récents au Mali.  Plus que jamais, la fonction des « bons offices » de l’UNOWAS est essentielle, a dit la représentante.  Elle a souligné l’importance de l’engagement des jeunes et de l’accès à une éducation de qualité, en particulier pour les filles.  Elle a condamné les attaques persistantes contre les écoles, en particulier les enlèvements au Nigéria.  « Les écoles doivent être protégées dans toute la région. »  

L’Irlande condamne également les attaques contre des civils, en particulier au Niger et au Burkina Faso, a poursuivi Mme Byrne Nason.  Elle s’inquiète de l’augmentation de l’insécurité, de l’exploitation par des groupes armés des tensions intercommunautaires, et, en particulier, des attaques dans les États côtiers d’Afrique de l’Ouest, notamment le nord de la Côte d’Ivoire.  « Il est clair que les changements climatiques sont l’un des moteurs des conflits dans la région. »  La détérioration de la situation humanitaire, en particulier la montée de l’insécurité alimentaire dans le Sahel central et le bassin du lac Tchad, est aussi très préoccupante.  « Il y a un besoin urgent d’une réponse à grande échelle pour résoudre ce problème. »  L’Afrique de l’Ouest et le Sahel recèlent un vaste potentiel de croissance, a rappelé la représentante, avant d’appeler les partenaires régionaux à se concentrer sur leur engagement politique en faveur de la gouvernance démocratique, des droits de l’homme et de la coopération. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est inquiété des menaces auxquelles sont confrontés les pays de la région, en citant le terrorisme, les conflits intercommunautaires persistants, et un trafic de stupéfiants qui se développe.  Le représentant russe a aussi noté que de nombreuses institutions sociales, écoles et centres médicaux n’ont pas pu ouvrir en raison de problèmes de sécurité et de la COVID-19.  Néanmoins, il a relevé que les pays ont réussi à progresser dans le respect de leurs cycles électoraux.  Il a dit la nécessité d’assurer la transparence et le strict respect de la souveraineté avant de fustiger l’ingérence d’acteurs extérieurs.  Il a appelé en outre au bon déroulement du référendum constitutionnel et des élections au Mali. 

Notant que l’UNOWAS est confronté à des défis « vastes et difficiles » pour faciliter la médiation politique, fournir une assistance aux institutions de l’État et mettre en œuvre la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, il a déclaré que son succès dépend de son travail conjoint avec l’Union africaine, le G5 Sahel et la Commission du bassin du lac Tchad.  Il a souligné la valeur ajoutée de la coopération régionale pour lutter contre la piraterie et avancer sur la question de la démarcation de la frontière camerounaise.  Il a qualifié d’« absurde » le maintien des sanctions contre la Guinée-Bissau.  

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a estimé important que l’UNOWAS reste concentré sur son mandat et travaille avec les gouvernements nationaux et les organisations régionales, en particulier la CEDEAO.  Le représentant a relevé des progrès notables sur la voie de la démocratie et de la bonne gouvernance réalisés en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, notamment en matière de réconciliation, de réformes constitutionnelles et de renforcement de la participation des femmes aux structures de gouvernance.  « L’environnement politique en Afrique de l’Ouest est plus dynamique et inclusif que jamais. »  M. Raguttahalli a invité ceux qui soulignent les aspects négatifs de l’évolution de la situation à garder à l’esprit que, jusqu’à il n’y a pas si longtemps, ce Conseil avait l’habitude de traiter plusieurs points de l’ordre du jour spécifiques à chaque pays.  Ce n’est plus le cas aujourd’hui.  Ces développements positifs méritent, à ses yeux, l’appréciation sans équivoque de ce Conseil.  Avec d’autres élections prévues dans les mois à venir, les pays de la région ont besoin du soutien continu des partenaires bilatéraux et de la communauté internationale.

Par ailleurs, l’Inde attache une grande importance à ses relations avec la région de l’Afrique de l’Ouest, a souligné le représentant, évoquant l’ouverture de cinq nouvelles missions diplomatiques dans la région et de quatre autres prévues d’ici à la fin de l’année.  L’Inde a, jusqu’à présent, accordé des prêts à taux réduit d’un montant de 3,3 milliards de dollars pour des projets dans les secteurs de l’agriculture, de l’irrigation, de l’approvisionnement en eau, de l’énergie, de l’énergie solaire et de la santé.  Dans le cadre du Fonds de partenariat pour le développement Inde-Nations Unies, elle fournit également neuf millions de dollars pour des projets de subsistance dans neuf pays d’Afrique de l’Ouest. 

Mme ALICIA BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a considéré que le résultat combiné des défis auxquels la région est confrontée a un impact démesuré sur la population civile.  Elle s’est dite préoccupée par les attentats de plus en plus meurtriers de ces derniers mois, comme ceux du Burkina Faso et du Niger.  « Tout aussi inquiétante est la confrontation croissante entre les groupes terroristes et le nombre d’enlèvements d’enfants.  La violence continue d’être la principale cause pour laquelle à l’heure actuelle plus de 29 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire dans la région, en plus de forcer de nombreuses autres à quitter leurs lieux d’origine. »   Face à ce panorama alarmant, la protection de la population civile doit être une priorité absolue pour les États de la région et pour les forces internationales présentes dans la zone, a indiqué la représentante.

Selon Mme Buenrostro Massieu, la lutte contre le terrorisme dans la région doit être menée dans le plein respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Elle a donc déploré les violations des droits de l’homme commises par des acteurs nationaux et internationaux, qui sont incompatibles avec le droit international, créent de nouveaux griefs parmi les communautés affectées et délégitiment les institutions, il est donc essentiel d’enquêter et de les punir correctement.  Enfin, la déléguée a jugé nécessaire d’adopter des stratégies globales pour résoudre les problèmes socioéconomiques structurels qui alimentent l’extrémisme violent.  Pour cette raison, le Mexique a estimé que le développement durable et l’accès aux services de base, tels que l’éducation et la santé en Afrique de l’Ouest et au Sahel, doivent être au cœur des actions de renforcement et de déploiement des institutions étatiques.

Mme TRA PHUONG NGUYEN (Viet Nam) a appuyé les activités de l’UNOWAS auprès des pays de l’Afrique de l’Ouest dans leur lutte simultanée contre de multiples fléaux, sécuritaires, humanitaires et climatiques.  Il est essentiel que tous les pays de la région redoublent d’efforts pour lutter contre le terrorisme et de renforcer la sécurité des populations civiles et des personnels de l’ONU dans la sous-région, a-t-elle souligné, plaidant en faveur d’un financement davantage prévisible des opérations de maintien de la paix déployées sur place.  La représentante a en conclusion réitéré le soutien de son gouvernement à la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel (UNISS). 

M. JAMES PAUL ROSCOE (Royaume-Uni) a déclaré que la sécurité au Sahel est la préoccupation régionale dominante.  Il a encouragé l’UNOWAS à se concentrer sur la promotion de mesures coordonnées pour lutter contre les facteurs de conflit.  Face à l’insécurité sur les côtes du golfe de Guinée, le représentant du Royaume-Uni a indiqué que son pays soutenait les partenaires africains pour trouver des solutions régionales, notamment par le biais du Groupe du G7 des Amis du golfe de Guinée, qu’il copréside avec le Sénégal.  Il a expliqué que le Royaume-Uni a négocié un plan d’action pour sauver des millions de personnes de la famine, assorti d’une promesse initiale de 267 millions de livres sterling d’aide destinée aux communautés du nord-est du Nigéria. 

Saluant la tenue d’élections pacifiques en Côte d’Ivoire et au Niger, et les préparatifs électoraux en Gambie et à Cabo Verde, le délégué a fait part de ses préoccupations concernant les violences observées en marge des élections au Bénin et en Guinée.  Il a également appelé au rétablissement de l’ordre constitutionnel au Mali et au Tchad.  Dans ce contexte, il a encouragé l’UNOWAS à favoriser le dialogue comme moyen de résoudre les différends.  Préoccupé par l’impunité pour les violations des droits, il a invité l’UNOWAS à appeler à un renforcement de la responsabilité et du respect des normes des droits de l’homme.  Il a également appelé à examiner plus avant ce que les États -et les Nations Unies- peuvent faire pour lutter contre l’insécurité, encourager les parties à autoriser l’accès humanitaire, et aider les États à se faire les champions de l’égalité des droits et du rôle des femmes dans la région. 

M. RICHARD MILLS (États-Unis) s’est félicité du récent partenariat entre l’UNOWAS et d’autres organisations pour lancer un groupe de travail régional qui se penchera sur les questions liées aux changements climatiques, à l’environnement, à la sécurité et au développement en Afrique de l’Ouest.  M. Mills a, par ailleurs, concentré son intervention sur trois domaines d’intérêt pour l’UNOWAS: le renforcement de la démocratie, l’arrêt du terrorisme et le soutien aux solutions communautaires à la violence.  Tout d’abord, il a salué le travail acharné de l’UNOWAS pour soutenir les élections et les gouvernements de transition dans la région du Sahel.  Cette année, malgré l’instabilité politique et des manifestations violentes, le Niger a connu son premier transfert de pouvoir entre présidents: « une réussite remarquable ».  Le représentant a, cependant, regretté la tendance inverse au Mali.  À cet égard, les États-Unis sont aux côtés de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de la communauté internationale pour appeler au retour de l’ordre constitutionnel au Mali par des élections démocratiques en février 2022.  Condamnant la détention d’anciens responsables du Gouvernement de transition, il a demandé leur libération « immédiate et inconditionnelle ». 

M. Mills a déploré que des groupes terroristes continuent de s’attaquer aux civils et aux soldats de la paix de l’ONU dans tout le Sahel.  Il a soutenu les efforts visant à contrer les groupes extrémistes violents.  Il a également condamné les récentes attaques au Burkina Faso qui ont tué 138 personnes, dont de nombreux enfants, et dénoncé l’utilisation d’enfants soldats.  Face à la violence intercommunautaire, le représentant a reconnu les efforts de la CEDEAO et de l’UNOWAS pour promouvoir la sécurité et la stabilité à long terme dans tout le Sahel.  « Nous soutenons fermement et accueillons favorablement les projets menés par les communautés pour répondre à ces préoccupations », a-t-il dit, car après tout, « les communautés affectées par cette violence sont les mieux placées pour savoir comment l’arrêter ». 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a rappelé que les 18 derniers mois ont été particulièrement importants dans les processus démocratiques en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, en raison du nombre d’élections organisées dans plusieurs États de la région.  « Alors qu’un certain nombre de ces élections se sont déroulées dans un environnement relativement pacifique, nous restons préoccupés par la perception croissante dans la région d’un espace politique et civique en train de se rétrécir. »  Le représentant a également souligné l’importance d’une participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects des processus politiques.  « Si le renforcement du cadre normatif sur l’inclusion des femmes est positif, la réalité en termes de représentation des femmes dans les gouvernements et parlements nationaux reste clairement insuffisante », a-t-il dit. 

M. Jürgenson s’est dit alarmé par la détérioration de la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, considérant comme essentiel que les États de la région continuent de renforcer leur coopération entre eux et avec la communauté internationale.  Néanmoins, une approche centrée sur la sécurité ne suffira pas à elle seule à apporter une paix et une stabilité durables en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel, a-t-il observé.  Il est, selon l’Estonie, crucial de s’attaquer aux causes profondes des conflits, de prendre en compte les griefs sous-jacents de la société et de garantir l’accès aux services sociaux de base.  Pour M. Jürgenson, le respect des droits de l’homme et la lutte contre l’impunité sont des éléments essentiels pour parvenir à une stabilité à long terme dans la société.  « La responsabilité des atteintes aux droits humains et des violations du droit international humanitaire est essentielle pour restaurer la confiance de la population et soutenir le processus de réconciliation. »

Consciente des défis auxquels sont encore confrontés les enfants et les civils dans la région, Mme MONA JUUL (Norvège) a rappelé le massacre de Solhan au Burkina Faso.  Non seulement il y avait des enfants parmi les victimes, mais des enfants ont également été utilisés par des acteurs terroristes pour perpétrer l’attaque.  La représentante a condamné le ciblage continu des enfants – pour enlèvement et en tant que victimes de violence sexuelle et sexiste.  « Les auteurs de tels crimes doivent répondre de leurs actes conformément au droit national et international. »  Nous déplorons également les enlèvements répétés d’écoliers contre rançon au Nigéria, a poursuivi Mme Juul. 

Le Conseil de sécurité doit rester vigilant et trouver des moyens de soutenir les réponses régionales au terrorisme – qui se propage de manière inquiétante vers le large, a demandé Mme Juul.  Des mesures sont nécessaires dans le golfe de Guinée, qui reste « le point chaud » de la piraterie dans le monde.  Outre la menace pour la navigation internationale, la piraterie a également des effets néfastes sur le développement durable des États côtiers, ainsi que d’autres pays de l’intérieur.  La Norvège souligne en outre la nécessité d’une planification océanique durable - pour jeter les bases d’une économie côtière pacifique et prospère.  Enfin, a signalé la représentante, la Norvège a récemment présenté sa nouvelle stratégie holistique pour le Sahel.  Celle-ci reflète ses priorités globales au Conseil: la diplomatie de la paix, la participation et les droits des femmes, la protection des civils, et le climat et la sécurité. 

M. DAI BING (Chine) s’est félicité de l’évolution en Afrique de l’Ouest et dans la région du Sahel marquée globalement par une situation stable.  La communauté internationale devrait encourager les parties à régler leurs différends à travers le dialogue et la consultation, a-t-il dit.  De même, elle devrait soutenir la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine et continuer à jouer un rôle de fer de lance, tout en respectant le leadership et la souveraineté des pays de la région et en fournissant un soutien constructif.  L’UNOWAS devrait fournir une assistance technique lors des élections générales à venir, a-t-il rappelé. 

Poursuivant, M. Dai a relevé la situation fragile au niveau sécuritaire, citant les atteintes à la sécurité civile et les attentats qui ont fait beaucoup de victimes civiles.  Reprenant à son compte les propos du Secrétaire général, il a estimé qu’une approche sécuritaire n’est pas suffisante.  En effet, a-t-il ajouté, il faut intégrer la gouvernance, le développement et la dimension communautaire si l’on veut traiter les causes profondes des conflits.  La communauté internationale doit continuer d’appuyer les pays de la région et les aider à renforcer leurs capacités dans les domaines du maintien de la paix et la stabilité et de la lutte contre le terrorisme.  En matière sécuritaire, la Chine propose de traiter conjointement les défis, tels que la drogue et la piraterie dans le golfe de Guinée.  Revenant sur le dernier sommet de la CEDEAO, le représentant s’est félicité de la série de mesures importantes annoncées pour renforcer l’intégration économique régionale, y compris la création d’une zone de libre échange continentale et la mise en place d’une monnaie unique pour l’Afrique de l’Ouest.  Il a, par ailleurs, salué les efforts des pays de la région dans leur lutte contre la pandémie qui méritent « notre reconnaissance ».  À l’heure actuelle, le virus continue à se propager en Afrique, a-t-il averti, appelant la communauté internationale à fournir des médicaments, des financements et un accès à la technologie et à garantir la mise à disposition des vaccins. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) s’est dit horrifié par les massacres récents au Burkina Faso.  Dans ce pays, mais également au Mali et au Niger, des centaines de civils et de membres des forces de défense et de sécurité ont été tués ces derniers mois, a-t-il rappelé.  « Cette situation impose de réagir.  Nous devons doter les pays de la région des moyens de lutter contre le terrorisme.  Pour cela, la Force conjointe du G5 Sahel doit être soutenue.  Nous attendons avec impatience le rapport du Secrétaire Général, en septembre, qui examinera des options pour améliorer ce soutien », a déclaré le représentant.  L’Académie internationale de lutte contre le terrorisme, inaugurée en juin dernier en Côte d’Ivoire et soutenue par la France, est également un projet essentiel pour faire face au terrorisme, selon lui.  En outre, il a encouragé la coopération des pays côtiers avec ceux du Sahel, les opérations conjointes entre la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Mali étant des initiatives prometteuses.  

Pour prévenir une expansion de l’insécurité, la France a encouragé l’UNOWAS et l’ONU à mener des actions de prévention dans le sud du Mali, le sud-ouest du Burkina Faso et le nord de la Côte d’Ivoire.  Le Fonds pour la consolidation de la paix est un outil pertinent à cet égard.  Elle a par ailleurs salué le lancement, par le PNUD, de la Facilité de stabilisation du Liptako-Gourma, qui vise à redéployer l’autorité de l’État et à fournir des services aux populations dans les territoires reculés du Sahel.  « Ces objectifs sont en phase avec ceux du “sursaut civil et politique” agréé au Sommet de Ndjamena », s’est félicité M. de Rivière. 

Sur le plan politique, la France a salué la tenue des élections législatives en Côte d’Ivoire, en mars, et au « Cap Vert », en avril, tout en formant le vœu que l’élection présidentielle en Gambie, prévue en décembre, se déroule dans des conditions apaisées.  « Les élections sont une étape importante et peuvent être complétées, quand c’est nécessaire, par des processus de dialogue politique et de réconciliation », a préconisé le représentant.  En Guinée, il a pris note de l’annonce d’un nouveau cadre permanent du dialogue politique et social, appelant tous les acteurs politiques à s’engager sincèrement en faveur de ce processus, qui doit inclure l’opposition parlementaire et extra-parlementaire.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.