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ECOSOC: le Forum pour la coopération en matière de développement s’ouvre sur des appels insistants pour réduire les inégalités économiques et sanitaires

Le Forum pour la coopération en matière de développement s’est ouvert ce matin sur des appels insistants en vue de réduire les inégalités économiques et sanitaires, ainsi que les risques climatiques, dans un contexte inédit de pandémie de COVID-19.  « Si nous répétons les mêmes débats et appliquons les vieilles recettes à ces nouveaux défis, nous échouerons à préparer l’avenir de nos économies et de nos sociétés », a averti à cette occasion le Président du Conseil économique et social (ECOSOC), M. Munir Akram. 

Ce dernier a ouvert ce Forum, qui se déroule sur deux jours sous les auspices de l’ECOSOC, en soulignant la nécessité de renforcer le multilatéralisme face au virus.  « Le nationalisme vaccinal est l’antithèse de la coopération pour le développement », a-t-il lancé, en prônant la « créativité » dans l’accès aux vaccins.  Il a notamment appelé à remédier aux 19 milliards de dollars manquants pour l’accélérateur ACT, y compris le Mécanisme COVAX, et réclamé la suspension temporaire des droits de propriété intellectuelle pour permettre la production de vaccins dans les pays en développement. 

M. Akram a aussi plaidé pour un financement renforcé du développement, notamment par le biais d’un meilleur accès au financement concessionnel et de la concrétisation des engagements des pays riches de consacrer 0,7 % de leur PIB à l’aide publique au développement (APD).  L’APD demeure une ressource importante, a jugé le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Liu Zehnmin.  Il a d’ailleurs expressément souhaité que les discussions de ce Forum soient axées sur la manière dont lesdits engagements peuvent être honorés. 

Mme Sania Nishtar, Conseillère spéciale du Premier Ministre du Pakistan, a, elle aussi, insisté sur le potentiel de ce Forum pour être un catalyseur en faveur du changement, en rappelant l’acuité des crises climatique et économique en cours. La question des inégalités et de leurs conséquences sur la santé ont été au cœur de l’intervention de M. Michael Marmot, Professeur d’épidémiologie de l’University College London.  Il a estimé que le niveau de santé d’une population est indicatif du niveau des inégalités au sein de la société dans laquelle elle vit. 

Ainsi, au Royaume-Uni, le gradient social de mortalité lié à la COVID-19 est presque identique au gradient social des décès provoqués par des maladies cardiaques, les cancers, des maladies pulmonaires obstructives chroniques et le diabète.  « Cela signifie que les causes des inégalités de la COVID-19 sont proches des causes des inégalités dans la santé en général », a-t-il expliqué, en appelant à reconstruire non pas en mieux, mais de manière plus équitable. 

La réduction des risques climatiques a dominé la première session de la journée intitulée « Naviguer à travers un environnement à risque en s’appuyant sur la coopération au développement. »  La crise de la COVID-19 a réaffirmé l’urgence du financement de la prévention et la réduction des risques de catastrophe, ainsi que de la réponse à celles-ci, a déclaré le Vice-Président et Ministre de l’économie, de la planification et de la réforme du secteur public du Malawi. Cette session a également été marquée par les appels, dont celui de la Chine, pour que les engagements au titre de l’APD soient honorés.  

Les travaux se sont poursuivis dans l’après-midi avec une discussion consacrée au renforcement des systèmes de santé dans les pays vulnérables.  À cette occasion, le Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Argentine a alerté que les pays dont les infrastructures de santé sont les plus faibles ne peuvent pas faire face aux défis mondiaux d’aujourd’hui; tandis que les pays les mieux équipés ne peuvent espérer progresser dans un contexte où les difficultés de leurs voisins risquent de mettre en péril leur propre développement.  M. Pablo Tattamanti a aussi insisté sur l’importance de systèmes de santé publique universels, gratuits et garantis par l’État « et non basés sur la capacité de payer de chacun ». 

Une fois encore, l’importance de l’investissement dans la prévention et de la coopération à tous les niveaux a été soulignée à mainte reprises.  « Nous avons tous les accords pour nous relever en mieux de la pandémie: le Programme 2030, le Programme d’action d’Addis-Abeba, l’Accord de Paris et le Cadre de Sendaï, ce dont nous avons besoin maintenant est d’une mise en œuvre plus créative et concertée », a déclaré le Sous-Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, résumant bien le sentiment général des intervenants. 

Le Forum reprendra ses travaux demain, vendredi 7 mai, à 9 heures. 

Déclarations liminaires 

M. MUNIR AKRAM, Président de l’ECOSOC, a indiqué que la réalisation du Programme 2030 exige de mobiliser toutes les modalités de coopération pour le développement.  Face à la pandémie, il a cité des exemples de coopération tels que le partage des vaccins ou bien encore l’initiative de suspension du service de la dette.  De telles initiatives n’apporteront néanmoins que des solutions partiales à des défis de long terme, parmi lesquels les nouveaux variants du virus ou encore les relèvements inégaux entre pays, aggravés par la crise climatique.  Si nous répétons les mêmes débats et appliquons les vieilles recettes à de nouveaux défis, nous échouerons à préparer les économies et les sociétés à l’avenir, a mis en garde M. Akram.  Il a indiqué que ce Forum demande à chacun comment il peut renforcer la coopération pour le développement pendant cette période critique. 

Le Président a souligné la nécessité de renforcer le multilatéralisme face au virus et de se montrer créatif dans l’accès aux vaccins.  Le nationalisme vaccinal est l’antithèse de la coopération pour le développement, a-t-il affirmé. Il a appelé à remédier aux 19 milliards de dollars manquants pour l’accélérateur ACT, y compris le Mécanisme COVAX, et réclamé la suspension temporaire des droits de propriété intellectuelle pour permettre la production de vaccins dans les pays en développement. 

M. Akram a aussi plaidé pour un financement renforcé du développement, y compris par une soutenabilité des dettes souveraines, un accès au financement concessionnel et la concrétisation des promesses des pays riches de consacrer 0,7% de leur PIB à l’APD.  Il faut aussi remédier au déficit des investissements en ce qui concerne la réalisation du Programme 2030.  Le Président a aussi insisté sur l’importance des investissements dans des technologies vertes et résilientes et la nécessité d’un appui international accru aux investissements dans le numérique. 

M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a indiqué que la pandémie actuelle pose un défi sans précédent au multilatéralisme.  Sans une réponse forte, le monde court le risque d’une décennie de développement perdue dans les pays en développement.  Pour alimenter les débats de ce Forum, il a rappelé qu’une coopération pour le développement efficace signifie d’aider les pays en développement à réduire les risques et à renforcer leur résilience, sous peine d’aggraver les conséquences de futurs chocs.  Le développement du financement doit être urgemment renforcé, a-t-il dit, en insistant sur la fonction particulière de l’APD qui demeure une ressource importante.  Il a souhaité que les discussions abordent la manière d’honorer les engagements pris au titre de l’APD.  Il a jugé essentielle la coopération et rappelé que la coopération Sud-Sud et triangulaire a permis de faciliter les transferts de fournitures médicales essentielles pendant la crise. 

Poursuivant, le Secrétaire général adjoint a loué les partenariats noués au titre de l’Accélérateur ACT pour l’accès aux outils médicaux nécessaires à la lutte contre la pandémie.  Il a espéré que ce Forum générera des idées concrètes pour renforcer les systèmes de santé dans les pays en développement.  Il a appelé à réduire les obstacles qui entravent la coopération pour l’action climatique et la réduction des risques de catastrophe naturelle, déplorant que seules 18% des dépenses de relèvement à la pandémie ont une dimension environnementale.  Ce Forum doit être un catalyseur d’idées pour appuyer les pays les plus vulnérables pour réaliser le Programme 2030 et l’Accord de Paris.  Il a aussi invité ce Forum à explorer les opportunités de renforcer les efforts régionaux pour une coopération plus efficace et une résilience de long terme.  « Nous disposons de tous les accords pour nous relever en mieux, le Programme 2030, le Programme d’action d’Addis-Abeba, l’Accord de Paris et le Cadre de Sendaï.  Ce dont nous avons besoin maintenant est d’une mise en œuvre plus créative et concertée. » 

M. MICHAEL MARMOT, Professeur d’épidémiologie de l’University College London et Conseiller spécial du Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a estimé que le niveau de santé d’une population est indicatif du niveau des inégalités au sein de la société dans laquelle elle vit.  Face aux iniquités que la pandémie a exposé au grand jour, il a appelé à reconstruire non pas en mieux, mais de manière plus équitable. 

Il a indiqué qu’au Royaume-Uni, le gradient social de mortalité lié à la COVID-19 est presque identique au gradient social des décès provoqués par des maladies cardiaques, les cancers, des maladies pulmonaires obstructives chroniques, et le diabète.  Cela signifie que les causes des inégalités de la COVID-19 sont proches des causes des inégalités dans la santé en général, a-t-il expliqué. 

Le Professeur s’est ensuite penché sur l’espérance de vie au Royaume-Uni et aux États-Unis, notant que celle-ci s’était ralenti au cours de la décennie qui a précédé la pandémie, et avait même diminué dans les régions les plus pauvres en raison de l’augmentation des inégalités.  Ces deux pays ont ensuite fait face à une mortalité excessive élevée durant la pandémie.  Faisant le lien entre ces deux phénomènes, il a pointé la qualité de la gouvernance, la culture politique, l’augmentation de l’inégalité sociale et économique, le désinvestissement du secteur public et des services publics, ainsi que la mauvaise santé de la population. 

M. Marmot a également parlé de la situation en Méditerranée orientale où la courbe de Preston fait ressortir que dans les pays à faible revenu national, une augmentation minime de ce revenu est liée à une amélioration notable de l’espérance de vie.  Mais lorsque le revenu national avoisine $20 000 par personne, cette corrélation disparait.  L’espérance de vie est pratiquement identique dans toute la région, que ce soit en Jordanie, en Tunisie ou au Qatar, un des pays les plus riches du monde. 

Face à la pandémie, M. Marmot a appelé à s’attaquer aux facteurs structurels de l’aspect économique des inégalités en matière de santé dans la région de la Méditerranée orientale.  Il faut aussi se pencher sur les conditions dans lesquelles les gens naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent, ainsi que sur les systèmes de gouvernance et le respect des droits humains qui permettent d’aborder ces déterminants sociaux de la santé.  Mais plus fondamentalement, a-t-il souligné, c’est l’équité en matière de santé et de bien-être qui doit être la base de toute politique gouvernementale, pas simplement la croissance économique. 

Mme SANIA NISHTAR, Conseillère spéciale du Premier Ministre du Pakistan, a loué le potentiel de ce Forum pour se montrer un catalyseur en faveur du changement.  La pandémie n’est pas la seule crise, il y a aussi les crises climatique et économique, a-t-elle affirmé, en appelant de ses vœux une coopération renforcée.  Elle a indiqué que les autorités ont dû reconfiner le Pakistan pour faire face à la pandémie, ce qui a occasionné des pertes d’emplois et de revenus.  Elles ont alors aidé financièrement 40% de la population sous une forme ou sous une autre, dans le cadre d’un programme appelé « compassion ».  Elle a loué l’apport de la numérisation dans la gestion de ce programme et les transferts d’espèces.  Quand les vaccins ont été mis en disposition, le numérique a également été mis à contribution.  Elle a précisé que l’action de son gouvernement s’est basée sur des données fiables et sur des partenariats.  La transparence est essentielle et il faut investir sur les technologies numériques pour un déploiement des programmes à large échelle, a déclaré Mme Nishtar.  Elle a insisté sur l’importance de la fiabilité des données et des partenariats.  Toutes les formes de coopération doivent être exploitées, a-t-elle poursuivi.  Enfin, elle a indiqué que le monde, malgré les mesures de distanciation sociale, n’a jamais été aussi proche.  Elle a plaidé pour des mesures fortes pour éviter de saper les gains de développement engrangés et remédier aux chocs.  « Nous pouvons nous montrer à la hauteur. » 

Naviguer à travers un environnement à risque en s’appuyant sur la coopération au développement 

Cette table ronde, présidée par le Vice-Président de l’ECOSOC, M. COLLEN KELAPILE (Botswana), et animée par Mme MIKAELA GAVAS du Centre for Global Development, a permis de relever que la pandémie de la COVID-19 a créé d’autres défis de développement plus complexes, tout en offrant de nouvelles opportunités de coopération dans le nouveau paysage numérique.  Il fut donc question pour les intervenants d’évoquer comment adapter la coopération internationale à ce nouvel environnement constitué de risques divers, y compris la COVID-19. 

Dans un premier temps, M. CARLOS LOPES, ancien Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a relevé, dans une vidéo préenregistrée, que la pandémie a révélé l’énorme potentiel de changement et d’adaptation des systèmes de coopération qui étaient déjà défectueux.  La COVID-19 a aussi permis de constater une remise en question de certains des principes fondamentaux de la coopération au développement, tels que la manière dont nous pratiquons la solidarité, ou encore comment nous partageons les connaissances et la technologie.  La pandémie a également démontré les limites du financement du Programme 2030.  Ainsi, dans l’ensemble, la communauté internationale a surtout réagi en faisant de la reprogrammation et la réutilisation des fonds, et moins de mise en place de nouveaux fonds dédiés aux nouveaux défis de coopération. 

Un constat similaire a été dressé par le Vice-Président et Ministre de l’économie, de la planification et de la réforme du secteur public du Malawi.  M. SAULOS KLAUS CHILIMA a expliqué qu’en février 2021, lors de la réunion régionale africaine de préparation à la cinquième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés, les participants ont mis en évidence diverses manières dont la COVID-19 a exacerbé les vulnérabilités des pays les moins avancés (PMA).  Les pays présents ont insisté pour que la coopération au développement soit alignée sur les priorités des PMA, y compris dans l’optique de renforcer leur résilience face aux risques.  En outre, la crise de la COVID-19 a réaffirmé l’urgence du financement de la prévention et la réduction des risques de catastrophe, ainsi que de la réponse à celles-ci.  M  Klaus Chilima s’est également désolé de constater que le niveau d’aide publique au développement (APD) fait transparaître que les partenaires de développement ne tiennent pas leurs promesses faites aux PMA. 

Les pays développés doivent honorer leurs engagements d’APD en temps opportun, a appuyé le Vice-Ministre du Commerce de la Chine, M. SHOUWEN WANG, qui a aussi insisté sur le renforcement de la coopération dans la lutte contre la pandémie de COVID-19.  Selon lui, la prévention et le contrôle de la pandémie sont la responsabilité commune et une priorité absolue de la communauté internationale.  Pour sa part, la Chine reste engagée à faire des vaccins un bien public mondial.  C’est pourquoi les vaccins chinois sont exportés ou en voie de l’être vers 127 pays et quatre organisations internationales.  La Chine a également activement promu la coopération internationale pour la réduction de la pauvreté, en s’efforçant de faire de son initiative « une Ceinture, une Route » une « voie pour sortir de la pauvreté ». 

« Il est urgent de repenser les modèles de coopération au développement afin de les orienter sur le long terme », a souligné à son tour le Directeur général de l’information et de la diplomatie publique au Ministère des affaires étrangères de l’Indonésie, M. TEUKU FAIZASYAH.  Constatant que la pandémie a créé à la fois des défis et des opportunités en matière de coopération internationale au développement, il a appelé à résoudre les problèmes actuels tout en prévoyant et anticipant les crises futures.  Bien que le pays ait été frappé par le cyclone Seroja, il reste engagé à fournir une assistance au Mozambique et au Zimbabwe pour y atténuer l’impact des changements climatiques.  L’Indonésie fait ainsi sien le principe selon lequel il n’y a pas de résilience sans solidarité. 

Il faut plus que jamais renforcer la coopération au développement, a également acquiescé la Ministre de la coopération internationale de l’Égypte.  Mme RANIA ALMASHAT a rappelé que 2030 n’est plus si loin et que, de ce fait, il faut rendre la coopération au développement plus apte à contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.  Dans ce contexte, le Directeur de la coopération internationale au Ministère des affaires étrangères de la Colombie a plaidé pour un réseau dynamique de solidarité entre les pays, un multilatéralisme fort, et surtout, une coopération pour le développement qui prenne en compte la préparation et la réponse aux situations de risque.  M. ALVARO CALDERÓN a rappelé que les catastrophes naturelles sont fréquentes en Colombie, mais aussi dans toute l’Amérique latine et les Caraïbes.  C’est pourquoi les pays du Sud se doivent d’échanger leurs connaissances et expériences afin de mieux atténuer et prévenir les risques et répondre aux urgences rapidement et efficacement.  Dans cette perspective de coopération à la prévention des risques de catastrophe, le Japon a renforcé les capacités de plus de 80 pays, a indiqué le Conseilleur à la réduction des risques de catastrophe de l’Agence japonaise de coopération internationale.  M. KIMIO TAKEYA a aussi expliqué que des mesures prises sur le plan niveau national dans le contexte du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030) ont permis au Japon de réagir promptement à la pandémie de COVID-19. 

Malheureusement, à l’heure actuelle, une grande partie de la coopération au développement ne tient pas compte de la prévention et de la résilience en cas de catastrophe, a déploré la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe.  Mme MAMI MIZUTORI a jugé important de penser à la prévention en finançant, par exemple, des infrastructures résilientes, des systèmes de santé et d’éducation solides qui ne vont pas être interrompus en cas de catastrophe.  Il faut utiliser le potentiel du secteur privé pour renforcer la résilience des pays en développement en raison de leur situation économique « très difficile ».  C’est ce que fait déjà la European Development Finance Institutions (EDFI) en favorisant des investissements dans des projets du secteur privé dans les pays à revenu faible ou intermédiaire dans le but de promouvoir la création d’emplois et une croissance économique durable.  La Directrice des politiques et des partenariats de l’EDFI, Mme LAURE BLANCHARD-BRUNAC, a expliqué que son organisation met l’accent sur des secteurs porteurs de changements, les priorités actuelles étant les changements climatiques, l’emploi, le développement des infrastructures, et les chaînes de valeurs, notamment dans le secteur agricole.  Selon elle, la COVID-19 a laissé voir qu’il est important de cibler un investissement durable quand on soutient les groupes les plus vulnérables.  

En fin de compte, la COVID-19 a remis au goût du jour le multilatéralisme qui était foulé au pied ces dernières années, s’est félicité le Directeur exécutif d’ActionAid India.  M. SANDEEP CHACRA a expliqué qu’il faut mettre en commun nos connaissances afin de réaliser l’ambition de sortir de pauvreté des millions de gens à travers le monde.

Renforcer les systèmes de santé pour les pays vulnérables

La discussion de l’après-midi avait pour thème « Renforcer les systèmes de santé pour les pays vulnérables » et était animée par M. STEFAN SWARTLING PETERSON, professeur de Transformations Globales dans la Santé au Karolinska Institutet, en Suède. 

Dans un premier temps, Mme JOY ST-JOHN, Directrice exécutive de l’Agence de santé publique des Caraïbes, a détaillé les vulnérabilités de cette région, dont six mois de mauvais temps et de catastrophes naturelles par année qui compromettent les gains en développement enregistrés.  Elle a aussi pointé la forte incidence de maladies chroniques qui pèsent sur les capacités sanitaires de la région.  Elle a indiqué que la pandémie est un défi mais aussi un mal pour un bien.  En effet, l’Agence a reçu l’appui de l’Union européenne (UE) pour un renforcement des systèmes de santé locaux.  Elle a aussi précisé que l’UE et la Banque mondiale ont assoupli leurs règles d’achat afin de faciliter les approvisionnements en matériel essentiel en ces temps critiques.  La lutte contre la pandémie met l’accent sur un relèvement en mieux et sur la poursuite du développement de la région.  Enfin, elle a mentionné la création d’une équipe spéciale COVID-19 et tourisme qui vise au renforcement du secteur du tourisme, crucial dans cette région. 

Pour M. PABLO TETTAMANTI, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Argentine, la pandémie de COVID-19 a mis en exergue l’importance de systèmes de santé publique universels, gratuits et garantis par l’État « et non basés sur la capacité de payer de chacun ».  Il a souligné la dichotomie entre une perception de la santé comme un droit humain universel et celle qui y voit un bien de marché. 

Il a passé en revue la riposte contre la COVID-19 de l’Argentine, relevant que la mise en œuvre précoce de mesures sanitaires, sociales et économiques a permis de renforcer les capacités du système de santé et la production nationale de fournitures critiques dont des respirateurs mécaniques et des équipements de protection.  Cependant, ces efforts ne peuvent prospérer sans une stratégie active de coopération, de coordination et de transfert de technologie sur le plan niveau mondial, a-t-il reconnu. 

Il a alerté que les pays dont les infrastructures de santé sont les plus faibles ne peuvent pas faire face aux défis mondiaux d'aujourd'hui; tandis que les pays les mieux équipés ne peuvent espérer progresser dans un contexte où les difficultés de leurs voisins risquent de mettre en péril leur propre développement.  À ses yeux, les projets de coopération Sud-Sud sont un outil très précieux pour sortir de la crise et renforcer les liens entre les pays de la région.  Cependant, au stade actuel, il est essentiel de susciter un plus grand engagement de la part des pays développés afin que tous les pays, « sans exception », puissent accéder aux médicaments, aux vaccins, à l'équipement médical et aux technologies de la santé en tant que biens publics mondiaux, a-t-il insisté.  Pour ce faire, il a jugé essentiel de mettre en place des mécanismes de financement durables et inclusifs pour le développement sociosanitaire des pays, qui tiennent compte des besoins spécifiques d'accès aux biens mondiaux.  « S’il y a un moment où la notion de solidarité internationale a du sens, c'est bien celui-ci », a-t-il conclu. 

À son tour, M. BÅRD VEGAR SOLHJELL, Directeur général de l’Agence norvégienne pour la coopération au développement (Norad), a souligné que la santé est à la fois un service vital à fournir aux populations et un secteur important de l’économie qui représente environ 10% du PIB mondial et emploie beaucoup de monde.  La question est alors de savoir comment financer et coordonner un agenda aussi complexe, a estimé M. Solhjell.  Il a fait état des progrès énormes en matière de santé que le monde a connus en juste une génération, tout en déplorant l’échec à aider les pays à développer des systèmes de santé nationaux capables de faire face aux épidémies et de fournir un accès équitable à des soins abordables pour tous. 

M. Solhjell a abordé la question du coût de l’investissement dans la préparation aux pandémies par rapport à la fourniture quotidienne et directe de services.  Des questions difficiles se posent également au sujet de l'interface entre les secteurs public et privé sur les marchés médicaux: comment garantir l'innovation, la coopération, l'efficacité et l'équité - tout à la fois.  

Pour aller de l’avant, il a appelé à considérer chaque région et pays comme des participants et non comme des bénéficiaires dans la préparation et réponse aux pandémies mondiales.  Des modèles commerciaux durables pour une production régionalisée prendront du temps à se développer mais il faut commencer dès maintenant, a-t-il insisté.  Il a souligné que l’investissement dans la préparation à la pandémie ne peut se faire au détriment des services quotidiens.  En conséquence il faut fixer des priorités de santé publique, et se doter de systèmes de surveillance et de diagnostic, de laboratoires, de plateformes de dotation en personnel et d'engagement communautaire.  En outre, la coopération au développement doit appuyer les institutions de santé publique compétentes ainsi que les organismes de recherche à la fois mondiaux et locaux.  En dernier lieu, M.  Solhjell a appelé à investir collectivement dans les données locales à partir des systèmes locaux, car lorsqu’une pandémie frappe, il faut pouvoir procéder à des études dans tous les pays en même temps. 

M. ANDALIB ELIAS, Directeur général pour les questions économiques multilatérales au Ministère des affaires étrangères du Bangladesh, a indiqué que dans les pays en développement, la densité de la population, en particulier dans les zones urbaines et les bidonvilles et les conditions économiques vulnérables sont les principaux défis à relever dans le contexte de la pandémie.  Il est donc essentiel de fournir l’appui nécessaire aux pays en développement, en particulier aux pays les moins avancés (PMA), aux pays en développement sans littoral (PDSL) et aux petits États insulaires en développement (PEID). 

Il a indiqué que face à la COVID-19 le Bangladesh s’est doté d’un plan de relance d'une valeur d’environ 14,58 milliards de dollars, ce qui représente 4,44% de son PIB.  Un plan national de préparation et d’intervention contre la COVID-19 couvre en outre les 1,1 million de Rohingyas que le pays accueille.  Ce plan, a-t-il détaillé, est axé sur la réponse épidémiologique; la prestation de services de santé; la prévention et le contrôle des infections, ainsi que la planification de la coordination et de la stratégie de réponse; la logistique et les achats; l’engagement communautaire; et la recherche, entre autres. 

Pour construire une architecture de santé robuste, il va falloir investir davantage dans le secteur de la santé qui doit figurer au cœur des plans de développement, a-t-il estimé.  Les pays en développement auront besoin pour cela d’un soutien à court, moyen et long termes de la part des partenaires de développement bilatéraux et multilatéraux sous forme de financement, de renforcement des capacités, de transfert de technologie, d’annulation de la dette, de prêts concessionnels et de dons. 

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