SC/14508

Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail sur les enfants et les conflits armés

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à l’occasion de l’examen du troisième rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé au Soudan du Sud (S/2020/1205), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de sa présidente, les messages suivants:

À toutes les parties au conflit armé au Soudan du Sud, en particulier les Forces sud‑soudanaises de défense du peuple, dont les Forces sud-soudanaises de défense du peuple alliées à Taban Deng, ainsi que le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition pro-Machar (M/APLS dans l’opposition)

  • Condamne vigoureusement toutes les violations et atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants au Soudan du Sud, se déclare gravement préoccupé par les conséquences disproportionnées que la pandémie de COVID-19 entraîne pour les enfants, prie instamment toutes les parties au conflit de prévenir et de faire cesser immédiatement toutes les violations du droit international applicable liées au recrutement et à l’utilisation d’enfants, aux enlèvements, aux meurtres et atteintes à l’intégrité physique, aux viols et autres formes de violence sexuelle, aux attaques perpétrées contre les écoles et les hôpitaux et au refus de l’accès humanitaire, et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international, tout en constatant que le nombre global de violations a diminué depuis le précédent rapport;
  • Les prie de continuer à donner suite à ses conclusions précédentes concernant le Soudan du Sud (https://www.undocs.org/fr/S/AC.51/2018/3);
  • Insiste sur le fait qu’il faut tenir compte, lors de la planification et de la mise en œuvre des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, de l’intérêt supérieur de l’enfant ainsi que des vulnérabilités et des besoins particuliers des filles et des garçons;
  • Se réjouit que l’Accord de paix revitalisé comporte des dispositions relatives à la protection des enfants, souligne que la mise en œuvre de cet accord offre une occasion importante de placer les droits et les besoins des enfants au cœur des efforts visant à instaurer une paix durable, la justice et la réconciliation au Soudan du Sud, souligne également que les considérations relatives à la protection de l’enfance doivent être prises en compte dans toute négociation de paix future, demande à cet égard que le Guide pratique des Nations Unies à l’intention des médiateurs pour la protection des enfants dans les situations de conflit armé soit diffusé et appliqué, demande instamment à toutes les parties qui s’emploient à mettre en œuvre l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud de veiller à ce qu’une place soit faite à la protection, aux droits, au bien-être et à l’autonomisation des enfants touchés par des conflits armés dans toutes les initiatives de consolidation et de pérennisation de la paix, y compris les activités liées aux programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration et à la réforme du secteur de la sécurité, et d’encourager et de faciliter la prise en compte de l’opinion des enfants dans ces processus, et prend note à cet égard des Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés;
  • Se félicite de la signature et de l’approbation le 7 février 2020 par les parties à l’Accord de paix revitalisé d’un plan d’action global visant à faire cesser et à prévenir les six violations graves à l’encontre des enfants au Soudan du Sud, invite les parties à le mettre pleinement en œuvre, et souligne à cet égard qu’il importe que l’Organisation des Nations Unies en soutienne et en contrôle l’application;
  • Réaffirme qu’il importe d’assurer la répression de toutes les violations et atteintes commises contre les enfants en temps de conflit armé, insiste sur le fait que tous les auteurs de tels faits doivent être traduits rapidement en justice pour y répondre de leurs actes sans retard excessif, ce qui suppose notamment de procéder à des enquêtes systématiques et diligentes et, s’il y a lieu, d’engager des poursuites judiciaires et de prononcer des condamnations, souligne qu’il faut mettre fin à l’impunité généralisée des violations commises contre les enfants, demande instamment au Gouvernement de mettre un terme à l’impunité en veillant à ce que tous les auteurs de violations et d’atteintes soient rapidement traduits en justice et aient à rendre compte de leur conduite, notamment en signant sans plus tarder le Mémorandum d’accord portant création du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud conclu avec l’Union africaine et en menant des enquêtes et des poursuites de manière rigoureuse, rapide, indépendante et impartiale, note que, dans le plan d’action global visant à faire cesser et à prévenir les six violations graves conclu le 7 février 2020, les parties se sont engagées à enquêter sur les six violations graves, à les ériger en infractions pénales lorsqu’il y a lieu, et à renforcer les organes judiciaires spécialisés dans la recherche, la poursuite et le jugement des auteurs de tels faits, souligne également qu’il est nécessaire de veiller à ce que toutes les victimes et tous les rescapés aient accès à la justice et à des services spécialisés intégrés, sans distinction, dans les domaines psychosocial, juridique et de la santé, y compris de la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’à des aides et à des moyens de subsistance, et encourage également le Gouvernement et l’Organisation des Nations Unies à collaborer au renforcement du cadre juridique général visant à sauvegarder les droits des enfants;
  • Condamne le fait que les forces de sécurité gouvernementales et les groupes armés recrutent et utilisent des enfants, notamment comme combattants, cuisiniers, porteurs, espions et gardes du corps, note que le recrutement et l’utilisation restent la plus courante des six violations graves commises contre les enfants et que les faits de recrutement et d’utilisation sont souvent liés aux cinq autres violations graves, souligne que l’intensification des conflits, l’apparition de nouveaux groupes armés, l’insécurité, la pauvreté et l’absence de perspectives constitueraient un terreau fertile pour le recrutement et l’utilisation d’enfants, exhorte vivement toutes les parties au conflit au Soudan du Sud à faire cesser immédiatement le recrutement et l’utilisation des enfants, à libérer immédiatement et sans conditions préalables tous ceux qui se trouvent dans leurs rangs et à les remettre aux acteurs civils de la protection de l’enfance, conformément aux protocoles en vigueur, en veillant à ce que ces enfants soient traités avant tout comme des victimes, à permettre leur pleine réinsertion dans la société et à prévenir tout nouveau cas d’enrôlement ou d’utilisation, conformément aux obligations énoncées dans le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;
  • Encourage le Gouvernement à s’attacher à offrir aux enfants touchés par des conflits armés des possibilités de réintégration et de réadaptation à long terme et durables, qui tiennent compte des questions de genre et des questions liées à l’âge, notamment de la nécessité d’assurer l’accès, dans des conditions d’égalité, aux soins de santé, aux services de soutien psychosocial et aux programmes d’enseignement, et à sensibiliser les populations, en travaillant avec elles, en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants, de faciliter leur retour, de réduire au maximum le risque d’un nouveau recrutement, tout en tenant compte des besoins respectifs des filles et des garçons, et de contribuer ainsi au bien-être des enfants et à une paix et une sécurité durables;
  • Se déclare préoccupé par le fait que les forces de sécurité gouvernementales et les groupes armés continuent de tuer et de mutiler des enfants, notamment lors d’échanges de tirs entre les Forces sud-soudanaises de défense du peuple et les groupes armés, de violences intercommunautaires et infranationales, d’opérations militaires menées par les Forces sud‑soudanaises de défense du peuple et de raids lancés par les groupes armés sur les villages, ainsi que dans l’explosion de restes explosifs de guerre, exhorte toutes les parties à prendre toutes les mesures nécessaires pour mieux protéger les enfants et pour prévenir de telles violations, et demande également au Gouvernement d’investir dans les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration, dans la réforme du secteur de la sécurité et dans les activités de déminage, en particulier pour mettre les enfants à l’abri des restes explosifs de guerre;
  • Se déclare gravement préoccupé par le fait que les forces de sécurité gouvernementales et les groupes armés commettent des viols et autres formes de violence sexuelle, dont des viols collectifs, sur la personne d’enfants, en particulier de filles, exhorte toutes les parties à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants par des membres de leurs forces ou groupes respectifs, souligne qu’il importe que les personnes qui commettent des violences sexuelles et fondées sur le genre sur la personne d’enfants aient à répondre de leurs actes et que les rescapés bénéficient d’une protection et d’une assistance adéquates ainsi que de mécanismes fiables de recours à la justice, encourage les parties à l’Accord de paix revitalisé à accélérer la mise en œuvre de leurs plans d’action respectifs de lutte contre la violence sexuelle liée au conflit, note que l’inadéquation du commandement et du contrôle exercés sur les forces et groupes armés ainsi que les récentes défections ayant donné lieu à des violences et fait des victimes civiles ont aggravé l’exposition des enfants aux violences sexuelles pendant la période considérée, note également avec inquiétude que l’ampleur des violences sexuelles infligées aux enfants au Soudan du Sud est sous-estimée du fait de la crainte de la stigmatisation, des normes culturelles, du défaut de sensibilisation, de la peur des représailles ainsi que de l’inadéquation des services d’accompagnement et des difficultés à établir les responsabilités, et souligne qu’il importe de fournir aux rescapés de violences sexuelles des services spécialisés intégrés, sans distinction, dans les domaines psychosocial, juridique et de la santé, y compris la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’à des aides et à des moyens de subsistance;
  • Condamne le fait que les groupes armés et les forces de sécurité gouvernementales continuent d’attaquer les écoles et les hôpitaux, et notamment de piller, vandaliser et détruire les installations et de menacer le personnel protégé, perturbant l’accès à l’éducation d’environ 6 741 enfants au cours de la période considérée, se déclare préoccupé par le fait que les forces armées et les groupes armés utilisent les écoles et les hôpitaux à des fins militaires, note en particulier que l’utilisation d’écoles à des fins militaires a perturbé l’accès à l’éducation d’environ 8 000 enfants pendant la période considérée, demande à toutes les parties au conflit armé de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et de faire cesser les attaques ou menaces d’attaque contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et d’hôpitaux à des fins militaires;
  • Rappelle que le Gouvernement du Soudan du Sud a approuvé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et doit la mettre en œuvre, et encourage le Gouvernement à veiller à ce que les attaques menées contre des écoles fassent l’objet d’enquêtes et à ce que les auteurs de violations du droit international humanitaire soient dûment poursuivis;
  • Condamne les enlèvements d’enfants, dont la majorité sont imputables à l’APLS dans l’opposition, notamment à des fins de recrutement et d’utilisation, de viol et autres formes de violence sexuelle, dont le mariage forcé, et demande instamment à toutes les parties de libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants enlevés et de les remettre aux acteurs compétents de la protection de l’enfance;
  • Se déclare gravement préoccupé par les refus d’accès humanitaire, notamment par les meurtres et les attaques visant des membres du personnel humanitaire ainsi que par les restrictions qui entravent l’acheminement de l’aide humanitaire aux enfants dans les zones contrôlées par l’opposition, et demande à toutes les parties au conflit d’autoriser et de faciliter, dans le respect des obligations que leur fait le droit international, y compris le droit international humanitaire, un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave, conformément aux principes directeurs des Nations Unies concernant l’aide humanitaire et aux principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance qui encadrent l’action humanitaire, de respecter la nature exclusivement humanitaire et l’impartialité de l’aide humanitaire et de respecter le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires sans discrimination;
  • S’inquiète vivement de la montée des violences intercommunautaires et infranationales dans tout le Soudan du Sud et des effets dévastateurs que ces faits ont sur les enfants, note que des enfants ont été recrutés pour grossir les rangs des groupes armés dans la perspective des activités de réintégration, et déplore l’apparition de nouveaux groupes armés et la désintégration ou l’éclatement de groupes existants;
  • Rappelle que le Conseil de sécurité, par ses résolutions 2206 (2015) et 2521 (2020), a décidé d’imposer des mesures financières et des restrictions sur les déplacements aux personnes et entités désignées par le Comité créé en application du paragraphe 16 de la résolution 2206 (2015) pour des activités telles que:
  • Le fait de préparer, de donner l’ordre de commettre ou de commettre au Soudan du Sud des actes qui sont contraires au droit international des droits de l’homme ou au droit international humanitaire, ou qui constituent des atteintes aux droits humains;
  • Le recrutement et l’emploi d’enfants par des groupes armés ou des forces armées dans le cadre du conflit armé au Soudan du Sud;
  • Le fait de préparer, de donner l’ordre de commettre ou de commettre des actes de violence sexuelle ou fondée sur le genre au Soudan du Sud;
  • Le fait de prendre pour cible des civils, notamment des femmes et des enfants, en préparant, en donnant l’ordre de commettre ou en commettant des actes de violence (notamment des meurtres, des mutilations, des actes de torture ou des viols), des enlèvements ou des disparitions et des déplacements forcés, en perpétrant des attaques contre des écoles, des hôpitaux, des lieux de culte ou des lieux où des civils ont trouvé refuge, ou en commettant d’autres actes qui constituent de graves atteintes aux droits de l’homme ou des violations du droit international des droits de l’homme ou du droit international humanitaire;
  • Le fait d’entraver les activités des missions de maintien de la paix ou des missions humanitaires ou diplomatiques déployées par la communauté internationale au Soudan du Sud, y compris celles du Mécanisme de vérification et de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité, l’acheminement ou la distribution de l’aide humanitaire ou l’accès à cette aide;
  • Les attaques contre les missions des Nations Unies, les présences internationales de sécurité ou d’autres opérations de maintien de la paix ou contre le personnel des organisations humanitaires;
  • Déclare qu’il se tient prêt à communiquer au Conseil de sécurité toutes informations utiles pour l’aider à adopter des mesures ciblées contre les auteurs de violations.

Aux notables locaux et aux chefs religieux

  • Souligne l’importance du rôle que jouent les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;
  • Les exhorte à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le viol et autres formes de violence sexuelle, les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, les enlèvements, les attaques et les menaces d’attaques visant des écoles et des hôpitaux et le refus de l’accès humanitaire, tout en continuant de se mobiliser pour faire cesser et prévenir ces violations et atteintes, et à se concerter avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour favoriser la réintégration et la réadaptation, au sein de leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par des activités de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.
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