8966e séance – après-midi
CS/14793

Yémen: l’Envoyé spécial informe le Conseil de sécurité du démarrage, la semaine prochaine, d’une série de consultations avec les parties yéménites

Alors qu’une paix au Yémen se fait attendre, que pendant « trop longtemps » les Yéménites sont restés sans processus politique et sans espoir de voir ce conflit vieux de sept ans se terminer, et que la situation devient « incontrôlable » sur le terrain, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, M. Hans Grundberg, a annoncé cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le lancement la semaine prochaine d’une série de consultations avec toutes les parties yéménites. 

L’initiative a été saluée par l’ensemble des délégations, même si des doutes ont été exprimés par celles du Yémen et des Émirats arabes unis, peu convaincues de la volonté des houthistes de se lancer dans le dialogue. 

L’Envoyé spécial a précisé qu’il tiendra des discussions bilatérales avec toutes les parties yéménites, y compris les belligérants, dans le but d’affiner le cadre général qu’il est en train d’élaborer et qui définira son plan pour progresser vers un règlement politique inclusif.  Grâce à ce processus, les intérêts des parties belligérantes seront pris en compte, a-t-il assuré avant de demander le soutien du Conseil de sécurité. 

Cette initiative a été soutenue par l’ensemble des membres du Conseil de sécurité, notamment par les États-Unis, la Fédération de Russie, la France ou la Chine, qui ont jugé qu’un processus de négociation s’impose de « toute urgence » en raison d’un conflit qui déborde largement des frontières yéménites et dans le contexte d’une situation socioéconomique et humanitaire « particulièrement préoccupante ».  Les membres du Conseil n’ont vu en effet aucun signe d’apaisement, au contraire: l’escalade des six dernières semaines, où en moyenne 21 civils ont été tués ou blessés chaque jour, montre que le Yémen a atteint de loin son bilan le plus lourd depuis au moins trois ans. 

Les attaques transfrontalières se sont intensifiées et il est devenu beaucoup plus difficile pour les acteurs humanitaires de travailler au Yémen, ont déploré les intervenants et en premier lieu le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths.  Pour preuve, la semaine dernière, cinq membres du personnel de l’ONU en mission officielle dans la province d’Abyan ont été enlevés, tandis que deux autres travailleurs de l’ONU arrêtés à Sanaa en novembre dernier sont toujours détenus, s’est-il inquiété en soulignant lui aussi la nécessité d’une approche durable. 

M. Grundberg a misé sur les discussions qui vont s’ouvrir, y voyant une « réelle opportunité » de tracer une voie pacifique.  Tous les efforts doivent être faits pour faire comprendre aux parties qu’il n’y a pas de solution militaire durable et que leur quête est vaine, a plaidé l’Envoyé spécial, convaincu qu’un processus politique sous les auspices de l’ONU, soutenu par ce Conseil, est « notre meilleure voie à suivre ».

En attendant, et afin de limiter les souffrances des populations civiles, le Conseil de sécurité doit obtenir un cessez-le-feu immédiat et faire respecter l’embargo sur les armes qu’il a décidé dans ses résolutions, notamment la 2616 (2021), ont insisté des membres du Conseil, dont le Mexique, l’Albanie et le Gabon. 

Le Yémen et les Émirats arabes unis se sont toutefois montrés sceptiques, tout en soutenant le projet de l’Envoyé spécial.  Le représentant du pays concerné a relevé qu’à ce jour, aucune condamnation, pas plus que les résolutions du Conseil de sécurité, n’ont dissuadé les milices houthistes de continuer de déstabiliser son pays et toute la région.  Armés par l’Iran, les miliciens continuent de mener des attaques terroristes par drones en visant les civils et les installations civiles d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, a dénoncé la délégation yéménite.

La représentante des Émirats arabes unis a, de son côté, affirmé que les houthistes ont clairement montré au monde leur refus de tenir leurs promesses et de s’engager dans un processus politique. 

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT (S/2022/50)

Déclarations

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a qualifié d’inquiétants les récents développements au Yémen.  Il devrait être « évident pour tout le monde » que les enjeux sont devenus importants, après les attaques d’Ansar Allah le mois dernier contre les Émirats arabes unis, a-t-il estimé.  Il a mentionné à cet égard l’aéroport civil et les zones industrielles voisines qui ont été ciblés, avec un bilan de trois morts parmi les civils.  Ces attaques, en plus de celles qui ont frappé l’Arabie saoudite, montrent à quel point ce conflit risque de devenir incontrôlable, à moins que des efforts sérieux ne soient déployés, de toute urgence, par les parties yéménites, la région et la communauté internationale pour mettre fin à ce conflit, a-t-il mis en garde. 

Par ailleurs, le mois dernier, les lignes de front se sont multipliées, avec un nombre record effroyable de victimes civiles, a observé l’Envoyé spécial.  La frappe aérienne de la coalition sur un centre de détention à Sadaa, a tué ou blessé plus de 300 détenus, faisant d’elle le pire incident pour les victimes civiles en trois ans.  La forte augmentation des frappes aériennes au Yémen, y compris sur les zones résidentielles et les infrastructures civiles à Sanaa et Hodeïda, est également alarmante selon M. Grundberg qui a rappelé une fois de plus à toutes les parties leurs obligations en vertu du droit international humanitaire.

Il a poursuivi son exposé en soulignant que la guerre continue par ailleurs de se dérouler sur le terrain économique, les parties belligérantes se disputant les ressources, les flux commerciaux et la politique monétaire.  Cette guerre économique frappe irréfutablement l’ensemble de la population, a-t-il noté.  L’Envoyé spécial a indiqué que le mois dernier a été marqué par des pénuries particulièrement graves de carburant et de dérivés pétroliers, notamment dans les zones contrôlées par Ansar Allah, mettant à rude épreuve la vie quotidienne des populations.  La guerre se déroule également dans le domaine public avec une rhétorique médiatique de plus en plus hostile, combinée à l’intimidation, à la détention et au harcèlement des professionnels et des militants des médias au Yémen, a encore déploré le haut fonctionnaire.  Il a regretté que cela contribue à créer un environnement toxique alors qu’il y a un besoin de dialogue. 

Mais, malgré tous ces défis, il existe une issue à cette guerre, a-t-il assuré en faisant remarquer que laisser la guerre se poursuivre est un choix, tout comme y mettre fin.  « Même s’il ne sera pas facile d’y mettre fin, je crois fermement que c’est possible. »  L’Envoyé spécial a indiqué être en train d’élaborer un cadre qui définira son plan pour progresser vers un règlement politique inclusif, y compris la mise en place d’un processus à plusieurs volets.  Grâce à ce processus, les intérêts des parties belligérantes peuvent être pris en compte dans le contexte d’un programme yéménite plus large selon les trois axes politique, sécuritaire et économique. 

Dans le cadre de cet effort, M. Grundberg a annoncé qu’il allait entamer la semaine prochaine une série de consultations bilatérales visant à affiner ce cadre.  Il s’engagera avec de multiples parties prenantes yéménites, y compris les parties belligérantes, les partis politiques, les représentants de la société civile et les experts yéménites dans les domaines politique, sécuritaire et économique.  Les consultations exploreront les priorités des Yéménites à court et à long terme, ainsi que leurs aspirations et leur vision plus large pour mettre fin au conflit.  Assurer l’inclusivité et l’inclusion des femmes sera un aspect important des consultations, a-t-il assuré, avant de demander le soutien du Conseil de sécurité pour encourager tous les acteurs à participer de manière constructive sans délai.

Selon l’Envoyé spécial, il s’agit d’une « réelle opportunité » pour les parties yéménites de tracer une voie pacifique vers l’avant.  Pendant trop longtemps, a-t-il poursuivi, les Yéménites ont été sans processus politique et sans espoir que ce conflit puisse se terminer.  En lançant un « processus structuré » qui essaye d’aborder les éléments clefs du conflit, l’espoir d’une fin aux batailles militaires, politiques et économiques dévastatrices peut être restauré. 

Concluant son intervention, l’Envoyé spécial a affirmé que mettre fin à cette guerre nécessitera des compromis inconfortables qu’aucune partie belligérante n’est actuellement disposée à faire.  « Il nous incombe donc à tous, y compris au Conseil, de déployer tous les efforts possibles pour faire comprendre aux parties à ce conflit qu’il n’y a pas de solution militaire durable et que leur quête d’un moment d’équilibre parfait sur le champ de bataille, lorsque l’autre côté est suffisamment affaibli pour accepter son sort, est vain. »  Un processus politique sous les auspices de l’ONU, soutenu par ce Conseil, est notre meilleure voie à suivre, a-t-il dit. 

M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a déclaré que la guerre au Yémen continue de menacer des millions de vies à travers le pays et ne montre actuellement « aucun signe d’apaisement ».  Bien au contraire, l’escalade des six dernières semaines a eu des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles, avec en moyenne 21 civils tués ou blessés chaque jour, soit « de loin, le bilan le plus lourd depuis au moins trois ans ».  M. Griffiths a rappelé que les attaques transfrontalières se sont elles aussi intensifiées.  Il a rappelé à toutes les parties leurs obligations au titre du droit international humanitaire et a demandé que les responsables de toute violation grave répondent de leurs actes. 

Tout au long d’un conflit vieux désormais de sept ans, les partenaires humanitaires ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour réduire les souffrances des populations, a fait remarquer M. Griffiths, qui a rappelé qu’en 2021, près de 200 organisations ont collaboré dans le cadre du plan d’intervention de l’ONU pour aider plus de 11 millions de personnes chaque mois.  Mais, a-t-il rappelé, « travailler au Yémen est souvent beaucoup plus difficile qu’il ne devrait l’être ».  Il a rappelé les restrictions auxquelles les travailleurs humanitaires restent confrontés et a rappelé que le droit international humanitaire exige de toutes les parties qu’elles facilitent l’accès et garantissent la liberté de mouvement des humanitaires.  Il a rappelé et condamné l’enlèvement la semaine dernière de cinq membres du personnel de l’ONU en mission officielle dans la province d’Abyan et a rappelé que deux autres travailleurs de l’ONU arrêtés à Sanaa en novembre dernier sont toujours détenus alors qu’un troisième, arrêté à Mareb en décembre dernier, vient d’être libéré. 

Le Coordonnateur des secours d’urgence a rappelé que c’est le financement qui est, « de loin », le plus grand défi auquel sont confrontés les organismes d’aide.  L’opération humanitaire -une bouée de sauvetage pour des millions de personnes au Yémen– « est sur le point de commencer à faire beaucoup moins », a-t-il averti, en expliquant que les agences d’aide vont rapidement se trouver à court d’argent.  À la fin du mois de janvier, près des deux tiers des principaux programmes d’aide des Nations Unies avaient déjà été réduits, voire fermés, a-t-il annoncé.  Et, a-t-il ajouté, « à partir du mois prochain », les huit millions de personnes que le Programme alimentaire mondial (PAM) aide et dont il a déjà dû limiter les rations depuis décembre, « ne recevront probablement pas de nourriture du tout ».  M. Griffiths a ensuite décrit une série de programmes qui seraient rapidement réduits ou supprimés.  « L’ampleur des lacunes actuelles est sans précédent au Yémen », a-t-il ajouté. 

Si ces lacunes ne sont pas comblées, ce sera un arrêt de mort pour les personnes dont les mécanismes d’adaptation ont été complètement épuisés et qui dépendent de l’aide pour survivre, a averti M. Griffiths, qui a précisé que les agences font « ce qu’elles peuvent ».  Aucune de ces solutions n’est durable.  Nous ne pouvons pas laisser l’opération d’aide au Yémen s’effondrer, a poursuivi le chef d’OCHA, qui a remercié les Gouvernements de la Suède et de la Suisse d’avoir coorganisé avec les Nations Unies un événement d’engagement de haut niveau pour le Yémen le 16 mars.  Il a « imploré » tous les donateurs de profiter de cette occasion pour démontrer leur engagement envers le peuple du Yémen.

M. Griffiths s’est dit conscient de la nécessité d’avoir une approche plus durable que la simple assistance humanitaire.  C’est possible, a-t-il estimé, en estimant que le cadre économique des Nations Unies offre « une voie à suivre » à cet égard car il rassemble des initiatives qui pourraient faire une différence immédiate « en stimulant les revenus, en réduisant les prix et en renforçant la stabilité macroéconomique ».  En conclusion, M. Griffiths a déclaré que la meilleure chose que l’on puisse faire pour le peuple yéménite serait de « trouver une fin juste et durable à la guerre ». 

M. FERIT HOXHA (Albanie), Président du Comité du Conseil de sécurité établi en application de la résolution 2140 (2014), a détaillé l’activité du Comité sur la période allant du 19 février 2021 à ce jour.  Depuis la dernière intervention de son prédécesseur devant ce Conseil, les membres du Comité se sont réunis à quatre reprises en présentiel et à trois reprises en virtuel, a-t-il indiqué.  Il a précisé que le Comité avait, le 26 mars dernier, entendu une présentation du Groupe d’experts sur l’attaque qui a frappé l’aéroport d’Aden le 30 décembre 2020.  Le 17 décembre, le Comité a entendu pour la première fois la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit.  Il a indiqué que le rapport final du Groupe d’experts a été transmis au Comité le 23 décembre puis à ce Conseil le 26 janvier.  Les discussions sur les six recommandations soumises au Comité se poursuivent, a-t-il encore précisé.  Le Président a souligné qu’elles ont trait à un embargo sur les armes ciblé, la préservation de l’économie yéménite ou bien encore le respect du droit international humanitaire.  Le Comité a continué de recevoir les rapports d’inspection de navires du Mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies, a ajouté en conclusion le Président.

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a regretté l’escalade notable du conflit, en dénonçant les attaques transfrontalières commises par des houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.  « La dernière attaque ayant visé l’aéroport international d’Abha a blessé 12 civils, tandis que l’attaque du 17 janvier contre les Émirats arabes unis en a tué trois », a-t-elle déploré.  Rappelant qu’il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit, la représentante britannique a appelé toutes les parties à s’engager dans le nouveau processus de paix placé sous l’égide de l’ONU.  Elle a appuyé la proposition de l’Envoyé spécial d’entamer de vastes consultations avec les parties au conflit, saluant son approche inclusive qui permettra, selon elle, à un large éventail de Yéménites d’avoir la possibilité de participer.  Elle a précisé que le Royaume-Uni avait organisé une réunion sur le Yémen fin janvier au cours de laquelle Oman, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les États-Unis ont planché sur une solution politique urgente et globale.  Alors que la réponse humanitaire se heurte à de graves pénuries de financement et que nous approchons du septième anniversaire du conflit, la représentante s’est inquiétée que seulement trois millions de personnes recevront des rations alimentaires complètes en février et deux millions en mars.  Elle a donc encouragé les donateurs à se montrer aussi généreux que possible. 

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a redit sa condamnation des nombreuses attaques perpétrées par les houthistes contre des cibles émiraties et saoudiennes.  Les attaques contre des infrastructures civiles essentielles, en plus d’être injustifiables, constituent une violation du droit international humanitaire, aggravent les souffrances humaines et accroissent les exigences imposées aux opérations humanitaires, a-t-elle déploré.  Elle s’est faite l’écho de l’appel du Secrétaire général aux parties pour qu’elles fassent preuve d’un maximum de retenue, encouragent les actions de désescalade et respectent les principes de proportionnalité, de distinction et de précaution.  Un cessez-le-feu national et l’avancement du processus politique, facilités par l’Envoyé spécial de l’ONU, sont la feuille de route vers la solution du conflit yéménite et la formule pour avancer vers une paix durable dans la péninsule arabique, selon la représentante mexicaine.  Elle a insisté en outre sur la nécessité de respecter l’embargo sur les armes, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, notamment la résolution 2616 (2021). 

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a condamné vigoureusement les attaques commises le mois dernier par les houthistes, y compris contre des sites saoudiens et émiriens, ajoutant que les États-Unis allaient les « aider à défendre leur territoire ».  Les houthistes continuent de détenir des étrangers, dont du personnel de l’ONU, et à occuper les locaux qui abritaient l’ambassade des États-Unis, a-t-il dénoncé.  Il a accusé les houthistes de vouloir semer l’instabilité dans toute la région, appelant à un « front uni » pour montrer aux houthistes que leurs attaques ne peuvent rester impunies. 

Le représentant a constaté une « escalade dangereuse » au Yémen et appelé les houthistes à respecter le droit international humanitaire et à participer à un processus de paix piloté par l’ONU.  Il a salué les efforts de l’Envoyé spécial et estimé que le retour à un processus de négociations s’imposait de toute urgence.  Il a appelé toutes les parties à soutenir le travail de M. Griffiths et à lui permettre de rencontrer tous les secteurs de la société yéménite.  Il a jugé inacceptable la volonté des houthistes d’imposer des conditions préalables à une rencontre avec l’Envoyé spécial.

M. Mills a rappelé que plus de 20 millions de Yéménites ont besoin d’aide humanitaire, appelant les donateurs à verser des fonds.  Il s’est également dit préoccupé par la situation du pétrolier SAFER et a appelé les houthistes à agir de manière à éviter une catastrophe humanitaire et environnementale. 

Mme ALLEGRA PAMELA R. BONGO (Gabon) a constaté que la crise multidimensionnelle au Yémen est loin de voir son épilogue et que le Gouvernement d’union nationale, « qui avait suscité tant d’espoirs lors de sa formation », n’est pas en mesure d’exercer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire yéménite, ni de faire face aux nombreux défis qui s’y posent.  L’escalade de la violence est des plus préoccupantes, a poursuivi Mme Bongo, avec des débordements sur les pays voisins qui risquent de déstabiliser la région.  Le Gabon appelle à la trêve des combats et au respect de l’embargo sur les armes, partant du principe qu’il n’y a pas de solution militaire à cette crise, comme l’a affirmé sa représentante.  Les populations civiles ne doivent pas continuer à être la cible des attaques meurtrière, s’est-elle indignée en dénonçant l’impunité qui prévaut au Yémen.  Elle a également appelé le Conseil de sécurité et la communauté internationale à être solidaires avec les femmes yéménites face aux abus et violations des droits fondamentaux qu’elles subissent.  Au-delà de l’indispensable cessez-le-feu, la sortie de crise au Yémen passe selon elle par un dialogue inclusif.  Avant de conclure, la représentante a appelé à une mobilisation de la communauté internationale à la hauteur de la détresse des populations.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) s’est dit vivement préoccupé par l’escalade du conflit qui hypothèque les chances d’un cessez-le-feu et qui a des conséquences terribles sur l’ensemble de la région du Golfe où vivent et travaillent neuf millions d’Indiens.  Il a dénoncé les attaques intervenues récemment contre les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite, qui ont blessé plusieurs citoyens indiens.  Le représentant a particulièrement dénoncé la rhétorique belliqueuse d’Ansar Allah avant de s’inquiéter de l’impact croissant du conflit sur la sécurité maritime dans la région.  Il a demandé la libération par Ansar Allah des membres d’équipage du navire Rawabi dont sept sont des Indiens.  Il s’est particulièrement inquiété de la crise humanitaire résultant de l’effondrement de l’économie yéménite avant d’exhorter les donateurs à soutenir financièrement les besoins des agences onusiennes.  Il a salué le cadre économique présenté par OCHA pour le Yémen.  Il a exhorté les parties à renoncer aux options militaires et à s’engager dans un dialogue en faveur d’un processus politique piloté par les Yéménites.  Enfin, il a exhorté les pays de la région ayant une influence sur les parties yéménites à n’épargner aucun effort pour parvenir à un processus politique inclusif respectueux de la souveraineté du Yémen. 

M. DAI BING (Chine) s’est inquiété de la détérioration de la situation au Yémen et a exhorté toutes les parties à cesser les hostilités.  Il a condamné les attaques houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, en se félicitant des initiatives prises par ces deux pays pour garantir leur propre sécurité.  Le Conseil de sécurité se doit de suivre de près la situation au Yémen, a-t-il recommandé, souhaitant aussi qu’il joue activement son rôle pour parvenir à une désescalade et pour voir la crise yéménite réglée à travers une solution politique.  Pour cela, il a demandé à toutes les parties de faire preuve de la volonté politique nécessaire et de coopérer avec l’Envoyé spécial, en prévenant que la réponse humanitaire ne saurait se substituer à un règlement politique.  Sur la plan humanitaire, le délégué a salué l’arrivée récente d’aide et de pétrole au port de Hodeïda.  Il a appelé la communauté internationale, et notamment les donateurs, à fournir une aide plus durable.  La Chine a pris une part active aux travaux du Comité de sanctions sur le Yémen, a rappelé son représentant, en soulignant que le mandat de ce Comité et celui du Groupe d’experts arrivent à expiration.  « La Chine espère qu’ils seront prorogés. »

Pour Mme SHERAZ GASRI (France), la stratégie des différentes parties au conflit qui espèrent, par la poursuite des combats, se placer en meilleure position pour négocier ensuite est « sans issue ».  Elle a réitéré l’appel de la France à un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  Alors que le conflit déborde « désormais largement des frontières yéménites », elle s’est inquiétée des risques de déstabilisation de la région et a condamné fermement les attaques des houthistes en direction des territoires saoudien et émirien, jugeant « inacceptables » les tirs de missiles.  Elle a également jugé « extrêmement préoccupant » le bilan humain de l’escalade de la violence, demandant de donner la « priorité absolue » à la protection des civils, y compris des personnels humanitaires et médicaux, ainsi que des infrastructures civiles.  Tout doit être fait pour garantir un plein accès humanitaire à l’ensemble des personnes dans le besoin, a poursuivi Mme Gasri, qui a appelé à la levée de « l’ensemble des obstacles bureaucratiques ».  Pour la France, la Conférence des donateurs, prévue le 16 mars, est une échéance importante.  Répondre aux besoins humanitaires est une responsabilité collective et un devoir moral et « la France sera au rendez-vous », a-t-elle assuré.

Mme Gasri a apporté son soutien à l’action de l’Envoyé spécial pour maintenir une dynamique politique, « seule porte de sortie au conflit ».  Elle l’a remercié pour ses efforts et a appelé tous les acteurs à coopérer pleinement avec lui, sans conditions préalables.  Rappelant que les paramètres internationaux pour résoudre le conflit au Yémen sont « bien connus », la représentante a souligné l’importance d’un dialogue inclusif avec la pleine participation des femmes au processus de paix.  La représentante a enfin déclaré que le pétrolier SAFER reste « une urgence et une priorité » et a appelé les houthistes à coopérer avec les Nations Unies pour éviter une catastrophe écologique. 

M. FERIT HOXHA (Albanie) a décrit le quotidien « chaotique » de la population yéménite prisonnière d’un conflit qui voit de nombreuses femmes décéder de complications liées à l’accouchement en raison des contraintes liées à la guerre.  Rappelant qu’il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, le représentant a dit que le pays a besoin sans délai d’un cadre de résolution du conflit.  C’est pourquoi il a exhorté les parties à s’engager dans un processus de dialogue politique sans exclusive permettant la participation de tous les segments de la société, dont les femmes.  « Un cessez-le-feu immédiat devait être la priorité », a-t-il insisté avant d’appeler à trouver une solution au problème du pétrolier SAFER et à la détention du navire marchand Rawabi.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a mentionné de nombreuses tendances préoccupantes au Yémen, en premier lieu, le niveau sans précédent de violences commises contre les civils.  Le délégué a rappelé que 600 civils ont été tués et blessés en janvier, soit le bilan mensuel le plus élevé depuis trois ans.  Il a également noté que les attaques commises par les houthistes contre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis en février ont aussi causé des pertes civiles.  « Les attaques contre les civils sont inacceptables et doivent être condamnées sans équivoque », a clamé le délégué, en demandant le respect du droit international humanitaire.  Il a souhaité que chaque violation fasse l’objet d’une enquête impartiale et que les responsables soient traduits en justice. 

Le délégué a ensuite évoqué le sort des enfants yéménites qui, en sept ans de guerre, ont été privés de leurs droits à la santé, à l’éducation et à une vie familiale normale.  « Pour notre plus grande honte », plus de 10 000 enfants ont été tués ou blessés en raison du conflit, a accusé le délégué.  Bien qu’ils ne soient pas les seuls à avoir commis de graves violations contre les enfants, les houthistes ont fait de l’endoctrinement et du recrutement d’enfants un élément constitutif de leur pouvoir, a-t-il poursuivi.  Nous devons tout faire pour garantir le respect du droit international et préserver ce qui reste de l’enfance des enfants du Yémen, a-t-il demandé en concluant.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a affirmé que son pays se réserve, et a le droit, de prendre toutes les mesures visant à protéger sa population civile contre les activités agressives des terroristes houthistes.  S’adressant directement à l’Envoyé spécial, elle lui a demandé: « Quand les activités de ce groupe cesseront-elles? »  Du point de vue de la délégation, le temps est venu pour la communauté internationale de faire cesser les activités de ces milices.  Elle a demandé avant tout à la communauté internationale d’exercer des pressions sur ce groupe et ses alliés et soutiens.  Cela passe par la mise en œuvre des sanctions décidées par le Conseil de sécurité, y compris l’embargo sur les armes, a plaidé la représentante. 

Elle a également déclaré que son pays reste en faveur d’un volet politique pour le règlement du conflit.  « Mais force est de constater que les houthistes ont clairement montré au monde leur refus de tenir leurs promesses et de s’engager dans un processus politique. »  La représentante a appelé une fois de plus la communauté internationale à mettre un terme aux activités des houthistes, afin d’orienter le Yémen vers une ère de paix. 

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) s’est dite préoccupée par la détérioration d’une situation sécuritaire qui a plongé les provinces de Mareb et Chaboua dans un conflit armé et qui continue d’avoir un impact négatif sur la situation économique et humanitaire de tout le Yémen.  Toutes les parties doivent faire de la protection des personnes et des infrastructures civiles une priorité et respecter les principes de proportionnalité, de distinction et de précaution, conformément aux normes du droit international humanitaire, a-t-elle tonné.  Elle a appelé les parties à s’engager immédiatement en faveur d’un cessez-le-feu national et d’un processus politique pour trouver une solution durable au conflit.  Elle a appuyé les efforts de l’Envoyé spécial visant à développer un cadre pour un processus politique inclusif de concert avec les parties et d’autres acteurs.  Mme Oppong-Ntiri a dit attendre des mesures concrètes et a précisé qu’en insistant sur un processus inclusif, elle fait sien l’appel à la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects des négociations politiques.  Les femmes yéménites doivent faire partie de la solution, a martelé la représentante.

Elle s’est indignée qu’alors que 80% de la population dépend de l’aide et que le risque de famine pointe à l’horizon, les belligérants multiplient les obstacles bureaucratiques aux opérations humanitaires.  Elle a salué la Conférence des donateurs pour le Yémen convoquée par la Suisse et la Suède au mois de mars, pour lever une somme de 3,9 milliards de dollars.  S’agissant de la situation économique, elle a appelé les parties à tenir sans plus tarder leurs engagements, en vertu des accords de Stockholm.  Sans l’ouverture des ports de Sanaa et de Hodeïda aux importations commerciales et à l’aide humanitaire, l’économie du Yémen poursuivra sa chute et la famine ne pourra être évitée, a prévenu la représentante.

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a dit condamner « fermement » les attaques répétées visant des civils et des infrastructures civiles au Yémen, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, d’autant qu’elles violent le principe fondamental du droit international humanitaire.  Pour cette raison, la délégation a demandé au Conseil de sécurité de prendre des mesures « pertinentes » afin de tenir tous les auteurs responsables de leurs actes.  Elle a ensuite jugé « évident » qu’il ne peut y avoir de solution militaire à la crise au Yémen, tout recours au terrorisme ou à la violence pour faire avancer des intérêts politiques ou idéologiques devant être condamné.  Le moment est au contraire venu pour toutes les parties de reconsidérer leur « ligne dure » et de faire les compromis nécessaires pour sortir de l’impasse actuelle.  Elles doivent donc convenir d’un cessez-le-feu et travailler « intentionnellement » vers une solution politique négociée, a-t-elle suggéré, avant d’exprimer son soutien aux efforts de l’Envoyé spécial pour élaborer un cadre politique pour une sortie de crise.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) s’est dite choquée de constater que le mois de janvier 2022 marque le mois le plus meurtrier jamais enregistré pour les civils au Yémen dans ce conflit sanglant.  « On estime que plus de 650 civils ont perdu la vie ou ont été blessés au cours du seul mois », a-t-elle précisé avant de noter que le peuple yéménite, de Mareb à Taëz, de Chaboua à Hodeïda, continue de payer un prix épouvantable tandis que les parties belligérantes sèment le chaos dans leur pays.  Dans ce contexte, elle a réitéré la condamnation du Secrétaire général et partagé sa profonde préoccupation face aux frappes aériennes de la coalition à travers le pays ces dernières semaines, y compris celles de Saada, qui ont frappé un centre de détention où des migrants étaient détenus - le pire incident de victimes civiles au Yémen en trois ans.  « Le message que nous avons relayé maintes et maintes fois au sein de ce Conseil est toujours d’actualité: il ne peut y avoir de solution militaire à ce conflit », a dit la représentante de l’Irlande.  C’est pourquoi, elle a appelé à une désescalade immédiate de la violence et a appelé toutes les parties à s’engager de bonne foi avec l’Envoyé spécial en faveur d’une solution politiquement négociée et inclusive, avec la participation pleine, égale et significative de diverses femmes, ainsi que la participation des jeunes et la société civile de tous horizons politiques.

Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a appuyé le renouvellement du mandat du Comité et du Groupe d’experts à la fin de ce mois.  Elle s’est dite vivement préoccupée par la grave escalade militaire au Yémen, ainsi que par la poursuite des attaques transfrontalières, notamment celles visant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.  La représentante a appelé les parties à faire montre de la plus grande retenue, avant de qualifier de « choquantes » les souffrances infligées aux civils.  « Il est déplorable que de récentes attaques aient frappé des infrastructures civiles », a tonné la déléguée, en demandant aux parties de respecter le droit international humanitaire.  Elle s’est dite alarmée par les violations des droits humains, avant d’exhorter les parties à garantir la sécurité du personnel onusien.  Il est évident qu’il ne peut y avoir de solution militaire au Yémen, a tranché la représentante.  « Il ne s’agit pas d’un exercice rhétorique mais de la leçon que nous avons acquise d’expérience des autres conflits dans le monde. »  Enfin, rappelant l’urgence d’une aide humanitaire au Yémen, Mme Heimerback a salué le projet de l’ONU de convoquer une conférence des donateurs le mois prochain à Genève.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a jugé préoccupante la situation au Yémen, en particulier l’escalade des hostilités dans les provinces de Mareb et Chaboua, ainsi que la prise pour cible de civils, tant au Yémen qu’au-delà de ses frontières, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis.  La Fédération de Russie estime notamment que les tentatives de déplacer les hostilités du Yémen vers les pays voisins pourraient entraîner une nouvelle escalade de la violence.  Inquiète de cette « menace réelle pour la sécurité régionale », le représentant a demandé instamment aux parties au conflit de respecter strictement le droit international humanitaire.  La Fédération de Russie a dit appuyer les activités de médiation de l’Envoyé spécial, espérant qu’il serait bientôt en mesure de formuler des propositions concrètes pour une feuille de route en vue d’un règlement fondé sur la prise en compte des opinions de tous les éléments de la société yéménite et des représentants de toutes les confessions, forces politiques et régions du pays.  Il a notamment appuyé le nouveau cadre de consultation proposé par l’Envoyé spécial.

M. Polyanskiy a jugé la situation socioéconomique et humanitaire du Yémen « particulièrement préoccupante » et cela, sur l’ensemble du territoire, « quel que soit son contrôle ».  Aucun des districts du pays ne peut être considéré comme sûr en termes d’alimentation durable et d’approvisionnement médical, a ajouté le représentant, qui a rappelé à toutes les parties la nécessité d’un accès humanitaire sans entrave et demandé la levée du blocus naval, terrestre et aérien du pays.  Le représentant, qui s’est dit préoccupé par les informations faisant état de l’enlèvement de cinq membres du personnel des Nations Unies près d’Aden, a rappelé la dimension régionale du conflit, en particulier le problème de la sécurité maritime.  Il a également rappelé la résolution 2598 du Conseil de sécurité et d’autres initiatives, « y compris le concept russe de sécurité collective », visant à stabiliser la situation dans toute la région du golfe Persique. 

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a particulièrement fustigé les conséquences de l’ingérence iranienne qui permet aux houthistes de continuer à déstabiliser le Yémen et toute la région, en violant les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a évoqué des rapports internationaux qui ont prouvé que le régime iranien continue de fournir des armes aux miliciens, ce qui a des conséquences également sur la sécurité maritime internationale.  Il a rappelé que l’utilisation par « la milice houthiste » de missiles et de drones pour attaquer les civils et les installations civiles du Royaume d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis constitue une grave violation du droit international et du droit international humanitaire. 

Il a exhorté la communauté internationale à condamner avec la plus grande fermeté les actes terroristes commis par les houthistes qui menacent la paix et la stabilité régionales.  Il a appelé le Conseil à assumer ses responsabilités et à prendre une position décisive pour arrêter les attaques.  Il l’a exhorté à entreprendre des sanctions contre les houthistes arguant qu’aucune condamnation n’a jusqu’ici dissuadé les milices houthistes de poursuivre leur guerre et leurs attaques terroristes.  Il a accusé les miliciens houthistes d’être responsables de la grave situation humanitaire qui frappe la population yéménite.

Le représentant du Yémen a remercié les donateurs internationaux qui soutiennent un mécanisme de décaissement de fonds qui aide la Banque centrale du Yémen à maintenir la valeur de la monnaie nationale et à limiter les souffrances de la population.  Il a appelé à ne pas attendre la fin de la guerre pour régler les questions humanitaires et aider au relèvement économique.  « Le Gouvernement yéménite attend également avec impatience la tenue d’une conférence des donateurs sur le Yémen en mars prochain », a dit le représentant avant d’appeler la communauté internationale à maintenir le Yémen en tête de liste de ses priorités.

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