ITALIE
 

Allocution

de

le Sénateur Alfredo Mantica 
Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangeres

Conférence internationale sur le financement du développement 

Monterrey, Mexique
18-22 mars 2002



Les objectifs de la «Déclaration du Millénaire», à réaliser d'ici 2015, constituent la plate-forme de l'engagement de la communauté internationale en faveur du développement.

Le ralentissement de la croissance économique mondiale enregistré en 2001, ainsi que l'impact des événements tragiques du 11 septembre, ont eu des répercussions négatives sur la poursuite de ces objectifs. Il s'agit d'identifier des formes novatrices et plus efficaces de mobilisation des ressources, en vue de faire face à la situation des pays les plus pauvres, et notamment de certaines régions telles que l'Afrique sub-saharienne. En même temps, nous réitérons le lien étroit entre la paix, la démocratie et la lutte contre la pauvreté. L'Italie associe l'action diplomatique et de maintien de la paix à celle de coopération au développement: c'est dans ce droit fil que s'inscrit la proposition d'un «Plan Marshall» pour la Palestine.

Le Sommet du G8 de Gênes a souligné l'importance d'une stratégie intégrée de la communauté internationale pour stimuler une croissance économique plus solide et éliminer la pauvreté dans les Pays en Voie de Développement (PVD). A Gênes, nous avons indiqué la voie à suivre pour aboutir à un tel résultat : commerce, investissements étrangers et soutien au secteurs sociaux - santé, éducation, sécurité alimentaire - voilà les éléments fondamentaux d'une stratégie, dans la perspective d'une nouvelle forme de partenariat. Le soutien donné à l'initiative « New partnership for African Development » (NePAD), qui a reçu une forte impulsion à Gênes par le lancement d'un Plan d'action pour l'Afrique, est un exemple de partenariat qui voit l'Italie au premier rang.

Ici à Monterrey, chaque sujet institutionnel ou privé est appelé à définir son engagement dans le cadre d'une vision commune. Il faut tout d'abord que les pays donateurs augmentent l'Aide Publique au Développement. La Banque Mondiale a calculé qu'il faudrait redoubler le niveau actuel de l'Aide mondiale pour atteindre les objectifs du Millénaire. Le gouvernement italien, conformément aux décisions des Conseils Européens de Goteborg et de Laeken, entend poursuivre l'objectif de 0,7% du Produit Interiéur Brut (PIB), selon le parcours d'augmentation progressive de l'aide agréé au Conseil Européen de Barcelone, tel qu'illustré par le Président Aznar au nom de l'Union Européenne.

Dans la même logique, nous devons travailler pour promouvoir la croissance du secteur privé. La coopération italienne peut compter sur une expérience consolidée pour soutenir les petites et moyennes entreprises dans les pays en voie de développement. Dans les zones rurales, la diffusion des schémas de micro-crédit acquiert une importance fondamentale en vue d'encourager l'émergence de l'économie informelle. Un secteur privé solide est essentiel pour stimuler un développement durable et il représente un facteur déterminant pour permettre de profiter pleinement des opportunités du processus d'internationalisation de la production et des services. Dans ce cadre nous soutenons l'hypothèse d'entamer des négociations pour créer un " framework" multilatéral, en vue de favoriser les investissements étrangers dans les pays en développement.

Pour ce qui est de l'annulation de la dette, le Gouvernement italien estime qu'on puisse faire de mieux et de plus. Il faut que les pays créditeurs, aussi bien que les pays débiteurs, accomplissent tous les efforts nécessaires en vue de réaliser les objectifs fixés par l'Initiative Renforcée pour les Pays les plus Pauvres et les plus Endettés. Les pays débiteurs qui connaissent une situation de conflit doivent parvenir au règlement pacifique des controverses en cours; ceux qui n'ont toujours pas atteint le "decision point" doivent rapidement définir des politiques efficaces et durables, améliorer la gouvernance, renforcer les initiatives liées à la productivité et à la croissance et élaborer - de concert avec la société civile - le Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP). Les pays créditeurs doivent, par conséquent, maintenir les engagements pris en matière d'annulation de la dette. A cet égard, l'Italie a adopté des normes concernant les pays les plus pauvres et les plus endettés lui permettant d'aller au-delà des accords conclus au niveau multilatéral et d'annuler l'ensemble de ses crédits. L'Italie peut en outre souscrire des accords de conversion de la dette relative à des crédits d'aide en des programmes ayant un impact social et environnemental. Nous demandons donc à tous les pays créditeurs de faire le maximum d'efforts au niveau bilatéral afin de réaliser pleinement l'objectif de libérer une fois pour toutes ces pays du fardeau de la dette.

Le Gouvernement italien poursuit aussi des formes nouvelles de mobilisation des ressources pour augmenter les flux de l'aide et, en même temps, pour affermir le soutien de l'opinion publique à la solidarité internationale. J'aimerais rappeler, à cet égard, la proposition du Ministre italien de l'Economie d'un mécanisme novateur, appelé "de-tax", qui consiste à affecter des ressources au financement d'initiatives étiques de soutien à des projets ou programmes de développement. Le système de de-tax est basé sur la libre décision des consommateurs et des circuits commerciaux de destiner 1 % de la valeur des achats à des projets de développement, alors que l'Etat s'engage à exempter cette contribution de l'imposition directe et indirecte. L'élément de nouveauté d'un tel mécanisme est représenté par le fait qu'il implique le secteur privé sur une base tout à fait volontaire. Contrairement aux autres formes d'imposition internationales qui ont été proposées, la de-tax ne demande aucune approche multilatérale, puisqu'elle peut en effet être introduite individuellement par tout pays qui le souhaite

Parmi les formules novatrices de financement au développement figurent aussi les initiatives de partenariat public-privé, telles que le Fonds Global pour la lutte contre le SIDA, le paludisme et la tuberculose, approuvé au Sommet de Gênes, dont l'Italie est l'un des principaux donateurs. Le Fonds, qui a été constitué très rapidement, adoptera les premières interventions à partir du mois d'avril. Pour ce qui est du SIDA, qui menace la survie de plusieurs dizaines de millions d'êtres humains et la prospérité de pays entiers, l'Italie est parmi les pays de la ligne de front qui favorisent le soutien des solutions novatrices pour la prévention et le traitement afin de permettre l'accès progressif à toutes les personnes qui sont dans le besoin.

L'innovation technologique est appelée à jouer un rôle clé. Par le biais d'initiatives appropriées, il est possible non seulement de réduire le fossé numérique, qui risque autrement d'exclure du progrès les deux tiers de l'humanité, mais également de profiter des potentialités qu'offre le "E-government". Voilà pourquoi l'Italie, en collaboration avec les Nations Unies, va organiser à Palerme, les 10 e 11 avril, une Conférence internationale pour promouvoir l'utilisation des technologies informatiques au bénéfice de l'efficience et de la transparence des Administrations des pays en voie de développement et, en général, pour renforcer les structures participatives et démocratiques. Nous sommes en train de travailler avec cinq pays-pilote pour élaborer un modèle numérique de fonctions et de services publics qui pourra, avec les ajustements nécessaires mis au point de concert avec les bénéficiaires, être progressivement adopté par l'ensemble des pays en voie de développement. Le projet italien sera présenté au prochain Sommet du G8 au Canada.

En matière d' "architecture" institutionnelle internationale, l'Italie partage la position européenne selon laquelle il n'est pas nécessaire de créer de nouvelles enceintes, puisque celles dont nous disposons actuellement ont toutes les compétences requises. Il s'agit de renforcer la coopération entre l'ECOSOC, les Institutions financières internationales, l'OMC, l'OCDE, en poursuivant parallèlement le processus de renforcement des banques multilatérales de développement, et notamment la coordination entre la Banque Mondiale et les Banques régionales, les possibilités de co-financement avec le secteur privé et l'utilisation des ressources concessionnaires.

Afin de soutenir le développement des pays les plus pauvres, il ne suffit pas d'augmenter le volume des ressources, mais il faut aussi élever les niveaux de qualité et d'efficacité de l'aide. Sans le respect des droits de l'homme, l'Etat de droit et la bonne gouvernance, les objectifs du Millénium ne pourront être réalisés. Il s'agit de principes universels et non pas d'une approche euro-centrique. Il appartient aux gouvernements des pays en développement de créer un contexte économique et institutionnel à même d'encourager la croissance, l'utilisation efficace de l'aide et susceptible d'attirer les investissements privés. D'après une étude récente de la Banque Mondiale, les pays qui appliquent des politiques appropriées enregistrent un taux de croissance des investissements étrangers environ dix fois plus élevé par rapport à ceux qui adoptent des politiques médiocres. D'ailleurs, la démocratie est le meilleur outil de prévention des conflits: d'après des estimations de centres internationaux de recherche, 90% environ des conflits actuels ont lieu à l'intérieur des Etats et en l'absence de structures démocratiques. A l'heure actuelle, sur quarante-neuf Pays Moins Avancés, vingt connaissent des situations de conflit.

Le document «Monterrey consensus», auquel nous donnons toute notre adhésion, s'inscrit dans l'optique d'un nouveau partenariat entre les pays industrialisés, les pays en développement, les Agences de l'ONU, les Institutions financières internationales, le secteur privé et la société civile. Il vise au renforcement de la cohérence des politiques qui influencent le développement des Pays concernés. L'Aide Publique au Développement est de plus en plus un élément catalyseur en termes qualitatifs plutôt que quantitatifs, puisqu'elle représente désormais environ 20-25% du total des flux nets. Les politiques qui réglementent le reste de ces flux ont donc une importance capitale dans le cadre d'une mondialisation qui puisse bénéficier l'ensemble des pays. Voilà pourquoi nous devons concentrer davantage notre action dans des domaines tels que la réforme du secteur financier et bancaire des pays en voie de développement, le processus d'annulation de la dette, l'ouverture des marchés. A cet égard, le nouveau round commercial lancé par la Conférence de Doha devra faciliter des négociations étendues et équilibrées, en vue d'une croissante libéralisation des marchés, avec des ouvertures concrètes vers les pays en développement.

Les défis auxquels nous sommes confrontés exigent une coalition de sujets, qui partagent le même engagement pour un monde plus libre, plus juste et plus riche. Les conclusions de Monterrey représentent aussi la base pour le succès des trois prochains rendez-vous internationaux dans lesquels le Gouvernement et le Parlement italien sont fortement engagés: la Session spéciale de l'Assemblée Générale des Nations Unies sur l'enfance en mai, le Sommet de Rome sur l'alimentation en juin et le Sommet de Johannesburg sur le développement durable en août-septembre.

L'Italie, avec les partenaires de l'Union Européenne, est prête à rendre disponibles les ressources financières et humaines de son propre "système-pays" en vue de la mise en oeuvre des conclusions de cette Conférence. Afin d'accélérer la marche vers un développement équitable, Monterrey lance trois forts messages: renforcer l'engagement, accroître la cohérence



Déclarations faites durant la Conférence
Nouvelles de la Conférence