Tambours et esclavage
En Afrique sub-saharienne, la plupart des gens ne sont généralement pas enclins à séparer le rythme, les dimensions spirituelles et l'ordre de l'univers dans des compartiments. Les sociétés traditionnelles africaines considèrent que le tambour a un esprit et un caractère clairement observables. On croit, dans de nombreuses communautés africaines, que la voix des grands ancêtres se cache dans le bois des arbres, et que les hommes et les femmes peuvent entrer en contact avec eux quand ils en ont besoin. L'histoire africaine se transmet par tradition orale.
Partout, les esclaves ont lutté pour garder leur héritage et la pratique du tambour vivants. Les tambours du Cameroun représentent de nombreux types de tambours africains. Du fait de ses nombreux peuples et de sa localisation géographique unique : sur la côte, au cœur de l'Afrique mais aussi aux portes du Sahara, le Cameroun est parfois perçu comme l'Afrique en miniature. Ces tambours sont aussi le reflet de perspectives spirituelles, sociales, ethno-anthropologiques et artistiques. La signification historique et culturelle des tambours au regard de la traite transatlantique des esclaves est remarquable.
Pendant le Passage, on encourageait les esclaves à battre le tambour. Mais à l'arrivée en Amérique, la pratique du tambour leur était interdite, pour la plupart d'entre eux. Néanmoins, le tambour a continué son voyage, et a accompagné les esclaves noirs partout où ils allaient, influençant ou créant de nouveaux genres artistiques et musicaux, tels que la forme « question-réponse » importée en Amérique et dans le monde pour la première fois par les esclaves et aujourd'hui répandu dans le blues, le jazz, le rock and roll, et le hip-hop. Mais l'influence des tambours est allée au-delà de la musique. Les Tambours ont continué à galvaniser l'esprit guerrier des esclaves noirs comme au cours de la Révolte de Stono en Caroline du Sud ou le soulèvement de la Nouvelle-Orléans. Partout dans les Amériques, les esclaves africains célébraient leur liberté retrouvée en battant les tambours. C'est arrivé le 12 avril 1865 quand les Confédérés ont quitté Mobile et qu'un groupe de jeunes africains décidèrent de faire quelque chose « d'africain » pour fêter leur retour à la liberté. Ils ont sculpté un tambour, l'ont frappé et sa pulsation puissante les a ramenés en Afrique. L'un d'entre eux, Cudjo Lewis, a dit : “After dey free us, you understand me, we so glad, we makee de drum and beat it lak in de Affica soil.” Cudjo Lewis faisait partie des derniers Africains à avoir été acheminés aux États-Unis par le commerce transatlantique des esclaves. Comme le symbolisait leur tambour, la liberté était pour eux directement liée à l'Afrique.
L'exposition montre l'importance unique qu'a le tambour pour tous, constituant aujourd'hui encore un lien fort entre les anciens esclaves d'origine africaine et l'Afrique, malgré des siècles d'esclavage.
Des pièces très spéciales et très rares, dont des tambours royales font partie de l'exposition, pour laquelle DPI a collaboré avec le Centre Schomburg de recherche en culture noire et le Centre culturel caribéen de New York. En plus du matériel académique fourni par le Cameroun, les deux institutions ont contribué à l'exposition par des textes et des recherches.