Chronique | Logo

L'impact de la guerre sur l'environnement


Par Pekka Haavisto
Président du PNUE/Groupe d'étude
de l'habitat dans les Balkans

Pour la première fois, les Nations Unies ont entrepris d'étudier l'état de l'environnement après une guerre. L'étude environnementale de la région des Balkans fait suite à une recommandation du Secrétaire général adjoint, Sergio Vieira de Mello, après sa mission au Kosovo, selon laquelle il fallait faire de toute urgence une évaluation détaillée des conséquences de la guerre sur l'environnement. Les informations recueillies indiquent qu'il y a de graves problèmes et qu'un grand nombre de personnes sont touchées par les conséquences du conflit au Kosovo.

En mai 1999, le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et le Centre des Nations Unies pour les établissements humains (CNUEH/Habitat) ont conjointement créé le Groupe d'étude dans les Balkans. En qualité d'ancien ministre de l'Environnement et du développement en Finlande, j'ai été invité à présider les travaux du groupe d'étude dans les Balkans envoyé par le Bureau régional européen du PNUE à Genève.

En juillet, notre première équipe d'experts a enquêté sur les zones environnementales "sensibles" comprenant les sites industriels à Bor, Kragujevac, Nis, Novi Sad, Prahovo, Pancevo et Pristina. Nous avons prélevé des échantillons et les avons analysés dans nos laboratoires itinérants ainsi que dans d'autres institutions scientifiques de bonne réputation.

Notre deuxième équipe internationale composée de neuf scientifiques venant de huit pays, des représentants du Fonds mondial pour la nature et de la Croix verte ont évalué l'état du Danube. Nous avons établi une coopération étroite avec la Commission internationale sur la protection du Danube et recueilli des échantillons d'eau et de sédiment qui seront examinés par des laboratoires indépendants dans divers pays. Nous avons visité quatre différents sites le long du Danube dont la Porte de fer I, réservoir à la frontière de la Serbie, la Roumanie et la Bulgarie.

Un autre groupe d'experts a évalué les dommages sur des sites choisis offrant une diversité biologique, tels que les parcs nationaux à Fruska Gora, les montagnes de Kopaonik, Zlatibor et le lac Skadar. Notre groupe d'experts en uranium appauvri était composé de scientifiques réputés appartenant entre autres à l'Organisation mondiale de la santé, l'Agence internationale de l'énergie atomique et le Fonds mondiale pour la nature. Le groupe a examiné les risques pour la santé ainsi que les dommages et la pollution de la terre et de l'eau. L'évaluation préliminaire a permis de déterminer les actions supplémentaires qu'il fallait entreprendre.

Nous avons fait une distinction entre la pollution existant précédemment et celle causée par les bombardements. Dans certains sites industriels, tels que la raffinerie de pétrole à Novi Sad, les usines à Pancevo, l'usine de fabrication de voitures à Kragujevac ou la ville minière de Bor, le niveau de pollution de l'environnement avant les conflits était alarmant.

Une évaluation indépendante de l'environnement était certes nécessaire depuis bien longtemps. Les gens ont aussi souffert de différentes maladies liées à la pollution. Du point de vue de l'environnement, que la pollution soit récente ou non importe peu, mais pour les questions liées à la guerre, nous établissons une distinction.

Je suis préoccupé par ces zones problématiques -- le taux de mercure à Pancevo, les problèmes de la dioxine à Pancevo et à Kragujac -- ainsi que les risques causés par la consommation d'eau dans les villes industrielles comme à Novi Sad. Le manque d'électricité en Serbie qui, d'après nos études, entraîne une augmentation des émissions de la ville minière Bor dans le Danube, est aussi un autre sujet inquiétant.

Ces sites n'ont pas encore été nettoyés et les personnes qui y vivent sont en danger. Par exemple, à Pancevo, nous avons trouvé de l'amiante disséminé sur le sol malgré sa toxicité. Ces matériaux dangereux doivent être retirés et les zones décontaminées avant le début de la reconstruction, car cela pourrait entraîner des conséquences néfastes sur la santé.

Le Groupe d'étude dans les Balkans a non seulement évalué les conséquences de la guerre sur l'environnement mais a aussi examiné les questions des établissements humains. Notre équipe spéciale travaille depuis juin à Pristina, dans le cadre de la Mission des Nations Unies au Kosovo, où de nombreux établissements humains ont été détruits et d'autres gravement endommagés. Nos experts ont proposé à la Mission un projet d'impact rapide afin de dresser une liste des projets d'amélioration au niveau du quartier et d'aider les entrepreneurs à réaliser les réparations au plus vite. Une autre proposition de projet traite de la régularisation des droits concernant l'habitation et la propriété au Kosovo.

J'espère que la communauté internationale des dona-teurs aidera à la décontamination des zones particulièrement touchées qui menacent la santé, risquent d'affecter les ressources en eau potable et augmentent les risques de pollution transfrontière le long du Danube. La campagne immédiate contre la pollution devrait faire partie de l'assistance humanitaire à la région. On estime à 17 millions de dollars les coûts des opérations de nettoyage.

Finalement, le conflit dans les Balkans soulève une question intéressante sur la guerre moderne qui prend pour cible des usines industrielles avec le danger d'engendrer une forte pollution à proximité des grandes villes. La communauté internationale discute et détermine si les règles de la guerre moderne prennent suffisamment en compte tous les risques sur la santé et l'environnement.

Le rapport final, les rapports détaillés de la mission, les photos et les cartes sont disponibles sur le site web du PNUE (http://www.grid.unep.ch/btf/).



Vos réactions


Accueil
Dans ce numéro
Archives
Abonnez-vous
Vos réactions


Accueil || Dans ce numéro || Archives || Abonnez-vous || Vos réactions

Créez un signet pour le site de la Chronique: http://www.un.org/french/pubs/chronique
Et vous pouvez adresser un courrier électronique: unchronicle@un.org
Site de la Chronique en anglais: http://www.un.org/Pubs/chronicle


Chronique ONU: Copyright © 1997-2000 Nations Unies.
Tous droits réservés pour tous pays.
Les articles de ce numéro peuvent être reproduits dans un but éducatif.
Cependant aucune partie ne peut en être reproduite dans un but commercial
sans l'autorisation expresse par écrit du Secrétaire du Conseil des publications,
Bureau L-382C, Nations Unies, New York, NY 10017, Etats-Unis d'Amérique.