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Mesures concrètes de désarmement
et le Groupe des Etats intéressés


Par l'Ambassadeur Dieter Kastrup
Représentant permanent de l'Allemagne auprès des Nations Unies

Il y a exactement un an, j'ai eu l'occasion de présenter dans le Numéro 1, 1999 de Chronique ONU la première évaluation de l'initiative allemande concernant les mesures concrètes du désarmement et la création du Groupe des Etats intéressés (GEI). Après deux ans d'existence, les résultats de l'initiative sont encore plus encourageants. Le Groupe a réalisé des progrès impressionnants ; il a obtenu le soutien de plus en plus important des Etats Membres et de la communauté internationale ; et il a acquis une expérience précieuse des mesures concrètes de désarmement en Afrique, Amérique latine et Europe (pas encore en Asie). Après tout, c'est ce que nous avions à l'esprit lorsque nous avons présenté notre première résolution sur la consolidation de la paix il y a quatre ans. Pour résumer ces expériences et réfléchir aux situations dans lesquelles le travail du Groupe peut faire une différence, un document de référence est en cours d'élaboration et devrait être prêt vers la fin du printemps.

La résolution 51/45N de 1996 intitulée "Consolidation de la paix par des mesures concrètes de désarmement" a attiré l'attention sur le fait que dans la plupart des zones de conflit et après les conflits, les questions de contrôle des armes de petit calibre et des armes légères, le déminage, la démobilisation et la réinsertion des anciens combattants revêtent une importance croissante dans la recherche d'un règlement efficace du conflit et le relèvement après le conflit. Dans ces situations complexes, il est nécessaire d'associer certains éléments différents et qui souvent se chevauchent : désarmement, consolidation de la paix, maintien de la paix, instauration de la paix, mesures de confiance, sécurité et développement après le conflit. On ne peut réussir si l'on n'adopte pas une démarche générale et intégrée. Nous fondant sur ce concept, nous souhaitions trouver les moyens d'offrir une assistance concrète à ceux qui vivent et souffrent dans des situations après les conflits, en écartant les discussions théoriques et en nous concentrant sur des contributions concrètes visant à prévenir que de nouvelles crises éclatent, et à contribuer à la mise en place d'un environnement nouveau de paix durable.

Depuis sa création à New York, le 4 mars 1998, sous la présidence allemande, le GEI a tenté de renforcer la coopération internationale dans le domaine de la consolidation de la paix, en particulier lorsque cette coopération est lancée par les Etats concernés. Le Groupe a toujours été ouvert à tous les Etats intéressés et il est donc devenu, en coopération étroite avec le Département des affaires du désarmement des Nations Unies, un centre de liaison où les délégations peuvent se rencontrer pour échanger des informations concernant les différentes activités dans le domaine du désarmement concret. Les autres pays peuvent en tirer parti et la coordination en est améliorée.

Le Groupe essaie aussi de soutenir les efforts des pays concernés en parrainant leurs projets en matière de désarmement. Comparés aux activités des organes de l'ONU, quelquefois difficiles à mesurer, les résultats du Groupe sont évidents :

  • réunions régulières du GEI (tous les deux mois) ;
  • augmentation constante du nombre des coauteurs de la résolution sur le sujet (de 42 à 74 pour la résolution 54/54H de 1999) ;
  • quatre projets concrets (une expérience pleine d'enseignements) en Afrique centrale, Amérique centrale et en Albanie, et il y en aura probablement de nouveaux prochainement au Niger et dans d'autres pays ;
  • préparation de nouveaux documents pertinents sur la consolidation de la paix et questions connexes par divers organismes des Nations Unies ou associés à l'ONU, notamment : Les principes directeurs de la Conférence du désarmement de l'ONU en date du 28 avril 1999 (rapport du Groupe de travail III sur les "Principes directeurs concernant le contrôle et la limitation des armes classiques, en insistant particulièrement sur la consolidation de la paix") ; rapport final du Comité spécial des opérations de maintien de la paix daté d'avril 1999, qui comprenait la consolidation de la paix après les conflits dans des opérations de maintien de la paix multidimensionelles ; étude des conclusions du Département des Opérations de maintien de la paix de juillet 1999 (principes et grandes lignes du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion d'anciens combattants dans un contexte de maintien de la paix); rapport final du Groupe d'experts des armes de petit calibre du 3 août 1999 (groupe d'experts gouvernementaux) ; publication des conclusions de l'Atelier GEI-Guatemala sur la collecte des armes et l'intégration des anciens combattants à la société civile (18-20 novembre 1998) ; Guide pratique sur les "rencontres sur le terrain avec des armes légères et de petit calibre" (BICC, Monterey Institute of International Studies, Program on Security and Development, SAND), qui sera bientôt terminé ; le rapport du Secrétaire général sur le "rôle des forces de maintien de la paix sur le désarmement, la démobilisation et la réintégration" (S/2000/101), publié le 11 février 2000 ; réunions publiques du Conseil de sécurité, notamment les déclarations de son président sur les questions connexes, dont par exemple la consolidation de la paix après les conflits, la protection des civils dans les conflits armés, le désarmement, la démobilisation et la réinsertion, la situation des enfants et des civils dans les conflits armés, les armes de petit calibre, le rôle du Conseil de sécurité dans la prévention des conflits et la protection du personnel de l'ONU et associé ainsi que du personnel humanitaire dans les zones de conflit.
Pour son premier projet, le GEI a adopté et co-financé un atelier de "Formation des formateurs" à Yaoundé (Cameroun), du 27 au 31 juillet 1998, à l'intention des experts militaires d'Afrique centrale.

Un deuxième projet, présenté par le Guatemala, vise à produire une étude de politique fondée sur les leçons tirées de la collecte des armes, de la démobilisation et de la réinsertion des combattants dans les sociétés civiles d'Amérique centrale afin d'en faire profiter d'autres pays. Pour atteindre cet objectif, un atelier s'est tenu du 18 au 20 novembre 1998 à Guatemala City. Dans les deux cas, le Groupe dans son ensemble a pu recueillir les fonds et le soutien supplémentaire nécessaires directement auprès des membres du GEI et de verser cette aide financière sur un fonds d'affectation des Nations Unies. L'étude a depuis été publiée en anglais et en espagnol et elle peut être utilisée comme document de référence dans des situations de crise similaires dans d'autres régions.

Le troisième projet a été présenté par la délégation de l'Albanie. Il demande l'aide de la communauté internationale pour bâtir un programme dont le but est d'inciter les nombreux civils albanais qui détiennent des armes à les rendre. Le Secrétaire général adjoint des Nations Unies Jayantha Dhanapala et un groupe d'experts ont mené une première mission d'enquête dans le pays en mai 1998, à la demande du gouvernement albanais. Le rapport de la mission recommandait le développement et la mise en œuvre d'un projet pilote dans le district de Gramsh, dans le cadre duquel seraient organisées des activités de développement communautaires rémunératrices et employant une main d'œuvre importante en échange des armes remises volontairement. C'est ainsi qu'est né le "projet-pilote de Gramsh".

La spécificité unique de ce projet tenait au fait qu'il accordait une importance égale au désarmement et au développement. En Albanie, le nombre d'armes par habitant est exceptionnellement élevé. Ces armes freinent les progrès économiques et politiques, mettent en danger la vie de chaque Albanais, font augmenter les taux de criminalité et déstabilisent davantage encore une région déjà explosive.

Le projet a été couronné de succès. Il a contribué à améliorer la sécurité et la prospérité de l'avenir des 9 communes et 98 villages du district de Gramsh. Près de 15 000 armes et plus de 100 tonnes de munitions ont été recueillies. L'infrastructure pour le développement provenant de ces incitations, telle que la réparation des routes locales, la construction de ponts et l'installation de lignes de téléphone et de lignes électriques, facilitées par le Programme des Nations Unies pour le développement, progresse dans presque tous les districts de la province. A la fin de l'année dernière, le projet a même été élargi à deux régions voisines (Peshcopia et Elbasan).

Un quatrième projet est en ce moment à l'étude : la collecte et la destruction d'armes au Niger. Sa première phase comprend la sensibilisation du public, la collecte des armes et des incitations au développement en échange de la remise d'armes détenues illégalement. Une première mission d'enquête, dirigée par le Centre régional pour la paix et le désarmement en Afrique, pourrait être organisée très bientôt.

Le 25 janvier, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a marqué les 1 000 premiers jours de son existence. Au cours de cette période, elle a beaucoup progressé vers son but, un monde exempt d'armes chimiques.
  • Les arsenaux déclarés d'armes chimiques (70 000 tonnes d'armes chimiques, plus de 8 millions de munitions et conteneurs) ont été inspectés par les agents de l'Organisation et sont soumis à un régime de vérification internationale draconien.
  • Trois des quatre pays qui ont déclaré posséder des armes chimiques procèdent actuellement à leur destruction sous la surveillance constante des équipes d'inspection de l'Organisation.
  • Plus d'un million d'armes chimiques et 4 000 tonnes d'agents de guerre chimiques ont été détruites.
  • L'ensemble des 60 usines déclarées de fabrication d'armes chimiques du monde ont été inspectées et scellées. Sur ce nombre, 20 ont été certifiées détruites. La reconversion de 5 autres dans un but pacifique a été approuvée.
  • Pour prévenir la prolifération d'armes chimiques, un régime de verification industrielle draconien a été mis en place. Il prévoit l'inspection des usines qui produisent ou consomment des produits chimiques "à double emploi", c'est-à-dire qui peuvent être utilisés dans un but pacifique mais également pour créer des armes chimiques.
  • Plus de 90 pour cent des 6 milliards d'habitants de la planète habitent dans les 129 pays qui ont déjà ratifié la Convention contre les armes chimiques.
  • L'OIAC est l'élément moteur d'un nombre croissant de projets de coopération internationale concernant l'utilisation de la chimie dans des buts pacifiques.


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