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L'INTERVIEW de Chronique ONU

A l'occasion de l'exposition internationale la plus importante jamais tenue, les Nations Unies se joindront à plus de 200 pays et organisations. L'Expo 2000 se tiendra à Hanovre (Allemagne) du 1er juin au 31 octobre. Le thème s'intitulera "Humanité, nature et technologie" et, dans ce contexte, le pavillon des Nations Unies mettra en relief le thème du millénaire du Secrétaire général, Kofi Annan, "L'ONU est à votre service". M. Annan a nommé Nadine B. Hack Commissaire générale pour les Nations Unies à l'Expo 2000. Présidente de NBH Executive Consulting, une entreprise internationale de gestion d'événements majeurs et de planification stratégique, elle a auparavant assumé les fonctions de Commissaire de New York pour les Nations Unies, du corps consulaire et d'International Business et a travaillé avec de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG). Elle s'entretient avec Russell Taylor de Chronique ONU sur les préparations de l'équipe chargée de l'Expo et sur les attentes.


Expo 2000 : De quoi s'agit-il au juste ?

La première exposition mondiale dont je me souviens vraiment a été l'Exposition de Montréal en 1968. Ce sont essentiellement des expositions mondiales. Une occasion pour les pays et les organisations du monde, mais principalement les pays -- et ceci différencie les expositions universelles des expositions mondiales où ce sont, principalement, les corporations et les entreprises qui sont représentées -- de se faire connaître au monde entier en termes d'opportunités commerciales, touristiques et de promotion. Les Nations Unies participent depuis l'Exposition de 1950 en Haïti, ce qui représente donc un passé de longue date. En raison de l'importance que revêt la présence de l'ONU, les responsables ont toujours placé son pavillon dans une zone centrale.

On arrive à l'Expo 2000 par l'entrée principale, où se trouve l'arrêt du train venant de l'aéroport et de Hanovre. Les visiteurs empruntent un pont pour accéder à la place centrale. Le pavillon national allemand se trouve à gauche et celui de l'ONU à droite, donc au cœur même de l'Exposition. En se basant sur les expositions précédentes, on estime entre 40 et 50 millions le nombre de visiteurs. Lors des premières expositions, l'ONU avait jusqu'à 20 000 visiteurs par jour et, étant donné notre emplacement, nous pensons en accueillir au moins autant. C'est une expérience passionnante.

Lorsque le Secrétaire général m'a appelée pour me demander d'assumer cette responsabilité, je lui ai dit qu'au lieu de considérer cet événement comme un événement à court terme -- l'Expo, cinq mois --, il serait plus judicieux de le "placer dans le contexte plus vaste de toutes les autres activités de la campagne du millénaire des Nations Unies, d'établir un lien avec le thème de l'exposition de cette année : "Humanité, nature et technologie". Et nous l'avons adopté pour le pavillon de l'ONU.

Etant donné ce thème, quel est le message général de l'ONU ?

Le message général est "l'ONU est à votre service". Et nous rattachons ce thème à chaque élément de la présentation. C'est un véritable défi. D'un côté, nous voulons que l'exposition soit intéressante et détaillée, puisqu'il y a des tonnes d'informations à fournir sur l'ensemble du système de l'ONU et son rôle dans le monde, et de l'autre, nous voulons qu'elle soit divertissante et stimulante pour attirer l'attention du visiteur moyen et éviter qu'il ne s'ennuie.

La présentation est structurée de telle sorte que, lorsque vous déambulez dans les diverses parties de l'exposition, elle reste très simple, avec de nombreux supports visuels. Mais, en même temps, nous l'avons élaborée en faisant appel à une imagerie numérique très complexe qui est projetée des plafonds, du sol, des murs. L'équipe qui a créé cet environnement est remarquable. Elle a déjà gagné des prix lors de plusieurs expositions.

Jan Ralph, le directeur technique, est excellent. Et Luis Sardá est l'un des plus grands designers en Europe. Il vient d'être chargé par le roi d'Espagne de l'organisation d'une exposition au Musée national de Madrid sur l'histoire du design en Espagne. C'est un grand "gourou du design". Il s'est entouré d'une équipe d'architectes et de spécialistes de l'audiovisuel, ceux-là même qui ont produit les spots télévisés de 30 secondes durant la mi-temps lors de la Coupe du monde de football. Ils ont accepté de réduire leurs coûts, simplement pour avoir le privilège d'être affiliés au pavillon de l'ONU.

Et ils réunissent différents aspects des arts : technologie numérique, musique... ?

... musique, enregistrements, tout. Nous négocions actuellement avec plusieurs groupes de musique connus, dans l'espoir qu'ils nous céderont leurs droits pour nous permettre d'utiliser leurs enregistrements. Nous parlons avec de nombreux musiciens, réunissant sons environnementaux, différents rythmes afro-cubains, musique du Moyen-Orient et du monde entier. Ce qui est vraiment passionnant, c'est de voir que tout cela fonctionne très bien. Vous pouvez vous promener dans les différentes expositions qui sont structurées à l'image d'un nautile cloisonné : vous pouvez entrer dans une section consacrée à la "nature", une autre à la "technologie" ou une autre à "l'humanité". Les termes en sont très simples et directs : communiquer et personnaliser le thème "L'ONU est à votre service". Donc, au lieu de donner des statistiques qui ennuient vite, et il y en a des centaines de millions pour ceci ou cela, les informations sont très graphiques, individualisées. "Voici une femme enceinte qui doit faire plusieurs kilomètres pour se procurer de l'eau" ou "Steffi Graff, l'ambassadrice itinérante des Nations Unies en Allemagne, disant : "Je travaille comme bénévole pour les Nations Unies. Aimeriez-vous en faire autant ? Vous pouvez vous inscrire ici." Tout au long des expositions, le visiteur est invité à participer activement."

Travaillez-vous avec d'autres parties du système de l'ONU ?

Nous présentons toutes les institutions spécialisées. A l'entrée, il y aura six piliers représentant les organismes principaux de l'ONU, avec une transmission vidéo et des informations simples. Une fois à l'intérieur, tout a été conçu pour que le visiteur continue sa promenade. Il n'y a pas de début. On évolue tout naturellement. Au centre, une zone de sites informatiques interactifs disposés en cercle est éclairée par une splendide lumière provenant d'une verrière de 9 m sur 9. Une fois que les visiteurs ont traversé l'exposition de base, et ce sera la majorité d'entre eux, les plus férus -- les universitaires, étudiants et toute personne intéressée -- peuvent se connecter et explorer chaque organisme par région, par sujet, par domaine et se familiariser avec les travaux qui ont été réalisés. Ils peuvent en savoir plus sur la Convention sur les changements climatiques ou sur la désertification ou bien sur l'UNIFEM (Fonds de développement des Nations Unies pour la femme) et autres programmes consacrés à la femme. Il sera possible de se connecter à tous les principaux sites de l'ONU et de chacune des organisations.

Et après l'exposition ?

L'un des sujets que j'ai abordé dès le début avec le Secrétaire général est le caractère global du thème qui lie l'humanité, la nature et la technologie, ce qui est un développement durable car ces questions sont liées. Pour rester dans cet esprit de durabilité, je me suis demandée pourquoi réunir toutes ses ressources et créer ce merveilleux pavillon qui sera démonté au bout de cinq mois.

A la fin de l'Exposition, l'ensemble du centre interactif situé au milieu du pavillon sera transféré dans le centre des visiteurs du siège de l'ONU à New York pour y être installé en permanence. D'autres parties feront partie d'une exposition permanente qui se tiendra à Bonn. Nous cherchons aussi d'autres endroits pour exposer d'autres parties de l'exposition. Vous voyez, l'ensemble durera plus que cinq mois.

Qui finance cette exposition ?

Les 4,5 millions de deutsche marks ont été donnés par des entreprises privées -- Volkswagen AG, RWE AG, Deutsche Telekom AG et l'Association des banques allemandes du secteur public. L'ONU n'a pas déboursé un centime. Nous sommes actuellement en négociation avec d'autres entreprises. Dans l'idéal, nous pourrions réaliser des choses sensationnelles si nous avions suffisamment de temps pour contacter le plus grand nombre de personnes possible, mais nous devons commencer l'installation de l'exposition à Hanovre en avril, et les portes s'ouvrent le 1er juin. Cela ne laisse pas beaucoup de temps.

Les responsables de l'Expo de Hanovre ont réussi à créer des relations avec les entreprises allemandes et le ministère du Développement économique en Allemagne. Avec les responsables de l'Exposition comme partenaires, nous avons organisé des réunions et obtenu la confirmation des sponsors. Le Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit GmbH (GTZ) finance un grand nombre de pavillons des pays du tiers-monde. (GTZ, appartenant à la République fédérale d'Allemagne, fonctionne comme une entreprise du secteur privé et a pour mission en matière de politique de développement d'apporter des améliorations durables aux conditions de vie des populations des pays partenaires et de protéger les ressources naturelles de base essentielles à la vie.)

Chaque pavillon est doté d'un tableau sur lequel figure la liste des sponsors. Le nom de nos sponsors sera aussi mentionné sur toute la littérature que nous distribuerons pour le pavillon de l'ONU. Ils ont été tout spécialement heureux d'apprendre qu'une partie de l'exposition allait devenir une exposition permanente et arborerait un petit drapeau sur lequel sera indiqué "Faisait partie de l'Expo 2000. Ont aidé à sa réalisation les sponsors suivants..." Tout est donc financé. C'est un cadeau offert à l'ONU qui -- sans aucun frais à sa charge -- pourra se présenter à un grand public. De mon point de vue, c'est une situation idéale pour l'ONU et il n'y a aucune ombre au tableau.


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Les illustrations sont gracieusement offertes par l'artiste de l'Expo 2000, Luis Sardá.











Le rôle de Mme Hack en tant que Commissaire de New York pour les Nations Unies dans la préparation de l'Expo 2000 :

Lorsque l'ancien maire de New York, David Dinkins, m'a demandé d'assumer cette fonction, nous pensions tous deux qu'une telle fonction était dans mes cordes. Je militais depuis longtemps dans les ONG telles que l'Institut mondial de politique, la Ligue internationale des droits de l'homme et d'autres organisations bénéficiant d'un statut consultatif à l'ONU, et j'avais aussi travaillé avec le système de l'ONU. Mais, dès le premier jour, je me suis rendu compte que c'était bien plus qu'une Organisation complexe, à multiples niveaux et aux diverses compétences. Il m'a semblé n'avoir jamais autant fait travailler ma matière grise depuis ma jeunesse. Il m'a fallu absorber une masse d'informations : qui avait pris une décision sur le papier, qui avait réellement pris la décision, ou quel service du Secrétariat et/ou du Comité de l'Assemblée générale et/ou d'autres avaient le pouvoir final de décision. Si je commençais à négocier en toute bonne foi avec une entité, croyant que c'était celle à qui je devais m'adresser, je me rendais compte que six ou sept autres, qui n'avaient pas été invitées à participer aux discussions, allaient le prendre mal.

J'ai donc appris à avoir la vision la plus large possible du rôle de chacun dans les diverses activités et à essayer d'inclure un grand nombre de personnes dans chaque initiative que j'ai lancée. A mon départ, je peux dire que je connaissais tout le monde, du Secrétariat général installé au 38e étage aux électriciens au sous-sol. Et chaque élément était si fascinant.

Mais de mes années de fonction, c'est probablement la bataille pour garder le PNUD et l'UNICEF à New York qui représente mon accomplissement le plus durable. Aux négociations, qui ont duré deux ans et demi, ont participé de nombreux départements de l'ONU, les organisations concernées, et de nombreux organismes fédéraux, d'Etat et de la ville. Les négociations finales ont abouti à un bénéfice net annuel d'un milliard de dollars pour la ville.

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