Travailler ensemble:
La mouche tsé-tsé et la pauvreté rurale
Par Erika Reinhardt, pour la Chronique
LOrganisation de lUnité africaine (OUA) a lancé une nouvelle campagne en Afrique pour lutter contre la mouche tsé-tsé,
porteuse de la maladie du sommeil, qui peut être fatale. Le programme de contrôle est, à lorigine, réalisé dans les vallées de lÉthiopie, la
région de culture du coton située en Afrique de lOuest, et une région en Afrique australe, commençant au delta de lOkavango. En 2001, lOUA a
inauguré au Burkina Faso la Campagne panafricaine déradication de la mouche tsé-tsé et de la trypanozomiase (PATTEC), fondée sur le programme de Zanzibar
(voir encadré), avec le soutien de la FAO, de lOMS et de lAIEA. Le Conseil économique et social des Nations Unies a reconnu que la création de zones libres de mouches
tsé-tsé pourrait contribuer à la réduction de la pauvreté rurale. Sous légide de la PATTEC, le contrôle de la maladie est associé à
une planification du sol afin de promouvoir une utilisation responsable des ressources naturelles dans les zones où les mouches tsé-tsé ont été
éliminées.
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Photo: WHO/TDR/Fisher |
La mouche tsé-tsé a été éliminée de lîle de Zanzibar (République de Tanzanie) en 1997, par
lutilisation de méthodes conventionnelles visant à réduire leur nombre et par le lâcher dans la nature de centaines de milliers de mâles stériles. Cette
percée a été réalisée grâce à la Technique de linsecte stérile (TIS), associée à lapplication dun insecticide
sur le dos du bétail et la pose de pièges imprégnés dinsecticide. Les mouches mâles stériles sont introduites dans les zones infestées dune
région cible. Elles peuvent saccoupler et produisent du sperme, mais les œufs ne sont pas fertilisés. Ces mouches mâles stériles sont produites dans des centres
spéciaux. Après leur naissance, elles sont exposées à des rayons gamma émis par une source de cobalt-60, suffisamment puissants pour inhiber la fertilité du
sperme. Elles sont ensuite lâchées dans la région cible par un avion spécialement équipé. Selon Peter Salema, Directeur adjoint de lOrganisation des
Nations Unies pour lalimentation et de lagriculture établie à Vienne (FAO)/la Division des techniques nucléaires de lAgence internationale de
lénergie atomique (AIEA), la SIT, combinée à dautres méthodes de contrôle, peut établir des zones libres de mouches sans nécessiter un
contrôle supplémentaire. Cette technique a permis de contrôler la mouche méditerranéenne des fruits, la mouche des melons et déradiquer la myase à
callitroga. |
Trente sept pays subafricains sont frappés par ce fléau, dont 32 des 42 pays les plus endettés du monde. La plupart des zones
infestées, où les terres sont fertiles pour lagriculture et lélevage, ne sont pas cultivées, alors que les zones libres de mouches tsé-tsé sont
surexploitées. Sur une population de 260 millions de personnes vivant dans cette région, 60 millions risquent dêtre infectées. Selon lOrganisation mondiale de
la santé, dans certaines parties dAfrique, telles dans la République démocratique du Congo ravagée par la guerre, de nouvelles flambées ont fait plus de
victimes que les autres maladies transmissibles, y compris le VIH/sida. Sur les 4 millions de personnes menacées, seulement 3 millions font lobjet dun dépistage
systématique, « la plupart des personnes infectées - estimées à 80 % - meurent avant même dêtre diagnostiquées », déclare
lOMS.
La mouche tsé-tsé - qui véhicule le parasite de la trypanosome - est responsable de la maladie du sommeil et tue chaque année 3 millions danimaux
délevage, transformant une grande partie des terres fertiles dAfrique en zones inoccupées.
Généralement, moins de 5 % des mouches sont infectées par le parasite, pourtant un pourcentage encore inférieur est considéré comme vecteurs. Elles
deviennent lhôte du parasite après sêtre nourries du sang dun mammifère infecté. Il faut de 12 à 21 jours pour que le parasite se transmette
à un nouvel hôte. Il attaque le sang et le système nerveux, engendrant la maladie du sommeil chez lêtre humain et la trypanozomiase chez lanimal. Limpact
économique de cette maladie est important en raison de la réduction considérable de la main-dœuvre et de la diminution de la productivité qui sensuit
ainsi que de la diminution de 20 à 40 % de la production de bétail. Le ministère pour le développement international du Royaume-Uni a estimé que dans le domaine de
lagriculture, le coût annuel de la maladie sélevait à 4,5 milliards de dollars.
Selon les experts, lélimination de la mouche tsé-tsé permettrait une meilleure répartition du bétail et une réorientation vers des races plus
productives. Même si des recherches sont menées pour promouvoir des races plus résistantes au trypanosome, seules les races indigènes moins productives, qui sont
traitées par des médicaments auxquels les parasites deviennent résistants, peuvent survivre dans les régions infestées. Un grand nombre de races étant
infectées, la plupart du temps les vaches avortent, les taureaux deviennent stériles et leur croissance est interrompue. À cause de la présence de la mouche
tsé-tsé, les chevaux et autres bêtes de somme sont absents des régions infestées. Une étude, commandée par lONU au Zimbabwe, a
révélé que les fermiers qui utilisaient les animaux pour leurs travaux agricoles généraient un revenu supérieur de 25 à 45 % par unité de terre
et de 140 à 143 % par unité de travail à celui des fermiers qui cultivaient manuellement.
Il nexiste aucun vaccin ni aucun médicament pour les êtres humains ou le bétail qui puisse empêcher lapparition de la maladie du sommeil, les médicaments
disponibles étant très toxiques ou difficiles à administrer. Les grands laboratoires pharmaceutiques et les fondations des États-Unis ont engagé des fonds pour
aider lOMS à lutter contre cette maladie, et les partenaires publics de la PATTEC ont été récemment invités par un laboratoire pharmaceutique à
définir leurs besoins afin de lutter contre la mouche tsé-tsé et la trypanozomiase.
Liens:
Speech announcing launch of PATTEC campaign
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