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L’année internationale de la montagne

Menace de crues glaciaires



(Photo/UN)

Nous sommes à mi-chemin de l’Année internationale de la montagne et de l’Année internationale de l’écotourisme, qui ont pour but de mettre l’accent sur la fragilité des écosystèmes vitaux et les dangers que leur font courir le réchauffement planétaire, le tourisme non durable, la pollution et autres et pour inciter les gouvernements, l’industrie, les organisations non gouvernementales et le public à agir.

Des scientifiques du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et du Centre international de mise en valeur intégrée des montagnes (ICIMOD) ont constaté qu’au moins 44 lacs de glaciers se remplissent si rapidement qu’ils risquent de déborder dans à peine cinq ans, inondant de millions de litres d’eau de crue les vallées en aval et mettant en danger la vie de dizaines de milliers de personnes. Les températures de la région sont en telle hausse que la fonte des glaciers et des champs de neige qui alimentent ces lacs s’accélère, les remplissant rapidement d’eaux glaciales.

Au Népal, par exemple, les données en provenance de 49 stations de surveillance révèlent que les températures ont nettement augmenté depuis le milieu des années 70, les plus hautes températures se trouvant aux altitudes les plus élevées. La température de l’air est ici en moyenne de 1 °C plus élevée que dans les années 70 et continue d’augmenter de 0,06 °C par an. En plus des personnes dont les vies sont en danger, des millions de dollars de biens, installations touristiques, pistes de trekking, routes, ponts, usines hydroélectriques dont dépend l’économie de nombreux pays de la région sont également menacés. Selon Surendra Shrestha, Coordonnateur régional pour l’Asie de la Division de l’évaluation environnementale et de l’alerte rapide (PNUE), les observations indiquent que les changements climatiques ont fait de 20 lacs de glaciers du Népal et 24 du Bhoutan des dangers potentiels. Tout indique qu’à moins que des mesures soient prises d’urgence, n’importe lequel d’entre eux pourraient déborder dans cinq à 10 ans, ce qui risquerait d’être catastrophique pour les personnes et les biens se trouvant à des centaines de kilomètres en aval. “Ces lacs sont ceux que nous connaissons. Qui sait combien d’autres ailleurs dans l’Himalaya et de par le monde se trouvent dans une situation aussi grave ?”

Les frontières et les limites qui figurent sur ces cartes ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel des Nations Unies.
Pradeep Mool, expert de l’ICIMOD en télédétection, explique que des travaux sont en cours pour faire baisser le niveau de l’eau dans un des lacs glaciaires dont les relevés topographiques et de nouvelles imageries satellitaires ont fait ressortir la situation critique. Il s’agit du lac Tsho Rolpa qui alimente les vallées Rolwaling et Tam Koshi dans le district de Dolakha au Népal. Les chercheurs ont constaté que la fonte du glacier proche a gonflé le lac de telle sorte que sa superficie s’est multipliée par six, de 0,23 km2 à la fin des années 50 à 1,4 km2 aujourd’hui. “En cas de crue, les eaux de ce lac provoqueraient de graves dégâts dans le village de Tribeni, à 108 km en aval et mettraient en danger la vie de 10 000 personnes, de milliers de têtes de bétail, ainsi que des terres agricoles, des ponts et d’autres infrastructures”, a déclaré M. Mool.

Un réseau ultramoderne de communication par capteurs et sirènes relie le lac aux villages que les eaux de crues menaceraient. Des travaux de génie civil sont en cours pour diminuer le niveau d’eau du Tsho Rolpa d’une trentaine de mètres. Néanmoins, les experts estiment qu’il faudrait des fonds pour faire d’urgence un travail similaire sur des vingtaines d’autres lacs glaciaires. Des gouvernements de pays donateurs nous aident dans ces efforts mais nous aurions besoin de beaucoup plus d’assistance. “C’est un problème qui va être coûteux à résoudre parce que les lacs de glaciers se trouvent dans des zones reculées très difficiles à atteindre”, a dit M. Shrestha.

Les frontières et les limites qui figurent sur ces cartes ne reflètent pas nécessairement le point de vue officiel des Nations Unies.
“Notre travail consiste en partie à aider les gouvernements du Népal et du Bhoutan à déterminer quels lacs pourraient devenir dangereux, à mettre en place des systèmes d’alerte rapide pour pouvoir prévenir les communautés concernées en cas d’imminente crue glaciaire et à faire des travaux de génie pour pallier ces dangers”, a-t-il ajouté.

Les crues ou débâcles glaciaires ne sont pas un phénomène récent mais il semble qu’elles soient plus fréquentes ces trente dernières années. En août 1985, une crue soudaine du lac glaciaire de Dig Tsho au Népal a détruit 14 ponts et provoqué 1,5 million de dollars de dégâts à la petite usine hydroélectrique de Namche qui était sur le point d’être achevée.

Cette nouvelle recherche annoncée en avril 2002, a commencé en 1999 et se base sur des relevés topographiques, des photographies aériennes et des images en provenance des satellites Landsat, Spot et IRS. L’étude a repéré 3252 glaciers et 2323 lacs de glacier au Népal et 677 glaciers et 2674 lacs au Bhoutan. Le lac de glacier de Rapshtreng Tsho au Bhoutan, par exemple, dans le sous-bassin du fleuve Pho Chu, faisait 1,6 km en longueur, 0,96 km en largeur et 80 mètres de profondeur en 1986. Les chiffres les plus récents (1995) révèlent que le lac mesure maintenant 1,94 km de longueur, 1,13 km en largeur et qu’il atteint une profondeur de 107 mètres. Le glacier proche pourrait provoquer une débâcle jusqu’à deux fois et demie plus importante que la crue dévastatrice d’octobre 1994.

On a constaté une évolution similaire sur les 43 autres lacs. C’est la fonte des glaciers due aux hausses des températures qui cause ce gonflement des lacs menaçant de rompre leurs digues. les glaciers du Bhoutan se rétrécissent de 30 à 40 mètres par an. Cette contraction est encore plus rapide dans certains endroits. Le glacier de Tradkarding qui alimente le lac de Tsho Rolpa dans la vallée de Rolwaling au Népal se rétrécit à un rythme de plus de 20 m par an allant parfois au cours de ces dix dernières années jusqu’à 100 m en une année.

Dans ce village de montagne indien, les habitants doivent parcourir un km à pied pour aller chercher de l’eau.(Photo/Bob Sherman)
“Jadis, les montagnes étaient perçues comme invincibles, immuables et imprenables. Mais nous sommes en train d’apprendre que, comme les océans, les prairies et les forêts, elles sont vulnérables aux menaces environnementales et au développement effréné”, a précisé Klaus Toepfer, Directeur exécutif du PNUE. Les résultats des études dans l’Himalaya, le toit du monde, révèlent toute la portée d’une nouvelle menace fort alarmante. Il ne suffit pas de nous inquiéter des risques encourus par des personnes, l’agriculture et autres biens. Les montagnes sont les châteaux d’eau de la planète, elles alimentent les rivières et les lacs dont toute vie dépend. Si les glaciers continuent de se rétrécir aux niveaux constatés notamment dans l’Himalaya, nombreux sont les fleuves et bassins fluviaux qui risquent de tarir, ce qui menacerait nos ressources en eau potable, ainsi que les pêches, la faune et la flore sauvages. C’est là une autre raison pressante de prendre des mesures pour réduire les émissions de dioxyde de carbone et autres gaz à effets de serre ”.

Les questions de l’environnement et du développement, notamment au sujet des montagnes, seront au cœur du Sommet mondial du développement durable.




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