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Mettre à profit l’énergie des jeunes

Par Isaac Lamba

Photo/UN

Aujourd’hui, toute discussion ayant trait aux enfants et aux adolescents doit inévitablement se rapporter aux Objectifs du développement du Millénaire des Nations Unies qui fournissent un plan du développement humain. La récente Session extraordinaire des Nations Unies consacrée à l’enfance a mis en avant les échecs des gouvernements à créer un environnement favorable pour les enfants dans le cadre des Objectifs du développement du millénaire. Les chefs d’État et de gouvernements ont réaffirmé l’importance cruciale de reconnaître les droits des jeunes aux programmes de développement. Ils ont reconnu que les besoins et les aspirations des enfants tendent vers un monde qui facilite un développement humain riche, fondé sur “ les principes et la démocratie, l’égalité, la non-discrimination, la paix, la justice sociale et l’universalité, l’indivisibilité, l’interdépendance de tous les droits de l’homme, y compris le droit au développement. Les enfants et les adolescents sont des citoyens pleins de ressources et capables de contribuer à l’avènement d’un monde meilleur pour tous ”. [Un monde digne des enfants]. La Session a tiré la sonnette d’alarme afin d’examiner le manque d’attention accordée aux enfants et aux adolescents dans un monde où règne l’indifférence.

Pendant longtemps, le public a considéré les jeunes comme une bande de rigolos qui faisaient fi des lois et ne savaient pas tirer parti des opportunités. Les images négatives des jeunes, qui représentent actuellement la moitié de la population mondiale, excluent et ignorent leur potentiel qui pourrait se réaliser avec les opportunités et les conseils adéquats.

L’échec à créer un monde pacifique est souvent dû à l’égoïsme des personnes influentes qui se préoccupent peu de savoir si les conditions sont aptes à préparer les jeunes à entrer dans le monde adulte. La qualité de la jeunesse dépendra de l’héritage qu’elle recevra, ce qui constitue un véritable défi du XXIe siècle. Identifier et reconnaître les besoins des jeunes constituera un ordre du jour de l’ONU qui devra être mis en pratique par le biais de ses différentes organisations. Il faut écouter les enfants et assurer leur participation dans l’élaboration de leur avenir. La productivité de chaque nation a pour origine les enfants et les jeunes ancrés dans les valeurs culturelles, sociales et économiques de la nation, qui condamnent l’enlèvement des enfants pour les faire participer aux conflits armés ainsi que le travail forcé et la prostitution enfantine.

En préparation à la Session extraordinaire, organisée du 8 au 10 mai 2002, les jeunes du Malawi ont réuni les 16 et 17 août un “ Parlement des enfants ” ayant pour thème “ Un Malawi digne des enfants ”.

Les domaines de priorité définis par les enfants, dont le principal parlement a adopté les recommandations, comprenaient l’éducation, le VIH/sida, la participation des enfants dans la prise de décision, la pauvreté et le problème des orphelins. Pour les responsables malawiens, le plus grand défi était de réaliser les désirs et d’articuler de manière éloquente les préoccupations des enfants, ce qui était nécessaire dans la formulation des politiques. Les préoccupations des enfants malawiens sont les mêmes que celles des enfants des autres pays, à l’exception du problème de la violence contre les enfants qui s’ajoute à la liste.

Selon la Politique de la jeunesse nationale du Malawi, les facteurs qui contribuent à la vulnérabilité de la jeunesse comprennent une éducation et des services de formation inadéquats, exacerbée par des pratiques sociales et culturelles, des grossesses et des mariages précoces, le harcèlement sexuel, la violence et l’exploitation, le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles, l’usage de drogues et de l’alcool, la marginalisation ainsi que la non-participation à la prise de décision, le problème des sans-logements, le chômage et le manque de structures sportives et de loisirs adéquates. Ces domaines concordent avec les intérêts liés à la mission de l’ONU.

Cependant, pour que l’ONU aide à tirer profit de l’énergie et du potentiel des jeunes, les États Membres doivent faire preuve de volonté politique. Le 31 mai, dans son discours sur l’état de la nation, le Président du Malawi, Bakili Muluzi, a exhorté “ la population à donner aux garçons et aux filles des opportunités égales pour qu’ils participent au développement de ce pays. Ils sont notre avenir. Il faut les préparer pour qu’ils assurent une contribution importante ”.

En Afrique, la situation des enfants et des jeunes est problématique. Un enfant sur trois souffre de malnutrition. La pandémie du sida a fait des millions d’orphelins, et le travail des enfants, l’exploitation sexuelle et les enfants soldats dans les guerres, avec leurs tragédies humaines, ont des conséquences négatives sur les perspectives d’une société humaine, civilisée et riche. Les efforts des gouvernements nationaux afin d’examiner ces problèmes n’ont pas connu de succès notables à cause du manque de ressources et de capacités financières. L’ONU a un rôle important à jouer, mais nous devons également reconnaître que sa réussite dépend souvent du niveau d’investissement de la communauté internationale dans les sociétés frappées par la pauvreté.

Si l’éducation représente le pivot de l’autonomie et du développement socio-économiques, les organisations de l’ONU, telles que l’Organisation pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) et, dans une certaine mesure, l’Organisation internationale du travail (OIT), dans le domaine de la formation professionnelle, peuvent apporter une contribution importante dans la mise en place de programmes et de projets. Le concept “ l’éducation pour tous ”, lancé à Jomtien (Cambodge) au début des années 1990, a suscité des attentes importantes. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le FNUAP continue de jouer un rôle important dans le soutien des rôles en examinant le problème de l’infrastructure physique dans le domaine de l’éducation afin de promouvoir les objectifs de Jomtien. Dans un pays frappé par la pauvreté, la tâche du gouvernement est extrêmement délicate. Au Malawi, l’éducation primaire universelle, introduite en 1994 par le Front démocratique uni, a permis d’augmenter le nombre d’enfants scolarisés qui, de 1,9 million est passé aujourd’hui à environ 3,4 millions. Cela a engendré d’importants problèmes de logistique et d’infrastructure qui, cependant, devraient être considérés comme un point de départ. Les tentatives visant à réduire l’écart entre les garçons et les filles dans le domaine de l’éducation ont été au premier rang de l’ordre du jour dans des pays comme le Malawi, qui a obtenu la parité entre les sexes, même si elle ne s’applique seulement qu’aux cinq premières années de l’école primaire. Sur les 100 millions d’enfants dans le monde qui ne sont pas scolarisés, 60 % sont des filles. L’ONU doit continuer à soutenir le développement de locaux et de programmes scolaires appropriés en offrant aux filles des mesures incitatives. L’UNICEF a montré un intérêt dans le financement de la révision des programmes scolaires qui doivent désormais inclure les domaines à facettes multiples, tels que la l’égalité entre les sexes et le VIH/sida.

De nos jours, le VIH/sida constitue la menace la plus importante pour le développement humain. L’impact négatif n’est pas seulement dû à la perte de millions de vie, à la réorientation des efforts menés en faveur du développement économique et à l’insécurité, mais aussi à la situation infligée aux enfants et aux jeunes, surtout à ceux qui vivent dans les pays frappés par la pauvreté. Sur les 11 millions d’enfants et de jeunes atteints du sida, 70 % vivent en Afrique subsaharienne, 12,1 millions sont des orphelins du sida qui nécessitent une prise en charge médicale et sociale et 90 % vivent en Afrique subsaharienne (1,2 million en Zambie et 1 million au Malawi). Les jeunes, de leur côté, ont besoin de services d’éducation et d’information dont le but est d’encourager le respect de soi-même, les droits des adolescents et les choix informés afin de réduire leur vulnérabilité à l’infection du sida, ce qui permettra aux gouvernements de respecter leurs engagements visant à réduire de 25 %, d’ici à 2005, la prévalence du VIH chez les 15-24 ans. Le VIH/sida fait partie des travaux de l’UNICEF, l’UNESCO et du FNUAP. En matière de soutien financier et d’assistance technique, les partenariats de l’ONU avec les gouvernements visent à mettre fin au fléau en mettant en place des services de formation et en éduquant le public, ce que la plupart des gouvernements sont incapables de faire en raison de la situation économique précaire de leur pays.

Il faut trouver des alternatives aux messages verbaux en donnant la parole aux jeunes par le biais de programmes scolaires et de forums traditionnels.

Tout enfant, tout adolescent a le droit de mener une vie décente à l’abri de l’exploitation et de la discrimination dans un monde que nous devons protéger pour leur bien-être. L’éducation qui n’est pas ouverte sur la vie active ne réussit pas à attirer les jeunes qui voient dans l’école un moyen d’améliorer leur vie économique.

Il se peut que les gouvernements aient la volonté d’améliorer le bien-être des jeunes mais le manque de ressources freine les élans. Comme l’a fait remarquer le Secrétaire général de l’ONU, la réalisation des objectifs visant à améliorer la vie des jeunes a été entravée par un financement insuffisant des gouvernements, un facteur très important dans le développement des capacités des jeunes et un défi sérieux pour l’ordre du jour mondial de l’ONU qui vise à créer un monde digne des enfants.

Le manque d’emploi a souvent eu une influence négative sur l’éducation et a contribué à l’abus de la drogue, aux relations sexuelles avant le mariage, à la violence et même au vol. Former les jeunes au travail indépendant permettrait de réduire la déviance et de promouvoir un développement socio-économique équilibré. Une organisation de l’ONU telle que l’OIT pourrait contribuer à cette formation en apportant un soutien à un collège ou même en mettant en place un centre de formation professionnelle. Donner aux jeunes les moyens d’être indépendants financièrement pourrait réduire les problèmes de délinquance dans les villes.

Les jeunes ont une énergie mentale et physique extraordinaire qui ne demande qu’à s’exprimer. Très souvent, les responsables n’ont pas accordé l’attention nécessaire à leurs besoins. L’investissement des gouvernements dans des centres de loisirs pour jeunes constitue une action positive, une stratégie visant à favoriser le respect de soi, particulièrement en l’absence d’emplois suffisants.

Les organisations de financement ont parfois considéré qu’il était risqué de soutenir les petites entreprises commerciales. L’expérience du Malawi en matière de prêts aux jeunes a été positive. Le Président Muluzi a offert le soutien du gouvernement aux emplois pour les jeunes ainsi qu’aux projets et aux programmes d’entreprise qui permettront aux jeunes non seulement d’acquérir les compétences nécessaires pour assurer leurs moyens d’existence durables mais aussi pour développer le potentiel de leadership et la confiance dont les jeunes malawiens ont fait preuve pendant le parlement des enfants. En ce qui concerne les projets et la formation professionnelle, on ne dira jamais assez combien le rôle de soutien de l’OIT et des autres organisations de l’ONU est crucial.

En Bolivie, un programme de formation au leadership moral, avec un magazine qui inclut des jeunes, a suscité de grandes promesses dans le développement du caractère et du leadership chez les jeunes (Un pays, Bahai Magazine, janvier-mars 2002). De petits groupes de jeunes ont été organisés pour entreprendre des projets communautaires, éloignant les jeunes des activités dégradantes. L’UNESCO pourrait apporter son aide à la formation.

Si les jeunes sont les garants de l’avenir du monde, ils sont les facteurs déterminants de la qualité de la vie d’aujourd’hui, qui doit refléter notre contribution. Notre rôle est d’enrichir le processus de leur développement afin de les transformer en architectes utiles, productifs et responsables d’un monde où règne la paix. Dans ce processus, l’ONU doit créer un partenariat avec les gouvernements afin d’assurer l’éducation des jeunes ancrée dans les valeurs socio-économiques et culturelles pour garantir la durabilité de l’humanité.



L’ambassadeur Isaac C. Lamba est Représentant permanent de la République du Malawi auprès des Nations Unies. En plus d’une carrière diplomatique brillante, il possède une grande expérience universitaire.
 

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