"Saisir l'occasion" L'Irak se dit disposé à coopérer pleinement
Par Russell Taylor pour la Chronique
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Photo ONU |
Le Conseil de sécurité a approuvé à l'unanimité une nouvelle résolution 1441 (2002) autorisant le retour des inspecteurs de l'ONU en Irak. Après huit semaines de négociations intenses, les quinze membres du Conseil sont parvenus à un terrain d'entente et ont envoyé un message clair à Bagdad, à savoir qu'il lui était donné une " dernière occasion " de désarmer, le mettant en garde contre " de graves conséquences " au cas où il ne s'acquitterait pas de ses obligations.
Immédiatement après le vote, le Secrétaire général, Kofi Annan, a déclaré que " la manière dont la crise sera résolue aura des conséquences considérables pour la paix et la sécurité dans la région et dans le monde ". Il a exhorté l'Irak à " saisir l'occasion " et à satisfaire aux demandes du Conseil, et a appelé tous les gouvernements influents à rester engagés.
Les deux pays qui ont proposé le projet de résolution, les États-Unis et la Grande-Bretagne, ont accueilli favorablement son adoption. Le Président des États-Unis, George Bush, a dit : " Maintenant, le plus dur reste à faire : le Conseil de sécurité doit maintenir son unité et sa raison d'être de sorte que le régime irakien ne puisse pas retourner à son ancienne pratique d'obstruction et de dissimulation. " Le Premier ministre du Royaume-Uni, Tony Blair, a mis en garde l'Irak que s'il défiait l'ONU, " nous le désarmerons par la force ".
Le Président chinois du Conseil, Zhang Yishan, a estimé qu'" un message de paix, de bonne volonté et d'espoir " avait été envoyé. " La balle est dans le camp du gouvernement irakien et nous espérons qu'il respectera pleinement et sans condition les termes de la résolution ", soulignant que la souveraineté et l'intégrité territoriale du pays, ainsi que ses préoccupations légitimes, devraient être respectées.
Qualifiant la résolution de " compromis positif et constructif ", l'ambassadeur du Cameroun, Martin Belinga-Eboutou, a dit qu'elle ne " constituait pas une victoire pour un combat particulier mais plutôt pour la paix et la sécurité internationale ".
Dans une lettre datée du 13 novembre, alors que la Chronique était sous presse, l'Irak a indiqué sa volonté d'accepter le retour des inspecteurs du désarmement, une initiative dont s'est immédiatement félicité le Président du Conseil. L'ambassadeur irakien, Mohammed Al-Douri, a déclaré que son pays était " prêt à recevoir les inspecteurs dans les délais impartis ". À New York, il a dit aux journalistes : " Nous sommes impatients de les voir accomplir leur devoir dès que possible conformément au droit international. "
De son côté, M. Zhang Yishan a dit avoir été contacté par M. Al-Douri pour lui annoncer une lettre d'acceptation du Ministre des affaires étrangères, Naji Sabri, ajoutant que les membres du Conseil se félicitaient de la décision " correcte " prise par le gouvernement irakien et espéraient que la résolution 1441 serait appliquée " pleinement et efficacement ".
Selon la résolution, l'Irak continue d'être en " violation patente " de ses engagements antérieurs, en particulier par son refus de coopérer avec la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies (COCOVINU) ainsi qu'avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Cette résolution donnera aux inspecteurs un mandat renforcé qui leur permettra de revenir en Irak, après une absence de près de quatre ans, et d'avoir " un accès immédiat, sans entraves, inconditionnel et sans restrictions aux zones, installations, bâtiments, équipements, archives et moyens de transport qu'ils souhaitent inspecter et à pouvoir approcher tous les responsables et autres personnes que la COCOVINU ou l'AIEA veulent interroger ". Auparavant, les inspecteurs devaient fournir un avis avant de procéder aux inspections et travailler sous escorte diplomatique. Désormais, ils sont tenus d'informer le Conseil de sécurité si l'Irak ne satisfait pas à ses obligations.
Le Conseil a déploré le fait que l'Irak n'ait pas fourni de déclaration précise et complète sur tous les aspects de ses programmes de développement d'armes chimiques, biologiques et nucléaires, de missiles balistiques de portée supérieure à 150 km et d'autres armes.
Il a particulièrement regretté qu'à maintes occasions, Bagdad ait refusé l'accès aux sites désignés. Le Conseil a également déclaré que l'Irak avait manqué à ses engagements, conformément à la résolution 687 (1991) concernant le terrorisme et à la résolution 688 (1991) le sommant de mettre fin à la répression de la population civile et de fournir aux organisations humanitaires internationales un accès à tous ceux qui avaient besoin d'assistance.
Une première équipe d'inspecteurs du désarmement devrait se rendre en Irak le 18 novembre.
Cette équipe sera dirigée par le Président exécutif de la COCOVINU, Hans Blix, et le Directeur général de l'AIEA, Mohamed ElBaradei. La COCOVINU, qui est financée à partir d'un faible pourcentage des fonds produits par l'exportation de pétrole par l'Irak (le programme " pétrole contre nourriture "), est chargée de mener des enquêtes et de démanteler les programmes d'armes chimiques, biologiques et de missiles.
L'Équipe Action Irak de l'AIEA, qui mène ses activités avec l'assistance et la coopération de la COCOVINU, est chargée de découvrir et de démanteler tout programme nucléaire existant.
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Même si le Programme des Nations Unies " pétrole contre nourriture ", qui permet à l'Irak de vendre du pétrole pour acheter de la nourriture et d'autres produits humanitaires, a considérablement amélioré la situation humanitaire du pays, des problèmes persistent, a dit le Secrétaire général, Kofi Annan, dans un rapport rendu public le 15 novembre.
Selon le rapport, " malgré ses lacunes, le Programme a contribué et continue de contribuer à améliorer la vie des Irakiens ". Alors que la simplification des procédures a permis d'accélérer la mise en ouvre du programme, la baisse des ventes de pétrole par l'Irak a eu un impact négatif.
Reconnaissant l'importance des circonstances politiques actuelles entourant l'Irak, M. Annan a toutefois estimé que " tandis que les discussions actuelles portent, à juste titre, sur le retour des inspecteurs du désarmement, j'aimerais appeler toutes les personnes concernées à porter également leur attention sur la dimension humanitaire et à n'épargner aucun effort pour répondre aux besoins humanitaires du peuple irakien ".
Le rapport note que le programme a permis d'améliorer les conditions socio-économiques générales et empêcher la dégradation des services publics et de l'infrastructure. Dans plusieurs domaines, il a permis de stabiliser et d'améliorer l'accès aux biens et aux services humanitaires.
Les développements positifs dans la santé comprennent une augmentation de 40 % des interventions chirurgicales majeures comparé à 1997 dans le centre et le sud du pays, où le nombre de maladies transmissibles a diminué. Les campagnes de vaccination ont permis d'éradiquer la polio; cependant, certains médicaments continuent de manquer, les membres du Comité des sanctions des Nations Unies craignant qu'ils soient utilisés dans des applications militaires. D'autre part, l'insuffisance des fonds alloués par le gouvernement irakien est en partie responsable de la pénurie de médicaments destinés au traitement de la leucémie et du cancer.
Tandis que la malnutrition parmi les enfants de moins de cinq ans reste relativement élevée, elle a été stoppée et la tendance a été inversée dans le centre et le sud du pays : en 2002, les taux ont été réduits de moitié par rapport à 1996. Dans le secteur de l'éducation, la distribution de 1,2 million de pupitres a satisfait à 60 % des besoins dans ces régions. Reconnaissant qu'il s'agissait d'" une nette amélioration " par rapport aux années précédentes, M. Annan a cependant précisé que " dans l'ensemble du pays, les écoles ne fournissent pas un environnement propice à l'apprentissage : des classes surchargées et des doubles postes sont devenus la norme ".
Le programme " pétrole contre nourriture " a été créé en 1996 pour atténuer les conséquences des sanctions, y compris l'interdiction de ventes de pétrole, imposées à l'Irak après l'invasion du Koweït en 1990.
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