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S'engager à assurer une bonne gouvernance
'Le bon gouvernement'
Par Antonio Maria Costa

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Lorsque j'ai appris que le Secrétaire général de l'ONU m'avait nommé à la tête du Bureau des Nations Unies pour le contrôle des drogues et la prévention du crime (BCDPC) établi à Vienne, j'ai éprouvé un sentiment d'honneur, mais aussi d'inquiétude. Je me suis dit : " D'un côté, il s'agit d'un travail et, de l'autre, d'une mission. " Mais c'est le travail qui a pris le dessus. Le jour où j'ai pris mes fonctions, le 7 mai, lors d'une assemblée générale à laquelle participaient tous les membres du personnel de la Cité de l'ONU, comme nous l'appelons ici, j'ai parlé des priorités internes que nous devions définir afin d'examiner les priorités internationales de manière plus efficace. J'ai souligné que le concept de bonne gouvernance était une condition fondamentale de la crédibilité du Bureau, illustrant ce point en prenant des exemples dans l'histoire et l'art.

" Beaucoup d'entre vous ont visité Sienne, en Toscane, l'un des plus grands centres de la Renaissance italienne. Dans la mairie, Il Palazzo Pubblico, se trouvent deux célèbres fresques d'Ambrogio Lorenzetti : il buon governo (le bon gouvernement) et il cattivo governo (le mauvais gouvernement). On ne peut pas mieux représenter la notion moderne de gouvernance qu'en faisant un bond en arrière de quelques siècles pour apprécier la représentation d'Il buon governo à Sienne. (Incidemment, et peut-être symboliquement, celle d'Il cattivo governo n'a pas survécu aux siècles et a été tellement endommagée qu'aucune restauration n'est possible.) Pourquoi cela est-il pertinent quelque six siècles plus tard ? Parce que les États membres jouent un rôle crucial dans cette cité de l'ONU, que nous devons gérer efficacement en leur nom ", ai-je dit.

C'est un principe que j'ai appliqué dans mon travail depuis que j'ai pris mes fonctions à Vienne. De mes expériences professionnelles passées, j'ai appris que la gestion peut être une expérience très solitaire, quelle que soit la taille du bureau, même avec un personnel suffisant et compétent. Pendant ma première semaine, j'ai décidé, avec mes collègues, de créer un organe représentatif chargé de la gestion—le Comité exécutif—qui se réunit chaque semaine et a la responsabilité de traiter les questions principales de manière collégiale et transparente. Pour faire face de manière systématique aux défis mondiaux de la drogue, du crime et du terrorisme, nous avons cherché à créer un guide pour nos opérations des deux prochaines années. Ce guide sera un outil de gestion, montrant comment nous avons l'intention de mettre en ouvre les programmes et les projets—où, dans quelle mesure et dans quel but, y compris les résultats escomptés.

Photos: PNUCD Pakistan
L'Afghanistan est probablement le meilleur exemple concret de ce que le Bureau doit faire pour assister les États membres dans la prévention des comportements antisociaux. Forts d'une expérience de dix ans dans le pays, nous faisons partie intégrante de la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) avec, comme tâche, celle de coordonner la reconstruction du pays dévasté par 23 ans de guerre. Depuis sa réouverture à Kaboul, en février 2000, le Bureau s'est lancé dans un vaste éventail d'activités visant à éradiquer les stupéfiants en commençant par la surveillance. L'évaluation de la culture du pavot à opium, qui est l'estimation la plus fiable de l'importance de cette culture et fournit une base concrète pour les prises de décision. Nous avons également créé un cadre juridique compatible avec le droit international : nos experts analysent les lois existantes et en créent de nouvelles. À ceci s'ajoutent la création de capacités et l'aide à la mise en place des organes nationaux et régionaux chargés d'assurer le contrôle des drogues et du respect de la loi. Nous aidons également à mettre au point des stratégies destinées à réduire la demande en drogue. L'Afghanistan étant non seulement le plus grand producteur d'opiacés mais aussi de plus en plus affecté par la consommation de drogues, le Bureau surveille ces tendances et lance des activités de prévention et de traitement.Nous pensons qu'à long terme, la seule solution est d'offrir aux cultivateurs afghans des moyens de subsistance fiables autres que la culture du pavot.

De belles fleurs un peu spéciales... Un champ de pavots au Pakistan
Photos: PNUCD Pakistan

Nous travaillons donc avec toutes les autres organisations de l'ONU qui assistent la MANUA afin d'inclure des mesures de contrôle des drogues dans la stratégie d'ensemble de reconstruction et de développement. Enfin, nous avons pris en compte la dimension régionale dans la lutte contre la drogue. Le Bureau a activement contribué à renforcer la coopération frontalière entre l'Afghanistan et les pays voisins et à améliorer leur capacité à interdire le trafic illicite des drogues.

Lors d'une réunion privée fin juillet 2002 à Kaboul, le Président Hamid Karzaï m'a assuré de l'engagement de l'Autorité transitoire de mettre en ouvre l'interdiction de la culture du pavot à opium ainsi que de la fabrication, du trafic et de l'abus illicite de drogues. Cet engagement m'a été démontré de manière symbolique. Le Ministre de l'intérieur afghan, Taj Mohammed Wardak, m'a invité au stade de Kaboul afin d'assister à la destruction de quatre tonnes d'opium qui avaient été saisies. Le lancement d'une campagne d'éradication du pavot à opium au printemps dernier et l'engagement des autorités à prévenir la plantation de pavots en automne prochain nécessitent un soutien international important. C'est probablement la tâche la plus difficile à laquelle est actuellement confronté mon Bureau.

Photos: PNUCD Pakistan
Depuis ma nomination à la tête du Bureau en mai, nous avons débattu d'autres questions figurant en tête de la liste des priorités. J'en mentionnerai seulement deux : le terrorisme et la corruption. Au début de juin, nous avons organisé un symposium sur La lutte contre le terrorisme international : la contribution des Nations Unies. Parmi les participants figuraient un nombre impressionnant de Ministres et de dignitaires représentant des États membres et des institutions régionales, plusieurs Secrétaires généraux adjoints de l'ONU et Sir Jeremy Greenstock, Président du Comité contre le terrorisme. Ils ont souligné le rôle du Bureau de l'ONU à Vienne auprès des gouvernements dans la ratification et la mise en ouvre des conventions internationales pertinentes ainsi que dans l'amélioration des capacités nationales en vue de faire face à la menace du terrorisme. Suite au symposium, le lancement d'un programme mondial de lutte contre le terrorisme a été décidé en réponse aux attentes des États membres.

Les gouvernements d'Autriche, d'Italie, du Japon et des États-Unis se sont engagés à soutenir les activités de prévention contre le terrorisme. Je suis convaincu que d'autres suivront. Cela sera crucial si le Bureau doit aider les États membres à mener à bien leurs mandats prorogés. Nous accueillons également les travaux du Comité ad hoc chargé de la négociation d'une convention sur la corruption qui devrait marquer la fin du processus de négociation d'ici la fin de l'année prochaine. Nous sommes tout à fait conscients de l'effet dévastateur de la corruption qui appauvrit des économies entières par le transfert de centaines de milliers, voire de milliards de dollars, vers les pays étrangers. Le chaos économique qui s'ensuit, la perte des richesses nationales et le déclin du pays sont bien documentés. Lorsqu'un bon gouvernement est à nouveau mis en place, les autorités tentent pendant des décennies de récupérer les fonds en vue de réparer les dégâts sociaux et économiques. Nous attachons une grande importance à la réalisation de cette tâche.

Photos: PNUCD Pakistan
Avec les autres activités, dont la préparation de la Réunion ministérielle de la Commission sur les stupéfiants à la mi-avril et les efforts en vue d'aider les pays à ratifier la Convention sur la criminalité transnationale organisée, le Bureau fait face à d'importants défis. Prendre part à ces efforts est une expérience à la fois difficile et gratifiante que je suis prêt à assumer. En fait, c'est une mission qui a de bonnes chances de réussir grâce à l'engagement et à la compétence professionnelle du personnel.


La Biographie
Antonio Maria Costa est le Directeur général du Bureau des Nations Unies à Vienne et Directeur exécutif du Bureau des Nations Unies pour le contrôle des drogues et la prévention du crime. Il était Secrétaire général de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, établie à Londres, a été engagé en tant qu'économiste au Département des Affaires économiques et sociales internationales entre 1969 et 1983. Il a été ensuite nommé Conseiller spécial de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques à Paris et a occupé ce poste jusqu'en 1987. M. Costa a également fait partie de la Commission de l'Union européenne entre 1987 et 1992.
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