Assurer la conservation de l'environnement: 'Réparer les dégâts que nous avons causés'
Par Horst Rutsch, pour la Chronique
Le Sommet mondial du développement durable, qui s'est tenu à Johannesburg, en Afrique du Sud, du 28 août au 4 septembre, s'est conclu sur la déclaration des dirigeants mondiaux faisant valoir que le clivage existant entre les riches et les pauvres faisait peser une menace majeure sur la prospérité et la stabilité mondiales. Pour répondre à ces défis, le Sommet a fixé des objectifs mondiaux spécifiques en matière de réduction de la pauvreté, d'approvisionnement en eau potable et de mortalité infantile et a également abordé les problèmes liés à ces questions dans les domaines de l'agriculture, de la biodiversité, du changement climatique, des énergies renouvelables et du commerce. Le Sommet de Johannesburg, la conférence la plus importante jamais tenue par les Nations Unies, avec plus de 191 pays et plus de 21 340 accréditations, a réuni 104 chefs d'État et de gouvernement.
Adoptant la Déclaration de Johannesburg sur le développement durable et réaffirmant leurs engagements vis-à-vis de l'Action 21, programme qui a été adopté dix ans auparavant à Rio de Janeiro, les dirigeants mondiaux ont déclaré que même si la mondialisation avait créé de nouvelles opportunités, permettant l'intégration rapide des marchés et augmentant la mobilité des capitaux et des flux d'investissement, les bénéfices et les coûts étaient répartis de manière inéquitable. " Nous risquons de voir ces disparités mondiales s'aggraver et, à moins que nous n'agissions de manière à modifier radicalement leur vie, les pauvres de la planète risquent de perdre confiance dans les systèmes démocratiques auxquels nous demeurons attachés ainsi que dans leurs représentants, qui ne leur apparaîtront plus que comme des voix qui prêchent dans le désert. " La Déclaration a noté que l'environnement mondial continuait d'être fragilisé par l'appauvrissement de la diversité biologique, la diminution des ressources, la désertification, les effets préjudiciables du changement climatique, les catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et dévastatrices, la vulnérabilité des pays en développement.
Le Sommet a adopté un Plan de mise en ouvre qui vise à relever ces défis d'ici à 2015 et demande de:
réduire de moitié la proportion de la population mondiale qui vit avec moins de 1 dollar par jour;
réduire de moitié le nombre de personnes n'ayant pas accès à l'eau potable et à l'assainissement de base;
réduire de deux tiers les taux de mortalité des nourrissons et des enfants de moins de cinq ans;
réduire de trois quarts la mortalité maternelle.
Le Plan de mise en ouvre met également en relief la nécessité d'augmenter considérablement l'utilisation des sources d'énergie renouvelable, bien qu'aucun objectif spécifique n'ait été fixé, de mettre en place un nouveau système mondial de classification et d'étiquetage des produits chimiques et de rétablir les stocks de poissons épuisés. Il appelle les États qui ne l'ont pas encore fait à ratifier "à point nommé" le Protocole de Kyoto à la Convention-Cadre des Nations Unies sur le changement climatique.
D'autres clauses portent sur un large éventail de questions concernant l'environnement et le développement, telles que l'agriculture, la biodiversité, le changement climatique, l'énergie et le commerce. Le Plan encourage également le développement africain et celui des petits États insulaires.
Dans sa déclaration de clôture, le Président du Sommet, Thabo Mbeki, Président de l'Afrique du Sud, a exhorté les chefs d'État et de gouvernement à écouter les messages émis à la conférence et de " réparer les dégâts que nous avons causés ". Le Secrétaire général, Nitin Desai, a déclaré qu'il espérait que la Conférence " Johannesburg +15 " serait l'occasion de rendre compte de résultats positifs et concrets et de constater que les pays auront assumé leurs engagements. Cela pourrait être possible, a-t-il précisé, si les décisions déjà prises étaient prises aux sérieux, ajoutant que c'était la raison pour laquelle ce Sommet avait été baptisé le " Sommet tourné vers l'action. "
Un segment de haut niveau du Sommet, qui s'est déroulé du 2 au 4 septembre, a réuni plus de 100 dirigeants mondiaux. Un grand nombre de questions ont été débattues, notamment le principe des responsabilités communes et différenciées, la nécessité d'examiner les inégalités causées par la mondialisation, la lutte contre le VIH/sida, la modification des modes de consommation et de production non viables, la corrélation entre la pauvreté et la dégradation de l'environnement, l'élimination des subventions agricoles, le transfert des technologies respectueuses de l'environnement et l'ouverture des marchés pour les exportations provenant des pays en développement. Il a été souligné que les subventions accordées aux agriculteurs des pays développés étaient au détriment des marchés de nombreux pays en développement.
Une autre question mise en relief par les délégations a été la nécessité de fixer des objectifs et des échéanciers concernant l'utilisation des énergies renouvelables. L'énergie doit être fournie aux 2 milliards de personnes qui n'y ont pas accès, ont dit les orateurs, et ce, sans accroître la pollution ni entraîner de changements climatiques. Certains ont proposé l'objectif mondial de fixer à 15 % la part des énergies renouvelables d'ici à 2010, les pays industrialisés étant chargés de montrer l'exemple, soulignant que le développement durable ne pouvait pas être assuré si les sources d'énergie n'étaient pas renouvelables ou efficaces.
Un certain nombre d'orateurs ont abordé la question du changement climatique, les représentants des petits États insulaires soulignant l'impact catastrophique de l'élévation du niveau de la mer sur leur propre survie. Il n'y aucune raison que les petits États insulaires soient rayés de la carte à cause de la cupidité des pays industrialisés, notait un orateur. Pour beaucoup d'entre eux, a renchéri un autre orateur, le temps, " la ressource non renouvelable la plus précieuse ", était compté.
Le segment de haut niveau a également inclus quatre tables rondes au cours desquelles les chefs d'État et de gouvernement ont rencontré les chefs des institutions spécialisées de l'ONU ainsi que les représentants des organisations intergouvernementales, des organisations non gouvernementales (ONG) et d'autres groupes importants. Le Canada et la Fédération russe ont annoncé leur intention de ratifier le Protocole de Kyoto, ce qui pourrait permettre de le mettre en vigueur sans la participation des États-Unis, qui s'y opposent depuis longtemps. Le Protocole établira les premières restrictions obligatoires sur les émissions de dioxyde de carbone et des autres gaz à effet de serre des pays industrialisés.
Aux séances plénières, les délégations gouvernementales, les groupes importants, les institutions spécialisées, les fonds et les programmes des Nations Unies, les organisations intergouvernementales, les ONG et les représentants des entreprises ont débattu des partenariats dans cinq domaines identifiés par le Secrétaire général Kofi Annan avant le Sommet : l'eau, l'énergie, la santé, la productivité agricole et la biodiversité. De nombreux partenariats ont été créés afin d'atteindre des objectifs variés dans des domaines prioritaires, spécialement l'eau et l'assainissement.
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Les États-Unis investiront 970 millions de dollars répartis sur trois ans dans des activités liées à l'eau et à l'assainissement. Ils affecteront 90 millions de dollars aux programmes d'agriculture durable, jusqu'à 43 millions de dollars l'an prochain à des projets ayant trait à l'énergie, et 53 millions de dollars à la gestion des forêts en 2002-2005. Ils se sont également engagés à affecter, jusqu'en 2003, 2,3 milliards de dollars aux programmes de santé, y compris au Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida.
L'Union européenne a annoncé qu'elle dégagerait 700 millions de dollars pour l'énergie et a lancé une initiative " De l'eau pour la vie " visant à créer des partenariats stratégiques pour atteindre les objectifs dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, spécialement en Afrique et en Asie centrale..
La Banque de développement de l'Asie a annoncé l'octroi de 5 millions de dollars au Centre des Nations Unies pour les établissements humains (Habitat) et 500 millions de dollars de crédits pour le Programme pour les villes d'Asie.
Les neuf entreprises d'énergie les plus importantes au monde ont signé plusieurs accords avec l'ONU pour faciliter la coopération technique de projets d'énergie durable dans les pays en développement. L'entreprise d'énergie sud-africaine, Escom, a annoncé un partenariat destiné à étendre les services de l'énergie aux pays voisins.
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