L'utilisation de la documentation de l'ONU est vraiment déroutante, spécialement par les universités. Malgré cela, un grand nombre de services de documentation électronique sont fréquemment consultés. En 2001, les visiteurs du site Internet de l'ONU ont consulté en moyenne 500 000 fichiers htlm par jour et, selon Mahbud Ahmad, Chef de la section du site web de l'ONU, ce chiffre a atteint 750 000 en 2002 et 950 000 les deux premiers mois de 2003. Une majorité de ces documents ont été consultés par des collèges et les universités. Pourtant, de nombreuses autres sources de documentation numérique ou imprimée sont peu consultées malgré leur qualité et leur importance pour la recherche.
Le Système de diffusion électronique des documents (SEDOC), l'une de ces sources contenant le texte intégral de la majorité des documents de l'ONU publiés depuis 1993, ainsi qu'une sélection de documents des années passées, est l'une des base de données les plus importantes produites par les organisations gouvernementales internationales. Or, selon de nombreux spécialistes chargés des documents d'État, cette source est rarement utilisée. Pour accéder au SEDOC, un nom d'utilisateur et un mot de passe sont nécessaires, ce qui en limite l'accès, mais cela ne suffit pas à expliquer pourquoi cette source précieuse d'information reste en grande partie méconnue.
Cette situation est loin d'être unique. Au début de 2003, un professeur qui enseignait un cours de communications verbales dans une université située dans le nord des États-Unis, a choisi le débat concernant l'Irak pour illustrer ses propos. Les élèves devant utiliser des documents d'appui, le professeur a chargé une bibliothécaire de les aider à localiser les sources pertinentes. Pour faciliter le plus possible le processus, elle a créé une page Internet avec des liens à neuf sites et un réseau informatique, y compris deux sources de l'ONU, leur a montré comment les utiliser et les a assistés dans leurs recherches. Or, sur les 84 étudiants, 5 seulement ont cité un document de l'ONU, la majorité ayant utilisé en grande partie des articles de la presse populaire américaine qu'ils avaient trouvés sur Internet. Quelle est la cause du problème ?
Divers facteurs contribuent à l'écart entre l'utilisation actuelle et potentielle des documents de l'ONU dans les universités. Le plus important est la concurrence. Dans de nombreux pays, les bibliothèques des collèges et des universités ont consacré d'importants investissements à la mise en place d'un réseau informatique en ligne dont les ressources sont utilisées par un nombre croissant d'étudiants et de professeurs. De plus, un grand nombre d'étudiants du premier cycle sont portés à consulter sur le web les publications disponibles, mais souvent peu fiables, en y accédant par des index d'Internet et des moteurs de recherche.
Un autre obstacle est la vision étroite de la population concernant les activités de l'ONU, créée par les grands médias. Si les efforts de l'Organisation en matière de sécurité et de paix internationales font souvent la une des journaux, les autres activités sont pratiquement passées sous silence.
Par exemple, la plupart des étudiants américains de premier cycle ignorent pratiquement tout des travaux du Conseil économique et social de l'ONU. Cette sous-représentation des activités majeures et des organes importants coïncide avec le point de vue limité des activités de l'ONU qui amène un grand nombre d'utilisateurs potentiels à sous-estimer cette source d'information.
L'idée selon laquelle les sources de l'ONU sont difficiles à décrypter est un obstacle supplémentaire et, malheureusement, souvent réel. Par exemple, les documents avec en-tête - la catégorie de documents de l'ONU la plus importante et la plus diverse - s'adressent principalement aux délégations des États membres et au personnel de l'Organisation. C'est pourquoi leurs auteurs partent du principe que les lecteurs connaissent les processus de l'ONU. Et ceci est vrai même avec les titres. Par exemple, le document intitulé Examen des rapports soumis par les États parties en vertu de l'article 9 de la Convention : seizième rapport périodique des États parties présenté en 2002 : Annexe : Maroc. Il s'agit d'un rapport du Maroc renfermant des informations sur l'adhésion du Maroc au traité interdisant la discrimination raciale mais le néophyte n'a pas la moindre idée du sujet. Ceci est particulièrement fâcheux, les deux facteurs ayant le plus de chances d'inciter les étudiants du premier cycle à rechercher une source particulière sont la facilité d'accès et le niveau de compréhension des documents. (Vicki Tolar Burton et Scott A. Chadwick, « Investigating the practices of student researchers: Patterns of Use and Criteria for Use of Internet and Library Sources, » Computers and Compositions 17 (2000), p. 321).
Dernier point, de nombreux usagers ont des difficultés à déterminer si les sources de l'ONU sont appropriées pour leur recherche. Si un professeur demande à ses étudiants d'utiliser seulement des ouvrages et des articles universitaires, l'utilisation de documents administratifs est-elle adéquate ? Il est difficile de répondre à cette question. Alors que certains documents de l'ONU sont de qualité comparable à celle des publications vendues en librairie, d'autres sont préparés plus hâtivement, l'étape de la correction étant moins importante.
Certains de ces problèmes sont insolubles. La concurrence continuera, et il est peu probable que les grands médias changeront d'optique. Que faut-il donc faire pour que les documents de l'ONU occupent une plus grande place dans la recherche des étudiants et des professeurs ?
L'ONU devrait engager des efforts considérables pour améliorer l'accès des documents administratifs aux intellectuels. Dans les universités, les étudiants ont l'habitude de voir sur la page de titre le nom de l'auteur ainsi que le sujet, alors que tous les documents de l'ONU ne satisfont pas à ces critères de base.
La plupart des étudiants, des enseignants et des bibliothécaires ne savent pas qu'il existe des bibliothèques dépositaires. Pour remédier à cela, il est important que celles-ci fassent la promotion de leurs collections et de leurs services sur une grande échelle.
Elles doivent également identifier les cours dans lesquels les documents de l'ONU pourraient être utilisés et informer les enseignants concernés des ressources à leur disposition.
Ceci est important pour deux raisons : dans chaque établissement universitaire, l'utilisation de la documentation est fonction des programmes et les enseignants ne savent pas toujours que des ressources de documentation de l'ONU sont à leur disposition.
Les établissements scolaires devraient fournir un effort important dans la recherche de premier cycle en matière de relations internationales. John Sloan Dickey Center for International Understanding au Darmont College offre des subventions de voyage pour la recherche de premier cycle et les présentations de conférences, finance un journal dirigé par les étudiants qui publie des articles d'étudiants du premier cycle et de professeurs et octroie des bourses pour la recherche des deuxième et troisième cycles. Selon John Cocklin, bibliothécaire des documents de l'État à Darmouth, l'utilisation des documents de l'ONU dans sa bibliothèque est en grande partie due aux programmes de Dickey Center.
Le nombre considérable de visiteurs des sites Internet de l'ONU et des utilisateurs de base de données reflète un immense intérêt pour les travaux de l'Organisation. Il est important que cet effort ne soit pas réduit à une initiative technologique. Il faut également confronter et surpasser les obstacles moins évidents. Seule une approche complète peut maximiser l'impact de la documentation de l'ONU.
|