Élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse Chercher un consensus malgré les différences
Dérogeant à la tradition, l'Assemblée générale a voté une résolution condamnant l'antisémitisme, l'islamophobie et la christianophobie dans le cadre d'un texte dénonçant l'intolérance religieuse.
La résolution 59/199 « Élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse » a été adoptée après des négociations ardues entre les Pays-Bas, qui ont parrainé le projet au nom de l'Union européenne (UE), les membres de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI) et Israël. Sur recommandation de la Troisième Commission, l'Assemblée a adopté la résolution par un vote enregistré de 186 voix pour.
« L'intolérance religieuse est une question qui nous concerne tous et qui doit être combattue », a dit Peter-Derreck Hof (Pays-Bas) à la Chronique. À la cinquante-huitième session de l'Assemblée, l'Irlande était le
principal auteur de la résolution. Mais, « comme l'élimination de l'intolérance religieuse est l'une des priorités de l'UE, nous avons décidé cette année de parrainer la résolution », a-t-il indiqué.
<< L'élimination de l'intolérance religieuse est l'une des priorités de l'Union européene. >>
  Peter-Derrek Hof
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En juillet 2004, les membres de l'UE se sont réunis à Bruxelles pour travailler à la rédaction du projet de cette importante résolution. Après avoir apporté quelques changements linguistiques, les Pays-Bas, au nom de l'Union européenne, ont introduit des révisions au texte qui ont donné lieu à des discussions informelles parmi les délégués durant les réunions de la Troisième Commission, au siège de l'ONU à New York. Le texte est essentiellement semblable à celui de 2003, à l'exception des changements apportés dans le paragraphe 9, où l'Assemblée constate avec une profonde inquiétude l'augmentation du nombre de cas d'intolérance et de violence dirigés contre les membres de nombreuses communautés religieuses, dans diverses régions du monde, y compris des cas motivés par l'islamophobie, l'antisémitisme et la christianophobie.
« Nous ne savons pas si l'augmentation de la violence contre les communautés religieuses représente 20 ou 30 % », a déclaré M. Hof. Le Rapporteur spécial sur la liberté des religions et des croyances a cependant indiqué une augmentation de l'hostilité à l'égard des minorités religieuses. « En Europe, nous avons constaté que ces incidents étaient de plus en plus nombreux », a-t-il ajouté. La formulation du projet de texte est conforme à la résolution de la Commission des droits de l'homme qui avait identifié les communautés religieuses confrontées à la violence et à la haine. La résolution de 2004 est semblable à celle de la Commission « où le texte a été approuvé par consensus », a commenté M. Hof.
Le paragraphe 9 de la résolution a cependant été une cause de désaccord dans le débat et a empêché d'obtenir un consensus parmi les États Membres. « Les auteurs de la résolution ont décidé d'inscrire la mention de l'antisémitisme. Ma délégation et plusieurs autres ont estimé qu'il n'était pas nécessaire de s'engager dans cette voie qui nous éloignait de la résolution que nous avions adoptée précédemment », a dit Astanah Abdul Aziz (Malaisie) à la Chronique.
"Anti-Semitism relates to racial discrimination, while Judaeophobia relates to religious intolerance."
  Astanah Abdul Aziz |
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Même si le texte mentionnait deux autres grands groupes religieux - l'islam et la le christianisme -, son pays avait buté sur la terminologie, a-t-elle expliqué. « On parle d'islamophobie et de christianophobie, mais pour l'autre religion, on emploie antisémitisme et non judéophobie, a-t-elle ajouté. « L'antisémitisme se rapporte à la race. C'est pourquoi les éléments liés à la discrimination raciale n'étaient pas pertinents dans cette résolution concernant la discrimination religieuse, a indiqué Mme Abdul Aziz. « Ce fut le seul point qui a été débattu ».
« Constate avec une profonde inquiétude l'augmentation du nombre de cas d'intolérance et de violence dirigés contre les membres de nombreuses communautés religieuses dans diverses régions du monde, y compris des cas motivés par l'islamophobie, l'antisémitisme et la christianophobie. »
-Paragraphe 9 du dispositif de la résolution 59/199
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Dans un entretien avec la Chronique, Zina Kalay-Kleitman (Israël) a indiqué qu'elle soutenait la résolution car elle prenait en compte la résurgence de l'antisémitisme, qui se réfère à la haine envers les personnes qui
pratiquent la religion juive. « L'antisémitisme est un phénomène connu et incontestable; il ne peut être remis en cause par des courants révisionnistes ou une interprétation cynique », a-t-elle affirmé. Israël n'avait pas soutenu la résolution les années précédentes parce que l'antisémitisme n'y était pas mentionné, a ajouté Mme Kleitman.
« L'antisémitisme est un phénomène connu et incontestable; il ne peut être remis en cause par des courants révisionnistes ou une interprétation cynique »
Zina Kalay-Kleitman
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La plupart des membres de l'OCI ont cependant maintenu leur position. « La religion juive ne nous pose aucun problème, pourquoi alors ne pas adopter le terme "judéophobie" », a commenté Mme Abdul Aziz.
Incapables de sortir de l'impasse, plusieurs États Membres ont demandé à la Troisième Commission de voter sur le paragraphe 9. Celui-ci a été adopté par l'Assemblée par 105 voix pour, 35 voix contre et 19 abstentions. L'OIC a présenté un projet d'amendement pour ajouter « et autres » après « les communautés religieuses ». La Malaisie a proposé de changer « antisémitisme » par « judéophobie », mais l'Assemblée a rejeté les amendements.
Pour expliquer son vote, le représentant des Pays-Bas a dit que l'Union européenne s'était opposée à l'amendement parce qu'il aurait dénaturé le paragraphe, étant destiné à lutter contre l'intolérance religieuse seulement. « Il est décevant que la Commission des droits de l'homme ait accepté le paragraphe par consensus et que les pays pour qui ce paragraphe posait un problème aujourd'hui n'avaient manifesté aucune réserve il y a six mois lorsque la Commission l'avait approuvé », a ajouté M. Hof. Il a regretté la nécessité de recourir à un vote, considérant que le manque de consensus allait à l'encontre de l'objectif visé. Mais même si elle a créé une division parmi les États Membres, la résolution a été adoptée à l'unanimité. |
La Division de la section éducative du Département de l'information de l'ONU (DPI) a lancé une nouvelle initiative éducative en organisant une série de colloques sur le thème
« Désapprendre l'intolérance », qui visent à étudier les diverses manifestations de l'intolérance et le rôle de l'éducation et de la société civile pour promouvoir la tolérance. Ces colloques sont le programme de sensibilisation le plus récent ouvert à la société civile et parmi les expériences les plus réussies qui ont suscité un intérêt général pour les travaux du DPI et l'ensemble des Nations Unies.
Le premier colloque de la série, qui s'est tenu au siège de l'ONU le 21 juin 2004, a eu pour thème « Faire face à l'antisémitisme : Éducation à la tolérance et à la compréhension ». L'événement d'une journée a engagé des experts, des chefs religieux et des membres de la société civile dans une discussion sur les moyens de répondre à ce défi. Le deuxième colloque, intitulé « Affronter l'islamophobie : Éducation à la tolérance et à la compréhension », a eu lieu le 21 décembre. Ils ont été tous deux bien reçus par le public et les membres de la presse mondiale. « Les colloques sont un cadre idéal pour discuter de ces questions aux niveaux régional et international », a dit Peter-Derreck (Pays-Bas) à la Chronique.
Dans son discours d'ouverture au premier colloque, le Secrétaire général Kofi Annan a fait remarquer qu'il était bien de commencer par l'antisémitisme, qui constitue une manifestation de haine, d'intolérance et de persécution unique dans l'Histoire. « La montée de l'antisémitisme dans un pays est toujours une menace pour le monde entier. Ainsi, en luttant contre ce phénomène, c'est pour l'avenir de l'humanité que nous nous battons. » Faisant écho à des sentiments similaires envers l'islamophobie, il a évoqué lors du deuxième colloque la « peur de l'autre », qui « est si générale et si profondément violente que l'on peut être tenté d'y voir un trait inné de l'espèce humaine. Mais le préjugé n'est pas inscrit dans les gènes. Parfois, la haine s'apprend. Parfois, on y est amené par les manipulations de dirigeants qui exploitent la peur, l'ignorance et le sentiment d'infériorité », a-t-il ajouté.
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