Chronique ONU
Une maternité sans risque
Une question des droits humains et de la justice sociale
Par Rita Luthra

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L'article
Photo HCR/N.Behring
Une maternité sans risque signifie l'accès des femmes aux soins pendant la durée de leur grossesse et au moment de l'accouchement. Pendant les dernières décennies, les questions des femmes ont été comprimées dans ce qu'on appelle « la moitié de l'humanité », l'autre moitié n'ayant toujours pas vraiment pris conscience des conditions de vie des femmes. Les femmes et les enfants représentent environ 75 % de la population mondiale. Les conséquences du « problème démographique » sur la qualité de la vie humaine sont évidentes. La solution idéale serait d'associer une baisse du taux de croissance de la population mondiale (ou croissance zéro) à une redistribution de la population mondiale en fonction des ressources.

Le propos de cet article est de comprendre les droits de reproduction des femmes et la manière de les équilibrer, avec l'engagement des communautés et des sociétés de prendre des mesures en matière de reproduction. Cela servira non seulement leurs propres intérêts mais aussi ceux de la société. Même si l'éducation et l'emploi des femmes ont une incidence sur leur autonomisation, la plupart d'entre elles ne contrôlent pas vraiment leur fertilité, quelle que soit leur classe sociale : leur statut est souvent dicté par les sociétés et les cultures. Heureusement que le changement social est un processus constant. Fournir une éducation en matière de santé des femmes, de soins maternels et de planification familiale peut permettre d'utiliser pleinement les opportunités et de promouvoir le rôle des sociétés d'obstétriciens et de gynécologues en formation.

Sur les statistiques sur la santé examinées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la mortalité maternelle présente les écarts les plus importants entre les pays développés et ceux en développement :

  • Chaque jour, au moins 1 600 femmes meurent de complications dues à la grossesse et à l'accouchement, soit un minimum de 585 000 par an; ces complications sont la première cause de décès et d'invalidité des femmes âgées de 15 à 49 ans dans les pays en développement;


  • Chaque année, environ 50 millions de femmes souffrent de complications liées à la grossesse, entraînant souvent une maladie ou une invalidité à long terme;


  • Sur les 200 millions de grossesses par an estimées dans le monde, un tiers, soit 75 millions, ne sont pas désirées;


  • Chaque grossesse présente des risques : au moins 40 % des femmes auront des complications, dont 15 % seront extrêmement graves;


  • Chaque année, près de 20 millions d'avortements sont pratiqués dans des conditions dangereuses dans le monde, entraînant la mort de 80 000 mères et des centaines de milliers d'invalidités. Dans certains pays, l'avortement pratiqué dans des conditions dangereuses est la principale cause de décès, alors que cela pourrait être facilement évité;


  • Si toutes les femmes ne désirant plus d'enfants pouvaient éviter d'en avoir, le nombre de naissances serait réduit en moyenne de 35 % (4,4 millions) en Amérique latine, 33 % (24,4 millions) en Asie et 17 % (4 millions) en Afrique. Les taux de mortalité maternelle seraient réduits, les naissances évitées seraient probablement celles à parité élevée et ou présentant des risques élevés;


  • Les intervalles entre les naissances de moins de 36 mois augmentent considérablement le risque de complications et de décès.


  • Même si les objectifs en matière de soins prénatals sont les mêmes partout dans le monde, la pratique varie d'une région à l'autre. La majorité des morts maternelles pourraient être évitées si la condition des femmes était améliorée et les services de soins de santé en plus grand nombre, y compris les centres de planning familial et les services d'orientation. La participation des obstétriciens et des gynécologues à la mobilisation et au soutien technique, à la fois à titre individuel et par le biais de leur société nationale, est nécessaire pour garantir une maternité sans risque et la santé des femmes. L'objectif n'est pas seulement de réduire le taux de mortalité liée à la maternité, mais aussi de s'assurer que la mère et le nouveau-né sont en bonne santé pendant la grossesse et après. Dès leur naissance, tous les nourrissons ont besoin d'une attention spéciale et de soins spéciaux. Pourtant, dans de nombreux pays, cela est loin d'être le cas tant pour les femmes que pour leur bébé.

    Les éléments essentiels d'une maternité sans risque sont : une éducation communautaire; des soins et des conseils prénatals, y compris la promotion de la nutrition maternelle; une aide compétente pendant l'accouchement; les soins donnés lors de l'accouchement; la gestion des complications liées à l'avortement; les soins suite à un avortement; des services dûment équipés pour mettre un terme à une grossesse lorsque l'avortement est légal; des conseils, des informations et des services en matière de planification familiale; et des services d'éducation en matière de santé génésique destinés aux adolescents.

    Quiconque s'est occupé d'une femme sait que si celle-ci est malade, elle (ou le père) sera inquiète, stressée, déprimée et parfois inconsolable. Ceux qui comprennent l'impact qu'ont la grossesse et la naissance sur les émotions, les pensées, la vie et le bien-être des femmes comprennent pleinement cette connexion vitale. Renforcer l'engagement afin d'améliorer l'accès aux soins de santé et leur qualité est une priorité du partenariat qui plaide pour une plus grande volonté politique et des progrès en vue de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) des Nations Unies sur la santé maternelle et de l'enfant. À la lumière des OMD (voir http://www.un.org/millenniumgoals/), la réduction de la mortalité maternelle et des nouveau-nés est de plus en plus importante. Encourager la création de partenariats pour la communication et la coordination peut renforcer les programmes de maternité sans risque.

    Taux de fertilité élevés, usage limité des contraceptifs, activité sexuelle et mariage précoces, les défis en Afrique sont nombreux, qui contribuent chaque année dans le monde à la moitié des 585 000 décès liés à la maternité. Ces décès surviennent dans un continent qui compte seulement 13 % de la population mondiale et 23,5 % des naissances. Il s'agit donc de donner aux individus, aux familles et aux communautés les moyens d'action.

    La vie quotidienne des femmes, en particulier dans les pays en développement, est telle qu'elles négligent leur propre santé. En effet, les opportunités pour améliorer les conditions de santé des femmes sont limitées pour de nombreuses raisons comme, par exemple, la responsabilité de s'occuper de la maison, des enfants et de la famille et de subvenir à leurs besoins. De plus, leur santé souffre de la place qui leur est accordée dans la société, du manque d'une organisation et de moyens pour exercer une pression politique. Leur autonomisation permet de faire connaître leurs besoins et leurs préoccupations en matière de santé, de faire appel à des services compétents et sans délai, de demander aux fournisseurs de services et aux gouvernements de rendre des comptes sur leurs politiques et de participer plus pleinement au développement social et économique.

    L'Initiative Maternité sans risque a été lancée en 1987 avec, comme but, de réduire le nombre de décès liés à la maternité dans les pays en développement. Elle a permis d'améliorer les soins lors de complications pendant la grossesse et l'accouchement et de mettre en évidence les liens étroits qui existent entre la santé maternelle et infantile. De leur côté, les sociétés d'obstétriciens et de gynécologues pourraient mener des actions afin de fournir une éducation sur la santé des femmes, en collaboration avec les organisations de femmes, les ministres de la santé et d'autres partenaires pertinents. Elles devraient d'ailleurs s'employer à formuler des messages simples sur la santé maternelle et les soins de santé. Il est essentiel d'inculquer des notions concernant la santé des personnes et de la communauté en général.

    Par exemple, l'échec relatif dans les services médicaux actuels à faire comprendre aux prestataires de santé la nécessité de prendre en compte la santé des femmes tout au long de leur vie et d'être davantage à l'écoute. Les discussions et les préoccupations concernant les besoins des femmes en matière de santé devraient faire obligatoirement partie de la formation des professionnels de la santé. Chaque société nationale devrait participer à la surveillance de la qualité des soins de santé maternelle et encourager, faciliter et stimuler la recherche en vue de réaliser les objectifs de l'Initiative pour une maternité sans risque, en particulier dans les régions où la mortalité maternelle est élevée. Un mouvement national peut être créé, fondé sur une vision mondiale et une mobilisation locale. Voici quelques suggestions :

  • Les sociétés nationales devraient contribuer à l'éducation continue, non seulement de leurs propres membres mais aussi de tous les fournisseurs de santé des services de santé maternelle et de planification familiale, en particulier ceux prodiguant des soins de santé primaires;


  • Les efforts pour améliorer les programmes seraient davantage couronnés de succès si les sociétés nationales soutenaient la formation en fonction des objectifs de leur pays et les appliquaient en réduisant la mortalité maternelle et périnatale et en améliorant la disponibilité des services de planification familiale;


  • Concernant la santé des femmes en général et en coopération avec leurs partenaires, il faudrait définir clairement le type de formation nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par les obstétriciens ou les accoucheuses traditionnelles comme les sages-femmes;


  • Le recherche opérationnelle (parfois appelée système de santé ou « recherche appliquée ») est un domaine très important où la société nationale d'obstétriciens et de gynécologues peut jouer un rôle majeur;


  • La recherche opérationnelle pour une maternité sans risque consiste essentiellement à évaluer les améliorations et les innovations en matière de santé maternelle, en particulier les aspects liés à la prévention;


  • L'évaluation des campagnes d'éducation.


  • La santé maternelle est un problème à multiples facettes qui a des racines psychologiques et culturelles. Il n'y a aucune solution simple ou unique au problème; les soins de santé des femmes doivent plutôt être adressés aux niveaux multiples et dans les divers secteurs de la société afin de développer des projets et des programmes efficaces. Depuis plusieurs décennies, nous avons les connaissances et les moyens pour éliminer les risques et les incertitudes associés à la naissance des enfants. Avec la motivation et la volonté politique croissantes, la nécessité de disposer de meilleures informations est devenue plus urgente. Les femmes ont le droit à une maternité sans risque. L'objectif est d'assurer la santé pour tous et l'accès égal à des soins de santé abordables et de qualité. Il faut encourager le développement de la recherche empirique, principalement basée sur la communauté, abordable et ayant des implications immédiates pour les programmes et les partenaires locaux. La communauté a un rôle important à jouer, en particulier en ce qui concerne les délais d'attente aux soins d'urgence et de planification familiale. Tous les êtres humains sont nés libres et égaux en droit et en dignité.
    [Nous conseillons la lecture du rapport du Secrétaire général de l'ONU sur le Millénaire +5 intitulé Dans une plus grande liberté : vers la sécurité, le développement et les droits de l'homme pour tous à http://www.un.org/largerfreedom/.]
    Biographie
    Rita Luthra est présidente du Centre de santé et d'éducation des femmes et rédactrice en chef de la publication d'éducation en ligne WomensHealthSection.com, qui est consacrée aux soins de santé et au bien-être des femmes dans le monde. Elle est également membre de l'American College of Obstetricians and Gynecologists depuis 1986 et a travaillé avec de nombreuses organisations internationales, telles que UNA-USA, Peace Corps et l'OMS. Son domaine d'intérêt est la santé mondiale et le développement international.

    Éducation et VIH/sida
    Le savoir est-il un facteur du changement ?

    L'école est un moyen de communication qui peut contribuer à s'attaquer au problème du VIH/sida. Dans de nombreux pays, les preuves montrent que l'éducation et le changement de comportements concernant la maladie sont étroitement liés entre eux. L'objectif final est de sensibiliser les personnes vulnérables aux risques encourus pour qu'elles prennent des décisions éclairées à partir d'informations sur les modes de transmission. La diffusion de messages sur la protection contre le sida dans les écoles ne peut donc avoir qu'un effet bénéfique.

    Une étude menée dans six pays - le Kenya, l'Ouganda, la République unie de Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe - a révélé une sensibilisation importante sur le VIH/sida, bien que les sources d'informations aient été différentes dans chaque pays. En Ouganda, les réseaux d'amis et la famille étaient la source principale d'informations, alors que dans d'autres pays, c'était les médias et les institutions, telles que les écoles, les églises et les établissements de santé. En outre, le fait que les Ougandais aient signalé les cas de séropositivité qu'ils connaissaient a probablement contribué à changer les comportements. Ce pays est le parfait exemple illustrant les liens entre l'éducation en matière de VIH/sida, la sensibilisation et la promotion des comportements sans risque. Dans les régions rurales, les taux de prévalence du VIH, comme illustrés dans le tableau ci-dessous, étaient initialement pratiquement identiques pour tous les niveaux d'éducation. Mais, en 1995, les personnes ayant suivi un enseignement secondaire présentaient des taux moins élevés que les autres.

    Une autre étude réalisée en Afrique du Sud a indiqué qu'un tiers des 15-24 ans avaient été informés sur le VIH/sida à l'école.
    —Sagine Damas
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