 |
Choi
Young-Jin, Représentant permanent de la République
de Corée, Président de la Première Commission
© Photo Chronique ONU |
Lors de la soixantième session, la Première Commission
a fait face à des décisions et à des choix
difficiles concernant le désarmement, la prolifération
nucléaire et la sécurité internationale.
Le Président de la Commission, Choi Young-Jin (République
de Corée) a dit à la Chronique ONU que la Commission
avait entamé ses travaux dans un " contexte décourageant
", alors que ces questions fondamentales n'ont pas été
traitées dans le Document final du Sommet mondial 2005. Devant
la paralysie qui frappe les mécanismes en matière
de désarmement, tels que la Conférence du désarmement
et la Commission sur le désarmement, ainsi que l'échec
de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération
en 2005, le moral n'était guère brillant. " Aucun
mécanisme de ésarmement ne fonctionnait, tout est
fini, c'est le point mort ", a expliqué l'ambassadeur,
ajoutant que la Commission était " le seul grand événement
du jour ".
La Commission s'est ouverte sur une " impasse entre les pays
du Nord (les pays développés) et les pays du Sud (les
pays en développement) ", a indiqué M. Choi.
Ceci a constitué un obstacle important durant les délibérations
et, surtout, lors du débat sur les questions de désarmement
et de non-prolifération. Les déclarations sur le désarmement
portaient sur la " réduction des armements existants
". Cette position était en opposition avec l'idée
de non-prolifération, selon laquelle les pays s'engageaient
à ne pas développer de nouvelles armes à condition
de pouvoir garder celles qu'ils possèdent. Les pays du Nord
voulaient centrer essentiellement le débat sur la non-prolifération,
les pays du Sud sur le désarmement.
Avec la menace grandissante de la prolifération nucléaire
et les progrès lents du désarmement nucléaire,
la Commission a toutefois réussi à introduire de nouveaux
projets de résolution et à en réexaminer quelques
anciens. Deux projets de texte exprimant des points de vue divergents
ont été présentés : le premier sur le
respect des accords de non-prolifération nucléaire,
le deuxième sur le respect des obligations en matière
de désarmement nucléaire. Le texte sur les accords
de non-prolifération nucléaire, de limitation des
armements et de désarmement, présenté par les
États-Unis, a été adopté par 163 voix
pour et 10 abstentions, tandis que le texte présenté
par l'Iran sur le suivi des obligations en matière de désarmement
nucléaire fixées à l'issue des Conférences
de 1995 et 2000 a été adopté par 87 voix pour,
56 contre et 26 abstentions.
Pour expliquer les raisons de son abstention, le représentant
de l'Iran a dit qu'une interprétation subjective à
des fins politiques avait sapé le régime de désarmement
et de non-prolifération. Contrairement aux projets précédents
sur le non-respect, ce texte contenait des changements importants
et avait renforcé les soupçons selon lesquels les
États-Unis ne faisaient aucunement confiance aux organisations
internationales compétentes comme l'Agence internationale
de l'énergie atomique (AIEA). De son côté, la
représentante des États-Unis a indiqué qu'elle
avait voté " non " au texte sur le suivi des obligations
en matière de désarmement nucléaire parce qu'il
mettait la prolifération et le non-respect sous le faux couvert
du désarmement nucléaire. Il suffit de voir qui a
parrainé le texte, rien moins que l'État qui, selon
l'AIEA, ne respectait pas ses obligations du TNP il y a un mois
à peine, a-t-elle commenté.
En plus de la résolution traditionnelle intitulée
" Prévention sur une course aux armements dans l'espace
", adoptée par 180 voix, un nouveau texte présenté
par la Fédération de Russie sur les " Mesures
propres à promouvoir la transparence et la confiance dans
l'espace " a été adopté par 178 voix.
Son représentant, Anton Vasiliev, a souligné que la
militarisation de l'espace était une menace qu'il fallait
prendre au sérieux et que tout espoir de dominer l'espace
était illusoire. Selon lui, il fallait combler les lacunes
dans les lois internationales actuelles régissant l'espace
et conclure un nouvel accord international juridique, ce qui empêcherait
toute possibilité de déploiement d'armes dans l'espace.
Un accord sur la non-militarisation de l'espace serait dans l'intérêt
de tous, surtout pour les États dotés de programmes
nucléaires, soit environ 130 pays, a-t-il ajouté.
Le représentant des États-Unis a cependant estimé
qu'on n'avait pas besoin d'une institution internationale pour "
examiner une course aux armements dans l'espace inexistante ".
M. Choi a indiqué qu'à ce stade, " il est trop
tôt pour savoir dans quelle direction évoluera cette
[question] ".
La Commission a également débattu de la question
des armes légères. Trois résolutions sur cinq
ont été introduites pour la première fois,
y compris une résolution adoptée par 177 voix pour
et 1 voix contre, établissant l'impact négatif des
armes légères sur le développement, en particulier
dans les situations de conflit ou d'après-conflit. L'Assemblée
générale a également adopté un instrument
international de marquage et de traçage des armes légères
et de petit calibre illégales. Le texte, adopté par
consensus en juin 2005, visait, entre autres, à faciliter
la coopération et l'assistance internationales en matière
de marquage et de traçage et à renforcer l'efficacité
des accords existants en vue de combattre et d'éliminer le
commerce illicite des armes légères et de petit calibre.
Toutefois, il autorisait les États à détenir
les petites armes nécessaires à leur défense
personnelle et à leur sécurité ainsi qu'à
participer aux opérations de maintien de la paix. Alors que
de nombreuses délégations se sont félicitées
de cet instrument, d'autres ont estimé qu'il n'allait pas
assez loin, rappelant que depuis 1990, les armes légères
et de petit calibre avaient coûté la vie à 4
millions de personnes et forcé 18 millions à quitter
leur maison ou leur pays.
Sylvester Ekundayo Rowe (Sierra Leone) s'est dit préoccupé
par la réticence concernant la création d'un instrument
juridiquement contraignant visant à permettre aux États
de procéder au marquage et au traçage des armes légères
et de petit calibre. Dans le préambule du Programme d'action
2001, a-t-il indiqué, plusieurs points ont été
soulevés, notamment les conséquences humanitaires
et socio-économiques de la prolifération de ces armes.
Alors que le Programme n'est pas une convention internationale mais
plutôt une déclaration politique, a-t-il ajouté,
le commerce illicite des armes légères et de petit
calibre est international par nature et seul un instrument international
contraignant juridiquement pourrait être efficace. Les pays
se réuniront en juillet 2006 pour la Conférence d'examen
du Programme d'action, qui sera une occasion de réévaluer
les travaux sur la question du marquage et du traçage de
ces armes depuis 2001.
La résolution omnibus sur le " désarmement nucléaire
", parrainé par le Myanmar et d'autres pays non-alignés,
qui élargit les mesures de désarmement, a été
approuvée par 113 voix pour, 45 voix contre et 20 abstentions.
Un autre texte sur la " Réduction du danger nucléaire
" a suivi un modèle de vote similaire. Présenté
par l'Inde, il demande que des mesures urgentes soient prises, en
particulier par les cinq États dotés d'armes nucléaires,
afin de réduire les risques d'emploi involontaire ou accidentel
des armes nucléaires.
Le Japon et la Coalition pour un nouvel ordre du jour - composée
de l'Afrique du Sud, du Brésil, de l'Égypte, de l'Irlande,
du Mexique, de la Nouvelle-Zélande, de la Slovénie
et de la Suède - ont présenté des versions
révisées de leurs résolutions annuelles et
ont engagé des consultations. La résolution de la
Coalition " Vers un monde exempt d'armes nucléaires
: accélérer la mise en uvre des engagements
sur le désarmement nucléaire ", a été
adoptée par 153 voix pour, 5 voix contre et 20 abstentions.
La Coalition a soutenu la résolution présentée
par le Japon, intitulée " Détermination renouvelée
vers l'élimination complète des armes nucléaires
", qui a été adoptée par 168 voix pour,
2 voix contre et 7 absentions.
Malgré la controverse sur la capacité de la Conférence
sur le désarmement à résoudre cette question,
le " Rapport de la Conférence sur le désarmement
" a été adopté sans vote. Le texte souligne
que l'Antarctique devait être réservé aux seules
activités pacifiques et ne devienne ni le théâtre
ni l'enjeu de différends internationaux. Cette résolution
avait été adoptée pour la dernière fois
en 2002, ce qui marque une différence par rapport à
la manière dont la Commission adopte les résolutions.
En effet, chaque question est examinée sur une base annuelle
afin de revoir les décisions et d'en prendre de nouvelles
en fonction de nouveaux facteurs. En examinant une question tous
les trois ans, la Commission accélère ses procédures
et est plus efficace à long terme.
Les délégués se sont penchés sur la
revitalisation et la réforme de la Commission, en particulier
sur l'ordre du jour et les débats. Pour améliorer
les négociations et les débats, l'idée d'un
" débat thématique " a été
proposée et mise en pratique. " Nous avons renforcé
le débat thématique ", a déclaré
le Président de la Commission. Avant, il y avait seulement
le débat général, ce qui a été
critiqué parce qu'il durait trop longtemps, chaque pays estimant
qu'il était nécessaire de faire une déclaration.
Le débat thématique facilite les interactions, tandis
que le débat général, où les représentants
lisent des déclarations pendant des heures, a un impact relativement
limité, a commenté M. Choi. Il a exprimé l'espoir
que les débats thématiques aient un " rôle
plus marqué ".
Pour la première fois dans son histoire, la Première
Commission a inclus des organisations non gouvernementales dans
le processus de délibération sur les questions de
sécurité internationale. Dans son discours de clôture,
M. Choi a dit que la prévention des tragédies potentielles
du XXIe siècle, en particulier celles que peuvent causer
la dégradation de l'environnement ou la prolifération
nucléaire, " ne serait pas possible tant que les pays
poursuivront des intérêts nationaux ". Il a conclu
en disant que " l'intérêt national étroit
et l'esprit de clocher menaçaient notre existence même
et nécessitaient une action collective ".
|