La douleur dans le dos fut si vive que Wisdom Nutrakor, un expert
en commerce agricole de 48 ans habitant à Accra, au Ghana,
a dû s'arrêter sur le bord de la route. Il n'irait pas
travailler aujourd'hui. Il a téléphoné à
sa femme, une infirmière agréée, et a décidé
qu'il était temps de se faire soigner. Une fois arrivé
aux urgences, cet Africain grand et fier a souffert d'une paralysie
partielle - la perte de sensation dans les membres inférieurs
et l'incapacité de marcher.
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Atteint d'une
tumeur cancéreuse au poumon, Wisdom Nutakor a souffert
d'une paralysie des membres inférieurs. Traité
par radiothérapie puis par chimiothérapie, il
se porte bien et peut de nouveau marcher. Photo/David Kinley/IAEA |
Le docteur Joel Yarney, un oncologue récemment diplômé,
a regardé l'IRM. " Vous avez une tumeur aux poumons
qui exerce une pression sur la colonne vertébrale, ce qui
provoque la douleur et la paralysie ", a-t-il expliqué.
" Le mieux que l'on puisse faire, c'est d'alléger la
douleur. " Un traitement de radiothérapie au cobalt
d'un mois lui a été prescrit. " Le docteur Yarney
avait peu d'espoir que je m'en sorte ", a expliqué M.
Nutakor. " Je pensais que je serais grabataire le restant de
ma vie. " Mais les miracles existent. La dose quotidienne de
radiation a réduit la tumeur et, à la fin du traitement,
M. Nutakor était guéri et éprouvait de nouveau
des sensations dans les jambes. Avec une chimiothérapie complémentaire,
il pourrait marcher avant six mois, et avec une réadaptation
physique, reprendre le travail dans l'année et retrouver
une vie normale auprès de sa femme et de sa fille. "
Mes médecins et ma famille avaient peur de me dire que mes
problèmes étaient dus au cancer ", a-t-il commenté.
" Mais mon cas prouve que, même en Afrique, le cancer
n'est plus une sentence de mort. "
Avec l'augmentation de l'espérance de vie, l'incidence du
cancer augmente dans les pays en développement. " Au
Ghana, les formes de cancer les plus courantes sont le cancer du
poumon et de l'sophage chez les hommes, et le cancer du sein
et du col de l'utérus chez les femmes ", a indiqué
le docteur K. Frimbourg-Boateng, directeur exécutif de Korbe
Bu Teaching Hospital, le centre de traitement le plus vaste et le
mieux équipé du Ghana, offrant des services de radiothérapie,
de chirurgie et de chimiothérapie. Tandis que le nombre de
cancers ne cesse d'augmenter, les Ghanéens sont de plus en
plus nombreux à recourir à un traitement moderne.
Toutefois, les statistiques montrent que l'insuffisance des services
prend des proportions de crise : avec une population de
20 millions d'habitants, on peut s'attendre à ce que 20 000
nouveaux cas de cancer soient diagnostiqués chaque année.
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Alors que l'incidence
des cancers augmente, les patients sont de plus en plus nombreux
à se rendre dans les centres de traitement. Photo/Rodolfo
Quevenco/IAEA |
Le Korle Bu Hospital, qui a été construit avec l'aide
du programme de coopération technique de l'Agence internationale
de l'énergie atomique (AIEA), a commencé à
traiter les patients en 1997, bien que sa capacité dépasse
à peine
1 000 patients par an, tandis qu'un deuxième centre a été
ouvert en 2004 à l'Anolye Hospital à Kumasi avec l'assistance
de l'AIEA. Toutefois, même avec l'extension de ces deux centres
et la construction d'un troisième centre dans la province
du nord prévue dans cinq ans, seulement environ 6 000 patients
atteints d'un cancer pourront être traités au Ghana.
Une telle insuffisance de centres de soins et de personnel qualifié
peut aussi survenir dans des pays à revenus bas et moyen.
Comme l'a décrit le directeur général de l'AIEA,
Mohamed ElBaradei, " étant donné le manque d'accès
actuel à la radiothérapie, ainsi qu'à la médecine
nucléaire pour le diagnostic et le traitement, nous n'avons
pas de temps à perdre
seulement des vies seront perdues
si nous n'agissons pas ".
Le cancer est un problème mondial et sa prévalence
augmentera considérablement au cours des dix prochaines années,
en particulier dans les pays en développement. Chaque année,
la maladie (sans compter le cancer de la peau) est diagnostiquée
chez plus de 10 millions de personnes, dont plus de la moitié
dans les pays en développement. Selon l'Organisation mondiale
de la santé (OMS), 12,5 % de tous les décès
dans le monde sont dus au cancer - un plus grand pourcentage que
ceux qui sont causés par le VIH/sida, la tuberculose et le
paludisme réunis. Alors que le cancer est perçu comme
une maladie touchant principalement les pays industrialisés,
où il est la deuxième cause de décès,
il figure parmi les trois causes principales de décès
dans les pays en développement. Il est probable que près
de 16 millions de personnes en seront atteintes en 2020. Les pays
en développement pauvres manquent de traitements qui permettent
de sauver la vie ou améliorer la qualité de la vie.
Ils représentent 85 % de la population mondiale mais n'ont
à leur disposition qu'un tiers des centres de traitement.
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Pour nombre de
personnes, un diagnostic de cancer a un effet dévastateur
Photo/Rodolfo Quevenco/IAEA |
Le cancer le plus fréquent est celui du poumon, le cancer
du sein étant prédominant chez les femmes. De plus,
dans les pays en développement, le cancer du col de l'utérus
est responsable de 200 000 décès par an. Or, cela
pourrait être aisément évité, cette maladie
étant guérissable si elle est décelée
à temps par des méthodes de dépistage, comme
le frottis vaginal ou la mammographie dans le cas du cancer du sein.
Toutefois, peu de femmes effectuent un test de dépistage
à cause du manque de sensibilisation ou de ressources. Mais
il n'existe pas encore de méthodes de dépistage efficaces
pour d'autres formes de cancer, comme celui du poumon. Trop souvent,
le cancer est décelé lorsqu'il est déjà
développé et que des symptômes, comme la toux,
une grosseur ou des saignements, sont apparus. Pour prouver la présence
de cellules cancéreuses, il est presque toujours nécessaire
de faire une biopsie, qui consiste en une ablation et un examen
des tissus prélevés dans la zone affectée.
Un examen physique complet et d'autres tests, y compris des radiographies
et un scanner, sont généralement requis pour déterminer
la cause, le " stade " et l'étendue du cancer.
La qualité du traitement dépend de nombreux facteurs
: la zone affectée; le type histologique et le stade du cancer;
ainsi que l'âge du patient. Le pronostic dépend aussi
de la disponibilité des centres de traitement adéquats
et de la compétence des professionnels de santé.
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On peut s'attendre
à ce que 20 000 nouveaux cas de cancer soient diagnostiqués
chaque année au Ghana. Le Korle Bu Hospital est le centre
de traitement le plus vaste et le mieux équipé
du pays mais sa capacité dépasse à peine
1 000 patients par an.
Photo/David Kinley/IAEA |
Le traitement par radiation, ou radiothérapie, est un traitement
efficace pour plus de 50 % des cancers. L'énergie délivrée
détruit ou endommage le matériel génétique
des cellules, les empêchant de se reproduire. Même si
la radiation détruit à la fois les cellules cancéreuses
et les cellules saines, avec une dose et une utilisation adéquates,
les cellules saines peuvent réparer leur ADN et fonctionner
normalement. La radiothérapie peut être utilisée
conjointement avec la chimiothérapie ou la chirurgie pour
traiter des tumeurs localisées, telles que dans le cas de
cancers de la peau, du larynx, du cerveau, du sein et de l'utérus,
ainsi que le cancer des cellules du sang et du système lymphatique,
comme le lymphome. Mais comme tous les traitements du cancer, la
radiothérapie peut entraîner des effets secondaires,
y compris la chute des cheveux, l'irritation ou une décoloration
de la peau et la fatigue.
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Une patiente reçoit
un traitement. Les formes du cancer les plus courantes chez
les Ghanéennes sont le cancer du sein et le cancer du
col de l'utérus. Avec un diagnostic précoce, ces
cancers peuvent être traités efficacement.
Photo/David Kinley/IAEA |
Les pays en développement font face à une dure réalité
: des systèmes de santé saturés avec un dépistage
du cancer insuffisant, des diagnostics effectués tardivement,
alors qu'il pourrait en être autrement, et un traitement non
curatif. L'AIEA estime qu'environ 5 000 centres et systèmes
de soins, y compris des médecins et un personnel de santé
qualifié, sont nécessaires pour aider les pays à
revenus bas et moyen à combattre le cancer. Elle a intensifié
ses efforts afin d'aider les patients à survivre en leur
donnant accès à un diagnostic précoce et à
un meilleur traitement. Mais le matériel seul ne résoudra
pas le problème, et l'établissement de nouveaux centres
de traitement est un long processus qui nécessite le soutien
gouvernemental et une stratégie de lutte contre la maladie
à l'échelle nationale.
La radiothérapie comprend la formation du personnel, la
planification et la construction d'établissements, la spécification
et l'acquisition de matériel, son installation, la mise en
service, la création de protocoles et de manuels de procédures
ainsi que le développement de programmes de contrôle
de la qualité. L'AIEA aide les pays à faire face à
cette tâche immense et participe actuellement à l'amélioration
des établissements, à la formation du personnel et
au contrôle de la qualité des soins dans environ 100
pays dans le monde. Seulement 2 400 appareils de radiothérapie
sont actuellement en service. Près de 15 pays en Afrique
et d'autres en Asie en sont toujours dépourvus. L'Éthiopie,
avec plus de 70 millions d'habitants, n'a qu'un seul appareil, tandis
que dans de nombreux pays en développement, la capacité
de traitement est encore inférieure. Avec le soutien de l'AIEA,
toutefois, des centres modernes de radiothérapie ont été
établis en Éthiopie, au Ghana, en Namibie, en République
unie de Tanzanie, en Ouganda et en Mongolie. Un quatrième
centre a été ouvert au Nigeria, tandis que dans d'autres
pays, y compris en Angola, en Érythrée, à Haïti,
au Yémen et en Zambie, la radiothérapie commence à
se développer avec l'appui de l'AIEA.
L'AIEA apporte également son appui à la formation
en radiothérapie, qui comprend un programme national d'éducation
et de formation destiné aux techniciens et au personnel soignant
tenant les registres, y compris les radiologues. Des projets ont
été mis en place pour aider les pays de l'Europe du
Sud-Est et de l'ex-Union soviétique à sortir des conflits
et d'une situation économique difficile. Dans la plupart
des cas, ces pays ont pu garder leurs médecins spécialisés
dans le pays mais ont dû reconstruire et moderniser les établissements.
Les activités de l'AIEA vont de la simple fourniture d'un
système de planification des traitements à la réorganisation
complète d'un service de radiothérapie. Toutefois,
il n'existe aucun programme global de traitement du cancer associant
soins multidisciplinaires, formation et besoins en ressources.
L'AIEA a pour but d'" accélérer et d'augmenter
la contribution de l'énergie atomique à la paix, à
la santé et à la prospérité dans le
monde ". Elle a démontré son expertise technique
et son expérience dans le diagnostic et le traitement du
cancer, en particulier en mettant en place des services de radiothérapie
efficaces et bien équipés. Avec plus de 150 millions
de dollars versés aux pays en développement dans le
cadre de la lutte contre le cancer, l'expérience de l'AIEA
acquise au cours des 25 dernières années démontre
que le transfert de la technologie et des compétences en
radiothérapie aux pays moins développés est
possible. De leur côté, les pays récipiendaires
ont engagé des investissements aussi importants, voire plus,
permettant à nombre d'entre eux de créer pour la première
fois des centres de radiothérapie fiables et efficaces.
Toutefois, l'AIEA ne possède pas les ressources nécessaires
pour répondre efficacement à la crise qui s'annonce.
Les besoins actuels qui, selon les projections, devraient augmenter
de plus de 50 % au cours des 15 à 20 prochaines années
et représenter un coût de plusieurs milliards de dollars,
ce qui est au-delà des moyens financiers dont dispose l'Agence.
Pour répondre à ce défi et à l'appel
à l'action lancé par l'OMS et l'Union internationale
contre le cancer (UICC), l'AIEA a lancé le Programme d'action
pour le traitement du cancer (PACT). Il aura pour but de déterminer
les ressources légales, techniques et humaines nécessaires
pour établir, améliorer et élargir les programmes
de traitement au moyen de la radiothérapie dans le cadre
de stratégies de contrôle nationales et en fonction
des priorités et des besoins des pays et des régions
concernés.
Le PACT a pour objectif de construire une alliance mondiale pour
répondre aux défis du cancer dans les pays en développement,
sous tous ses aspects, en mettant l'accent sur le traitement; d'assurer
le transfert efficace et durable des capacités en radio-oncologie
et oncologie nucléaire aux pays qui en ont besoin; et de
mobiliser les ressources venant des associations caritatives, des
fondations et des secteurs public et privé pour le bénéfice
des patients. Le PACT présente également des objectifs
ambitieux pour les 15 prochaines années, avec l'élaboration
d'un plan stratégique pour s'attaquer au problème
du cancer dans les pays en développement. Par son biais,
l'AIEA orientera ses efforts sur son domaine d'expertise, la radiothérapie
et la médecine nucléaire, tout en construisant une
alliance pour lutter contre le cancer.
En coopération avec l'OMS, l'UICC, la Société
américaine du cancer, l'Agence internationale pour la recherche
sur le cancer, l'Institut national du cancer aux États-Unis
et le Réseau international pour le traitement et la recherche
en cancérologie, le PACT évaluera les besoins nationaux,
créera des projets pour mettre en place l'infrastructure
nécessaire dans des pays en développement sélectionnés
et lancera un programme et une collecte de fonds à l'échelle
mondiale.
L'AIEA reconnaît que seules, la planification et la mise
en place de capacités pour le traitement du cancer ne suffisent
pas. Le traitement est plus efficace lorsqu'il s'inscrit dans un
ensemble de mesures, comme la prévention, le dépistage
et le diagnostic, le traitement, la rééducation et
les soins palliatifs. Selon elle, plusieurs milliards de dollars
seront nécessaires au cours des dix prochaines années
pour fournir aux pays en développement des centres de traitement
et du matériel adéquats et former des spécialistes
et des médecins pour assurer les soins de santé. L'objectif
de l'Agence est de combler cet important manque de ressources et
de venir en aide à des millions de personnes atteintes d'un
cancer comme Wisdom Nutakor.
S'appuyant sur l'expérience de l'AIEA et de ses partenaires,
le PACT et son alliance contre le cancer a pour objectif de sensibiliser
l'opinion publique, d'établir des partenariats stratégiques
afin d'élaborer des stratégies et des programmes de
contrôle du cancer nationaux, de contribuer à créer
des centres de radiothérapie dotés de programmes de
sécurité et de protection et des centres de compétence
dans les pays en développement afin de favoriser la formation
et la recherche en radiothérapie.
Pour plus d'informations, visitez le site de l'AIEA www.iaea.org
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