Chronique ONU

CONSENSUS ET ENGAGEMENT POUR LA PRESERVATION ET LA GESTION DURABLE DES FORÊTS MONDIALES

Par Daniel Shepard et Renata Sivacolundhu

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L'article

Longtemps considérées une ressource économique et environnementale d'une valeur inestimable, les forêts mondiales perdent 200 km2 chaque jour -l'équivalent de la superficie de l'Allemagne tous les cinq ans. La plus grande partie de cette perte est due à la conversion des forêts en terres agricoles ou pour l'élevage.

Le problème n'est pas que le déboisement et la destruction des forêts sont passés inaperçus auprès des responsables politiques, ce n'est pas le cas, mais qu'aucun plan mondial réalisable n'a été à ce jour mis en place pour gérer et préserver les forêts. Toutefois, après des années de discussions intenses, les pays ont finalement trouvé un terrain d'entente lors du Sixième session du Forum des Nations Unies sur les forêts. Ils se sont engagés à améliorer la gestion des forêts en prenant des mesures pour préserver et augmenter la couverture de celles-ci et réaliser leur potentiel économique optimal, ainsi que pour accroître l'aide aux pays en développement.

Exploitation forestière illégale et déforestation au Malawi PHOTO FAO/A. CONTI

Selon Pekka Patosaari, directeur du Secrétariat du Forum de l'ONU sur les forêts, le nouveau consensus n'a pas été établi sur des idées originales ou des accords historiques mais, plutôt, sur la volonté de mettre en œuvre les recommandations déjà proposées. " En fait, on a abordé maintes fois ces questions ; il n'y a rien de nouveau. Mais ce qui est important c'est que nous avons maintenant un haut niveau d'engagement et que le Forum a pris des mesures importantes pour établir des règles au niveau mondial et un cadre normatif afin de favoriser une gestion forestière durable dans le monde. Les engagements envers les objectifs mondiaux et les moyens de les mettre en œuvre seront soutenus par le rapport des pays sur les progrès réalisés pour atteindre ces objectifs ", a-t-il indiqué.

Même si cette nouvelle résolution n'est pas le traité international ou la convention sur la gestion forestière durable que certains espéraient, il y a lieu d'être optimiste pour l'avenir des forêts du monde et le 1,6 miliard de personnes qui en dépendent. M. Patossari a souligné que cet accord marquait un tournant en matière de politiques forestières internationales. " Il est évident que les États Membres veulent avancer. S'il est bien structuré, fondé sur les décisions prises antérieurement et développé, cet instrument, même s'il est juridiquement non contraignant, peut jouer un rôle important ", a-t-il ajouté. " Tout repose sur l'engagement politique. "

Et la détermination des États Membres sera vite testée. Les pays se sont mis d'accord pour conclure et adopter dès avril 2007 un instrument juridiquement non contraignant concernant tous les types de forêts. Les négociations internationales d'un accord sur la gestion, la préservation et la plantation des forêts ont été laborieuses et controversées pendant les deux dernières décennies. Alors que des inquiétudes avaient été exprimées concernant le déboisement lors du Sommet de la Terre de 1992 à Rio de Janeiro, les négociations sur les forêts avaient été particulièrement difficiles et s'étaient conclues par un ensemble de principes non contraignants. Au cours des deux décennies suivantes, les pays ont continué de débattre et d'analyser les questions complexes dans divers forums intergouvernementaux mais les efforts visant à établir des engagements internationaux contraignants plus concrets ont été, jusqu'ici, infructueux. Aux pays favorables à un instrument plus efficace s'opposaient ceux qui craignaient qu'un nouvel instrument international n'engendre des coûts élevés et soit difficile à mettre en œuvre, sans garantie de succès.

Les objectifs mondiaux sur les forêts, tels qu'ils ont été fixés par le Forum de l'ONU sur les forêts lors de sa sixième session visent à :

  • inverser la tendance à la déforestation et à augmenter les efforts pour empêcher la dégradation des forêts;
  • augmenter de manière significative la surface des forêts protégées et la proportion des produits forestiers provenant de forêts en gestion durable;
  • augmenter les avantages économiques, sociaux et écologiques tirés des forêts, notamment en améliorant les moyens de subsistance des populations qui dépendent d'elles;
  • inverser la baisse de l'aide publique au développement en faveur de la gestion forestière durable et mobiliser de nouvelles ressources financières.

Les forêts couvrent un tiers de la superficie de la Terre, soit un peu moins de 4 milliards d'hectares. On estime que près de 24 % de la population mondiale dépend, à divers degrés, des forêts comme moyen de subsistance. Elles offrent également une grande variété de produits et de services : nourriture, bois de chauffage, matériaux de construction, plantes et faune, ressources en eau, et jouent un rôle important dans la conservation des sols, même dans la régulation du climat.

Leur importance est un aspect souvent négligé dans les débats. Contrairement à la plupart des autres biens communs dont la protection et la gestion nécessitent une responsabilité partagée, les forêts ont la capacité de générer des activités autofinancées pour leur propre protection tout en fournissant des moyens de subsistance durables. Le commerce des produits du bois représente plus de 150 milliards de dollars et le secteur emploie 13 millions de personnes, presque l'équivalent de la population de la Norvège et de la Suède réunies.

Toutefois, les pays ne sont pas tous en mesure de gérer les ressources - une bonne gouvernance est un facteur primordial pour exploiter ou gérer les forêts de manière durable.
" Les forêts sont précieuses ", a indiqué M. Patosaari. " Bien gérées, elles sont une source de richesses inépuisable. On pourrait financer une grande partie des projets pour arrêter le déboisement en utilisant seulement les ressources existantes. Mais la réalité est tout autre. Les terres occupées par les forêts sont souvent considérées plus importantes pour l'agriculture et les pâturages que pour la foresterie, l'agroforesterie ou les " puits de carbone " qui contribuent à réduire les effets du changement climatique. Le déboisement n'est pas inévitable, a-t-il poursuivi.

" Nous parlons du déboisement comme si c'était une loi de la nature. Mais non. Il est causé par l'homme, et l'on peut donc l'inverser. " D'après lui, il faut prendre de nombreuses mesures aux niveaux international et local pour augmenter la rentabilité économique des forêts. L'inégalité d'accès aux marchés mondiaux, les mécanismes internationaux de fixation des prix et de taxations ou les accords sur les droits d'importation défavorables empêchent les pays en développement d'exploiter leurs ressources forestières de manière durable. Et au niveau local, une bonne gouvernance, qui élimine la corruption et les mécanismes défavorables comme les subventions agricoles gouvernementales, peut jouer un rôle vital dans la gestion forestière durable.

M. Patosaari a souligné que la propriété locale des forêts est essentielle. " Il faut encourager les gens à créer des forêts, à maintenir, à conserver et à utiliser ces ressources naturelles. " Plusieurs pays ont déjà fait de grands progrès en matière de gestion forestière. " Le Brésil, par exemple, est actuellement sur le point d'adopter ces quatre objectifs mondiaux dans le cadre de sa politique nationale ", a-t-il expliqué. La République du Congo change ses pratiques commerciales et applique les principes d'une gestion forestière durable afin que les communautés locales profitent des accords entre les entreprises européennes et nordiques. La Chine a planté de nouvelles forêts pour protéger les sols et les rivières, tandis que le Costa Rica est un des premiers pays à collecter des redevances et à fournir des services environnementaux.

Dans son pays d'origine, la Finlande, dont 60 % des terres sont boisées, M. Patosaari a noté que la gestion forestière par des particuliers ou des familles était une passion et une source importante de revenus. De plus, la plupart des forêts sont une source importante de biodiversité, 10 % étant des réserves et des zones protégées, principalement pour conserver la biodiversité et pour les loisirs. " Si vous survolez la Finlande, vous voyez des forêts et des lacs. La campagne est couverte de forêts et c'est un élément important du style de vie. "

" Nous avons aussi un ancien droit d'accès libre aux forêts, quel qu'en soit le propriétaire ", a-t-il ajouté. " Il n'y a pas de clôtures, on peut cueillir des baies et ramasser des champignons. Et on peut même y passer la nuit et, au besoin, faire un feu de camp. Ce droit d'accès a fait naître parmi les citoyens un sens de la responsabilité et le respect pour la nature. "

Biographie

Daniel Shepard, fonctionnaire de l'information au Département de l'information de l'ONU (DPI), a beaucoup travaillé sur les questions du développement durable. En plus des articles et des rapports réalisés sur le développement social et environnemental, il a été rédacteur de CHOICES, publié par le Programme de l'ONU pour le développement.

Renata Sivacolundhu, fonctionnaire de l'information au DPI, travaille sur les droits de l'homme et l'établissement du nouveau Conseil des droits de l'homme. Elle a travaillé sur les questions du développement durable, notamment la Commission du développement durable, le Forum de l'ONU sur les forêts et la Décennie internationale 2005-2015 intitulée " L'eau, source de vie " Décennie : 2005-2015.

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