Les réfugiés sont " des migrants " au sens
large du terme, pourtant ils continuent d'être une catégorie
à part. Comme il est énoncé dans la Convention
de 1951 relative au statut des réfugiés, ils se trouvent
hors du pays dont ils ont la nationalité et ne peuvent ou
ne veulent pas y retourner, craignant avec raison d'être persécutés
du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité,
de leur appartenance à un certain groupe social ou à
leurs opinions politiques. Au cours des années, le concept
de réfugié s'est élargi pour inclure d'autres
personnes qui ont fui des événements qui posaient
une menace sérieuse à leur vie et à leur liberté.
Ce qui différencie les réfugiés des autres
migrants est qu'ils ont droit à une protection internationale
et ont le droit de demander et de recevoir l'asile dans un autre
État.
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Un patrouilleur
des gardes-côtes italiens intercepte au large des côtes
de Lampedusa, en Italie, une embarcation bondée en provenance
de l'Afrique. PHOTO HCR/L. BOLDRINI |
Dans un grand nombre de pays, les mouvements de réfugiés
et de migrants se recoupent de diverses manières. Les personnes
qui quittent leur pays pour se rendre dans un autre, même
quand elles remplissent les critères de réfugiés,
sont de plus en plus nombreuses à rejoindre des mouvements
de migrants illégaux ou sans papiers, empruntant les mêmes
routes, employant les services des mêmes trafiquants et se
procurant des faux documents de voyage auprès des mêmes
fournisseurs. Si ces similarités n'influent pas sur la différence
fondamentale entre réfugiés et non-réfugiés,
elles ont contribué à rendre la distinction floue.
Les préoccupations relatives à la sécurité
nationale après le 11 septembre 2001, les efforts des États
à réduire le recours abusif aux procédures
de demandes d'asile et le renforcement de la coopération
entre les États pour réduire l'immigration illégale
font qu'il est aujourd'hui plus difficile pour un réfugié
d'obtenir l'asile et la protection. De nombreux États ont
adopté des mesures destinées à prévenir
et à dissuader les étrangers d'entrer sur leur territoire
et de demander l'asile. L'interdiction de naviguer en haute mer
est une pratique de plus en plus courante. Il est également
très inquiétant que les mesures restrictives introduites
pour réduire la migration illégale et lutter contre
le trafic et la traite des êtres humains soient appliquées
sans discernement et empêchent les réfugiés
d'avoir accès aux procédures d'asile d'un autre État
et d'entrer sur le territoire.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon des statistiques récentes
concernant le droit d'asile publiées en septembre 2006 par
le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR), la tendance
à la baisse se poursuit inexorablement dans la plupart des
36 pays industrialisés examinés. En 2005, le nombre
de demandeurs d'asile était le plus bas depuis 1987. Pendant
les premiers mois de 2006, les demandes ont encore baissé
de 14 % par rapport à la même période l'année
dernière. Alors que ce déclin constant peut être
partiellement attribué à l'amélioration des
conditions dans certains pays d'origine, il est aussi probablement
dû à l'introduction de politiques restrictives, notamment
en Europe.
Le Dialogue de haut niveau sur la migration internationale et le
développement, organisé par l'Assemblée générale
de l'ONU en septembre 2006, a sans aucun doute placé la migration
internationale au premier plan de l'agenda mondial. Les participants
ont largement convenu qu'elle pouvait être une force positive
pour le développement à la fois des pays d'origine
et de destination, à condition d'être soutenue par
des mesures adéquates. Ils ont aussi reconnu qu'il était
essentiel de traiter les causes fondamentales de la migration internationale
afin d'assurer que les personnes migrent de leur propre choix et
non par nécessité; cela s'applique aussi aux mouvements
de réfugiés. De nombreux participants se sont engagés
à collaborer étroitement afin de mettre fin à
la migration illégale.
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Des boat-people
à leur arrivée après que leur embarcation
a été interceptée par des gardes-côtes
italiens. PHOTO HCR/L. BOLDRINI |
La présence de réfugiés dans le groupe plus important
de migrants, dont certains peuvent aussi recourir à une demande
l'asile pour entrer dans un pays étranger, confronte la communauté
internationale et le HCR à des défis importants. Un
des premiers objectifs est d'assurer une réponse efficace et
cohérente aux mouvements migratoires " mixtes ",
notamment la protection des réfugiés et des demandeurs
d'asile. Le nombre de bateaux qui partent de l'Afrique subsaharienne
et traversent la Méditerranée est un bon exemple. Alors
que le modèle de migration que l'on voit en Méditerranée
aujourd'hui n'est pas en soi une situation de " réfugiés
", un nombre de personnes qui cherchent l'asile et la protection
en fait cependant partie. En plus de sauver des vies, il faut mettre
en place des procédures pour identifier ceux qui ont des motifs
valables d'asile. Il est également important de veiller à
ce que les mesures prises pour réduire la migration maritime
illégale n'empêchent pas les réfugiés d'avoir
accès à la protection à laquelle ils ont droit.
Il faut aussi établir clairement les rôles et les responsabilités
des différents acteurs impliqués - tels que les pays
d'origine et de transit, les organisations internationales et les
compagnies de navigation - lorsque les personnes sont interceptées
ou rescapées en mer. Il convient aussi de s'assurer que les
personnes qui ont voyagé ou qui comptent voyager trouvent une
solution définitive à leur situation, qu'elles aient
le statut de refugié ou non.
Les États ont, bien entendu, le droit légitime de
contrôler et de renforcer leurs frontières, mais ce
droit n'est pas sans contraintes. L'interception en mer et les mesures
pour réduire la migration illégale ne devraient pas
entraîner la violation du principe de non-refoulement, qui
est la pierre angulaire du droit international des réfugiés
et empêchent de renvoyer les personnes dans des pays où
leur vie et leur liberté sont menacées. Il est donc
important que les ministres de la Justice et de l'Intérieur
de l'Union européenne se soient mis d'accord en octobre 2006
pour que les mesures destinées à renforcer les frontières
maritimes extérieures au sud de l'Union et à lutter
contre la migration en haute mer soient appliquées "
sans préjudice des principes énoncés dans les
instruments juridiques internationaux relatifs au droit de la mer
et à la protection des réfugiés ".
D'autre part, après un certain nombre d'années, les
réfugiés peuvent également devenir " des
migrants ". Un grand nombre d'entre eux ont réussi à
s'établir et à devenir des membres productifs de leur
pays d'accueil. Ils peuvent choisir de rester dans ce pays, même
s'ils ne font plus l'objet de persécutions dans leur pays natal
ou peuvent décider de travailler dans un autre pays. Dans de
tels cas, il est important de veiller à ce que tous les réfugiés
puissent bénéficier des droits de l'homme et des normes
de travail auxquelles ils ont droit en tant que migrants. La distinction
floue entre réfugié et migrant peut même être
bénéfique, à condition que les réfugiés
ne pouvant pas retourner dans leur pays d'origine continuent de recevoir
la protection à laquelle ils ont droit en vertu du droit international.
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