LE RÔLE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL:
Une histoire personnelle
Par Jean Gazarian
Comme le disait si bien
Trygve Lie à propos du rôle de Secrétaire général,
Ban Ki-moon hérite de " la tâche la plus difficile
dans le monde ". La Charte des Nations Unies incluait le Secrétariat
parmi ses organes principaux, plus certainement pour attribuer des
prérogatives politiques au Secrétaire général.
La Charte définit le Secrétaire général
comme " le plus haut fonctionnaire de l'Organisation " et
stipule qu'il " est autorisé à attirer l'attention
du Conseil de sécurité sur toute affaire qui, à
son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la
sécurité internationales ".
La création des Nations Unies a suscité un immense enthousiasme.
Les délégués étaient convaincus qu'ils
avaient adopté un système de sécurité
collective qui empêcherait de nouvelles guerres, un sentiment
partagé par le Norvégien Trygve Lie, qui a été
le premier Secretaire général de 1946 à 1952.
Le Suédois Dag Hammarskjöld a pris ses fonctions en 1953,
à un moment où la situation commençait à
se détériorer et où l'euphorie initiale laissait
place aux tensions qui opposaient l'Est et l'Ouest. Le Conseil de
sécurité étant paralysé par les nombreux
vetos exercés par l'Union soviétique, M. Hammarskjöld
a souvent eu recours à la diplomatie tranquille, agissant en
tant que médiateur discret. À plusieurs occasions, à
la tribune de l'Assemblée générale, il a répondu
publiquement aux attaques de Nikita Khrouchtchev d'URSS, qui avait
préconisé le remplacement du Secrétaire général
par trois membres - un membre représentant l'Est, un autre
l'Ouest et un autre le Sud - la fameuse " troïka ".
U Thant de Birmanie (aujourd'hui le Myanmar) jouissait d'une réputation
établie dans le milieu diplomatique lorsqu'il a été
nommé en novembre 1962 pour remplacer Dag Hammarskjöld,
qui avait péri avec quinze collaborateurs dans un accident
d'avion alors qu'il se rendait en Afrique. Humble mais ayant des convictions
très fermes, il a fait triompher à l'Assemblée
générale et pendant ses missions à l'étranger
la stratégie des " trois D " : décolonisation,
désarmement et développement ". Il a souvent eu
recours à la diplomatie tranquille pour apaiser les tensions
explosives pendant la période difficile de la guerre froide.
Avant d'être nommé le quatrième Secrétaire
général de 1972 à 1981, l'Autrichien Kurt Waldheim
avait assumé de nombreuses fonctions diplomatiques, notamment
en tant que représentant permanent auprès des Nations
Unies et ministre des Affaires étrangères. Durant son
mandat, il s'est rendu dans les zones de conflit posant des problèmes.
La nomination du Péruvien Javier Pérez de Cuéllar
fut pour lui une surprise totale alors qu'il venait de prendre sa
retraite. Ayant été représentant permanent et
secrétaire général adjoint aux affaires politiques
spéciales, il connaissait les Nations Unies de A à Z.
Il a considérablement contribué à résoudre
les conflits en Amérique centrale et a désamorcé
la guerre entre l'Iran et l'Irak. Pendant son mandat de dix ans en
tant que Secrétaire général de 1982 à
1991, de nombreuses sources de tension associées à la
guerre froide ont été progressivement éliminées.
L'Égyptien Boutros Boutros-Ghali a occupé le poste de
1992 à 1996. Avant d'être nommé Secrétaire
général, il avait assumé d'importantes fonctions,
notamment en tant que ministre des Affaires étrangères
et négociateur des Accords de Camp David entre l'Égypte
et Israël en 1979.
Avant d'être nommé Secrétaire général
en 1997, le Ghanéen Kofi Annan, qui était entré
à l'ONU en 1962, avait 35 ans de carrière derrière
lui. Sa première initiative importante fut le lancement de
son plan de réforme " Rénover les Nations Unies
". En 2000, il a publié un rapport qui a servi de base
à la Déclaration du Millénaire, adoptée
par les chefs d'État et de gouvernement en septembre 2000.
Le premier poste du Sud-coréen Ban Ki-moon à l'ONU remonte
à 1975. Avant d'être nommé huitième Secrétaire
général, il était ministre des Affaires étrangères.
Quand il a prêté serment le 14 décembre 2006,
il a créé un précédent en plaçant
la main gauche sur la Charte de l'ONU. Il a déclaré
: " En renforçant les trois piliers de l'ONU, à
savoir développement, sécurité et droits de l'homme,
nous pourrons édifier un monde plus prospère, plus pacifique
et plus juste pour les générations à venir. À
mesure que nous poursuivons nos efforts communs pour atteindre cet
objectif, ma priorité numéro un sera de rétablir
la confiance. Je chercherai à réaliser l'harmonie et
à établir des passerelles. J'espère que tous
- États Membres comme fonctionnaires de l'Organisation - pourrez
reconnaître en moi un Secrétaire général
accessible, dévoué à son travail et disposé
à écouter attentivement. " |
Jean Gazarian, qui est entré au Secrétariat de l'ONU
en 1946 en tant que traducteur, a travaillé étroitement
avec plusieurs Secrétaires généraux. Depuis 1987,
il est membre associé à l'Institut des Nations Unies
pour la formation et la recherche (UNITAR). |
Retour Haut
|