Un partenariat spécial avec l'ONU : Un point de vue européen
Par Thomas Matussek
Quand Ban Ki-moon a été
nommé huitième secrétaire général
des Nations Unies le 13 octobre 2006, il a déclaré :
" Les peuples du monde ne seront pleinement servis que si la
paix, le développement et les droits de l'homme - les trois
piliers de l'action de l'ONU - sont promus ensemble, et avec une vigueur
égale. " L'Allemagne et les partenaires de l'Union européenne
soutiennent cet objectif ambitieux qu'il a fixé pour son mandat
à la tête des Nations Unies.
L'Union européenne (UE) s'est profondément engagée
à promouvoir les objectifs et les principes de l'ONU. Nous
sommes convaincus que l'ONU est, et demeure, l'institution centrale
pour un multilatéralisme efficace, le " centre de gravité
" du système multilatéral, tel que décrit
par Javier Solana, haut représentant de l'UE pour la politique
étrangère et de sécurité commune. La coopération
entre ces organisations a considérablement augmenté
et continuera de le faire. Alors que leurs liens sont de plus en plus
étroits, il est dans leur intérêt d'avoir un cadre
qui leur permette de répondre aux défis communs.
Au cours des dernières années, les attentes adressées
aux Nations Unies et par le Secrétaire général
ont été considérablement plus nombreuses. L'ONU
a joué un plus grand rôle pour assurer la paix et de
la sécurité ainsi que pour promouvoir une mondialisation
qui profite à tous les peuples. Pour répondre aux demandes,
la structure interne de l'Organisation doit être adaptée
au XXIe siècle. La réforme de l'ONU demeure donc une
priorité. Un certain nombre d'aspects de ce projet de réforme
ont été réalisés pendant la soixantième
Assemblée générale comme, par exemple, la création
du Conseil des droits de l'homme. La Commission de consolidation de
la paix a été créée pour canaliser les
ressources de la communauté internationale afin de recommander
des stratégies intégrées pour le relèvement
des pays sortant d'un conflit. Le Fonds central de réponse
d'urgence, créé pour répondre rapidement et de
manière opportune aux crises humanitaires, et le Fonds démocratique,
conçu pour soutenir la démocratisation dans le monde,
ont fêté leur premier anniversaire il y a peu de temps.
L'Union européenne est déterminée à promouvoir
les questions inscrites à l'ordre du jour de la réforme,
telle que la gestion de la réforme, l'examen des mandats, la
gouvernance en matière d'environnement, le Groupe de haut niveau
sur la cohérence du système de l'ONU et la réforme
du Conseil de sécurité.
Un projet de réforme important du Secrétaire général
a concerné la désignation, approuvée par l'Assemblée
générale, d'un haut représentant aux affaires
de désarmement et la restructuration des fonctions du maintien
de la paix au sein du Secrétariat de l'ONU. Ces propositions
visent à améliorer la planification des missions sur
le terrain, leur déploiement et l'assistance. L'Union européenne
continuera de soutenir aussi efficacement que possible les efforts
menés par les opérations de maintien de la paix. Étant
donné le nombre d'opérations de la paix sans précédent
qui mobilisent près de 100 000 personnels sur le terrain, et
qui pourraient augmenter de 40 % au cours des prochaines années,
l'Union européenne est appelée à fournir plus
de capacités et de contingents.
Les Nations Unies ont besoin des capacités, de l'expérience
et des compétences que l'Union européenne peut offrir
et celle-ci est déjà prête à y répondre
. Les États Membres de l'UE contribuent non seulement à
un tiers du budget des opérations de maintien de la paix mais
participent également aux différentes opérations.
Par exemple, ils ont joué un rôle important dans la mission
de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban en 2006.
Près de 3 000 casques bleus allemands ont également
servi dans la mission de l'ONU en Afghanistan aux côtés
de soldats de nombreux autres États Membres. L'Union européenne
a aussi répondu favorablement à l'appel de l'ONU pour
soutenir sa mission en République démocratique du Congo
avant et pendant les élections. Dans les Balkans, à
la fois l'ONU et l'Union européenne ont travaillé main
dans la main pour rétablir la paix et la stabilité.
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Le
Secrétaire général Ban Ki-moon (troisième
à partir de la droite) et les autres membres du Quartet
lors d'une conférence de presse donnée après
une réunion du Quartet à Berlin, en Allemagne,
le 21 février 2007. Photo ONU/Mark Garten |
Récemment, le Secrétaire général a indiqué
que la conclusion du processus de détermination du statut futur
du Kosovo était l'une de ses priorités pour 2007. Les
Européens estiment qu'on aurait dû depuis longtemps trouver
une solution à ce conflit qui a eu lieu aux portes de l'Union
européenne. Une solution sera non seulement bénéfique
pour les Kosovars mais aussi cruciale pour la paix et la stabilité
dans la région. Après d'intenses négociations
avec les parties, l'Envoyé spécial des Nations Unies
pour le Kosovo, Martti Ahtisaari, a présenté au Conseil
de sécurité à la fin mars 2007 son propre projet
de statut. En tant que membre du Groupe de contact des Balkans et
pays assumant actuellement la présidence de l'UE, l'Allemagne
apporte son concours.
Comme pour les Nations Unies, la recherche d'une solution pacifique,
durable et complète au conflit du Moyen-Orient est d'une importance
vitale pour l'Union européenne. Alors qu'elle fait participer
les deux parties au conflit aux affaires politiques, l'Union s'attaque
aussi aux défis humanitaires sur le terrain, apportant un appui
considérable aux institutions spécialisées sur
le terrain et aux populations, ainsi qu'aux services liés à
la santé. C'est, cependant, dans le cadre du Quartet sur le
Moyen-Orient que l'ONU et l'Union européenne, avec la Fédération
de Russie et les États-Unis, préparent l'avenir. En
2007, le Quartet réaffirme sa détermination à
uvrer pour la paix et la prospérité - une détermination
partagée avec de nombreux pays voisins et de nombreuses parties
régionales. Unir les efforts pour faire progresser le processus
de paix pourrait ouvrir une nouvelle perspective qui porte la promesse
d'une solution.
La recherche d'une solution diplomatique négociée concernant
le programme nucléaire iranien demeure l'un des défis
les plus urgents. L'Allemagne, la France et le Royaume-Uni, avec le
soutien des États-Unis, de la Fédération de Russie
et de la Chine (appelé E3+3), s'y attellent. Ce groupe partage
les préoccupations du Secrétaire général
face au refus de l'Iran de suspendre ses activités d'enrichissement
de l'uranium et autres activités connexes et de se conformer
aux décisions du Conseil de sécurité. Personne
ne veut nier le droit de l'Iran, énoncé dans le Traité
sur la non-prolifération des armes nucléaires, d'utiliser
l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. Toutefois,
le Conseil a clairement indiqué qu'une coopération et
une transparence de la part de l'Iran étaient indispensables.
Il lui a donc demandé d'adopter les mesures requises par l'Agence
internationale de l'énergie atomique, qui sont essentielles
pour instaurer la confiance dans les fins exclusivement pacifiques
de son programme nucléaire. L'Union européenne appelle
l'Iran à se conformer aux décisions, ouvrant la voie
pour trouver une solution négociée à long terme
à cette question nucléaire. La communauté internationale
doit continuer à être unie et ferme face à l'Iran.
La situation au Soudan figure en tête de l'ordre du jour de
l'UE. L'Union européenne partage les préoccupations
du Secrétaire général concernant la détérioration
continue de la sécurité et des droits de l'homme et
les crises humanitaires au Darfour qui affectent des millions de personnes.
Nous soutenons son appel pour relancer le processus politique et espérons,
comme lui, une réponse positive du gouvernement soudanais aux
propositions de maintien de la paix des Nations Unies, qui ont été
approuvées par l'Union africaine. Après avoir débloqué
quelque 400 millions d'euros pour la Mission de l'Union africaine
au Darfour (AMIS), l'Union européenne s'engage à apporter
des contributions financières supplémentaires à
la mission durant la période qui conduira au déploiement
d'une force conjointe de l'Union africaine et des Nations Unies. Concernant
la Somalie, le Secrétaire général et l'Union
européenne partagent la conviction que tout doit être
fait pour favoriser un dialogue ouvert et crédible et promouvoir
la réconciliation. Un processus politique détaillé
et inclusif, dans lequel toutes les composantes de la société
somalienne sont représentées, est une condition préalable
nécessaire pour assurer la stabilité durable dans le
pays. L'Union est prête à apporter son concours à
cette fin.
L'UE s'est aussi engagée à promouvoir la mise en uvre
des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)
et, à ce titre, a augmenté l'aide publique au développement
avec, comme objectif, d'atteindre 0,7 % du produit intérieur
brut d'ici à 2015. Alors que les progrès réalisés
en Asie et en Amérique latine sont très encourageants,
les défis demeurent considérables en Afrique et en Océanie.
L'Union européenne soutient les efforts visant à fournir
une plus grande assistance dans ces régions. Durant la présidence
de l'Allemagne, l'UE a fait des partenariats de développement
avec l'Afrique l'une de ses priorités.
Sur l'environnement, l'UE s'est également engagée à
réaliser d'importants progrès lors des discussions en
2007. Au début mars, le Conseil européen a pris des
décisions à long terme sur le changement climatique
et les politiques énergétiques. Durant la 15e session
de la Commission du développement durable, l'UE cherchera à
faire progresser les questions liées à l'efficacité
énergétique et aux énergies renouvelables. Elle
participe de manière constructive aux discussions portant sur
la mise en place d'un cadre institutionnel plus cohérent pour
les activités de développement du système de
l'ONU. Elle s'est engagée à renforcer le Programme des
Nations Unies pour l'environnement et à l'actualiser pour qu'il
soit sur le même pied d'égalité que les autres
organes économiques et sociaux de l'ONU.
L'Union européenne a soutenu avec ardeur le Pacte mondial depuis
sa création et est satisfaite de la manière dont le
bureau du Pacte a évolué au cours des années.
L'idée de la responsabilité des entreprises dans un
monde globalisé a des ramifications importantes sur le plan
économique, social, politique et de la sécurité.
Nous voyons le Pacte mondial comme un moyen innovant d'élargir
le rôle des Nations Unies. En engageant le secteur privé
aux activités de l'ONU, il peut offrir d'importants services
au Secrétaire général.
Il appartient à l'Allemagne d'organiser et de coordonner les
travaux des États Membres de l'Union européenne à
New York alors qu'elle assume la présidence de l'UE selon un
système de présidence tournante. Durant cette période,
elle s'emploie à faciliter les discussions et à promouvoir
la contribution de l'Union aux travaux des Nations Unies. Nous pensons
qu'en parlant d'une seule voix et en maintenant l'unité de
l'Union lors des votes à l'Assemblée générale
et dans les autres organismes de l'ONU, l'Union européenne
peut jouer un rôle important dans les travaux de l'ONU.
Nous accordons une importance particulière à l'engagement
de l'UE avec les autres États Membres et les groupes d'États
Membres des Nations Unies. Cet esprit est profondément ancré
dans l'expérience historique européenne. Au cours de
siècle dernier, l'Europe a connu des divisions - jusqu'en 1989,
le mur de Berlin et les barbelés en Allemagne symbolisaient
la division de l'Europe et du monde en deux blocs - mais elle a également
appris ce que cette ouverture représente. Ces deux expériences
ont façonné notre vision du monde : l'Union européenne
préconise une politique de dialogue et la conciliation des
intérêts opposés. C'est dans cet esprit que nous
nous engageons à toucher tous les États Membres et groupes
d'États au sein des Nations Unies. |
L'ambassadeur Thomas Matussek est représentant permanent
de l'Allemagne auprès des Nations Unies. Parmi ses fonctions
diplomatiques précédentes, il a été
ambassadeur auprès de la Cour de St. James à Londres
et directeur général du Département politique
au Ministère fédéral des Affaires étrangères
à Berlin.
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