Un partenariat spécial avec l'ONU : Un point de vue asiatique
Par Hilario G. Davide, Jr.
La mission des Nations Unies de créer un monde sûr,
prospère et équitable après la Deuxième
Guerre mondiale reste aujourd'hui une entreprise mondiale urgente.
Pendant leurs 61 ans d'existence, les organismes de l'ONU ont contribué
de manière significative à atteindre cet objectif.
Le Secrétariat de l'ONU a joué un rôle catalyseur,
dirigé par les éminents services de ses sept anciens
Secrétaires généraux dans différentes
périodes turbulentes de l'histoire de l'Organisation. Le
Secrétaire général actuel, Ban Ki-moon, de
la République de Corée, le deuxième asiatique
à la tête de l'ONU, a déjà prouvé,
pendant son premier mois en poste, non seulement sa diligence, sa
compétence, sa sincérité et son dévouement
envers son devoir mais aussi l'obsession asiatique pour l'unité
dans la diversité, où la coopération n'est
pas compromise par des dichotomies, comme les divisions Nord-Sud
ou Est-Ouest.
L'Asie, qui regroupe plus de 60 % de la population mondiale, est
un continent qui abrite une grande diversité de langues.
Il est le berceau des religions abrahamiques (christianité,
islam et judaïsme) et dharmiques (hindouisme, bouddhisme, jaïnisme
et sikhisme), du confucianisme, du taoïsme, du bouddhisme zen
et du shintoïsme et une région où trois des plus
grandes économies mondiales (Chine, Inde et Japon) contribuent
au produit intérieur brut (PIB)/parité de pouvoir
d'achat du continent avec 18 millions de millions de dollars en
2003 et dont le PIB par habitant est de 2 143 dollars. De par ses
origines asiatiques, le Secrétaire général
sait ce qu'est l'hétérogénéité
et est hautement qualifié pour diriger les fonctionnaires
internationaux pour servir le monde et l'humanité.
Il devrait maintenant mettre l'accent sur la mise en uvre
des engagements internationaux existants. Les États Membres
ont établi un certain nombre d'engagements, comme ceux qui
sont stipulés dans la Déclaration du Millénaire,
la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement,
le Consensus de Monterrey sur le financement du développement
et le Document final du Sommet mondial 2005, avec des objectifs
à atteindre. À moins que le processus de planification
de l'ONU ne devance leur mise en uvre, il appartient au Secrétariat
de faire le point sur la situation, de poursuivre les réformes
préconisées par le Secrétaire général,
d'établir des critères d'évaluation pour la
mise en uvre afin de rendre compte des résultats concrets
aux États Membres et de fournir des services techniques aux
pays qui le méritent pour les aider à honorer leurs
engagements.
Tandis qu'il faudrait accorder une plus grande attention à
la réalisation des engagements internationaux, il est aussi
important que le Secrétaire général s'emploie
à prendre des mesures innovantes pour actualiser les engagements
qui nécessitent une élaboration plus approfondie.
Dans ce contexte, il pourrait être utile d'examiner quatre
domaines, ce qui permettrait de construire une architecture durable
pour la coopération internationale. Ces domaines sont : un
plus grand engagement de l'ONU dans les affaires régionales;
la création d'un consensus international, non seulement pour
protéger les diasporas mas aussi pour maximiser le développement
et la migration à la fois dans les pays d'accueil et les
pays d'origine; la réalisation rapide des Objectifs du Millénaire
pour le développement (OMD) par une résolution plus
innovante concernant la dette; et la création de partenariats
stratégiques pour promouvoir une coexistence pacifique par
le dialogue et la coopération entre les religions, les cultures
et les civilisations.
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L'un
des objectifs des OMD est d'assurer que d'ici à 2015,
tous les garçons et les filles terminent le cycle primaire.
Sur la photo, aux Philippines, un garçon apprend à
lire. Photo /Mikel Flamm |
Accords régionaux. La Coopération de l'ONU avec
les groupes intergouvernementaux peut aller au-delà des accords
existants, comme ceux qui ont été conclus avec l'Union
africaine, l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE)
et de la Communauté des Caraïbes. Des groupements régionaux
ont été formés, conformes aux principes et aux
buts des Nations Unies. Ils devraient donc être considérés
comme des partenaires de l'ONU au niveau régional avec, comme
objectif commun, de promouvoir un monde sûr, prospère
et équitable. La Charte de l'ONU encourage ce type de coopération
et le Document final du Sommet mondial 2005 en a réitéré
la nécessité.
L'ANASE est un exemple. Le 1er mars 2007, à Siem Reap, au Cambodge,
les ministres des Affaires étrangères ont convenu d'élargir
ses relations avec les Nations Unies et de lui accorder un statut
de partenaire de dialogue à part entière. Les relations
de l'ANASE avec le système de l'ONU ont commencé en
1972 avec le programme des Nations Unies pour le développement
(PNUD), qui est devenu un partenaire de dialogue en 1997, le seul
organisme non étatique parmi les partenaires de dialogue actuels
de l'ANASE (Australie, Canada, Chine, États-Unis, Fédération
de Russie, Inde, Japon, Nouvelle-Zélande, République
de Corée et Union européenne). Le premier Sommet ANASE-ONU,
qui a eu lieu à Bangkok le 12 février 2000, a abordé
les questions liées à la paix et à la sécurité,
le développement des ressources humaines et le rôle futur
des Nations Unies dans la région. Il a souligné à
la fois l'ampleur et l'importance de la coopération ANASE-ONU
et les accords de coopération subsumés avec le PNUD.
Au cours du deuxième Sommet qui s'est tenu à New York
le 13 septembre 2003, les leaders de l'ANASE et le Secrétaire
général de l'ONU ont indiqué, dans un communiqué
commun, la nécessité d'élargir la coopération
entre l'ANASE et l'ONU dans les domaines liés au renforcement
des communautés, comme la réduction de la pauvreté,
la prévention et la maîtrise des maladies infectieuses,
la gestion des catastrophes, les questions trans-nationales, le développement
ainsi que la paix et la sécurité.
Chaque groupement régional possède des caractéristiques
uniques qui peuvent être exploitées par les Nations Unies
pour le bénéfice mutuel de la communauté internationale
et des organisations régionales. Son approche régionale
et globale a fait de l'ANASE l'élément moteur d'un grand
nombre de processus intergouvernementaux visant à promouvoir
la coopération dans les domaines politique, économique
et culturel, comme le Forum régional de l'ANASE, la Coopération
économique Asie-Pacifique, la Réunion Asie-Europe, ANASE+3
(Chine, Japon et République de Corée) et ANASE+3+3 (Australie,
Inde et Nouvelle-Zélande), connu aussi sous le nom de Sommet
de l'Asie de l'Est. Pour compléter le réseau régional,
les pays membres de l'ANASE ont créé le Forum pour la
coopération Asie de l'Est-Amérique latine et Solidarité
Asie-Afrique. Actuellement, l'ANASE travaille étroitement avec
l'ONU pour élargir et renforcer ses domaines de coopération
dans le cadre de l'élargissement de leurs relations.
Migration et développement. Environ un dixième
de la population des Philippines travaille à l'étranger.
C'est l'une des raisons pour laquelle ce pays accueillera le Deuxième
Forum mondial sur la migration et le développement en 2008,
s'appuyant sur les résultats positifs escomptés du Premier
Forum qui aura lieu en Belgique en 2007. Ceci reflète les recommandations
contenues dans le Document final du Sommet mondial 2005 et l'encouragement
du Dialogue de haut niveau sur la migration et le développement
de l'Assemblée générale en septembre 2006 à
traiter les questions multidimensionnelles touchant les diasporas,
en mettant l'accent sur la promotion et la protection des droits des
migrants et de leur famille. Le système de l'ONU peut contribuer
dans une grande mesure au succès de ces événements.
Objectifs du Millénaire pour le développement.
L'objectif internationalement reconnu de réduire de moitié
l'extrême pauvreté dans le monde d'ici à 2015
fait face à de sérieux défis qui nécessitent
une volonté politique collective et des programmes de coopération
innovants. La disponibilité des ressources est à la
base de tous ces défis, en particulier pour les pays en développement,
dont la plupart sont très endettés.
Le Groupe des 77 et la Chine ont appuyé la proposition des
Philippines de pouvoir échanger leur dette contre un investissement
dans les projets des OMD, ce qui a été noté dans
deux résolutions de l'Assemblée générale
au cours des deux dernières années. Cela présenterait
des bénéfices multiples qui seraient perçus au-delà
de la division Nord-Sud. Cette initiative ne vise à pas à
effacer la dette ou à l'annuler mais propose d'en convertir
50 % pour financer le programme des OMD. Techniquement, personne ne
serait perdant parce que le service et/ou le montant principal de
la dette serait simplement converti en projets liés aux OMD
d'une valeur égale et avec leur propre potentiel de gains.
Par exemple, le Congrès des Philippines affecte chaque année
2 milliards de dollars au paiement des intérêts de la
dette et 2,5 milliards au remboursement de celle-ci.
Si 50 % de cette somme était libérée, comme le
proposait les Philippines, ce pays pourrait consacrer environ 2,2
milliards de dollars dans des projets de lutte contre la pauvreté,
comme l'amélioration des soins de santé, la création
d'emplois, la modernisation de l'infrastructure, etc. Ces idées
novatrices méritent un examen approfondi de la part du Secrétariat
de l'ONU et de ses organismes techniques pour contribuer aux efforts
collectifs visant à réaliser les OMD.
Dialogue et coopération entre les religions. L'initiative
interconfessionnelle des Philippines pour la promotion de la paix,
du développement et de la dignité humaine, avec les
initiatives du groupe de pays partageant la même vision, a donné
lieu à une reconnaissance internationale croissante de son
importance stratégique, non seulement pour la prévention
des conflits mais aussi pour la prise de conscience et la compréhension
interculturelle, ainsi que pour la coexistence pacifique. La Conférence
de haut niveau sur la coopération cuménique pour
la paix, organisée à New York le 21 septembre 2006 par
le Forum tripartite sur la coopération entre les religions
pour la paix, a conclu entre autres que ce dialogue n'était
plus une option mais un devoir. Le Sommet de l'Asie de l'Est, qui
s'est réuni au début 2007 à Cebu, aux Philippines,
a reconnu l'importance du dialogue entre les religions au service
de la coexistence pacifique et a encouragé le déploiement
d'efforts régionaux et interrégionaux, en particulier
dans le Forum de dialogue interconfessionnel Asie de l'Est-Pacifique
et le Forum interconfessionnel Asie-Europe.
En décembre 2003, l'Assemblée générale
a adopté par consensus la résolution 61/221 intitulée
" Promotion du dialogue et de la compréhension entre les
religions et les cultures et de la coopération en faveur de
la paix ", parrainée par le Pakistan et les Philippines
et coparrainée par plus de 50 pays. La résolution recommandait
la tenue d'un dialogue de haut niveau entre les religions et les cultures
en 2007, la désignation d'une Année du dialogue entre
les religions et les cultures et la nomination d'un groupe focal au
Secrétariat de l'ONU chargé des questions interconfessionnelles
et interculturelles. Les États Membres espèrent que
le Secrétaire général contribuera à exécuter
ces mandats législatifs. |
L'ambassadeur Hilario G. Davide est représentant permanent
des Philippines auprès des Nations Unies. Ancien Président
de la Cour suprême aux Philippines, il a été
éducateur, législateur et conseiller présidentiel
avant d'être nommé diplomate auprès des Nations
Unies. Il a reçu le prix Ramon Magsaysay, l'équivalent
du prix Nobel en Asie, pour ses réalisations au sein du gouvernement.
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