À voix haute:
Activités normatives et valeurs éthiques
La FAO a pour obligations constitutionnelles daméliorer les niveaux de nutrition et de vie, la production agricole et la distribution des
produits agroalimentaires ainsi que les conditions de vie des populations rurales afin de contribuer au développement de léconomie mondiale et de libérer
lhumanité du fléau de la faim. Elle a aussi été mandatée par la communauté internationale afin de fournir les instruments et les mécanismes
nécessaires pour créer un forum international où serait débattue la répartition plus équitable des intérêts et adoptées les mesures pour
y parvenir, tout en sattachant à protéger et à améliorer les biens publics mondiaux qui se rapportent au secteur agroalimentaire. Elle a également comme
obligation éthique de veiller au bien-fondé, à la transparence et à la responsabilité de ses actions ainsi que de fournir un forum où débattre les
questions et les comportements éthiques dans le domaine de lalimentation et de lagriculture.
Aucune série de principes ne pourra suffire pour construire un système alimentaire et agricole plus
équitable et plus éthique étant donné les conflits et les contradictions qui existent entre ces principes mêmes. |
Ces instruments et ces mécanismes peuvent être utilisés pour mettre en place un système alimentaire et agricole plus
équitable, fondé sur des principes éthiques, qui examine les questions et les défis mentionnés plus haut. Il sagirait dun système efficace,
sûr et solidaire qui respecterait en même temps la diversité des systèmes de valeurs. La mise en place dun tel système ne doit, ni ne devrait, signifier
simplement créer un plan - un plan détaillé qui risquerait de devenir une fin en soi, mais être plutôt un processus de participation qui évolue en fonction des
nouvelles données scientifiques, des changements dobjectifs et des nouvelles questions éthiques soulevées par la FAO et ses partenaires. Un système alimentaire et
agricole plus équitable, fondé sur des principes éthiques, suppose la prise en compte de trois objectifs de portée mondiale communément acceptés, dont chacun
comporte nombre de propositions normatives : une amélioration du bien-être, la préservation de lenvironnement et une meilleure protection de la santé publique.
Un tel système aurait pour but de réduire puis déliminer la pauvreté en améliorant lefficacité économique ainsi que celle de la
production alimentaire et agricole dans le monde. Une efficacité de la production (le moyen le plus efficace pour produire un produit donné) doit aller de pair avec une
efficacité de la distribution (le meilleur moyen de distribuer des produits). De plus, lefficacité ne peut être jugée seulement en termes de coût relatif dans
le cadre dun système économique particulier. Elle doit inclure une étude du système de droits, de privilèges et dinstitutions selon lequel elle est
définie. Lefficacité ne peut pas non plus être définie simplement comme la capacité daccomplir une tâche spécifique; elle doit être
mesurée en termes de moyens adéquats, choisis en fonction des préoccupations éthiques, telles que léquité et la justice. Lefficacité ne
peut pas être développée au détriment de linterdépendance économique, de la liberté individuelle, des droits de lhomme ou de la
souveraineté de lÉtat mais doit contribuer à réaliser ces objectifs. Un système alimentaire et agricole éthique doit aider les citoyens, les
communautés, les nations et le monde à passer dune économie mondiale à une société véritablement mondiale où
linterdépendance devrait être reconnue comme un fait inéluctable, où chaque personne aurait le droit à lautonomie et à la dignité et
où les États pourraient maintenir leur souveraineté. Un tel système exige également de passer du libre-échange, où les intérêts en jeu
dictent les règles du marché, à un système commercial fondé sur des principes éthiques où les règles seraient établies et mises en
œuvre dans un monde participatif.
Les lieux et les façons dont la nourriture est actuellement produite dans le monde ne préservent pas le mieux les ressources naturelles. Auparavant, la production agricole mondiale
tendait à refléter les habitudes alimentaires et le niveau de vie des populations locales. Or, lurbanisation croissante, la plus grande pénétration des
marchés et le développement du commerce international ont changé la situation. Pour maintenir un système équitable, fondé sur des principes éthiques,
lefficacité biologique - par le biais de laccroissement de la production, de la transformation et de la distribution des produits alimentaires et agricoles - ainsi que la
diversité agrobiologique doivent être conciliées avec lefficacité économique afin de pouvoir produire la nourriture avec des ressources minimales, limiter les
contraintes sur lenvironnement et donner aux pauvres laccès à la nourriture. Une attention particulière devrait être accordée à la gestion des
échanges entre les objectifs de la sécurité alimentaire et la protection de lenvironnement. La lutte contre les ravageurs de cultures et la gestion des ressources
agricoles, forestières et halieutiques ne devraient pas être considérées comme un luxe. Si nous voulons léguer aux générations futures un
système équitable, fondé sur des principes éthiques, ces divers aspects devront être pris en compte.
Malgré les améliorations apportées au cours des dernières décennies, une trop grande proportion de la population mondiale souffre de problèmes de
santé causés par la faim, la malnutrition et une mauvaise hygiène alimentaire. Ces problèmes réduisent la capacité des gens à participer pleinement
à la vie de leur communauté, de leur pays ou de la planète. De plus, lindustrialisation du secteur agroalimentaire fait peser de nouvelles menaces sur la santé
lorsquelle nest pas correctement surveillée ou contrôlée. Dans un système équitable, fondé sur des principes éthiques, les questions de la
faim, de la malnutrition, du régime et de la sécurité alimentaires seraient considérées comme des priorités, de sorte que chaque personne aurait rapidement
accès à une nourriture abondante, équilibrée et saine.
Pour y parvenir, nous devons élaborer des politiques qui incitent à changer le mode de distribution des denrées alimentaires afin de réduire les inégalités
daccès à la nourriture, développer la recherche scientifique afin daméliorer les moyens de production, de transformation et de distribution, mettre
laccent sur le développement rural afin de promouvoir et de développer les sources deau potable et encourager le recours aux pratiques dhygiène pour la
manipulation des aliments ainsi que pour lutilisation et lapplication de mesures de protection et de normes de sécurité adéquates dans lacheminement de nouveaux
produits.
Aucune série de principes ne pourra suffire pour construire un système alimentaire et agricole plus équitable et plus éthique étant donné les conflits et
les contradictions qui existent entre ces principes mêmes. Mais les particuliers, les États, les entreprises et les organisations de volontaires de la communauté internationale
peuvent y contribuer par les actions suivantes :
- Créer les mécanismes nécessaires pour répartir équitablement les intérêts et résoudre les
conflits en établissant des instances où les questions controversées peuvent être discutées et résolues. Par exemple, la Commission sur les ressources
génétiques alimentaires et agricoles est parvenue à créer une instance où débattre des questions difficiles, y compris des éléments compatibles
et complémentaires entre les droits des phytogénéticiens et ceux des agriculteurs.
- Soutenir et encourager une plus grande participation des parties prenantes aux politiques, aux programmes et aux projets. Divers points de vue
devraient être représentés dans toutes les organisations internationales. De nouveaux moyens de participation des organisations non gouvernementales et des citoyens
intéressés et informés devraient être mis en place.
- Encourager le dialogue entre les particuliers, les communautés et les nations pour agir de manière éthique. Favoriser les mesures
incitatives pour promouvoir les valeurs énoncées ci-dessus (comme le libre- échange) et éliminer celles qui engendrent un comportement non éthique. Il
sagirait dun processus itératif qui prendrait en compte les leçons des expériences passées et qui modifierait les mesures incitatives futures afin
déviter les conséquences non intentionnelles.
- Développer et diffuser linformation et les analyses nécessaires pour prendre des décisions averties et éthiques. Au
moment opportun, les informations pertinentes et précises devront être accessibles à toutes les parties prenantes et diffusées par les médias à un public
diversifié.
- Sassurer que les procédures de prises de décision en matière de politiques alimentaires et agricoles internationales, ainsi que
le contenu des délibérations, sont correctement comprises et que le public puisse les examiner. Si les décisions, aussi démocratiques et équitables
quelles soient, ne sont pas soumises à lexamen du public ou portées à sa connaissance, comment peut-on juger de leur impartialité et de leur caractère
adéquat ? Un examen et une compréhension des processus de décision, ainsi que la teneur des décisions, contribueront au développement dun système
alimentaire et agricole mondial plus éthique, plus solide et plus efficace.
- Encourager le recours à la science et à la technologie pour soutenir un système alimentaire et agricole plus juste et plus
équitable nécessitera la conciliation du savoir scientifique, du savoir indigène et des diverses croyances culturelles fortement enracinées dans les priorités et
les valeurs ainsi que dans les actions adéquates. Si la science peut nous informer des risques que présente une entreprise donnée, il faut reconnaître quelle est
limitée pour nous informer si le risque vaut la peine dêtre pris. Cette question ne peut être abordée que par le dialogue entre les parties
concernées.
- Veiller à ce que les programmes, les politiques, les normes et les décisions prennent toujours en compte le point de vue éthique afin
quelles améliorent le bien-être, la protection de lenvironnement et la santé. Il est essentiel de reconnaître que ces trois objectifs ne sont pas toujours en
harmonie. En conséquence, même si les parties sont daccord sur les objectifs éthiques, un dialogue continu doit avoir lieu pour concilier ces objectifs dans des contextes
spécifiques. Ce dialogue doit nécessairement inclure des négociations et des compromis ainsi que des moyens spécifiques permettant de résoudre les divers
problèmes.
- Établir des codes de conduite là où ils sont inexistants. Dans un monde diversifié et interdépendant, il est
essentiel détablir des codes de conduite. Comme il est dusage courant dans de nombreuses professions, les particuliers, les États, les entreprises et les organisations de
volontaires qui participent à lélaboration dun système alimentaire et agricole équitable ont besoin détablir des valeurs et des principes qui les
guident. Les codes de conduite peuvent jouer ce rôle.
- Réévaluer périodiquement les engagements éthiques et déterminer sils sont adéquats à la
lumière du nouveau savoir et des changements de circonstances. Le monde actuel évolue rapidement. Ce qui savère une vérité aujourdhui peut
savérer faux demain. Ce que lon considère éthique aujourdhui peut être considéré non éthique demain. Il est donc impossible
détablir un schéma définitif du comportement et de laction éthiques. Il faut réévaluer régulièrement les positions éthiques
pour voir comment les améliorer à la lumière de nouvelles preuves, de nouveaux besoins et de nouvelles demandes.
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Les frontières et les zones qui figurent
sur la carte ne refiètent pas nêcessairement le point
de vue officiel de lONU.
Offerte par la FAO
Ci-dessus : Pour pouvoir évaluer la gravité du problème de la faim, la FAO a réparti en cinq groupes les pays à pénuries
alimentaires en calculant la prévalence de la faim et la gravité de la sous-alimentation. Les 23 pays qui figurent dans le groupe 5 font face au plus grand défi où
linstabilité et les conflits, les changements climatiques, la pauvreté, les échecs agricoles, la croissance démographique et les écosystèmes fragiles
vont de pair avec lampleur et la persistance du problème. Tandis que lobjectif du Sommet mondial de lalimentation est de réduire le nombre de sous-alimentés
dans le monde (de moitié dici 2015), de nombreuses améliorations importantes pourraient être réalisées en commençant par réduire la
gravité de la faim. Dans ce scénario, un pays ayant des degrés élevés de sous-alimentation et des carences énergétiques de plus de 300 kcal par
personne aurait comme priorité de réduire lampleur de la faim, ce qui ne lui permettrait pas de signaler une réduction du nombre de sous-alimentés dans
limmédiat mais atténuerait la faim et les risques pour la santé liés à la malnutrition. |
... les nations pauvres doivent pouvoir déterminer leur avenir au lieu que les donateurs le fassent en leur
nom. |
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