RÈGLES POUR L'ÉGALISATION
DES CHANCES DES HANDICAPÉS
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III. MESURES D'APPLICATION
Règle 13. Information et recherche
Les Etats assument au premier chef la responsabilité de la collecte et de la diffusion
de renseignements sur les conditions de vie des handicapés et encouragent la réalisation
de travaux de recherche approfondis sur tous les aspects de la question, en particulier
sur les difficultés auxquelles se heurtent les handicapés.
1. Les Etats devraient rassembler, à intervalles réguliers, des statistiques
ventilées par sexe et d'autres renseignements sur les conditions de vie des handicapés.
La collecte de ces données pourrait s'inscrire dans le cadre d'enquêtes sur les ménages
et de recensements nationaux et être menée en étroite collaboration avec les
universités, les instituts de recherche et les organisations d'handicapés, entre autres.
Des questions sur les programmes et les services ainsi que sur leur utilisation devraient
être posées à cette occasion.
2. Les Etats devraient envisager de créer une banque de données sur l'incapacité,
qui comprenne des statistiques sur les services et les programmes disponibles ainsi que
sur les différents groupes d'handicapés. Ils ne devraient jamais perdre de vue la
nécessité de protéger la vie privée des individus et l'intégrité de la personne.
3. Les Etats devraient lancer et appuyer des programmes de recherche sur les questions
sociales, économiques et de participation qui ont une incidence sur la vie des
handicapés et de leur famille. Ces programmes devraient aussi inclure des études sur les
causes des incapacités, leurs types et leurs fréquences, sur les programmes existants et
leur efficacité, ainsi que sur la nécessité de concevoir et d'évaluer des services et
des mesures d'appui.
4. Les Etats devraient mettre au point et adopter, en collaboration avec des
organisations d'handicapés, une terminologie et des critères pour l'exécution
d'enquêtes nationales.
5. Les Etats devraient faciliter la participation des handicapés à la collecte des
données et à la recherche. Ils devraient fortement encourager, pour l'exécution de ces
travaux de recherche, le recrutement de personnes handicapées qualifiées.
6. Les Etats devraient favoriser l'échange des résultats de la recherche et des
données d'expérience.
7. Les Etats devraient assurer la diffusion d'éléments d'information sur
l'incapacité à tous les niveaux de décision et d'administration aux échelons national,
régional et local.
Règle 14. Prise de décisions et planification
Les Etats veilleront à ce que les différents aspects de l'incapacité soient pris en
considération tout au long du processus de prise de décisions et de planification
nationale.
1. Les Etats devraient mettre en oeuvre des politiques adéquates en faveur des
handicapés à l'échelon national et stimuler et appuyer l'action menée aux niveaux
régional et local.
2. Les Etats devraient faire participer les organisations d'handicapés à la prise de
toutes les décisions concernant les plans et les programmes en faveur des handicapés ou
ayant une incidence sur leur situation économique et sociale.
3. Il convient de tenir compte des besoins et des intérêts des handicapés dans les
plans généraux de développement, et non les traiter séparément.
4. Les Etats sont responsables au premier chef de la situation des handicapés, ce qui
ne veut pas dire qu'ils en soient seuls responsables. Il faudrait inciter tous ceux qui
dirigent des services ou des activités ou assurent la diffusion de l'information dans ce
domaine à se charger de mettre leurs programmes à la disposition des handicapés.
5. Les Etats devraient aider les collectivités locales à élaborer des programmes et
des mesures en faveur des handicapés. L'une des dispositions qu'ils pourraient prendre à
cette fin consisterait à faire établir des manuels ou des listes récapitulatives des
activités à entreprendre et à organiser des programmes de formation à l'intention du
personnel local.
C'est aux Etats qu'il incombe de créer le cadre législatif dans lequel s'inscrit
l'adoption de mesures destinées à permettre la pleine participation des handicapés et
à leur assurer des chances véritablement égales.
1. La législation nationale, qui énonce les droits et les obligations des citoyens,
doit notamment préciser ceux des handicapés. Les Etats sont tenus de permettre aux
handicapés d'exercer leurs droits, notamment leurs droits individuels, civils et
politiques, dans l'égalité avec leurs concitoyens. Les Etats doivent faire en sorte que
les organisations d'handicapés participent à l'élaboration de la législation nationale
concernant les droits des handicapés, ainsi qu'à son évaluation suivie.
2. Il se peut que des mesures législatives doivent être prises pour mettre fin à des
situations préjudiciables pour les handicapés, en particulier le harcèlement et la
victimisation. Toute disposition discriminatoire envers les handicapés doit être
éliminée. La législation nationale doit prévoir des sanctions appropriées pour ceux
qui enfreignent les principes de non-discrimination.
3. La législation nationale concernant les handicapés peut se présenter sous deux
formes différentes. Les droits et les obligations des handicapés peuvent être
incorporés dans la législation générale ou faire l'objet de lois spéciales. Dans le
deuxième cas, on pourra :
- a) Promulguer des lois distinctes, traitant exclusivement des questions se rapportant à
l'incapacité;
- b) Traiter ces questions dans le cadre de lois portant sur des sujets déterminés;
- c) Faire expressément mention des handicapés dans les textes d'application de la
législation existante.
Peut-être serait-il bon de combiner ces différentes formules. Des dispositions
relatives à l'action palliative peuvent aussi être envisagées.
4. Les Etats peuvent envisager de créer des mécanismes officiels habilités à
recevoir des plaintes afin de protéger les intérêts des handicapés.
Règle 16. Politiques économiques
Les Etats ont la responsabilité financière des programmes et des mesures adoptés à
l'échelon national en vue de donner des chances égales aux handicapés.
1. Les Etats devraient faire une place aux problèmes liés à l'incapacité dans les
budgets ordinaires de tous les organismes publics nationaux, régionaux et locaux.
2. Les Etats, les organisations non gouvernementales et les autres organismes
intéressés devraient coordonner leur action pour déterminer les moyens les plus
efficaces d'appuyer les projets et les mesures en faveur des handicapés.
3. Les Etats devraient envisager de recourir à des mesures économiques (prêts,
exonérations fiscales, dons d'affectation spéciale, fonds spéciaux, etc.) pour stimuler
et favoriser l'égalité de participation des handicapés dans la société.
4. Dans de nombreux pays, il serait peut-être opportun de créer un fonds de
développement en faveur des handicapés, qui servirait à financer divers projets pilotes
et programmes d'auto-assistance au niveau local.
Règle 17. Coordination des travaux
C'est aux Etats qu'il incombe de créer des comités de coordination nationaux ou des
organes analogues qui puissent servir de centres de liaison nationaux pour les questions
se rapportant à l'incapacité et de renforcer ces comités.
1. Le comité de coordination national (ou entité analogue) devrait être un organe
permanent, régi par les règles juridiques et administratives voulues.
2. C'est en réunissant les représentants d'organisations publiques et privées que le
comité pourra le mieux s'assurer une composition intersectorielle et multidisciplinaire.
Les intéressés pourraient représenter les ministères compétents, des organisations
d'handicapés et des organisations non gouvernementales.
3. Les organisations d'handicapés devraient pouvoir se faire dûment entendre au
comité de coordination national, de façon que celui-ci soit au courant de leurs
préoccupations.
4. Le comité de coordination national devrait avoir l'autonomie et être doté de
ressources suffisantes pour être en mesure de prendre les décisions voulues. Il devrait
relever des autorités gouvernementales les plus élevées.
Règle 18. Organisations d'handicapés
Les Etats devraient reconnaître aux organisations d'handicapés le droit de
représenter les intéressés aux échelons national, régional et local. Ils devraient
aussi reconnaître le rôle consultatif des organisations d'handicapés dans la prise de
décisions sur les questions se rapportant à l'incapacité.
1. Les Etats devraient encourager et appuyer financièrement et sous d'autres rapports
la création d'organisations regroupant les handicapés, les membres de leur famille ou
leurs représentants, ainsi que le renforcement desdites organisations. Ils devraient
reconnaître que celles-ci ont un rôle à jouer dans l'élaboration des politiques en
faveur des handicapés.
2. Les Etats devraient établir des communications continues avec les organisations
d'handicapés et assurer leur participation à l'élaboration des politiques
gouvernementales.
3. Le rôle des organisations d'handicapés pourrait être de recenser les besoins et
les priorités, de participer à la planification, à la mise en oeuvre et à
l'évaluation des services et des mesures concernant la vie des handicapés, de contribuer
à la sensibilisation du public et de faire évoluer les mentalités.
4. Fondées sur le principe de l'effort personnel, les organisations d'handicapés
offrent et accroissent la possibilité de développer des compétences dans divers
domaines et permettent à leurs membres de s'entraider et d'échanger des informations.
5. Les organisations d'handicapés pourraient remplir leur rôle consultatif de bien
des manières différentes, par exemple en se faisant représenter en permanence dans les
conseils des organismes financés par les pouvoirs publics, en siégeant dans des
commissions publiques et en donnant des conseils techniques pour divers projets.
6. Les organisations d'handicapés devraient exercer leur rôle consultatif de façon
continue afin de développer et d'approfondir les échanges de vues et de renseignements
entre les pouvoirs publics et les organisations.
7. Les organisations devraient être représentées en permanence au comité national
de coordination ou dans des organes analogues.
8. Il faudrait élargir et renforcer le rôle des organisations locales d'handicapés
pour s'assurer qu'elles exercent une influence sur l'administration de la collectivité.
Règle 19. Formation du personnel
C'est aux Etats qu'il incombe d'assurer la formation adéquate du personnel qui, aux
divers échelons, participe à la planification des programmes et à la prestation des
services destinés aux handicapés.
1. Les Etats devraient faire en sorte que toutes les autorités assurant la prestation
de services à l'intention des handicapés donnent une formation adéquate à leur
personnel.
2. Il importe que les principes d'intégration et d'égalité pleine et entière
régissent la formation des spécialistes de l'incapacité, de même que l'information
apportée à ce sujet dans le cadre des programmes de formation générale.
3. Les Etats devraient élaborer des programmes de formation en liaison avec les
organisations d'handicapés, et des personnes handicapées devraient être invitées à
participer, en qualité d'enseignants, de moniteurs ou de conseillers, aux programmes de
formation du personnel.
4. La formation des agents des services sociaux revêt une importance capitale, en
particulier dans les pays en développement. Elle devrait faire intervenir des handicapés
et favoriser la progression des valeurs, des compétences et des techniques appropriées,
ainsi que l'acquisition d'aptitudes nouvelles par les handicapés, leurs parents, leur
famille et les membres de la collectivité.
Règle 20. Suivi et évaluation à l'échelon national, dans
le cadre de l'application des Règles, des programmes en faveur des handicapés
C'est aux Etats qu'il incombe de contrôler et d'évaluer de façon suivie la mise en
oeuvre des programmes et des services nationaux visant à assurer l'égalisation des
chances des handicapés.
1. Les Etats devraient évaluer périodiquement et systématiquement les programmes
nationaux en faveur des handicapés et faire connaître tant les bases que les résultats
des évaluations.
2. Les Etats devraient élaborer et adopter une terminologie et des critères pour
l'évaluation des programmes et des services portant sur l'incapacité.
3. Ces critères et cette terminologie devraient être élaborés en étroite
collaboration avec les organisations d'handicapés, dès les stades initiaux de la
conception et de la planification.
4. Les Etats devraient coopérer à l'échelon international en vue d'élaborer des
normes communes pour l'évaluation des programmes nationaux sur l'incapacité. Les Etats
devraient encourager les comités nationaux de coordination à participer également à
cette activité.
5. L'évaluation des divers programmes en faveur des handicapés devrait être prévue
dès le stade de la planification, de façon que la mesure dans laquelle leurs objectifs
généraux sont atteints puisse être déterminée.
Règle 21. Coopération technique et économique
C'est aux Etats, pays industrialisés ou pays en développement, qu'il incombe de
coopérer et de prendre les mesures voulues pour améliorer les conditions de vie des
handicapés dans les pays en développement.
1. Des mesures visant à assurer l'égalisation des chances des personnes handicapées,
y compris des réfugiés handicapés, devraient être intégrées dans les programmes
généraux de développement.
2. Il faut que ces mesures soient intégrées dans toutes les formes de coopération
technique et économique, bilatérale ou multilatérale, gouvernementale ou non
gouvernementale. Les responsables devraient aborder les questions se rapportant à
l'incapacité lors des discussions sur la coopération qu'ils ont avec leurs homologues.
3. Lors de la planification et de l'examen des programmes de coopération technique et
économique, une attention particulière devrait être accordée aux incidences de ces
programmes sur la situation des handicapés. Il importe au plus haut point que les
handicapés et les organisations qui les représentent soient consultés sur tous les
projets de développement conçus en leur faveur. Ils devraient participer directement à
l'élaboration, à l'exécution et à l'évaluation de ces projets.
4. Devraient notamment constituer des domaines prioritaires de coopération technique
et économique :
- a) La mise en valeur des ressources humaines grâce au développement des compétences,
des capacités et du potentiel des handicapés et la mise en train d'activités
génératrices d'emploi à leur intention;
- b) La mise au point et la diffusion de technologies et d'un savoir-faire appropriés
dans le domaine de l'incapacité.
5. Les Etats sont également incités à appuyer la formation d'organisations
d'handicapés et leur renforcement.
6. Les Etats devraient prendre les mesures voulues pour mieux informer le personnel
intervenant à tous les niveaux de la gestion des programmes de coopération technique et
économique des questions relatives à l'incapacité.
Règle 22. Coopération internationale
Les Etats prendront une part active à la coopération internationale ayant pour objet
l'égalisation des chances des handicapés.
1. Dans le cadre de l'Organisation des Nations Unies, des institutions spécialisées
et des autres organisations intergouvernementales concernées, les Etats devraient
participer à l'élaboration des politiques en faveur des handicapés.
2. Chaque fois que les circonstances s'y prêtent, les Etats devraient tenir compte des
questions relatives à l'incapacité dans les négociations générales relatives aux
normes, à l'échange d'informations, aux programmes de développement entre autres.
3. Les Etats devraient encourager et soutenir les échanges de connaissances et de
données d'expérience entre :
- a) Les organisations non gouvernementales qu'intéressent les questions relatives à
l'incapacité;
- b) Les institutions de recherche et les chercheurs travaillant sur les questions
relatives à l'incapacité;
- c) Les représentants des programmes sur le terrain portant sur l'incapacité et des
groupes de spécialistes de la question;
- d) Les organisations d'handicapés; e) Les comités nationaux de coordination.
4. Les Etats devraient faire en sorte que l'Organisation des Nations Unies et les
institutions spécialisées, ainsi que tous les autres organismes intergouvernementaux et
interparlementaires, aux niveaux mondial et régional, fassent une place dans leurs
travaux aux organisations mondiales et régionales d'handicapés.
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