Rapport final du Rapporteur spécial de la Commission
du développement social sur le suivi de l'application des
Règles pour l'égalisation des chances de handicapés
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V. ACTIVITÉS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
C. Enquête connexe éducation : règle 6
Les lacunes des systèmes sociaux, dont l'enseignement est l'une des plus importantes,
sont dans une large mesure responsables du fait que les handicapés mènent une vie plus
ou moins séparée. Il existe un rapport étroit entre le niveau d'éducation et
l'intégration dans la société. L'éducation allège le poids que font peser diverses
formes de désavantages sociaux et ouvre la voie à de meilleures conditions de vie.
L'éducation des handicapés est par conséquent l'un des objectifs essentiels des
Règles.
Pour comprendre la teneur de la règle sur l'éducation, il convient de l'examiner dans
le contexte de trois autres documents importants qui ont précédé l'adoption des Règles
et d'un autre qui lui a succédé. Il s'agit de la Convention des Nations Unies relative
aux droits de l'enfant (1989), du Programme d'action mondial concernant les personnes
handicapées (1982), de la Déclaration mondiale sur l'éducation pour tous (1990) et de
la Déclaration de Salamanque et du Cadre d'action pour les besoins éducatifs spéciaux
(1994).
La Déclaration de Salamanque, le plus récent de ces documents, se fonde sur les
idées formulées dans la règle 6 qu'elle développe plus avant pour mieux les préciser.
C'est un instrument efficace qui proclame que l'éducation intégrée est un principe
directeur en matière de besoins éducatifs spéciaux. Elle préconise que les personnes
ayant des besoins éducatifs spéciaux doivent pouvoir accéder aux écoles ordinaires,
qui doivent les intégrer dans un système pédagogique centré sur l'enfant, capable de
répondre à ses besoins. Cet enseignement intégré est considéré comme le meilleur
moyen de lutter contre les attitudes discriminatoires; il est en outre réputé assurer
efficacement l'éducation de la majorité des enfants et, en fin de compte, la
rentabilité du système éducatif tout entier.
De nombreux pays prennent désormais des dispositions pour appliquer les directives qui
figurent dans les Règles. L'un des principaux problèmes est la persistance d'un système
d'enseignement séparé un système ordinaire à l'intention des non-handicapés et
un système séparé d'enseignement spécial pour les handicapés.
Depuis 1980, l'UNESCO a recueilli des informations mondiales sur les pratiques en
matière d'enseignement spécial. Sa dernière étude pour 1993-1994 intitulée
"Review of the Present Situation of Special Education" porte plus
particulièrement sur les questions suivantes : politique, législation, administration,
organisation, formation pédagogique, financement et dispositions prises pour répondre
aux besoins éducatifs spéciaux. Ce document est particulièrement utile pour évaluer
l'application de la règle 6 sur l'éducation. Pour suivre l'application de la règle 6,
le Rapporteur spécial a examiné les conclusions de cette étude. Il a également eu
accès à une précédente étude de l'UNESCO sur la législation relative à
l'enseignement spécial (1991). On trouvera dans les paragraphes ci-après quelques
résultats et observations qu'il a tirés de ces deux études et qui permettent de mieux
comprendre la situation dans le domaine de l'éducation.
L'étude pour 1993-1994 se fonde sur des renseignements recueillis à l'aide d'un
questionnaire envoyé à 90 gouvernements. Soixante-trois gouvernements ont répondu (dans
le cas de l'Australie et du Canada, deux réponses séparées ont été reçues, ce qui
explique le nombre total de 65 réponses).
1. Réglementation juridique du droit à l'enseignement spécial
Le droit à l'éducation est dénié à des millions d'enfants ayant des besoins
éducatifs spéciaux qui soit reçoivent un enseignement inadapté, soit sont exclus de
systèmes d'enseignement public. Plusieurs pays en développement ont reconnu le droit à
l'éducation, mais dans de nombreux cas les personnes ayant des besoins éducatifs
spéciaux n'en jouissent pas.
Soixante-cinq pays ont fourni des informations sur les législations en vigueur; 44 ont
indiqué que la législation générale s'appliquait aux enfants nécessitant un
enseignement spécial; 34 ont précisé que les enfants profondément handicapés étaient
exclus de l'enseignement général. Dans 18 de ces 34 pays, cette exclusion était prévue
par la loi et dans les 16 autres elle était le fait d'autres facteurs d'ordre non
juridique. La raison la plus communément invoquée pour cette exclusion était la
gravité de l'incapacité, le manque d'installation et de personnel qualifié,
l'éloignement des établissements scolaires et le fait que les écoles ordinaires
n'acceptent pas d'élèves ayant des besoins éducatifs spéciaux. Dix pays ont indiqué
qu'aucune législation n'existait en matière d'enseignement spécial.
2. Rôle des parents
112. Une des questions figurant dans le questionnaire de l'UNESCO visait à préciser
quels étaient officiellement les droits des parents eu égard aux procédures
d'évaluation et à la prise de décisions relatives au placement des enfants ayant des
besoins éducatifs spéciaux. Dans 22 des 53 pays ayant fourni des informations, le rôle
des parents est pleinement reconnu dans la prise de dé_isions concernant ce placement.
Dans sept pays, les parents ont seulement le droit de faire appel des décisions
concernant le placement de leur enfant. Toutefois, dans 24 pays, les parents ne
participent que dans une très faible mesure à la prise de décisions et leur droit de
choisir le placement de leur enfant dans l'enseignement spécial est extrêmement limité.
3. Formes d'enseignement et question de l'intégration
D'après les renseignements fournis dans l'étude pour 1993-1994, on peut
provisoirement conclure que la scolarité des enfants ayant des besoins éducatifs
spéciaux intervient toujours essentiellement dans le cadre d'un système d'enseignement
séparé et que les taux de scolarisation des personnes nécessitant un enseignement
spécial sont extrêmement faibles dans un très grand nombre de pays. Ainsi, dans 33 des
48 pays ayant fourni des informations, moins de 1 % des élèves sont inscrits dans des
programmes d'enseignement spécial. Dans la plupart des pays, l'intégration n'est qu'une
aspiration pour l'avenir. Une comparaison entre l'étude de l'UNESCO pour la période
1986-1987 et celle qu'elle vient d'effectuer montre que certains progrès ont été
accomplis en vue de l'intégration dans le système ordinaire d'enseignement général.
4. Législation en matière d'enseignement spécial
En 1991, l'UNESCO a prié les gouvernements de lui faire part de l'état de leur
législation relative à l'enseignement spécial. Cette demande a été adressée à 70
pays et 52 y ont répondu.
Il s'agissait d'établir le genre de législation en vigueur en matière d'enseignement
spécial ainsi que sa teneur. On trouvera ci-après quelques conclusions importantes de
cette étude :
a) Dans 16 des 52 pays ayant fourni des informations, l'enseignement spécial est
financé en totalité par l'État et/ou des autorités locales;
b) Dans 10 de ces 52 pays seulement, il est normal que les enfants handicapés suivent
les programmes ordinaires dans les écoles du système d'enseignement général, des
méthodes d'enseignement répondant à leurs besoins individuels étant appliquées;
c) Dans la majorité des pays, le Ministère de l'éducation est responsable de
l'organisation des services d'enseignement spécial.
Dans un nombre croissant de pays, c'est le Ministère de l'éducation qui est chargé
d'organiser l'enseignement spécial, la responsabilité de l'application et de
l'évaluation de ces programmes incombant aux États fédéraux ou aux autorités locales.
Dans certains pays, cette responsabilité est divisée entre plusieurs ministères. Dans
un pays, elle est partagée entre le Ministère de l'éducation en ce qui concerne les
enfants moyennement handicapés et le Ministère des affaires sociales pour les enfants
profondément handicapés.
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